Profil aérien de contact

Dans un système d'électrification ferroviaire, le profil aérien de contact aussi appelé caténaire rigide, est un système de captage de courant par les pantographes des véhicules moteurs, une alternative au classique système de caténaire à câble d'alimentation des trains. Ce profilé métallique, nécessitant d'être fixé sur une paroi en plafond, est donc utilisé dans les tunnels. La caténaire rigide est un rail de traction qui, parce que suspendu à la voûte des tunnels, améliore la sécurité des personnels d'entretien ainsi que des voyageurs en cas d'évacuation des trains.

Détail de la fixation d'un profil aérien de contact

Histoire

Troisième rail conducteur aérien sur la Baltimore Belt Line

La première caténaire rigide fut celle de la Baltimore Belt Line électrifiée en 1890.

La première ligne du métro de Budapest mise en service en 1896 en fut équipée sous une tension de 550 V, ce rail étant situé à 2,85 m au-dessus des voies dans un tunnel « cadre » de 3,66 m de haut. L'équipement est toujours en service avec une tension portée à 600 V depuis 1973[1].

Histoire de la caténaire rigide au Japon

Le métro de Tokyo utilise la caténaire, à câble ou rigide, sous tension 1 500 V. Dès 1961, la ligne n°2 du métro de Tokyo était électrifiée sur 37 km de voies avec un profil en T.

La Société Sumitomo utilisa pour la ligne Tōzai du métro de Sapporo un rail acier plus léger, renforcé sur ses flancs par des profilés aluminium, ce qui augmente la section d'équivalent cuivre pour un moindre alourdissement, permettant une tension de 1 500 V.

Par la suite, Sumitomo, pour alléger encore le rail, à résistance linéique égale, adopta d'autres métaux conducteurs comme le cuivre et l'aluminium. Le cuivre, outre son prix, présente l'inconvénient d'être d'un poids élevé, ce qui nécessite des suspensions rapprochées pour limiter la flèche et conduit à un investissement important. Sumitomo a conçu un rail en aluminium avec une partie frottante inférieure en acier inoxydable[1]. Les performances de l'aluminium en matière de frottement avec le pantographe se révèlent assez mauvaises, ce qui nécessite l'adjonction d'un fil de contact en cuivre. Ce modèle a évolué vers un profilé comportant deux fils de contact fixés par des griffes en bronze. Ensuite, les griffes ont été remplacées par des languettes en aluminium fixées par des boulons ou goujons espacés de 25 cm[1].

Histoire de la caténaire rigide en France

Le profil aérien de contact de la Gare du Musée d'Orsay

La Société Delachaux inventa un profilé en alliage d'aluminium qui fixait le fil de contact par un pinçage élastique, évitant ainsi tout usage de boulonnerie. La RATP en posa en 1983 une longueur de 400 m dans un tunnel inexploité de la ligne A du RER Parisien, avec un montage pincé pivotant. L'expérimentation sous 1 500 V ne fut pas concluante. La RATP entama alors à partir de 1984 des essais de corrosion à des endroits du tunnel de la ligne A du RER particulièrement exposés démontrèrent la bonne tenue du profilé d'aluminium, y compris avec des fils de contact en cuivre dont les rainures furent enserrées par l'aluminium, malgré la mauvaise réputation de ce couple électrolytique. Les tests de résistance de la caténaire rigide lors d'un échauffement par effet Joule proche de la réalité démontrèrent la quasi invulnérabilité de cette caténaire. Les essais dynamiques, réalisés fin 1990 sous les 400 m de caténaire rigide conservés dans le tunnel inexploité de la ligne A, montrèrent une meilleure régularité dynamique avec la caténaire rigide. Les essais d'endurance sous 1 500 V, réalisés à partir de 1991 avec 500 m de caténaire rigide, sur la ligne C du RER en gare d'Austerlitz avec le passage d'environ 130 000 pantographes par an, furent satisfaisants[1].

Histoire de la caténaire rigide en Suisse

Zurich. Deux rails conducteurs aériens pour la même voie. À gauche, 1 200 V CC pour le chemin de fer Uetliberg (le pantographe est monté de manière asymétrique pour collecter le courant de ce rail); à droite, 15 kV CA pour le chemin de fer Sihltal.

