Carnaval

Le carnaval est un type de fête relativement répandu en Europe et en Amérique. Il consiste généralement en une période pendant laquelle les habitants de la ville sortent déguisés (voire masqués ou bien maquillés) et se retrouvent pour chanter, danser, faire de la musique dans les rues, jeter des confettis et serpentins, défiler, éventuellement autour d’une parade.

Carnaval de Cholet et son remarquable défilé de nuit.

Pour les articles homonymes, voir Carnaval (homonymie).

Carnaval

Le carnaval de Venise par François Flameng

Commence le 6 janvier
Finit 47 jours avant Pâques
2021 : 16 février
2022 : 1er mars
2023 : 21 février
Célébrations parades, bals masqués, déguisement
Lié à Carême
Pâques
Jour des Blancs et Grand Défilé du Carnaval des Noirs et Blancs de Pasto, Colombie.
Joueuse du Carnaval des Noirs et Blancs de Pasto, Colombie.
Char du défilé de Rio de Janeiro.

Héritiers de rituels antiques tels que les Lupercales et la Guillaneu, ils sont traditionnellement associés au calendrier chrétien et se déroulent entre l'Épiphanie, soit le 6 janvier, et le Mardi gras, une fête mobile entre le 3 février et le 9 mars.

Étymologie

Le substantif masculin carnaval apparaît en français sous la forme carneval en 1549 pour exprimer le sens de « fête donnée pendant la période du carnaval »[1],[2].

C'est un emprunt[3],[4] à l'italien carnevale ou carnevalo[3],[4],[5]. Il a pour origine carnelevare, un mot latin formé de carne « viande » et levare « enlever »[6],[2]. Il signifie donc littéralement « enlever la viande ».

Des étymologies fantaisistes ont été jadis avancées, telle que « caro vale » pour « adieu la chair »[7].

Une autre hypothèse propose carrus navalis, en relation avec le Bateau d'Isis (en) (Isis).

Jusqu'au XIXe siècle, le nom masculin carême-prenant a été utilisé en français à égalité avec carnaval. Il a été orthographié de diverses manières : caresme-prenant, quaresmeprenant, etc. On le retrouve dans le journal de Pierre de l'Estoile, chez Molière, etc. En France on peut trouver des variantes régionales de carême-prenant, telles que caramentran en Provence[8].

De carême-prenant, on a dérivé deux expressions. L'une : « tout est de carême-prenant », pour parler de certaines libertés, en particulier dans le domaine des mœurs, qui se prennent ou prenaient traditionnellement pendant le carnaval. L'autre, pour désigner une personne costumée en carnaval, ou en général quelqu'un d'habillé de façon ridicule. Dans cette situation, on entend crier « Au secours, au secours, votre fille on l'emporte, Des carêmes-prenants lui font passer la porte[9] ». On trouve aussi dans le Bourgeois gentilhomme de Molière : « On dit que vous voulez donner votre fille en mariage à un carême-prenant »[10].

Du nom carnaval dérive l'adjectif carnavalesque (relatif au carnaval), mais aussi certains régionalismes tels que carnavaleux et carnavalier : le premier désigne, dans la région de Dunkerque, en Belgique et au Québec, un participant au carnaval[11],[12] ; le second un artiste créant des œuvres pour le carnaval tels que chars, des géants, des grosses têtes, etc. Les « carnavaliers » les plus célèbres de France sont établis à Nice où le métier se transmet de père en fils depuis 1870 et où ce mot est traditionnellement utilisé[13].

Périodes du carnaval

Le combat de Carnaval et de Carême, Pieter Brueghel l'Ancien (1559).

D'après le calendrier religieux, le carnaval débute à l'Épiphanie (le 6 janvier), date qui marque la fin des fêtes de Noël et s'arrête le mardi gras, veille du début de la période de carême. Les Laetare sont des carnavals de mi-carême.

Les Lupercales des Romains et les fêtes dionysiaques en Grèce sont des précédents historiques du carnaval.

