Résonance orbitale
La résonance orbitale est, en astronomie, la situation dans laquelle les orbites de deux objets célestes et , en révolution autour d'un barycentre commun, ont des périodes de révolution et commensurables, c'est-à-dire dont le rapport est un nombre rationnel[1]. C'est un cas particulier de résonance mécanique qui est aussi appelé résonance de moyen mouvement[2]. La résonance orbitale est couramment notée où et sont deux nombres entiers naturels.
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Par exemple, dans le Système solaire, la planète naine Pluton est en résonance 2:3 avec la planète Neptune, c'est-à-dire que Pluton effectue deux révolutions autour du Soleil pendant que Neptune en réalise trois. Cette résonance est stable : une perturbation de l'orbite de Pluton serait corrigée par l'attraction de Neptune.
La résonance orbitale ne doit pas être confondue avec la résonance spin-orbite qui est la situation dans laquelle la période de rotation et la période de révolution d'un même objet céleste sont commensurables.
Lorsque plus de deux objets sont en résonance, comme dans les cas des trois lunes galiléennes Io, Europe et Ganymède, on parle de résonance de Laplace.
Stabilité des orbites
Depuis la publication des lois de Newton, le problème de la stabilité des orbites a préoccupé beaucoup de mathématiciens comme Laplace ou Poincaré (mémoire « Sur le problème des trois corps et les équations de la dynamique »). Comme la solution du problème à deux corps ne prend pas en compte les interactions mutuelles entre les planètes, de petites interactions vont sûrement s’accumuler et finir par changer les orbites ; ou alors, il reste à découvrir de nouveaux mécanismes qui maintiennent la stabilité de l’ensemble. C’est aussi Laplace qui a trouvé les premières réponses pour expliquer la remarquable danse des lunes de Jupiter. On peut dire que ce champ d’investigation est resté très actif depuis et il reste toujours des mystères à élucider (par exemple les interactions des petites lunes avec les particules des anneaux des planètes géantes).
En général, la résonance peut :
- concerner soit un seul paramètre, soit n’importe quelle combinaison des paramètres d’orbite ;
- agir sur des échelles de temps très différentes, comparables avec les périodes des orbites, ou séculaires, allant parfois jusqu’à 106 années ;
- elle peut tout aussi bien être la cause de la stabilité des orbites que celle de leur déstabilisation.
Types de résonance
L'influence gravitationnelle périodique des planètes (ou lunes) peut déstabiliser leurs orbites. C'est ce qui permet d'expliquer l'existence de « bandes interdites » dans la ceinture d'astéroïdes dans lesquelles le nombre de corps est considérablement plus faible. Ces bandes, appelées lacunes de Kirkwood, auraient été créées par une résonance avec l'orbite de Jupiter qui aurait provoqué l'éjection des corps s'y trouvant.
La résonance peut avoir l'effet opposé : elle peut permettre la stabilisation d'orbites et protéger certains corps de perturbations gravitationnelles. Ainsi Pluton et les autres plutinos sont protégés de l'éjection de leur orbite par une résonance 2:3 avec la planète géante Neptune. D'autres objets de la ceinture de Kuiper sont également dans d'autres résonances avec cette planète : 1:2, 4:5, etc. Dans la ceinture principale d'astéroïdes, les résonances stables 3:2 et 1:1 sont occupées respectivement par le groupe de Hilda et les astéroïdes troyens de Jupiter[3].
Lorsque plusieurs objets ont leurs périodes orbitales dans des rapports faits d'entiers simples, on parle de résonance de Laplace. C'est le cas des lunes de Jupiter, Ganymède, Europe et Io qui sont dans une résonance 1:2:4.
Commensurabilité des périodes de révolution
Les rapports des périodes de révolution des planètes du système solaire (Mercure, Vénus, Terre, Mars ; Jupiter, Saturne, Uranus, Neptune) sont approximativement les suivants :
- Vénus-Mercure : 9:23[4] ;
- Terre-Vénus : 8:13[4],[5] ;
- Terre-Mercure : 7:29[5]
- Mars-Terre : 8:15[5] ;
- Mars-Vénus : 1:3[5]
- Saturne-Jupiter : 2:5[5] ;
- Uranus-Saturne : 7:20 (≈ 1:3)[5] ;
- Uranus-Jupiter : 1:7[5]
- Neptune-Uranus : 26:51 (≈ 1:2)[5] ;
Du fait de leur caractère peu stable et approximatif, on ne parle pas à proprement de résonance pour ces planètes[4].
