Hu Jintao
Hu Jintao (chinois simplifié : 胡锦涛 ; pinyin : [ xǔ tɕìntʰáu][1]), né le à Taizhou, Jiangsu (à environ 300 km à l’ouest de Shanghai), est un homme d'État chinois, secrétaire général du Parti communiste chinois (PCC) du au et président de la république populaire de Chine du au , en ayant été réélu le par l'Assemblée nationale populaire.
Pour les articles homonymes, voir Hu.
Dans ce nom chinois, le nom de famille, Hu, précède le nom personnel.
Il a été choisi quatre fois par le Time sur sa liste des cent personnes les plus influentes au monde[2]. Fin , il a été élu la personnalité la plus influente du monde, selon le nouveau classement publié par le magazine Forbes[3].
Biographie
Né dans une famille de commerçants du centre de l'Anhui (son clan ancestral étant originaire du district de Jixi[4]), Hu Jintao effectue ses études dans le département d’hydro-électricité à l’université Tsinghua de Pékin. Il adhère au parti communiste en 1964 et alterne ensuite des séjours dans la capitale et dans les régions pauvres de l’Ouest. Instructeur politique à son université entre 1965 et 1968 — en pleine révolution culturelle — il fait un premier séjour au Gansu en 1968 et un deuxième en 1974.
Secrétaire national de la Ligue des Jeunesses communistes (1982)
Hu y est très apprécié de Song Ping, secrétaire du Comité provincial et « conservateur » influent à Pékin, qui devient son protecteur et l'envoie en stage à l’École centrale du parti vers 1980-81. En 1981 Hu Jintao rencontre Hu Deping (en), le fils de Hu Yaobang[5]. Lors du XIIe congrès du parti (septembre 1982), Hu Jintao devient — avant l’âge de 40 ans — membre suppléant du Comité central et premier Secrétaire national de la Ligue des Jeunesses communistes.
Secrétaire du PCC dans la région autonome du Tibet (1988-1992)
Apprécié par Zhao Ziyang, le nouveau chef réformiste du parti, il est nommé, le , avec le soutien de Deng Xiaoping, au poste de secrétaire du PCC dans la région autonome du Tibet, laquelle connaît des troubles depuis 18 mois[6], troubles qu'il réprimera. Selon Ronald D. Schwartz, professeur en sociologie agrégé à l'Université Memorial de Terre-Neuve au Canada[7], s'il remplaça Wu Jinghua, bien vu des Tibétains, officiellement pour raison de santé, l'éviction de ce dernier serait liée à son incapacité à contenir les manifestations au Tibet. Sa nomination signifie la poursuite de la politique de réformes au Tibet. Dès son arrivée le , il annonce un ensemble de projets de développement comportant un accroissement des investissements et mettant l'accent sur le développement de l'économie marchande[8]. Le , il en appelle au respect des coutumes et de la religion locales et à la promotion de la langue tibétaine[9].
Deux mois après sa nomination, et contre l'avis de Zhao Ziyang, il fait transférer au Tibet une dizaine de milliers de militaires[10].
Dans son ouvrage Tibet, Tibet, une histoire personnelle d'un pays perdu, l'écrivain Patrick French note que Hu Jintao passa à Pékin les deux dernières années de son mandat de secrétaire du Parti communiste de la région autonome du Tibet[11]. Il quitte ce poste en .
Bureau politique et Comité central (1992)
À l’automne de 1992, Deng Xiaoping s’intéresse à lui de près et décide de le propulser vers le sommet. Désigné par Deng comme le « noyau de la quatrième génération de dirigeants », Hu Jintao est nommé membre du Comité permanent du Bureau politique du PCC et du secrétariat du Comité central, nominations sanctionnées par le XIVe congrès du parti en octobre 1992 (14e Politburo).
Ascension vers la présidence de la République
Dans sa marche vers le sommet, Hu Jintao est nommé en outre président de l’École centrale du Parti (en octobre 1993), vice-président de la République (mars 1998) et premier vice-président de la Commission militaire centrale (en 1999), au sein du 15e Politburo, puis du 16e et du 17e.
Secrétaire général du Parti et Président de Chine (2002, 2003)
Il est élu secrétaire général du Parti communiste chinois le et est réélu pour 5 ans le . Il est élu président de la république populaire de Chine le et est réélu pour 5 ans le [12] par l'Assemblée nationale populaire.