Le carnaval est une tradition archaïque liée aux cycles saisonniers et agricoles. L’historien des religions Mircea Eliade écrit : « Toute nouvelle année est une reprise du temps à son commencement, c’est-à-dire une répétition de la cosmogonie. Les combats rituels entre deux groupes de figurants, la présence des morts, les saturnales et les orgies, sont autant d'éléments qui dénotent qu’à la fin de l’année et dans l’attente du Nouvel An se répètent les moments mythiques du passage du chaos à la cosmogonie »[14]. Eliade écrit encore : « Alors les morts pourront revenir, car toutes les barrières entre morts et vivants sont brisées (le chaos primordial n'est-il pas réactualisé ?) et reviendront puisqu'à cet instant paradoxal le temps sera suspendu et qu'ils pourront donc être de nouveau contemporains des vivants »[14]. Eliade souligne que les peuples ont « d’une manière profonde le besoin de se régénérer périodiquement en abolissant le temps écoulé et en réactualisant la cosmogonie »[14].

Dans l’essai Le Sacré et le Profane, Mircea Eliade écrit : « L'abolition du temps profane écoulé s’effectuait au moyen des rites qui signifiaient une sorte de « fin du monde ». L'extinction des feux, le retour des âmes des morts, la confusion sociale du type des saturnales, la licence érotique ou encore les orgies, etc. symbolisaient la régression du cosmos dans le chaos »[15].

Mircea Eliade parle des valeurs cosmologiques du carnaval même dans son Traité d'Histoire des religions (chapitre XI, Temps sacré).

Le traditionnel carnaval de Acireale est le plus ancien de la Sicile.

En Suisse, le carnaval de Bâle débute le lundi suivant le mercredi des Cendres, à 4h00 du matin, tandis qu'à Lucerne, il commence le jeudi gras à 4h00 du matin[16]. En Grèce, il s'appelle Apokriá et se termine le lundi pur.

Travestissement

La diablada, typique du carnaval d'Oruro.

Les masques prennent les caractéristiques des êtres surnaturels qui sont les démons et les esprits des éléments de la nature, c’est pourquoi le masque a une fonction apotropaïque.

À la fin le temps et l’ordre du cosmos, bouleversés pendant le carnaval, sont reconstitués (nouvelle création, nouvelle cosmogonie) par la cérémonie de la lecture du « testament » et par les « funérailles » du carnaval qui souvent consistent en la brûlure du « Roi Carnaval » représenté par un mannequin ou une poupée de chiffon. D'autres fois l'image du carnaval est noyée ou décapitée[17].

Les travestissements de tous genres, les bals nocturnes et masqués, les promenades du dimanche gras et du mardi gras sont les principaux amusements auxquels on se livre pendant le carnaval. Le carnaval de Venise et en général ceux des pays méridionaux sont les plus célèbres et les plus brillants.

Tradition catholique

Traditionnellement, dans le christianisme, le carnaval marque la dernière occasion de célébration des aliments gras et autres avant le début du Carême. La période entre le début du Carême et Pâques (autrement dit la durée du Carême), selon le calendrier de l'Église, est de quarante jours. Traditionnellement, pendant le Carême, aucune fête ne doit avoir lieu, et les gens doivent s'abstenir de manger des aliments riches, tels que la viande, les produits laitiers, les graisses et le sucre. Les quarante jours du Carême, rappelant le récit biblique des quarante jours que Jésus passa dans le désert, servent à marquer une certaine période où le croyant chrétien se tourne vers Dieu et la discipline religieuse. Dans les jours précédant le Carême, il y aurait lieu de consommer tous les aliments et boissons riches en graisse, en sucre ou en œufs. La tradition de cette consommation importante d'aliments avant le début du Carême serait censée être à l'origine du carnaval.

Traditions préchrétiennes

Schembartlauf, Nüremberg, 1472
Déguisement lors des Anthestéries (Grèce, vers -400)

Les pratiques carnavalesques préexistent aux mots de Carnaval, Fasching, Fastnacht. Elles remontent pour partie à des traditions alpines préchrétiennes (Autriche, Suisse, Savoie, Italie du nord, Slovénie) : Carnaval souabe-alémanique, avec déguisements, masques, soirée carnavalesque, humour carnavalesque, bal paré-masqué, défilé carnavalesque (avec fanfares et chars fleuris), rupture de jeûne, Mardi gras, Bonhomme Hiver, sorcières, feux de joie, etc.

