Bataille de Saint-James (1800)
La deuxième bataille de Saint-James a lieu le , pendant la Chouannerie.
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Date | |
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Lieu | Saint-James, La Croix-Avranchin et Montanel |
Issue | Victoire des chouans |
République française | Chouans |
• Charles Dumoulin | • Aimé Picquet du Boisguy • Auguste Hay de Bonteville • Louis Picquet du Boisguy • François Julien Morel d'Escures • Bertrand de Saint-Gilles |
600 à 1 000 hommes[1],[2] | 2 200 hommes[3] |
22 morts[1] 30 à 35 blessés[1] | 80 morts ou blessés[3] |
Batailles
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- 1re Argentré
- Expédition de Quiberon
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- Quiberon
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- 2e Saint-James
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- Les Tombettes
Prélude
La troisième chouannerie a commencé le , mais dès le , une trêve a été conclue entre les belligérants, à la suite de la chute du Directoire. Évadé de la prison de Saumur, Aimé Picquet du Boisguy reprend le commandement de sa division de Fougères à la fin du mois de . Il réorganise ses troupes, mais peu de temps après son arrivée, il se rend à la conférence de Pouancé où républicains et royalistes négocient sur de possibles conditions de paix[3].
Du Boisguy figure parmi les généraux royalistes qui sont pour continuer la guerre. Ayant appris que le général Brune arrivait en Bretagne avec d'importantes troupes, il regagne rapidement le pays de Fougères et y rassemble une partie de ses forces, mais ne veut pas rompre lui-même la trêve[3].
Une première escarmouche a lieu le 16 janvier, lorsque les républicains de la garnison de Saint-James repoussent une incursion de 150 chouans qui laissent quatre ou cinq morts[4],[2]. Puis le 20 ou le 22, François Julien Morel d'Escures, colonel de la division de Saint-James, de l'Armée catholique et royale de Normandie, est attaqué avec ses 200 hommes par les troupes républicaines venues d'Avranches et fortes de 800 hommes selon Pontbriand. Le chef normand trouve alors refuge avec ses hommes dans la division de Boisguy à Parigné. Du Boisguy décide alors de contre-attaquer et se porte avec sa troupe au village de Montjoie-Saint-Martin, près de Saint-James, afin d'attaquer cette place pour le lendemain[3].
Forces en présence
Selon les mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand, les chouans engagent 2 200 hommes dans l'affrontement, soit les 200 Normands commandés par Descures, tandis que du Boisguy a initialement 1 100 Bretons avec lui. Ces forces sont renforcées pendant la bataille par la colonne d'Auguste Hay de Bonteville, forte de 800 à 900 hommes[3].
Toujours selon Pontbriand, les forces républicaines sont bien plus nombreuses, il écrit que la garnison de Saint-James était forte de 400 hommes et que le général Dumoulin disposait de 4 000 soldats. Ce nombre aurait été donné par un soldat républicain fait prisonnier[3].
Mais cette estimation semble surévaluée, selon des sources républicaines de l'administration de Fougères, la colonne du général Dumoulin ne comptait que 500 à 600 hommes de troupe de ligne[1].
D'après Pontbriand, Dumoulin estima le nombre des chouans à 5 000[3].
De son côté, l'administration républicaine d'Avranches écrivit dans un courrier daté du 8 pluviôse (28 janvier) et adressé à l'administration municipale du canton de Villedieu-les-Poêles, que le combat opposa 130 hommes commandés par Dumoulin à 250 chouans sur les hauteurs de la Palluelle, puis 1 000 à 1 200 autres au bourg de La Croix-Avranchin[2]. Selon l'historien Félix Jourdan, d'autres sources républicaines évoquent un affrontement opposant 400 soldats sortis de Saint-James à 1 200 ou 1 500 chouans[2].
La bataille
Dans ses mémoires, Pontbriand fixe la date du combat au [3], en revanche les documents républicains le placent au 3 pluviôse, soit le 23 janvier[1].
Les chouans commandés par Aimé Picquet du Boisguy se divisent en deux colonnes égales, la première se porte à la vue de la garnison de Saint-James afin de la pousser à faire une sortie, tandis que la deuxième est chargée de prendre les républicains à revers. La garnison se porte effectivement à la rencontre des chouans mais elle se replie très rapidement, ayant sans doute deviné le piège. Selon Pontbriand, 26 républicains sont tués dans ce combat[3].
