Remi de Reims

Saint Remi[Note 1] (vers 437 - [1]), né dans ce qui n'était pas encore le diocèse de Laon, est le 15e évêque de Reims où il siégea pendant soixante-quatorze ans, si l'on croit l'inscription à partir de 459-462 jusqu'à sa mort que fit porter sur son tombeau l'archevêque Hincmar de Reims en 852. Celui qui sera honoré du titre d'apôtre des Francs par ce même Hincmar[2], baptisa le roi Clovis Ier, le 25 décembre d'une année comprise entre 496 et 506, avec 3 000 guerriers francs de son entourage[3]. Il a sans doute contribué à organiser sa province ecclésiastique, mais on ne peut pas affirmer qu'il soit le fondateur des sièges épiscopaux de Thérouanne ou d'Arras, encore moins de Laon.

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Remi de Reims
Remi baptisant Clovis par le Maître de Saint Gilles à la National gallery of Art.
Fonctions
Évêque de Reims (d)
jusqu'en
Archevêque catholique
Archidiocèse de Reims
à partir de
Évêque catholique
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Activité
Fratrie
Enfant
Helaria (d)
Autres informations
Religion
Étape de canonisation
Fête
Statue de saint Remi baptisant Clovis Ier à côté de la basilique Saint-Remi de Reims.

Saint Remi est l'un des patrons de l'archidiocèse de Reims[4]. Il est célébré le 15 janvier en France, et le 13 janvier au martyrologe romain. Dans le diocèse de Reims, il est fêté le 1er octobre conformément à une tradition locale remontant à la fin du VIe siècle[5],[6].

Biographie

Famille

Remi porte un nom de baptême d'origine latine : il signe tantôt Remigius (rameur), tantôt Remedius (remède). L'orthographe Remi (sans accent et avec un « i ») est attestée en 1794 par Hourelle, Povillon, Bertin (curé de Saint-Remi)[7].

Il est né, selon la tradition, à Cerny-en-Laonnois, près de Laon, dans la bonne société gallo-romaine[Note 2]. Il est dit fils du comte Émile de Laon (Emilius) (qui autrement n'est attesté nulle part et ne pouvait pas porter ce titre, anachronique) et de sainte Céline.

D'après la Vita Remigii rédigée par Hincmar avant 882, sa naissance avait été annoncée à sa mère par saint Montan (Montanus), qui donna son nom au village de Saint-Montan en Vivarais où il se retira. Cet ermite aveugle revint peu après la naissance de Remi et recouvra la vue grâce au lait maternel de Céline.

Début de carrière ecclésiastique

Remi fit sans doute des études, comme on en faisait dans son milieu, à Reims, puis fut élu évêque de Reims à seulement vingt-deux ans, sans être encore entré dans les ordres. Le frère de Remi, saint Principe (Principius), était déjà évêque de Soissons. Il correspondit, comme Remi, avec saint Sidoine Apollinaire (livre IX, 8), dont les lettres donnent une idée du style littéraire gallo-romain, élégant et très cultivé que les trois hommes avaient en commun.

Baptême de Clovis

L'histoire du Vase de Soissons, sans doute un des vases sacrés de l'Église de Reims qui avaient été volés puis rendus à Remi, témoigne des relations respectueuses qui existaient entre Remi et Clovis Ier, roi des Francs.

Remi prit acte de la conversion de ce dernier au catholicisme et, avec l'aide de saint Vaast[Note 3] et sous l'influence de la seconde épouse du roi, la princesse burgonde Clotilde, fille du roi Burgonde Chilpéric II, il lui conféra le baptême à Noël d'une date comprise entre 496 et 506.

Le baptême de Clovis est un des événements-clefs de l'histoire du catholicisme en Gaule puis en France et à partir d'Henri Ier en 1027, tous les rois de France sont sacrés à Reims sauf Louis VI le Gros à Orléans, Henri IV à Chartres et Louis XVIII n'ayant pas été sacré. Saint Grégoire de Tours, au VIe siècle, dans son Histoire des Francs relate ainsi l'événement :

« Le roi demanda le premier à recevoir le baptême des mains du pontife. Il s'avance, nouveau Constantin, vers le bain sacré pour se laver de la lèpre ancienne qui le couvrait, et faire disparaître dans cette eau salutaire toutes les taches dont il était souillé. Au moment où il entra dans le baptistère, le saint lui adressa d'une voix grave et solennelle : « Mitis depone colla, Sicamber, Sois humble, enlève tes colliers, Barbare[8],[Note 4] ; adora quod incendisti, incende quod adorasti, adore ce que tu as brûlé, brûle ce que tu as adoré ». Le roi ayant confessé qu'il reconnaissait un seul Dieu tout-puissant en trois personnes, fut baptisé au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit, et reçut l'onction du saint chrême avec le signe de la croix. »

Après son baptême Clovis cède sa place à ses sœurs Alboflède, dite la païenne et à Lantechilde, adepte de l'arianisme, puis c'est le tour des fidèles soldats.