Perte d'influence et succession
En , Xi Jinping fut nommé vice-président de la Commission militaire centrale du Parti communiste chinois[13]. Cette nomination « implique qu'il deviendra sans aucun doute le secrétaire-général du PCC en novembre 2012, puis le président en mars 2013 », selon Willy Lam, analyste politique de l'Université chinoise de Hong Kong[14],[15]. Xi remplace officiellement Hu à la tête du PCC le [16], puis à la tête de l’État le .
En , Hu Jintao est éclaboussé par le scandale de l'accident de Ling Gu, le fils de Ling Jihua, son chef de cabinet[17]. L'accident qui révèle le train de vie de Ling Jihua sonne la fin de l’influence de Hu Jintao et des hommes de la « Ligue de la jeunesse » dans la succession du pouvoir[18],[19]. L'enquête et les indiscrétions qui l'accompagnent montrent que Ling Jihua était un allié secret de Bo Xilai et son principal atout au cœur du pouvoir. En 2016, celui qui fut le principal conseiller de l’ancien chef d’État entre 2007 et 2012 est reconnu coupable de corruption[20].
Son programme politique
Le programme de Hu Jintao est d'obtenir une « société harmonieuse » pour laquelle il a développé avec son équipe le concept de développement scientifique. En effet, les inégalités sociales continuent de se creuser entre les classes et entre les régions, entraînant une multiplication des manifestations sociales. Afin de préserver la paix sociale, il a fait supprimer tout impôt pesant sur les paysans, déjà dans la misère. Il semble également vouloir faire rentrer le système hospitalier dans le giron public. Cependant, le gouvernement central a beaucoup de mal à faire appliquer ces décisions aux gouvernements de provinces, dirigés par des gouverneurs puissants et de plus en plus autonomes.
En , Yu Jianrong, directeur du centre de recherche sur les problèmes sociaux à l’Académie des Sciences sociales, affirme que la politique de Hu Jintao et de Wen Jiabao a échoué, et qu’elle est vouée à l’échec, mettant en garde contre la possibilité de troubles sociaux[21],[22].
Droits de l'homme
Lors d'un voyage officiel aux États-Unis en , Hu Jintao a évoqué la question des droits de l'homme en Chine[23]. L'ONG Reporters sans frontières indique que, selon un haut responsable américain, le président Barack Obama a évoqué le cas de Liu Xiaobo auprès du président chinois. Ce dernier a indiqué publiquement que « la Chine est toujours attachée à la protection et à la promotion des droits de l’homme », et que « d’énormes progrès ont été réalisés », mais « qu’il reste encore beaucoup à faire »[24].
Critiques et accusations
Les troubles au Tibet en 1989 furent brutalement réprimés par Hu Jintao, ce qui lui valut le surnom de « boucher de Lhassa » de la part des militants de la « cause tibétaine »[25],[26]. Selon Tang Daxian, un ancien journaliste chinois aujourd'hui réfugié en Occident, les manifestations des 5 et à Lhassa se seraient soldées par la mort de 450 Tibétains. Ce chiffre, qui est en contradiction avec le chiffre officiel d'une douzaine de morts, provient, à ce qu'il affirme, d'un document chinois confidentiel en sa possession[27].
Le , l'Audience nationale espagnole a annoncé qu'elle allait enquêter sur plusieurs dirigeants chinois, dont Hu Jintao, pour génocide au Tibet, dans le cadre d'une procédure ouverte en 2006 à la demande du Comité de soutien au Tibet, du professeur José Elías Esteve, secrétaire de l'Institut des droits de l'homme de l'université de Valence[28], et de Thubten Wangchen, député du Parlement tibétain en exil possédant la nationalité espagnole[29]. Le , la Cour nationale espagnole a donné des ordres pour informer Hu Jintao de l'acte d'accusation et l'interroger sur sa politique au Tibet et a rendu un arrêt qui devrait entraîner l'émission de mandats d'interpellation de 5 anciens dirigeants chinois soupçonnés d'avoir bafoué les droits de l'homme au Tibet : Jiang Zemin, ancien président et secrétaire du Parti, Li Peng, Premier ministre lors de la répression au Tibet dans les années 1980 et au début des années 1990, Qiao Shi, ancien chef de la sécurité chinois et responsable de la Police armée du peuple pendant la période de la loi martiale au Tibet à la fin des années 1980 ; Chen Kuiyuan, secrétaire du Parti de la région autonome du Tibet de 1992 à 2001, et Deng Delyun (également connu sous le nom Peng Peiyun (en)), ministre de la Planification familiale dans les années 1990[30],[31].