Les chouans se rendent alors ensuite à La Croix-Avranchin puis prennent la route de Montanel après avoir pris du repos. Les républicains de Saint-James font alors une nouvelle sortie et se portent à la rencontre des chouans. Mais Louis Picquet du Boisguy, frère d'Aimé du Boisguy et commandant de l'avant-garde, en est informé et les républicains tombent dans une embuscade entre La Croix-Avranchin et Montanel[3].
Ces derniers sont mis en déroute en un quart d'heure et se replient sur le village de Vauzel, sur la route de Saint-James. C'est à ce moment que le général Dumoulin arrive en renfort avec sa colonne. Il commence par rallier les fuyards puis fait poster ses hommes en embuscade. Les chouans menés par Bertrand de Saint-Gilles arrivent alors à Vauzel, lancés dans la poursuite des républicains, mais ils tombent à leur tour dans le piège. Surpris par les républicains embusqués, les royalistes battent aussitôt en retraite et rejoignent le gros des troupes commandées par Aimé Picquet du Boisguy[3].
Dumoulin fait alors mouvement et lance l'attaque sur les forces royalistes. Le combat s'engage alors pendant une demi-heure, mais les chouans ont l'avantage car ils occupent un front plus large. Boisguy reçoit ensuite des renforts, qui leur permet de faire jouer le poids du nombre ; d'abord les 400 hommes de son frère Louis rejoignent le combat et c'est ensuite la colonne d'Auguste Hay de Bonteville qui fait son apparition sur le champ de bataille. Celle-ci, forte de 800 à 900 hommes, attaque les républicains dans leur dos[3].
Dumoulin ordonne alors la retraite qui, selon Pontbriand, se transforma en déroute ; il ne put rallier ses hommes qu'à Saint-James. Pontbriand estime dans ses mémoires que le général républicain fit plusieurs erreurs lors du combat. N'ayant pas attaqué assez vigoureusement après une embuscade réussie, il a laissé le temps aux royalistes de se réorganiser, a ensuite trop massé ses troupes qui ne présentèrent pas un front suffisamment étendu et enfin n'a pas gardé une réserve à opposer à Bonteville[3].
Par la suite, le cantonnement fit une nouvelle sortie pour affronter les rebelles, mais le 25 janvier, profitant du départ de la garnison, un groupe de 200 chouans s'emparèrent du poste qui n'était plus gardé que par des paysans. Ils prirent les fusils dans la mairie et pillèrent ou menacèrent quelques habitants[4].
Les pertes
Les pertes des deux camps ne sont pas connues avec certitude, elles furent exagérées ou minimisées des deux côtés[2]. Certains rapports républicains annoncèrent la défaite des chouans, mais le champ de bataille resta à ces derniers[5],[1].
Dans ses mémoires, le colonel chouan Toussaint du Breil de Pontbriand, écrivit que 900 républicains furent tués lors de la bataille et 300 blessés, contre un bilan de 80 morts ou blessés chez les chouans[3].
Selon les administrateurs d'Avranches, les pertes du général Dumoulin furent de 8 morts et 20 blessés sur 130 hommes[2]. De son côté un journal rennais, le Journal du Commerce, évalua les pertes républicaines à 4 tués et 12 blessés contre 500 morts ou blessés sur 1 500 hommes du côté des chouans[1]. Mais cette dernière estimation fut contredite par Hautraye, commissaire de Louvigné-du-Désert, qui écrivit que : « Le général Dumoulin ne s'était pas fait rendre un compte bien exact de la perte de part et d'autre, car il eût appris qu'il y a eu vingt-deux tués et de trente à trente-cinq blessés du côté des républicains et de celui des chouans, à qui resta l'avantage du champ de bataille, soixante à quatre-vingt tués ou blessés, au plus »[1].
« Le général Dumoulin, à la tête de 130 hommes,attaque, le 3 du courant, les Chouans postés sur les hauteurs de la Palluelle, au nombre d'environ 250, les débusque et les chasse jusqu'au bourg de la Croix, où les Chouans étaient réunis en force au nombre d'environ 1 000 ou 1 200.
Le feu s'engagea avec vigueur et notre colonne se battit contre les Chouans, quoique dix fois plus nombreux, pendant dix heures de temps. À la fin, manquant de munitions, elle fut obligée de faire sa retraite sur Saint-James. Nous n'avons eu dans cette affaire que huit tués et vingt blessés[2]. »
— Rapport de l'administration d'Avranches à l'administration municipale du Villedieu, le
« Aussitôt que ce général (du Boisguy) s'était trouvé en état de monter à cheval, après la chute qu'il avait faite en s'évadant du château de Saumur, il était revenu prendre le commandement de sa division de Fougères, qui ne comptait plus que dix-huit cents à deux mille hommes, parce que les Normands du pays d'Avranches, composant sa troisième colonne dans la guerre précédente, s'étaient réunis à M. de Frotté, qui avait le commandement de toute la province de Normandie.