L'installateur suisse Furrer+Frey l'essaya dès 1984 sous 15 kV à la station Zurich - Opfikon avec un franchissement à 105 km/h sur une section de 300 mètres. Fin 1988, les trains circulaient à 140 km/h sur 1,07 km équipés de cette caténaire rigide dans le tunnel du Simplon. La gare Museumstrasse du RER Zurichois a été équipée de profil Delachaux. Sur ces zones, les montages pincent le profil et bénéficient d'une articulation double élaborée pour permettre la dilatation[2]

Histoire de la caténaire rigide en Allemagne

En Allemagne, des profilés de cuivre autoporteurs furent posés sur des isolateurs de plafond. La ligne C du métro de Hanovre utilise un profilé en cuivre depuis 1984 sous 600 V. Le profilé suspendu est pincé tous les 3,3 m, après avoir été légèrement cintré en forme de sinusoïde dont l'ampleur varie avec les variations de température. Il est prévu que la durée de vie de ce profilé dépasse 50 ans[1].

Description technique

La caténaire rigide se composait à sa création d'un profilé d'une dizaine de centimètres de haut, à la forme approximative d'un rail, suspendu à la manière d'un câble de caténaire au-dessus de la voie.

Principes d'installation des profilés d'aluminium

Les profilés en alliage d'aluminium, de 10 à 15 m de longueur, sont fixés bout à bout par soudure ou par éclisses boulonnées pour former un tir continu d'une longueur maximum de 200 à 250 m (au lieu de 1 500 m pour une caténaire classique). Pour équiper les voies en courbe ou pour obtenir le désaxement nécessaire au bon balayage du pantographe, il est possible de cintrer le rail par pression latérale manuelle jusqu'à un rayon de 120 m. Pour les rayons inférieurs, un cintrage mécanique permet de descendre jusqu'à 45 m ou moins. Il convient d'immobiliser le point milieu du tir, par exemple par un ancrage en X à la voûte. Deux types de montages des isolateurs existent : soit un montage horizontal dont la hauteur permet de réduire la distance entre le fil de contact et le haut du tunnel à moins de 40 cm, soit un montage vertical. Une fois le profilé installé, il est procédé à la pose du fil de contact qui peut s'effectuer à l'aide d'un petit chariot conçu spécialement à cet effet.

Le tir se dilatant avec la chaleur, les montages prévoient donc, soit des dispositifs qui pincent le profilé avec une possibilité de mouvement par pivotement ou par double articulation, soit qui laissent glisser le profil par un système de suspension à bride avec du jeu vertical et latéral. Pour cette même raison, des joints de dilatation sont prévus aux extrémités des tirs, soit qui assurent une continuité axiale de la caténaire rigide avec un dispositif de conducteurs glissants entremêlés, soit composés du chevauchement latéral avec un écartement entre les deux tirs consécutifs dont les extrémités ont été relevées par un cintrage mécanique[1].

Techniques actuelles

La partie au-dessus ne sert plus à transporter l'électricité et à être en contact avec le pantographe, mais à supporter la partie conductrice proprement dite sur sa partie inférieure. Il maintient par pincement le fil de contact en cuivre. Aujourd'hui le profilé aérien de contact est un rail rigide composé d'un fil de contact en cuivre serti dans une poutre en aluminium[3].

Utilisation de la caténaire rigide dans le monde

En Suisse, la caténaire rigide est utilisée depuis les années 80 aussi bien dans les tunnels ferroviaires avec des tensions de 15 KV en remplacement de caténaires conventionnelles que sur les réseaux urbains (à Zurich surtout, à Locarno ainsi qu'à Lausanne). Toutes les installations suisses le furent par la Société Furrer+Frey.

Une caténaire rigide dans le métro de Barcelone

La caténaire rigide est très répandue dans les métros du Japon, de Corée et maintenant de Chine continentale. Après le métro de Tokyo, c'est celui d'Osaka qui en fut équipé en 1969. La première installation en Corée le fut dès 1974 pour les lignes de métro et de RER de la ville et de la banlieue de Séoul. Des centaines de kilomètres de voies en souterrain ont été ainsi équipées sur les lignes de métro ou de banlieue parmi les plus fréquentées du monde.

Ce système est très utilisé en Espagne, en particulier pour le métro de Madrid dont la nouvelle ligne 9[4] La TMB a entrepris en 2002 d'uniformiser le système de captation de courant du métro de Barcelone avec la caténaire rigide[5]. Les nouvelles lignes dont la 9[6] en sont équipés, tout comme une partie du métro de Bilbao[7]. La caténaire rigide est également utilisée en Espagne pour les trains dans les tunnels. En Italie, la ligne C du métro de Rome utilise également la caténaire rigide[8].

Le métro de Panama utilise une caténaire rigide sur la totalité de la ligne 1 alors que six de ses stations sur quatorze sont aériennes[9].