Selon la BBC, de nombreux Tibétains croient qu'il est impliqué dans la mort inattendue, en 1989, du 10e panchen-lama, le deuxième plus haut dirigeant religieux du Tibet[32]. Le dissident chinois d'ethnie mongole Yuan Hongbing a affirmé que Hu Jintao avait planifié cette mort[33]. En , il publie avec Namloyak Dhungser un livre sur la mort du 10e panchen-lama, dans lequel les auteurs dévoilent le complot de l'assassinat par le Parti communiste chinois (PCC) du 10e panchen-lama. Le livre décrit comment Deng Xiaoping et d'autres oligarques, membres fondateurs du PCC, ont pris la décision d'assassiner par empoisonnement le 10e panchen-lama, et ce sous la direction de Hu Jintao et Wen Jiabao, et la mise en œuvre de Meng Hongwei, Hu Chunhua et Zhou Meizhen[34].
Famille
Hu Jintao est marié à Liu Yongqing qu'il rencontra à l'université Tsinghua[35]. Deux enfants sont nés de ce mariage : Hu Haifeng et Hu Haiqing.
Son fils Hu Haifeng est un homme d'affaires chinois. En 2008, celui-ci est promu secrétaire du parti communiste de Tsinghua Holdings[36], qui contrôle Nuctech (en) et plus de 20 autres sociétés[37]. Sa fille Hu Haiqing est mariée à Mao Daolin (en)[38], ancien patron du site Internet Sina.com[39].
Notes et références
- Prononciation en mandarin standard retranscrite selon la norme API.
- (en) « Hu Jintao », Time, mai 2008.
- (en) « The World's Most Powerful People », Forbes.
- Le parcours de Hu Jintao — nouvelobs.com
- Agnès Andrésy, Le Président chinois Hu Jintao, sa politique et ses réseaux.
- (en) Richard Daniel Ewing, « Hu Jintao: The Making of a Chinese General Secretary », dans The China Quarterly, 2003, 173, pp. 17-34, Cambridge University Press « On 9 December 1988, with Deng Xiaoping's support, Hu Jintao was appointed to fill Wu's position and given a mandate to end the disturbances ».
- (en) « Ronald Schwartz », Memorial University of Newfoundland.
- (en) Ronald D. Schwartz, Circle of protest: political ritual in the Tibetan uprising, C. Hurst & Co. Publishers, 1994, 263 p., pp. 148-149 : « On 11 December 1988 the Chinese government had announced that Wu Jinghua was to be replaced as secretary of the CPC in Tibet by Hu Jintao, a young reformer and protege of Zhao Ziyang. Though the official reasons for the replacement were given as the failing health of Wu Jinghua, there was much speculation that he had been dismissed for failing to contain the protest in Tibet. Wu was of the Yi nationality, and generally well spoken of by Tibetans — if only because he appeared in public wearing Tibetan clothes and was thought to be sympathetic to Tibetan aspirations [...] The appointment by Beijing of Hu Jintao nevertheless signified a continuing commitment to the reform policies for Tibet. Hu Jintao arrived in Lhasa on 12 January and immediately announced a package of development plans for Tibet that included an increase in investment and emphasis on the expansion of the commodity economy. »
- (en) The Tibetans, Conflict Early Warning Systems (CEWS) research project of the International Social Science Council], Center for International Studies and Department of International Relations, University of Southern California : « January 18, 1989: Hu Jingtao, the new Communist Party Chief in Tibet, calls for respect of local customs and religion and the promotion of the Tibetan language (Reuters, 01/18/89). »
- Thomas Laird, Dalaï-Lama, Une histoire du Tibet : Conversations avec le Dalaï Lama, traduction Christophe Mercier, Plon, 2007 (ISBN 2259198910), p. 359.
- Patrick French, Tibet, Tibet, une histoire personnelle d'un pays perdu, traduit de l'anglais par William Oliver Desmond, Albin Michel, 2005, pp. 49-50.