Sa troupe, sous les ordres de MM. de Limoëlan, Bonteville, Louis du Boisguy, son frère, et Bertrand de Saint-Gilles, digne frère du chevalier, s'était distinguée dans plusieurs combats, avant la trêve ; le chevalier de Lambilly était aussi venu le rejoindre ; mais on s'apercevait bien de la disparition de tant de braves capitaines, sous-officiers et soldats indignement massacrés pendant la paix. Néanmoins, il s'empressa de réorganiser ses compagnies, de nommer de nouveaux officiers et se prépara à soutenir l'effort de l'ennemi.
Peu de jours après son arrivée, la trêve fut publiée partout, et il reçut une invitation pour se rendre aux conférences de Pouancé. Il partit aussitôt pour cette ville et se réunit aux chefs qui, regardant les propositions du Premier Consul comme fallacieuses, opinaient pour la continuation de la guerre. Ce fut à Pouancé qu'il apprit la marche du général Brune qui descendait la Loire avec une puissante armée, tandis que le général Chambarlhac marchait sur la Normandie. Il quitta Pouancé avec Frotté et revint se mettre à la tête de ses troupes.
Il n'avait cependant pas encore la certitude que l'ordre fût arrivé de rompre la trêve et ne voulait pas attaquer le premier. Le 20 janvier 1800, il était sur la paroisse de Parigné, dans les environs de son château du Boisguy, lorsqu'il entendit une fusillade du côté de Saint-James, et, deux heures après, il vit arriver M. Descures, commandant une division en Normandie, qui avait été surpris au moment il n'avait avec lui que deux cents hommes et quand, sur la foi de la trêve, il ne se tenait pas sur ses gardes. Descures, attaqué par huit cents hommes sortis d'Avranches avait été battu après une courte résistance et venait se réfugier auprès de du Boisguy. Ce dernier n'avait lui-même que onze cents hommes ; néanmoins il se mit en marche sur-le-champ et alla coucher au village de Montjoie, à une lieue de Saint-James.
Le lendemain, il divisa sa troupe et en fit passer la moitié en vue de la garnison de Saint-James, espérant l'attirer hors de ses retranchements ; son intention était de la mettre entre deux feux et de lui couper la retraite, ce qui n'eut lieu qu'en partie. Les Républicains sortirent en effet, au nombre de quatre cents, mais ils furent sans doute prévenus du piège, car ils rentrèrent presque aussitôt ; vingt-six des leurs furent tués près des retranchements.
Du Boisguy, voyant cette expédition manquée, marcha sur la Croix-Avranchine, de quoi y rafraîchir sa troupe ; ensuite il prit la route de Montanel. Son avant-garde, commandée par son frère Louis, qui avait repris les armes, quoiqu'il eût été estropié d'un bras en 1794, était partie depuis une demi-heure, lorsqu'il eut avis que les Républicains marchaient contre lui. Il pensait que c'était la garnison de Saint-James et qu'il n'avait pas besoin de rappeler son frère pour battre cette troupe. Il fit arrêter sa colonne et se mit à cheval sur la route de la Croix à Montanel, où il attendit l'ennemi dans une assez bonne position.
Les Républicains donnèrent dans son embuscade, où ils furent reçus par une fusillade à bout portant, et aussitôt, chargés si vigoureusement qu'ils furent rompus et mis en déroute en moins d'un quart d'heure. Du Boisguy les poursuivit dans trois quarts de lieue ; mais arrivé au village de Vanzel, sur la route de la Croix à Saint-James, l'affaire changea de face. Le général Dumoulin venait d'arriver avec quatre mille hommes ; il apprit par les fuyards la déroute de la garnison de Saint-James, et, prévoyant que les Royalistes allaient la poursuivre jusqu'à cette ville, il leur dressa une embuscade où Bertrand de Saint-Gilles alla tomber avec ceux qui étaient les plus ardents à la poursuite. Ils plièrent d'abord et se retirèrent en combattant toujours pendant un quart de lieue. Ils rejoignirent du Boisguy, occupé à rallier et à embusquer ses troupes. Un prisonnier que Saint-Gilles venait de faire lui apprit le nombre et la qualité des nouveaux ennemis qu'il avait à combattre ; néanmoins, il résolut de faire une vigoureuse résistance ; plusieurs cavaliers étaient déjà partis pour hâter le retour de son frère.