Utilisation de la caténaire rigide en France

Les réseaux dotés de caténaire rigide

Caténaire rigide sur le RER C.

La SNCF fait usage de la caténaire rigide sur la partie centrale de la ligne du RER C depuis 1991. Ce fut longtemps la seule utilisation en France.

Le profilé aérien de contact est aussi utilisé sous 25kV sur la ligne du Haut-Bugey entre Bourg-en-Bresse et Bellegarde, au niveau des tunnels de Bolozon, ainsi que sur la Ligne de Lyon-Perrache à Genève dans le Tunnel du Crêt d'Eau[10].

La RTM a installé un profil aérien de contact à la sortie souterraine du tunnel de Noailles sur la ligne de tramway T1, dans la station terminus du même nom.

Les nouvelles lignes de métro du Grand Paris Express seront pour partie équipées de caténaires rigides. Les premiers contrats sont signés dont celui de la ligne 15 Sud - secteur Est[11].

Les expérimentations récentes

La RATP teste ce système à Paris sur deux courtes sections de voies. Sur une centaine de mètres en tunnel à la sortie de Nation (voie 1, direction Boissy / Chessy) avec une pose très rigide, puis sur la longueur du quai à La Défense (voie 2, direction St-Germain / Cergy / Poissy) avec une suspension plus élastique. Les deux sections d’essai ont été choisies à des endroits où il existe une voie d’évitement, pour ne pas devoir interrompre l’exploitation en cas de souci. À la sortie de Nation, on peut ainsi rester sous caténaire « classique » en circulant par la voie Z (garage central en tunnel) et à La Défense, en utilisant la voie B (centrale) de l’autre côté du quai. Le but de ce test est de pouvoir arbitrer, le moment venu, entre le renouvellement des caténaires à l’identique ou leur remplacement par une caténaire rigide.

Avantages et inconvénients

Les avantages de la captation de courant par profilé aérien de contact par rapport à la caténaire conventionnelle sont[12],[13],[14],[15],[16],[17],[18] :

  • Ce système permet une réduction du gabarit des tunnels par rapport à une caténaire conventionnelle. Dans de nombreux cas, le gain en génie civil dépasse le surcoût en électrification.
  • Le montage et démontage lors des travaux d'entretiens est facile, le système n'étant pas tendu comme dans le cas d'une caténaire classique.
  • Une caténaire classique sous 1 500 V utilise des milliers de pièces différentes, la caténaire rigide réduit leur variété au moins dans un apport de 1 à 10.
  • La caténaire rigide est beaucoup plus résistante et plus durable que la caténaire souple. Elle a donc une plus longue durée de vie, 30 ans selon les estimations les plus basses.
  • Le système conserve une haute conductivité électrique et supporte des tensions élevées jusqu'à 25 KV.
  • La caténaire rigide permet de transférer l’électricité via plusieurs pantographes, réduisant ainsi un échauffement trop élevé des points de contact[19].
  • Ce système permet une circulation des trains jusqu'à 250 km/h. Il est homologué à cette vitesse par l'Organe de certification des chemins de fer allemands Eisenbahn Cert. Des essais en Autriche en 2012 permirent de respecter les normes à une vitesse de 302 km/h[12].
  • Ce système existe sous version escamotable pour les hangars d'entretien des locomotives notamment mais également de garages d'entretien des tramways.

Par rapport à un troisième rail d'alimentation électrique au sol, la caténaire rigide permet de faire passer la tension de 750 V à 1.500 V, ce qui diminue le nombre de postes redresseurs donc de sous-stations électriques. Une tension de 1 500 V est une solution plus adaptée dans le cas d'interstations longues. C'est par exemple le choix du métro de Sao Paulo pour sa modernisation[20] et ses nouvelles lignes[21]. C'est également le choix de beaucoup de métros asiatiques.

Les inconvénients par rapport à la caténaire conventionnelle sont :

  • Le poids de ce troisième rail, plus lourd que les caténaires par câbles, cause des problèmes de manutentions et de scellements onéreux dans les voûtes. Il nécessite donc des points de suspension, de support plus nombreux.
  • La section de 1 500 mm² d'équivalent cuivre au-dessous de laquelle on ne peut guère descendre, constitue un surcoût important pour les tensions élevées.
  • Il n'est guère envisageable d'installer une caténaire rigide en surface, en voie courante, car les portées, de 5 à 12 m suivant les vitesses, moindres que ceux de la caténaire classique, font que le rapprochement des poteaux ou portiques, deux à six fois plus nombreuses, serait inesthétique et financièrement inacceptable[1], même en tenant compte d'une durée de vie estimée supérieure et de l'emploi aujourd'hui généralisé de matériaux plus légers, comme l'aluminium au lieu de l'acier.