Saint Remi baptise Clovis le jour de Noël, vitrail de l'église Saint-Bonaventure, à Lyon.

Selon les Dix livres d'histoire de l'évêque Grégoire de Tours, 3 000 Francs furent baptisés avec lui ainsi que ses deux sœurs, Alboflède et Lanthechilde (Livre II, ch 31).

Le chroniqueur italien du XIIIe siècle, Jacques de Voragine, raconte que, selon Hincmar, archevêque de Reims (vers 802-882), comme il n'y avait pas de saint chrême pour oindre le front de Clovis, le Saint-Esprit lui-même, sous la forme d'une colombe, en aurait apporté dans une fiole, la Sainte Ampoule, qui servira par la suite à l'onction des rois de France durant leur sacre.

Clovis Ier accorda à Remi des terres, où ce dernier fit bâtir et consacra un grand nombre d'églises.

Prestige

En vérité, Remi n'a assisté à aucun des conciles ecclésiastiques gaulois, se faisant à peine représenter peut-être à celui d'Orléans (511). Hincmar comble cette lacune en inventant un synode que Remi aurait organisé à Reims : l'évêque y aurait réduit au silence un évêque qui penchait pour l'arianisme. La réalité semble bien différente : Remi jouissait d'un prestige certain, mais pas auprès de tous ses confrères[9].

Une de ses lettres[Note 5], à propos d'un certain Claudius, un prêtre qu'il avait consacré, lui valut les réprimandes de ses confrères évêques, qui jugeaient que Claudius ayant fait des dettes méritait d'être dégradé. La réponse de Remi plaide en faveur de la miséricorde et exprime sa vive admiration pour l'œuvre de restauration chrétienne accomplie par Clovis[10].

Postérité

Tombeau de saint Remi dans le chœur de la basilique Saint-Remi de Reims.

Tombeau

Remi a été inhumé dans une petite église Saint-Christophe, devenue la basilique Saint-Remi. En 852, Hincmar procéda à une élévation des reliques, dont une partie minime fut déplacée à Sainte-Marie de Reims ; cette cérémonie correspondait à une canonisation. La châsse fut mise à l'abri des invasions normandes en 882 à Épernay, puis dans l'église de l'Abbaye Saint-Pierre d'Orbais, puis solennellement rapportée en juin 883 à Sainte-Marie. En 900, l'archevêque Hervé replace les reliques à Saint-Remi où elles ont été vénérées jusqu'à la Révolution française. Le corps de saint Remi était conservé intact.

Culte et dévotion

L'archidiocèse de Reims compte plus de 90 paroisses dédiées à saint Remi. De nombreux villages français portent également son nom.

Chaque année, l'allumage du lustre monumental, dont les 96 lampes rappellent ses années de vie sur terre, attire de nombreux pèlerins et touristes en l'abbaye Saint-Remi de Reims.

Un chapitre collégial et l'ordre de Saint-Rémi sont respectivement fondés en 2016 et 2017 sous son patronage afin d'œuvrer « à la fidélité de la France aux promesses de son Baptême », par l'organisation de pèlerinages et de conférences et surtout par la célébration solennelle du culte divin, comme lors d'une Messe de pèlerinage devant sa châsse, le 2 juillet 2019.

On retrouve son nom dans celui de la commune valdôtaine de Saint-Rhémy-en-Bosses.

Écrits

Plaque d'ivoire sculpté qui ornait la reliure d'un manuscrit du IXe siècle, représentant les Miracles de saint Remi (musée de Picardie, Amiens).