Le général Dumoulin le fit attaquer vigoureusement ; mais, malgré le nombre de ses troupes, il ne prit pas autant de développement que les Royalistes. Il avançait toujours, mais ses flancs restaient découverts. Bertrand de Saint-Gilles d'un côté, du Boisguy, Lambilly, Louvières firent des prodiges de valeur pour arrêter l'ennemi et empêcher leurs troupes de se débander en présence de cette masse qui les pressait sans relâche.
L'action durait ainsi depuis plus d'une demi-heure, lorsque Louis du Boisguy arriva avec son avant-garde de quatre cents hommes ; puis une vive fusillade se fit entendre sur les derrières de Républicains ; c'était Bonteville qui arrivait à son tour, avec huit à neuf cents hommes de troupes fraîches. Le général donna des ordres pour faire tête à ce nouvel ennemi ; mais il avait trop massé ses bataillons, et il lui fut impossible de se déployer ; la dernière attaque y avait jeté un désordre qu'il ne put réparer, tandis que du Boisguy, redoublant d'efforts, parvenait à pénétrer dans le centre, et que Bonteville perçait la masse qui lui était opposée.
Le général voulut en vain opérer sa retraite en bon ordre ; la déroute devint générale. Il fut un des derniers à quitter le champ de bataille ; mais il fut obligé de suivre ses soldats, qu'il ne put rallier qu'à Saint-James. Il laissa six cents morts sur la place et emmena trois cents blessés. Tel fut le résultat de cette brillante action, qui prouva à du Boisguy que ses anciens soldats n'avaient pas dégénéré pendant la paix.
Les Royalistes eurent quatre-vingts hommes tués ou blessés.
Le général républicain fit des fautes dans cette affaire ; la première fut de n'avoir pas chargé aussitôt que les Royalistes furent tombés dans son embuscade, et profité du désordre qu'occasionna la première surprise qui les fit reculer assez loin ; la seconde, de n'avoir pas étendu suffisamment son front, ensuite de n'avoir pas assuré ses derrières par une bonne réserve. Ses soldats, se trouvant massés dans un trop petit espace, ne pouvaient se soutenir, et les balles faisaient plus de ravages. Enfin, il fut battu par des troupes qui lui étaient inférieures en nombre de près de moitié, ce qu'il ne voulait pas croire, car il assurait que du Boisguy avait plus de cinq mille hommes à cette affaire, tandis que, même avec les deux cents soldats de M. Descures, il n'en avait que deux mille deux cents. Il avoua qu'il ne s'attendait pas à l'attaque que Bonteville fit sur ses derrières au milieu de l'action.
Du Boisguy, en donnant des éloges à tous ceux qui s'étaient distingués, attribua à Bertrand de Saint-Gilles l'honneur principal de cette journée[3]. »
— Mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand
Bibliographie
- Christian Le Boutellier, La Révolution dans le Pays de Fougères, Société archéologique et historique de l'arrondissement de Fougères, , p. 699-701.
- Toussaint du Breil de Pontbriand, Mémoire du colonel de Pontbriand, , p. 424-430.
- Charles-Louis Chassin, Les pacifications dans l'Ouest, t. III, éditions Paul Dupont, , p. 556-557.
- Théodore Lemas, Le district de Fougères pendant les Guerres de l'Ouest et de la Chouannerie 1793-1800, Rue des Scribes Editions, , p. 336-337.
- Marie-Paul Du Breil de Pontbriand, Un chouan, le général du Boisguy, édition Honoré Champion, Paris, (réimpr. La Découvrance, 1994), p. 426-430.
- Léon de La Sicotière, Louis de Frotté et les insurrections normandes, 1793-1832, t. II, Plon, , p. 454-456. gallica
- Félix Jourdan, La chouannerie dans l'Avranchin, 2e partie, , p. 247-251. , p. 238.
Références
- Théodore Lemas, Le district de Fougères pendant les Guerres de l'Ouest et de la Chouannerie, p. 336-337.
- Félix Jourdan, La chouannerie dans l'Avranchin, p. 247-251.
- Toussaint du Breil de Pontbriand, Mémoires du colonel de Pontbriand sur les guerres de la Chouannerie, p. 424-430.
- Léon de La Sicotière, Louis de Frotté et les insurrections normandes, t. I, p. 454-456.
- Charles-Louis Chassin, Les pacifications dans l'Ouest, t. III, p. 556-557.
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