Manoir de Graffard

Le manoir de Graffard, ou Graffart, est une demeure, du XVIe siècle, remaniée au XVIIIe siècle[1], qui se dresse sur la commune française de Barneville-Carteret, en Cotentin, dans le département de la Manche, en région Normandie.

Manoir de Graffard
Présentation
Type
Fondation
Entre et
Propriétaire
Famille de Graffart
Usage
Patrimonialité
Inscrit MH (partie en )
État de conservation
Partiellement détruit (d)
Localisation
Adresse
Coordonnées
49° 23′ 18″ N, 1° 44′ 41″ O

Le manoir fait l'objet d'une inscription partielle au titre des monuments historiques par arrêté du [2].

Localisation

Le manoir est situé au lieu-dit « Graffard », à flanc de coteau, à 1 kilomètre au nord-est de l'église Saint-Germain, de Barneville-Carteret, dans le département français de la Manche. Le fort de Graffard commandait l'entrée du havre de Carteret[3].

Historique

Le plus ancien possesseur connu du fief de Graffard[note 1] est un certain Geoffroy de Graffart cité dans les dernières années du XIIe siècle[5].

Graffart de par sa position géographique comme point de surveillance du havre de Carteret eut un rôle stratégique important lors de la guerre de Cent Ans[6]. En 1360[7], la place est tenu par les Anglais qui devaient la rendre aux Français à la suite du traité de Brétigny mais ne l'évacuèrent que vers le mois de [8] après avoir demandé la somme de 2 000 écus pour sa restitution.

Au XIVe siècle, le fief de Graffard est la possession de la famille Lefebvre de Graffart et le conserveront jusqu'au début du XVIe siècle[5].

En 1415[7], un Robert Lefebvre de Graffard est cité. Son fief lui est confisqué en 1418 au profit de Jehan Granelay à la suite de l'invasion anglaise, mais par lettres patentes du roi d'Angleterre, compte tenu de son grand âge, « en considération de son antiquité de 95 ans, ne pouvant plus porter les armes et usé de vieillesse », il est remis en possession de ses biens. C'est son fils Michel Lefebvre de Graffard, contrôleur de la place de Cherbourg en 1435 pendant l'occupation anglaise, qui hérite[5]. Il est reconnu noble en 1463 lors de la recherche de noblesse de Montfaut[note 2]. En 1527, c'est Nicolas Lefebvre de Graffard qui est seigneur de Graffard. Il n'aura qu'une fille Catherine Lefebvre de Graffard qui épousa Richard du Moustier, écuyer, seigneur de Tombeville[9].

Vers 1540, le fief passe par achat à noble Jacques Pitteboult, vicomte de Saint-Sauveur-le-Vicomte[note 3][10]. C'est Pierre Pitteboult qui construisit le manoir actuel vers 1574-1575, lors des guerres de religion. On relève parmi cette famille, François Pitteboult, mort sans postérité, seigneur de Sortosville-en-Beaumont et de Saint-Georges-de-la-Rivière en partie, qui en 1741, constitua une rente pour la tenue d'une école à Barneville, avec le droit de choisir le maître d'école. C'est le frère de ce dernier, Pierre Pitteboult, écuyer, qui était seigneur de Graffart, et qui épousa la fille du lieutenant du roi « ès ville et château de Valognes »[5].

C'est Pierre-Georges-François-Robert de Pitteboult qui devient sans doute en 1744 seigneur de Graffard[10], et qui décéda sans postérité en 1764[5]. L'héritage passe à sœur Madeleine Pitteboult, fille du défunt Pierre Pitteboult et de noble dame Madeleine de Cussy, qui avait épousé le , dans la chapelle seigneuriale, Jean-Baptiste François Rossignol, écuyer, seigneur de Carteret, fils de Robert Le Rossignol, seigneur et patron de Carteret, Conseiller du Roi, lieutenant civil et criminel au bailliage de Saint-Sauveur-le-Vicomte et de noble dame Barbe Dancel de Quinéville[11], puis à Marie-Bernadine de Hennot, une cousine. Celle-ci épousa en 1764 Jérôme-Frédéric Bignon, qui devient ainsi seigneur de Graffart, mais qui ne séjourna que rarement au manoir. C'est M. Michel de Ventigny qui y résidait et gérait les biens : fiefs de Barneville, Graffard, Le Rozel, Sortosville-en-Beaumont, Saint-Georges-de-la-Rivière en partie[12].

Jérôme-Frédéric Bignon mourut à Paris en 1784, et sa veuve épousa, en 1791, M. Berthelot de la Villheurnoy. Son nom figurant sur la liste des émigrés, ses biens furent confisqués, alors qu'elle résidait à Soissons. Après avoir obtenu difficilement sa radiation de la liste elle finit par rentrer dans ses biens en 1800[6]. Le manoir échut par mariage à la famille Desfriches, comte Doria, qui s'en sépara en 1920.

Seigneurie de Graffart

La seigneurie, qui était tenue directement du roi, s'étendait sur les paroisses de Saint-Georges-de-la-Rivière et Saint-Jean-de-la-Rivière. Relevaient de la seigneurie des moulins à eau et à vent, des pêcheries, et « des salines, mondins et grèves ». Dans le bourg de Barneville se dressait le colombier et dont les tenanciers devaient deux douzaines de pigeons ou six sols[6]. Son seigneur avait également le droit de gravage et varech.

