Intégrabilité
En mathématiques, l'intégrabilité d'une fonction numérique est sa capacité à pouvoir être intégrée, c'est-à-dire à avoir une intégrale définie (qui a un sens) et finie (qui ne vaut pas l'infini).
La notion d'intégrabilité dépend de la notion d'intégrale que l'on considère. Il existe plusieurs types d'intégrales, les plus connues et utilisées étant l'intégrale de Riemann et l'intégrale de Lebesgue.
Intégrabilité au sens de Riemann
Fonctions en escalier
Soit un intervalle fermé inclus dans et . On dit que est une fonction en escalier s'il existe une subdivision et des nombres réels tels que[1]
.
Si est une fonction en escalier sur alors son intégrale (au sens de Riemann) est définie comme
.
Intégrabilité sur un intervalle fermé
Soit un intervalle fermé inclus dans et . On suppose que est bornée[2], c'est-à-dire qu'il existe un réel tel que pour tout . Notons
et
.
On dit alors que est intégrable (au sens de Riemann) si et dans ce cas son intégrale (au sens de Riemann) est définie comme
.
Intégrabilité sur un intervalle quelconque
Soit un intervalle d'intérieur non vide inclus dans et . On suppose que est localement intégrable[3] (au sens de Riemann) sur , c'est-à-dire que la restriction de sur tout intervalle fermé inclus dans est intégrable (au sens de Riemann). Notons l'extrémité gauche de et son extrémité droite[4]. On dit alors que est intégrable sur (au sens des intégrales impropres de Riemann) si pour tout dans l'intérieur de on a que les deux limites suivantes convergent :
et .
Dans ce cas l'intégrale (au sens des intégrales impropres de Riemann) de est définie comme la somme des deux limites précédentes[5].
Critères d'intégrabilité
- Une fonction réglée est intégrable sur un intervalle fermé[6]. En particulier on en déduit que les fonctions continues, continues par morceaux, monotones ou encore à variations bornées sont toutes intégrables sur un intervalle fermé.
- Une combinaison linéaire de fonctions intégrables est intégrable sur un intervalle quelconque.
- Si sont intégrables sur l'intervalle fermé alors[7]
- Pour tout continue, la composée est intégrable sur .
- Le produit est intégrable sur .
- Le minimum est intégrable sur .
- Le maximum est intégrable sur .
- La valeur absolue est intégrable sur .
- Si la valeur absolue d'une fonction est intégrable sur un intervalle quelconque alors la fonction elle-même aussi. La réciproque est vraie pour un intervalle fermé mais est fausse pour un intervalle non fermé. Si une fonction est intégrable mais que sa valeur absolue ne l'est pas alors on dit que son intégrale est semi-convergente.
- Si sont positives, localement intégrables et que de plus quand [8] alors l'intégrabilité de sur entraîne celle de [9]. On remarquera que est vérifié si par exemple ou quand .
- Soit un intervalle d'intérieur non vide dont les extrémités gauches et droites sont notées et . Supposons que et sont finis. Si est localement intégrable et a des limites finies en et alors est intégrable sur [10].
Exemples et contre-exemples
- La fonction indicatrice des rationnels entre 0 et 1 n'est pas intégrable.
- Critère de Riemann : la fonction est intégrable sur si et seulement si . Cette même fonction est intégrable sur si et seulement si .
- Critère de Bertrand : la fonction est intégrable sur si et seulement si ou ( et ). Cette même fonction est intégrable sur si et seulement si ou ( et ).
- La fonction est intégrable sur mais pas sa valeur absolue. Son intégrale, qui s'appelle l'intégrale de Dirichlet, est donc semi-convergente.
Intégrabilité au sens de Lebesgue
Soient (X, 𝒜, μ) un espace mesuré et f une fonction sur X, à valeurs dans ℝ ou ℂ et 𝒜-mesurable. On dit que f est intégrable sur X si
Notes
- On notera que, dans la définition de fonction en escalier, la valeur de en les n'est pas importante. Cependant certains auteurs requièrent que l'égalité soit vraie sur l'intervalle semi-fermé ou encore .
- Le fait que soit bornée permet de dire que et sont bien définis ; en effet les ensembles dont ils sont une borne inférieure et supérieure ne sont pas vides : il existe toujours des fonctions en escalier qui majorent ou minorent .
- L'hypothèse d'intégrabilité locale permet de s'assurer que les intégrales et sont bien définies pour tout .
- Les nombres et peuvent être infinis.
- La définition de l'intégrale ne dépend pas de . De plus il suffit de montrer qu'il existe un tel que les deux limites mentionnées convergent pour que soit intégrable (il n'est donc pas nécessaire de montrer que cela est vrai pour tout ).
- Cela n'est pas forcément vrai sur un intervalle quelconque, par exemple la fonction identité est continue, donc réglée, mais non intégrable sur .
- Ces 5 propriétés deviennent fausses lorsque l'intervalle n'est pas fermé. Voici des contre-exemples : 1) La fonction est intégrable sur mais si l'on prend alors ne l'est pas. 2) La fonction est intégrable sur mais le produit ne l'est pas. 3) La fonction est intégrable sur mais ne l'est pas. 4) De même n'est pas intégrable sur . 5) Le contre-exemple 3 marche aussi dans ce cas.
- Ici désigne le "grand o" de la notation de Landau.
- Cette propriété devient fausse si l'on omet la condition de positivité. Par exemple si a une intégrale semi-convergente alors on a bien que quand mais n'est pas intégrable.
- Si les extrémités ne sont pas finies, cette propriété devient fausse. Par exemple la fonction admet 0 comme limite en mais n'est pas intégrable sur .
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