Turandot
Turandot est un opéra en trois actes et cinq tableaux de Giacomo Puccini, sur un livret de Giuseppe Adami et Renato Simoni d'après Carlo Gozzi, créé le à la Scala de Milan sous la direction de Toscanini. Il est inspiré de la comédie de Carlo Gozzi intitulée Turandot, déjà mise en musique en 1917 par Ferrucio Busoni sous le même nom de Turandot.
Genre | Opéra |
---|---|
Nbre d'actes | 3 |
Musique | Giacomo Puccini |
Livret | Giuseppe Adami et Renato Simoni |
Langue originale |
Italien |
Sources littéraires |
Turandot (1762) de Carlo Gozzi |
Création |
Scala de Milan, Italie |
Personnages
- La princesse Turandot (soprano dramatique) : Rosa Raisa
- Altoum, empereur de Chine, son père (ténor)
- Timur, roi de Tartarie en exil (basse) : Carlo Walter
- Calaf, le « prince inconnu », son fils (ténor lyrique) : Miguel Fleta
- Liú, jeune esclave, guide de Timur (soprano lyrique) : Maria Zamboni
- Ping, grand chancelier de Chine (baryton)
- Pang, grand maître des provisions (ténor)
- Pong, grand maître de la cuisine impériale (ténor)
- Un mandarin (baryton)
- Le Bourreau (rôle muet)
- Le jeune prince de Perse (ténor)
Airs
- « Signore, ascolta! » - Liú (acte I)
- « Non piangere, Liú! » - Calaf (acte I)
- « In questa reggia » - Turandot (acte II)
- Scène des énigmes : « Straniero, ascolta! » - Turandot, Calaf (acte II)
- « Nessun dorma » - Calaf (acte III)
- Mort de Liú : « Tanto amore, segreto… Tu, che di gel sei cinta » - Liú (acte III)
- « Principessa di morte! » - Turandot, Calaf (acte III)
La dernière scène de cette œuvre inachevée de Puccini, mort en 1924, a été complétée par Franco Alfano. Une nouvelle version de cette scène par Luciano Berio a été créée le à l'Opéra de Los Angeles sous la direction de Kent Nagano.
Personnages
Personnage | Type de voix | Interprète lors de la création |
---|---|---|
Turandot, princesse de Chine | soprano dramatique | Rosa Raisa |
Altoum, empereur de Chine, père de Turandot | ténor | |
Calaf, le « prince inconnu » | ténor (le plus souvent lyrique) | Miguel Fleta |
Timur, roi détrôné des Tartares, en exil, père de Calaf | basse | Carlo Walter |
Liù, jeune esclave, guide de Timur | soprano lyrique | Maria Zamboni |
Ping, grand chancelier de Chine | baryton | |
Pang, grand maître des provisions | ténor | |
Pong,grand maître de la cuisine impériale | ténor | |
Un mandarin | baryton | |
Le bourreau | rôle muet | |
Le jeune Prince de Perse | ténor | |
Gardes impériaux, serviteurs du bourreau, prêtres, mandarins, dignitaires, huit savants, servantes de Turandot, soldats, porte-drapeaux, musiciens, ombre des morts, la foule (choeur, orchestre) | Chœur |
Argument
Acte I
Dans une Chine médiévale imaginaire, la cruelle princesse Turandot, fille de l'empereur et dont la beauté est légendaire, attire à Pékin de nombreux prétendants qui doivent se soumettre à une terrible épreuve : s’ils élucident les trois énigmes que leur propose la princesse, ils gagnent la main de celle-ci, ainsi que le trône de Chine ; s’ils échouent, c’est la décapitation qui les attend.
Au moment où l’exécution du prince de Perse est imminente, le Prince inconnu arrive à Pékin et retrouve par hasard son père, roi de Tartarie déchu, en exil et devenu aveugle, ainsi que sa jeune guide Liú qui aime le Prince en secret depuis qu’un jour celui-ci lui a souri, à elle, une esclave.
Le Prince inconnu condamne fermement la barbarie de la princesse mais, lorsque celle-ci apparaît, sublime, impassible, pour ordonner d’un geste la mise à mort, il en tombe fou amoureux, perd la raison et se précipite, au mépris des imprécations de son père, des larmes de Liù et des conseils cyniques des trois ministres, pour frapper le gong de trois coups qui le déclarent candidat aux énigmes.
Acte II
- 1er tableau
Les trois ministres Ping, Pang et Pong aspirent à des temps plus paisibles, se rappelant les bons moments passés dans leurs villages respectifs, et souhaitent que Turandot connaisse enfin l'amour, alors qu'ils pensent que les cimetières vont continuer à se remplir.
- 2e tableau
L'épreuve des énigmes a lieu. Avant de proposer les énigmes, Turandot explique pourquoi elle ne veut pas se marier, et l'on apprend que son ancêtre, Lou-ling, princesse de Pékin à la voix pure et fraîche, a été tuée par un prince étranger. Turandot veut venger Lou-ling en tuant tous les prétendants.