Ces festivités, interdites ou tolérées ou valorisées, marquent plus généralement la continuité des religions européennes antiques, à la manière des Lupercales ou des Feralia de la Rome antique, des Bacchanales, des Dionysies, ou des Lemuria (fête), pour demeurer en Antiquité classique. Les nombreuses fêtes religieuses romaines ont pu partiellement essaimer avec les conquêtes et la romanisation d'une partie de l'Europe antique.

Quelques carnavals célèbres

Musiques de carnaval

Des Touloulous qui défilent pendant la Parade de Kourou, en Guyane.

Films

Annexes

Bibliographie

  • Giampaolo di Cocco (2007) Alle origini del Carnevale
  • Jacques Dubois, « Carnaval : fête, révolte, spectacle. Pour une histoire », Études françaises, volume 15, numéro 1-2, avril 1979, p. 15-34 (lire en ligne).
  • Daniel Fabre et Jacques Lacroix, Carnaval, ou La fête à l'envers, Paris, Gallimard, 1992.
  • Martine Grinberg, « Carnaval et société urbaine XIVe-XVIe siècles : le royaume dans la ville », Ethnologie française, volume 4, 1974, p. 215-244.

Articles connexes

Liens externes

Conférences en ligne

Notes et références

  1. Marguerite de Navarre, L'Heptaméron, Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales : « Ung jour, en masque, à ung carneval […] »
  2. Alain Rey (sous la direction de), Le Grand Robert de la Langue Française, Le Robert, , 2230 p. (ISBN 978-2-85036-673-4 et 2-85036-673-0), article carnaval
  3. « Carnaval », dans le Dictionnaire de l'Académie française, sur Centre national de ressources textuelles et lexicales [consulté le 31 janvier 2017].
  4. Définitions lexicographiques et étymologiques de « carnaval » (sens A, 1) dans le Trésor de la langue française informatisé, sur le site du Centre national de ressources textuelles et lexicales [consulté le 31 janvier 2017].
  5. Entrée « carnaval, carnavals » dans le Dictionnaire de français, en ligne sur le site des éditions Larousse [consulté le 31 janvier 2017].
  6. Étymologie de Carnaval sur le site du Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales ; Lo Zingarelli, Vocabolario della lingua italiana ; Henriette Walter, Le français dans tous les sens, Robert Laffont éditeur, Paris, 1988, page 106.
  7. Marie-Nicolas Bouillet ; ouvrage revu et continué par Alexis Chassang, Dictionnaire universel d’histoire et de géographie, Paris, Hachette, , 2054 p. (lire en ligne), article carnaval.
  8. Caramentran - Carnaval en Provence.
  9. Régnard, le Bal, scène 18.
  10. Molière, Le Bourgeois Gentilhomme, 5e acte, scène 7.
  11. Je vis à Dunkerque, site officiel de la ville de Dunkerque : (au moment du carnaval) « On devient très vite acteur parmi des milliers d'autres acteurs : par un air de musique reconnu, par des amis rencontrés, par l'interpellation anonyme de carnavaleux chaleureux »...
  12. Les mots du carnaval, Office québécois de la langue française, consulté en ligne le 5 mai 2011.
  13. Site de l'office québécois de la langue française : « Carnavalier / Carnavalière : Artiste ou artisan qui travaille à la conception des chars et des personnages faisant partie des défilés d'un carnaval ».
  14. Mircea Eliade, Le Mythe de l'éternel retour, Gallimard, 1969, p. 69, 78, 91).
  15. Mircea Eliade, Le Sacré et le profane, Gallimard, 1965, p. 71 – 72.
  16. Carnaval Portail officiel d'informations sur la Suisse.
  17. À propos de la mort rituelle du carnaval, voir Le Rameau d’or écrit par James George Frazer.
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