Il existe des objets dont les orbites sont en résonance de moyen mouvement 1:1. Il s'agit des troyens, des quasi-satellites et des coorbiteurs sur orbite en fer à cheval.
Il n'existe que cinq résonances de ce type concernant les planètes ou les lunes majeures dans le système solaire (un bien plus grand nombre concernant les astéroïdes, les anneaux et les petits satellites) :
- 2:1 Mimas-Téthys (lunes de Saturne) ;
- 2:1 Encelade-Dioné (lunes de Saturne) ;
- 4:3 Titan-Hypérion (lunes de Saturne) ;
- 4:2:1 Io-Europe-Ganymède (lunes de Jupiter), l'unique résonance de Laplace.
- 2:3 Neptune-Pluton ; Neptune-(32929) 1995 QY9 ; Neptune-(90482) Orcus ; Neptune-(28978) Ixion — ils forment les plutinos ;
- 1:2 Neptune-(20161) 1996 TR66 ; Neptune-(26308) 1998 SM165 ; Neptune-1997 SZ10 ; Neptune-(137295) 1999 RB216 ; Neptune-(130391) 2000 JG81 ; Neptune-(119979) 2002 WC19 — ils forment les twotinos.
Le système plutonien est proche d'un très complexe système de résonance : Pluton:Charon:Styx:Nix:Kerbéros:Hydra ≈ 1:1:3:4:5:6 (en termes de période autour du barycentre du système plutonien).
Les simples relations entières entre les périodes de révolution cachent des relations plus complexes :
- les points de conjonction peuvent osciller autour des valeurs d'équilibre définies par la résonance ;
- compte tenu des excentricités des orbites, les nœuds ou les périastres peuvent changer.
Comme une illustration, pour la très célèbre résonance 2:1 Io-Europe, si les périodes de révolution étaient réellement dans ce rapport exact, les mouvements moyens (inverse de la période) satisferaient l'équation suivante :
Toutefois, en vérifiant avec les données, on obtient −0,739 5 ° jour−1, une valeur bien trop grande pour être négligée.
En fait, la résonance est exacte, mais elle doit inclure aussi la précession du périastre L'équation corrigée (qui fait partie des relations de Laplace) est
En d’autres termes, le mouvement moyen de Io est bien le double de celui d’Europe en tenant compte de la précession du périastre. Un observateur situé sur le périastre aurait vu les lunes arrivant à la conjonction au même endroit. Les autres résonances satisfont des équations similaires à l'exception de la paire Mimas-Téthys. Dans ce dernier cas, la résonance satisfait l'expression suivante
Le point de conjonction oscille autour d’un point à mi-chemin entre les nœuds des deux lunes.
La résonance de Laplace
La résonance la plus remarquable, celle des trois satellites galiléens, inclut la relation qui contraint la position des lunes sur leurs orbites :
où les sont les longitudes moyennes des lunes. Cette contrainte rend impossible une triple conjonction des lunes. Le graphique illustre les positions des lunes après 1, 2 et 3 périodes de Io.
Cette résonance est stable[6].
Notes et références
- Entrée « résonance orbitale », dans Richard Taillet, Pascal Febvre et Loïc Villain, Dictionnaire de physique, Bruxelles, De Boeck Université, , p. 486, en ligne sur Google Livres (consulté le 5 juillet 2014)
- Paolo Farinella et Alessandro Morbidelli (traduit de l'italien par Marc Henrard), « Au-delà de Neptune : la ceinture d'Edgeworth-Kuiper », Ciel et Terre, vol. 114, no 1, , p. 3-14 (Bibcode 1998C&T...114....3F, lire en ligne, consulté le ), en particulier p. 8 (consulté le 22 juin 2014)
- Steven Soter, Dossier Pour la Science n°64 p.114
- (en) Peter Grego, Venus and Mercury : and How to Observe Them, New York, Springer, , 262 p. (ISBN 978-0-387-74285-4), p. 71 (lire en ligne)
- (en) P. A. Semi, « Orbital Resonance and Solar Cycles », arXiv, (Bibcode 2009arXiv0903.5009S, arXiv 0903.5009, résumé, lire en ligne [PDF], consulté le )
- (en)Orbital resonances and chaos in the Solar System
Voir aussi
Articles connexes
- Rotation synchrone
- Jean-Marie Souriau
- Recherches de l'astronome Jacques Laskar sur la stabilité du système solaire
Bibliographie
- « Résonances et non-résonances dans le système solaire », communication au Colloque sur la gravitation à l'Observatoire de Genève, 1989.
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