- « Hu Jintao réélu président de la Chine pour cinq ans », AFP.
- « Xi Jinping nommé vice-président de la Commission militaire centrale », Radio Chine internationale, 18 octobre 2010.
- « Chine : le vice-président Xi Jinping nommé à la commission militaire », Agence France-Presse, 18 octobre 2010.
- « Xi Jinping, le futur président chinois », Libération, 18 octobre 2010.
- « Chine : Xi Jinping succède à Hu Jintao à la tête du pays », Le Point, 15 novembre 2012.
- « Chine : le bras droit de Hu Jintao sous le coup d'une enquête pour corruption », lepoint.fr, 22 décembre 2014.
- François Danjou, « Coup d’État à Pékin. Sexe, meurtre et corruption en Chine », questionchine.net, 22 mai 2017.
- Brice Pedroletti, « En Chine, les Ferrari sont des mauvais présages », lemonde.fr, 6 septembre 2012.
- Harold Thibault, « Perpétuité pour un proche allié de l’ex-président chinois Hu Jintao », lemonde.fr, 5 juillet 2016.
- (en) John Garnaut, « China's land disputes at crisis point as revolutionary turmoil beckons, says professor of disenfranchised », sur le site smh.com.au (The Sydney Morning Herald), 1er mars 2010.
- (en) John Garnaut, « China insider sees revolution brewing », sur le site smh.com.au (The Sydney Morning Herald), 27 février 2010.
- Le Point du 19 janvier 2011 : « Droits de l'homme : Hu Jintao reconnaît qu'il reste « beaucoup à faire » en Chine ».
- Reporters sans frontière du 20 janvier 2011 : « La femme de Hu Jia réitère la demande de libération de son mari pour raison médicale ».
- (en) « Tibet year 9 under the Chinese boot », Claude B. Levenson, février 2009.
- (en) « Tibet keeps alive true Spirit of the Games », 19 mars 2008, Claude Arpi.
- (en) « Chinese Said to Kill 450 Tibetans in 1989 », New York Times, 14 août 1990.
- (es) « Un profesor de la UV colabora en la imputación de Hu Jintao », Levante-EMV, 16 octobre 2013.
- « La justice espagnole va enquêter contre Hu Jintao pour génocide au tibet », Le Monde, « La justice espagnole a accepté d'enquêter sur l'ancien président chinois Hu Jintao, dans le cadre d'une procédure instruite depuis 2006 pour « génocide » au Tibet dans les années 1980-1990, selon une décision rendue publique jeudi 10 octobre. L'Audience nationale, la plus haute juridiction pénale du pays, chargée d'instruire les crimes de masse, a jugé recevable la demande du Comité de soutien au Tibet (CAT) d'étendre sa plainte à Hu Jintao, maintenant qu'il n'est plus couvert par son immunité présidentielle. Cette plainte vise déjà sept autres anciens dirigeants chinois, dont l'ancien président Jiang Zemin et l'ancien premier ministre Li Peng, pour « génocide, crimes contre l'humanité, torture et terrorisme contre le peuple tibétain » dans les années 1980-1990. »
- (en) « Spanish court orders arrest of Chinese leaders including Hu Jintao », phayul.com, 19 novembre 2013.
- « Jiang Zemin et Li Peng pourraient être arrêtés à l'étranger-Espagne », Reuters, 19 novembre 2013.
- (en) BBC NEWS | Asia-Pacific | Profile: Hu Jintao.
- (en) Kalsang Rinchen, « Hu killed Panchen: Chinese dissident », phayul.com, 16 mars 2011.
- (zh), (en) Voir Chapter 6, et suivant, site taiwanUs.net.
- « Chinese leader’s daughter marries », The Washington Times, 3 novembre 2003.
- Brice Pedroletti, « Nuctech, anciennement dirigée par le fils du président Hu Jintao, est impliquée dans une affaire de corruption », Le Monde, 22 juillet 2009.
- AFP « China Internet blackout linked to leader’s son », Tapei Times.
- Jordan Pouilleux, « Chine : les fortunes des princes rouges », regards.fr.
- « Chine, pouvoir et puissance. Fils de… », Le Monde diplomatique, septembre 2012.
Voir aussi
Liens externes
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