Description

Du Moyen Âge, il reste peu de vestiges, sinon une partie de l'enceinte extérieure. Elle se présente sous une forme carrée de 65 mètres de côté. On pénètre dans la cour par une double porte, charretière et piétonne toutes deux en arc en plein cintre, flanquée à gauche d'une tourelle défensive, percées de trous à fusil permettant le tir au ras de la muraille et vers le porche d'entrée. Elle a perdu une partie de son élévation ainsi que sa toiture en poivrière. Sa partie haute servait de colombier. Sur la droite du porche, une grosse tour circulaire, peu saillante et dont il subsiste quelques traces dans la muraille, devait être le grand colombier du manoir. En poursuivant de ce côté, et après avoir cheminé au pied du mur d'enceinte réduit au quart de sa hauteur on atteint l'angle sud-est flanqué d'une tourelle en poivrière à laquelle on accédait par le premier étage de la charreterie. Les bâtiments de part et d'autre de l'entrée correspondent aux communs ; celui de gauche, une vaste grange, avec aire à battre, percée côté cour d'une grande porte en anse de panier pour le passage des charrettes, aujourd’hui bouchée. À droite le bâtiment des communs, haut d'un étage avec un escalier extérieur, abrite le cellier, la charreterie avec ses quatre grandes arcades en plein cintre reposant sur des piliers carrés surmontés d'un larmier et l'écurie percée d'une porte haute permettant de rentrer à cheval. La date de 1663 avec François Pittebout et Charlotte Thomas est inscrite. Le reste de la cour est ceinte de hautes murailles avec dans l'angle nord-est encore une tourelle en élévation alors que celle qui flanquait la muraille côté sud est aujourd'hui détruite.

Le logis érigé pendant les guerres de religion, probablement par Pierre Pitteboult en 1574-1575, et en partie ruiné au XIXe siècle, s'appuie sur un des côtés de l'enceinte et fait face à l'entrée. Des quatre pavillons qui l'encadraient, trois ont disparu. À noter l'insertion de l'escalier rampe sur rampe dans la travée centrale en lieu et place de la traditionnelle tour d'escalier hors œuvre, généralement située en façade arrière du logis[13].

Le manoir possédait autrefois une chapelle seigneuriale dédiée à Saint-Michel encore utilisée en 1740[11].

Devant la façade de la maison manable, sur un ancien puits, qui assurait l’approvisionnement en eau, a été posé un bloc de calcaire, probablement de Valognes, sculpté avec la date de 1744 et les armes de la famille Pitteboult : d'argent au chevron de gueules chargé de trois (allias six) sautoirs d'argent et accompagné de trois roses de gueules 2 et 1[10],[note 4].

Protection

Sont inscrits[2] :

  • le logis, y compris la partie ruinée avec les caves voûtées d'arêtes et la porte rustique ;
  • les éléments décoratifs dispersés dans la cour ;
  • les façades et toitures des communs, y compris les murailles de clôture, les tourelles et le porche ;
  • le potager et ses murs de clôture.

Notes et références

Notes

  1. Une partie du territoire de Barneville relevait du fief de Graffard[4].
  2. La famille Lefebvre de Graffard portait : d'argent chargé de deux chevrons de gueules accompagné de cinq étoiles de même, deux, deux et un.
  3. Famille originaire d'Aubigny, anoblie en 1479.
  4. Les blasons tardifs de la famille de Pitteboult portent six sautoirs. L'écu « de fantaisie » est typique du XVIIIe siècle.

Références

  1. Norbert Girard et Maurice Lecœur, Trésors du Cotentin : Architecture civile & art religieux, Mayenne, Éditions Isoète, , 296 p. (ISBN 978-2-9139-2038-5), p. 167.
  2. « Manoir de Graffard », sur la plateforme ouverte du patrimoine, base Mérimée, ministère français de la Culture.
  3. André Davy, Les barons du Cotentin, Condé-sur-Noireau, Éditions Eurocibles, coll. « Inédits et introuvables du patrimoine Normand », , 319 p. (ISBN 978-2-91454-196-1), p. 175.
  4. Jean Barros, Le canton de Barneville-Carteret (Côte des Isles) : Le patrimoine, t. 1, Valognes, Éditions de la Côte des Isles, , 391 p. (ISBN 2-9505339-1-4), p. 44.
  5. Bavay - Barneville, Vikland n° 2, p. 25.
  6. Bavay - Barneville, Vikland n° 2, p. 27.
  7. Salch, 1987, p. 106.
  8. Barros 1991, p. 51.
  9. Barros 1991, p. 45.
  10. Collectif, Blasons armoriés du Clos du Cotentin, Condé-sur-Noireau, Éditions Charles Corlet, , 214 p. (ISBN 2-85480-543-7), p. 25.
  11. Blasons du Clos du Cotentin, 1996, p. 24.
  12. Bavay - Barneville, Vikland n° 2, p. 26.
  13. Gilles Désiré dit Gosset, « Châteaux et fortifications du Cotentin », dans Congrès archéologique de France. 178e session. Manche. 2019 - Société française d'archéologie, Condé-en-Normandie, Éditions Picard, (ISBN 978-2-9018-3793-0), p. 24.

Voir aussi

Bibliographie

  • Charles-Laurent Salch, Dictionnaire des châteaux et des fortifications du Moyen Âge en France, Strasbourg, Éditions Publitotal, , 28e éd. (1re éd. 1979), 1304 p. (ISBN 2-86535-070-3, OCLC 1078727877).
  • Jeanine Bavay, « Barneville », Vikland, la revue du Cotentin, no 2, juillet-août-septembre 2012, p. 25-29 (ISSN 0224-7992). 

Articles connexes

Liens externes

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