Les trois réponses aux énigmes sont : l'espoir, le sang, et Turandot elle-même.
Le Prince sort vainqueur. Face à Turandot, désemparée, il accepte généreusement de la libérer de son engagement si elle parvient à connaître son nom avant le lendemain, à l'aube.
Acte III
- 1er tableau
C'est la nuit. Le Prince attend le jour plein d'espérance. Ping, Pang et Pong tentent vainement d'apprendre son nom en faisant des marchés au Prince, puis torturent Liù, qui déclare qu'elle seule connaît l'identité de l'étranger. Elle se poignarde pour sauver le Prince, et emporte le secret dans la tombe[1].
À l'aube, resté seul avec Turandot, le Prince lui reproche sa cruauté avant de l'embrasser. Turandot lui révèle ensuite qu'elle l'a à la fois aimé et haï, mais lui demande de partir. Le Prince refuse et lui révèle son nom : Calaf, remettant ainsi son sort entre ses mains.
- 2e tableau
Devant l'empereur, et tout le peuple rassemblé, Turandot déclare qu'elle connaît le nom de l'inconnu : il s'appelle « Amour ». La foule acclame les fiancés.
Airs célèbres
- Acte I
- « Là sui monti dell'Est » — tiré du classique chinois du XVIIIe siècle, Mo Li Hua (茉莉花)
- « Signore, ascolta! » — Liú
- « Non piangere, Liú! » — Calaf
- Acte II
- « In questa reggia » — Turandot
- Scène des énigmes : « Straniero, ascolta! » — Turandot, Calaf
- Acte III
- « Nessun dorma » — Calaf
- Mort de Liú : « Tanto amore, segreto… Tu, che di gel sei cinta » — Liú
- « Principessa di morte! » — Turandot, Calaf
Analyse de l'œuvre
Sources
Turandot est à l’origine une « fable théâtrale » écrite par Carlo Gozzi en 1762, bien plus connue de nos jours dans ses diverses adaptations musicales. Carl Maria von Weber a composé l’accompagnement de l’adaptation théâtrale de Schiller, tandis que Ferruccio Busoni a écrit une Suite orchestrale basée sur Turandot (1904), ensuite réutilisée dans son opéra homonyme (1917).
L'intrigue repose sur une légende persane médiévale. Le nom de l'héroïne, Turandot, signifie « fille de Touran »[2] (l'Asie centrale et, par extension, la Chine) ; il apparaît dans les Mille et Un Jours de François Pétis de la Croix (1710)[3]. Le prince y est nommé Khalaf, voisin de l'arabe « khalîfa » : calife, successeur au trône (de Chine).
Les noms des deux rois sont en revanche différents dans l'opéra et le conte. Altoum évoque l'or (« altın » en turc, « alt(an) » en mongol ; allusion à la deuxième dynastie Jin, toungouse, dont le nom (金) signifie « or » en chinois). Timur évoque le fer (« demir » en turc], « tömör » en mongol).
Composition
La partition de Giacomo Puccini est restée inachevée à la mort du compositeur, emporté le par un cancer de la gorge, et fut complétée par Franco Alfano au moyen de quelques notes laissées par Puccini. Cette version du final n'a cependant jamais fait l'unanimité ; ainsi lors de la première, qui eut lieu le à La Scala de Milan, sous la direction d’Arturo Toscanini, le chef d’orchestre, juste après l’air de Liú « Tu, che di gel sei cinta », déposa sa baguette, se tourna vers le public et dit : « C’est ici que Giacomo Puccini a interrompu son travail. La mort, cette fois, fut plus forte que l'art. » La salle resta silencieuse quelques instants avant d'éclater en une formidable ovation. Dans les représentations qui suivirent, Toscanini dirigea cependant une version écourtée du final d'Alfano, qui est devenue la version la plus jouée et enregistrée à ce jour.
Il existe d'autres versions du final, notamment celle du compositeur Luciano Berio, créée en concert le à Las Palmas (Canaries), par le Royal Concertgebouw Orchestra sous la direction de Riccardo Chailly, puis intégrée à l'œuvre le à l'Opéra de Los Angeles.
Accueil
La valeur de Turandot dans l'œuvre de Puccini est encore discutée, deux positions se faisant jour. La première tient Turandot pour le chef-d'œuvre du compositeur italien. Dans son ouvrage Mille et un opéras, Piotr Kamiński écrit ainsi : « Turandot demeure le chef-d'œuvre de son auteur »[4] et cite comme arguments l'excellence de « l'envergure dramatique et la variété des styles », l'audace et la modernité du « langage harmonique », la force de « l'atmosphère orientale », et le « souffle sans précédent de l'écriture chorale »[5]. À l'inverse, Marcel Marnat, dans son étude sur Puccini, voit dans Turandot une œuvre inachevée et inégale, dont seul le premier acte lui semble véritablement comparable aux autres grandes œuvres de Puccini.