Les fournisseurs de lignes de contact rigides

En Europe, les sociétés Furrer+Frey dont l'expérience remonte au début des années 80 du XXe siècle et qui installa depuis cette date le profil aérien de contact sur 1700 km de voies[12] et Delachaux (sous la marques Pandrol[15] réunissant, entre autres sociétés, Railtech[22] et KLK[23]) dominent le marché. La Société OCS2 représente plusieurs entreprises qui proposent des caténaires rigides et escamotables[24]. La Société Alstom développe sa propre solution de caténaire rigide[25]. Il en est de même de la Société GCF dont la caténaire semble encore en cours d'homologation[14]. Les Sociétés Ineo Scle Ferroviaire et Galland développent le premier système français de rail rigide grande vitesse qui permet d’atteindre des vitesses de franchissement jusqu’à 250 km/h[26].

Notes et références

  1. Jean-Claude Héroult, « La caténaire rigide », Revue Générale des Chemins de Fer,
  2. (en) « Composite conductor rail replaces catenary in tunnels », Railway Gazette International, , p. 729-730
  3. Captage - Interaction pantographe / ligne aérienne de contact, Amiens, Etablissement Public de la Sécurité Ferroviaire, , 30 p. (lire en ligne), p. 11
  4. « Inauguración de la extensión de la línea 9 del Metro de Madrid - KLK », sur www.klk.es (consulté le )
  5. (en) Agustfn del Castillo Jimenez, « Barcelona metro changes to a rigid catenary power supply sytem over the whole network », Public Transport International -Special Edition,
  6. « Línea 9 de FMB - KLK », sur www.klk.es (consulté le )
  7. Systra, « Métro de Bilbao, lignes 1 et 2 », Systra fiches, (lire en ligne)
  8. « Metro C Di Roma - KLK », sur www.klk.es (consulté le )
  9. « Línea 1 del Metro de Panamá - KLK », sur www.klk.es (consulté le )
  10. « Túnel del CRÊT D’EAU (Francia) - KLK », sur www.klk.es (consulté le )
  11. « Grand Paris Express : le groupement Colas Rail / Alstom remporte le marché voie ferrée et caténaire de la ligne 15 Sud - secteur Est », Colas Alstom Communiqués de presse, (lire en ligne)
  12. « Furrer+Frey Lignes de contact - Le PAC », sur www.furrerfrey.ch (consulté le )
  13. « Ventajas respecto a la catenaria convencional - KLK », sur www.klk.es (consulté le )
  14. « La caténaire rigide GCF devient la norme », sur www.generalecostruzioniferroviarie.com (consulté le )
  15. « Système de caténaire rigide », sur Pandrol (consulté le )
  16. « Caténaires rigides : Trainance », sur trainance.be (consulté le )
  17. Claude Jullien, Conversion au 25 kV 50 Hz du complexe ferroviaire marseillais, Marseille, FNAUT - PACA, , 20 p. (lire en ligne), p. 10-11
  18. (en) Bassam Mansour, « Rigid catenary finds favour underground », International Railway Journal, , p. 89
  19. Robert Laplante, L’électrification du transport collectif : un pas vers l’indépendance énergétique du Québec, Montréal, Institut de recherche en économie contemporaine, , 114 p. (lire en ligne), p. 65-66
  20. Peter Ludwig Alouche, « La réduction des coûts et le financement de la Ligne 4 du Métro de São Paulo », Congrès CODATU, (lire en ligne)
  21. « ALSTOM est choisi pour une nouvelle ligne de métro à São Paulo », Alstom Presse, (lire en ligne)
  22. (en) Rigid Catenary, Gijón, Railtech-KLK, , 18 p. (lire en ligne)
  23. « Empresa - KLK », sur www.klk.es (consulté le )
  24. « Caténaires rigides et escamotables - OCS2 », sur www.ocs2.com (consulté le )
  25. (en) « EPD Search - The International EPD® System », sur www.environdec.com (consulté le )
  26. « Galland », sur www.galland-sas.com (consulté le )

Liens externes

Déroulage du fil de contact de la caténaire rigide du tunnel de Racouze (Ain)

Un système de caténaire rigide rétractable (Electren)

La caténaire rigide du métro de Panama (Railtech KLK).

Articles connexes

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