Il nous reste peu d'écrits authentiques de Remi :

  • Ses déclamations ont été admirées de façon savante par saint Sidoine Apollinaire dans une lettre à Remi élégamment écrite (livre IX, 7) mais elles sont perdues. Quatre lettres subsistent : une contenant sa défense au sujet de Claudius, deux écrites à Clovis Ier et une quatrième à l'évêque de Tongres.
  • Le Grand testament de saint Remi[11] est connu par différentes versions dont certaines (les plus longues) sont probablement apocryphes car anachroniques, mais l'une a été prouvée comme étant indiscutablement authentique par l'abbé Dessailly de l'Académie de Reims[12].
  • Le Petit testament, contenu dans certains manuscrits de la Vita Remigii, est authentique.
  • Une Vita courte, la Vita brevis, antérieure à Hincmar, a été autrefois attribuée à Venance Fortunat (Venantius Fortunatus).
  • Une lettre félicitant le pape Hormisdas de son élection en 523 est apocryphe.
  • La lettre dans laquelle le pape Hormisdas paraît l'avoir nommé vicaire du royaume de Clovis Ier a été dénoncée comme un faux. On présume qu'il s'agit d'un essai de l'évêque Hincmar de Reims de fonder ses prétentions à l'élévation de Reims à la primauté.

Un commentaire des Épîtres de Paul édité par Villalpandus en 1699 n'est pas de lui, mais d'un autre Remi, évêque d'Auxerre (Encyclopædia Britannica 1911).

Bibliographie

  • Marie-Céline Isaia, Remi de Reims, Paris, éditions du Cerf, 2010.
  • Jean Hoyoux, « Le collier de Clovis », Revue belge de philologie et d'histoire, t. 21, , p. 169-174 (lire en ligne)
  • Les plus grands saints. Leur vie et leur portrait. France Loisirs. Paris 1994 (ouvrage paru sous le titre original One Hundred Saints, Little Brown and Company (Inc.), Boston, 1993).
  • Extraits de la vie des saints de Butler, 1956, 1985, 1991.
  • Jacques de Voragine, La Légende dorée, Bibliothèque de la Pléiade, Gallimard, 2004, publication sous la direction d'Alain Boureau.
  • Patrick Demouy, Petite Vie de saint Remi, Paris, Desclée de Brouwer, 1997.
  • Jean Feray, Le tombeau de Saint-Remi et ses problèmes, Les monuments historiques de la France, 1959, no 1.
  • Documents sur le règne de Clovis, traduction de Nathalie Desgrugilliers, éditions Paleo, coll. encyclopédie médiévale. Contient les lettres de saint Remi, les diplômes de Clovis, les actes de conciles… (ISBN 978-2-84909-604-8).
  • Louis Charles Cerf : Souvenir du XIVe centenaire du Baptême de Clovis. Vie de Saint Remi, Archevêque de Reims, Apôtre de la France..., imprimerie de l’archevêché, Reims, 1896.

Liens

Articles connexes

Liens externes

Notes et références

Notes

  1. L'usage à Reims veut que l'on prononce Remi (voire R'mi ; Remi s'écrit en effet sans accent).
  2. Comme en attestent ses biens répertoriés dans son testament.
  3. Cité dans la Légende de sain Vaast, ce dernier, n'est pas cité par Grégoire de Tours.
  4. Le texte en latin est sûr et sa traduction, parfaitement limpide. Les guerriers francs portaient des colliers au pouvoir réputé magique ; quant à l’appellation « Sicambre », elle désignait un Barbare païen sous la plume des écrivains mérovingiens. Voir l’article de Jean Hoyoux, op. cit.
  5. Seules quatre lettres et des inscriptions métriques de Remi de Reims subsistent.

Références

  1. Marie-Céline Isaïa, Remi de Reims : Mémoire d'un saint, histoire d'une Eglise, Paris, Éditions du Cerf, , p. 187.
  2. Jean Devisse (professeur émérite d'histoire du Moyen Âge à l'université Paris-I), Hincmar, archevêque de Reims (845-882), tome 2, p. 1006.
  3. Laurent Theis, Clovis : de l'histoire au mythe, Complexe, 1996, p. 215.
  4. Stanislas Lalanne et Michel Dubost, Le nouveau Théo - livre 1 : Les saints : L'Encyclopédie catholique pour tous, , 260 p. (ISBN 978-2-7289-1496-8, lire en ligne), p. 329.
  5. Voir saint Remi de Reims sur Nominis.
  6. (en)Saint Remigius sur View of Saints.
  7. Prosper Tarbé, Trésors des églises de Reims, Assy imp., Reims, 1843, pp. 313-314.
  8. Jean Hoyoux 1942, p. 174.
  9. Marie-Céline Isaia, op. cité, p. 107.
  10. Wladimir Guettée, Histoire de l'Église de France, tome 2, Jules Renouard, 1856, pp. 88, 89, 90.
  11. Michel Morin, Chris Perrot, Le Retour du lys, Fernand Lanore, 1985, p. 185.
  12. Michel Morin, Chris Perrot, op. cit., note 40 de bas de page p. 188.
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