Productions
Parmi les productions récentes, on peut retenir celle de , dont huit représentations furent données dans la Cité interdite à Pékin en République populaire de Chine. Il s’agissait d’une coproduction internationale dirigée par Zubin Mehta, mise en scène par Zhang Yimou et riche d’un nombre impressionnant de figurants notamment complétés par d’authentiques soldats de l’Armée populaire de libération.
Discographie
Adaptations filmées et captations
- 1934 : Prinzessin Turandot de Gerhard Lamprecht, sur un scénario de Thea von Harbou, tourné en allemand, avec Käthe von Nagy (Turandot) et Willy Fritsch (Calaf)[6] ;
- 1934 : Turandot, princesse de Chine, de Gerhard Lamprecht et Serge Veber, sur un scénario de Thea von Harbou et Serger Veber, avec Käthe von Nagy (Turandot) et Pierre Blanchar (Calaf) – Cette version française est différente de la précédente (le tournage simultané de deux versions d'un même film n'était pas rare dans les années 1930)[6] ;
- 1958 : Turandot, captation télévisuelle de Mario Lanfranchi, avec Lucille Udovich (Turandot), Franco Corelli (Calaf), Renata Mattioli (Liù), Plinio Clabassi (Timur) - Fernando Previtali (chef d'orchestre) - RAI production - DVD catalogue VAI 2004 (115 min)
- 1983 : Turandot, captation télévisuelle de Brian Large, avec Ghena Dimitrova (Turandot) et Nicola Martinucci (Calaf)
- 1983 : Turandot, captation télévisuelle Rodney Greenberg, tourné à l’Opéra d’État de Vienne, avec Eva Marton (Turandot) et José Carreras (Calaf)
- 1988 : Turandot, captation télévisuelle de Kirk Browning, tournée au Metropolitan Opera de New York, avec Eva Marton (Turandot) et Plácido Domingo (Calaf)
- 1989 : Turandoti, film d'Otar Shamatava, en langue géorgienne
- 1994 : Turandot, captation télévisuelle de Brian Large, tournée à l'opéra de San Francisco, avec Eva Marton (Turandot) et Michael Sylvester (Calaf)
- 1999 : Turandot at the Forbidden City of Beijing, captation télévisuelle d'Hugo Käch et Ruth Käch, avec Giovanna Casolla (Turandot) et Sergej Larin (Calaf)
- 2002 : Turandot, captation télévisuelle de Brian Large, avec Gabriele Schnaut (Turandot) et Johan Botha (Calaf)
- 2005 : Turandot, captation télévisuelle de Zhang Yimou du spectacle donné au Stade de France le , avec Irina Gordei, Nicola Martinucci et Yao Hong.
Notes et références
- Cette scène est la dernière composée par Puccini avant sa mort.
- « Touran dokht »
- Récemment réédité aux éditions Phébus.
- Kamiński, page 1222.
- page 1223
- La Fiche IMDb ne précise pas s'il s'agit d'un film musical, listé ici sous toutes réserves
Bibliographie
- (de) Elisa Alberti, Wandlungen einer Frauenfigur: Vergleichende Untersuchungen zu den Turandot-Bearbeitungen von Gozzi, Schiller, Puccini, Brecht, Francfort/Berne/New York (Peter Lang), 2012.
- (en) William Ashbrook, Harold Powers, Puccini's Turandot. The End of the Great Tradition, Princeton (Princeton University Press), 1991 (ISBN 0-691-09137-4).
- (en) Allan Atlas, « Newly discovered sketches for Puccini's Turandot at the Pierpont Morgan Library », in : Cambridge Opera Journal, 3/1991, pp. 173–193.
- (it) Virgilio Bernardoni, La maschera e la favola nell'opera italiana del primo Novecento, Venise (Fondazione Levi), 1986.
- (it) Sylvano Bussotti/Jürgen Maehder, Turandot, Pise (Giardini), 1983.
- (en) Mosco Carner, Puccini. A Critical Biography, Londres (Duckworth) 1958 ; 2e édition augmentée : Londres (Duckworth) 1974 ; 3e édition augmentée et corrigée : Londres (Duckworth) 1992.
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- (it) Giovacchino Forzano, Turandot, Milan (Società Editrice Salsese), 1926.
- (it) Michele Girardi, « Turandot: Il futuro interrotto del melodramma italiano », in : Rivista italiana di musicologia, 17/1982, pp. 155–181.
- (it) Michele Girardi, Giacomo Puccini. L'arte internazionale di un musicista italiano, Venize (Marsilio) 1995 ; traduction en anglais, Chicago (Chicago Univ. Press) 2000.
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- (en) Kii-Ming Lo/Jürgen Maehder, Puccini's Turandot, Guilin (Guanxi Normal University Press), 2003.
- (en) Kii-Ming Lo/Jürgen Maehder, Turandot de tui bian [The Transformations of "Turandot"], Taipei (Gao Tan Publishing Co.), 2004 (ISBN 986-7542-50-9).
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- (de) Wolfgang Volpers, « Giacomo Puccinis Turandot », in : Publikationen der Hochschule für Musik und Theater Hannover, vol. 5, Laaber (Laaber), 1994.
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