Rosemonde Gérard

Rosemonde Gérard, née Louise-Rose-Étiennette Gérard le à Paris où elle est morte le , est une poétesse et comédienne française[1].

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Rosemonde Gérard
Portrait par Ernest Hébert en 1901.
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom de naissance
Louise-Rose-Étiennette Gérard
Nationalité
Activités
Père
Louis Maurice Fortuné (d)
Conjoint
Enfants
Autres informations
Distinctions
Signature

Biographie

Petite-fille du comte maréchal Étienne Maurice Gérard, héros de Wagram, et de Louise-Rose-Aimée de Timbrune-Thiembrone de Valence, dite Rosemonde, elle adopte le surnom de sa grand-mère pour jouer et écrire. Elle a eu pour parrain le poète Leconte de Lisle. Son père, le comte Gérard, meurt jeune et Alexandre Dumas fils devient son tuteur.

Dodette, de son surnom familier, s'installe avec sa mère au 107 boulevard Malesherbes à Paris.

Rosemonde Gérard signe de son vrai nom Les Pipeaux, parus en 1889.

Le , elle épouse Edmond Rostand à Paris en l'église Saint-Augustin, avec le compositeur Jules Massenet comme témoin. La même année, elle reçoit le prix Archon-Despérouses (qu'elle recevra à nouveau en 1926)[2].

Le jeune ménage vient tout d'abord habiter au 107 boulevard Malesherbes[3] et s'installe, peu après, au 2 rue Fortuny où naissent leurs fils Maurice Rostand en 1891, puis Jean Rostand en 1894. En 1897, les Rostand achètent, au 29 rue Alphonse-de-Neuville, un petit hôtel qu'ils abandonnent en 1900 et vendent ensuite pour s'établir dans le sud-ouest de la France à Cambo-les-Bains, dans la luxueuse Villa Arnaga.

Le , soir de la répétition générale de Cyrano de Bergerac, la créatrice du rôle de Roxane, Maria Legault, est absente pour la répétition « des couturières »[Note 1],[4] ; Rosemonde est alors sollicitée par Coquelin pour tenir le rôle durant toute la répétition[5]. Plus que comédienne, elle a surtout été poète. Elle a rarement joué la comédie, hormis une fois dans le rôle de Roxane de Cyrano de Bergerac, avec Sarah Bernhardt lui donnant la réplique en « Cyrano ».

Lorsque Rostand la quitte, en 1915, pour l'actrice Mary Marquet, elle entame une liaison avec « son Beethoven », le compositeur Tiarko Richepin, de 18 ans son cadet[6].

En , elle est nommée chevalier de la Légion d'honneur[7]. Elle a été membre du jury du Prix Fémina.

Rosemonde Gérard meurt le à son domicile, 17 chaussée de la Muette, dans le 16e arrondissement de Paris[8]. Elle est inhumée au cimetière de Passy à Paris[9] (dixième division), en compagnie de son fils Maurice Rostand.

Œuvre

La Robe à ramage, portrait de Rosemonde Gérard par Eugène Pascau (musée d'Orsay).
Chacune des pensées d'Edmond Rostand avait une rime, chacun de ses regards un reflet,
chacune de ses actions un symbole. (Rosemonde)
C'est Elle, mot pour moi toujours en italique,
Elle, avec sa dolente inflexion de cou,
Ses longs cils relevés et ses cheveux d'or flou
Et ses yeux étonnés de poupée angélique. (Edmond Rostand, son époux)

À côté des Musardises, et pour les mieux comprendre, il faut placer Les Pipeaux, publiés un an plus tôt (1889). Ce sont les accents mélangés de deux jeunes poètes sentimentaux, qui sont un peu précieux l'un et l'autre et qui « raffinent » sur le double sentiment de la nature et de l'amour, avec une technique aussi savante chez l'un que chez l'autre, car Rosemonde Gérard écrit avec autant de virtuosité que son mari les poèmes à forme fixe, sonnets, triolets et rondeaux.

Elle est avec bonheur l'âme d'une jeunesse chantante, donnant confiance à Edmond Rostand et rivalisant avec lui dans le dessein de l'encourager. Pour se convaincre de son rôle bénéfique, il suffit d'ouvrir ces légers Pipeaux et de les feuilleter quelques instants. La nature y est tout entière présente :

Voici des jardins, des animaux, et puis voici des insectes.

Anna de Noailles n'a pas été la première à célébrer les jardins potagers :

Dans une plate-bande à bordure d'oseille,
Majestueusement poussaient les artichauts ;
Sur le mur, au-dessus d'un buisson de groseille ;
Pendaient les chasselas poudrerisés de chaux.
Bedonnant doucement sous la cloche de verre,
Les melons presque mûrs avaient de beaux tons roux,
Des mouches bourdonnaient aux portes de la serre
Et des papillons bleus voltigeaient sur les choux.

Mais ce sont aussi des jardins d'agrément : lis et roses, sensations d'aube ou de crépuscule, de soirée d'été ou de clair de lune, japonaiserie délicate et minutieuse, croquis de village, promenade sur l'eau, impressions de plage, bonheur d'une jeune fille en vacances, et ces lézards, ces cigales, ces grenouilles, toute cette faune d'album peinte par petites touches, que l'on retrouvera dans Chantecler.

Ensuite, ce sont des « ritournelles », comme les appelle le poète, c'est-à-dire de petits poèmes toujours souples et subtils qui peuvent être chantés et puis des sonnets, des rondes, des poèmes d'enfance, le marchand de sable, Noël, les images d'Épinal, les vieux meubles, bahuts, bijoux anciens, fauteuils branlants, éventails fanés, chaise à porteurs, clavecin, pastels pâlis, bureaux à secrets, poupées, armoires pleines de « souvenirs que personne ne rappelle ».

Enfin, c'est L'Éternelle chanson, celle de l'amour, naturellement :

Car vois-tu, chaque jour je t'aime davantage,
Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain.

Qui fait écho au poème Les vieux, en 1903 dans l'interprétation de Sarah Bernhardt) :

Et comme chaque jour je t'aime davantage,
Aujourd'hui plus qu'hier et bien moins que demain,
Qu'importeront alors les rides du visage ?
Mon amour se fera plus grave - plus serein.
Songe que tous les jours des souvenirs s'entassent,
Mes souvenirs à moi seront aussi les tiens.
Ces communs souvenirs toujours plus nous enlacent
Et sans cesse entre nous tissent d'autres liens.

Ou encore :

Ce n'est pas la faute à nous deux,
Si nous nous aimons de la sorte...
Pardon de toutes les années
Où je ne te connaissais pas...
Malgré nous.

Tous ces vers exquis ont chanté à toutes les oreilles des gens de 1900. Chanté, car beaucoup ont été mis en musique, par Emmanuel Chabrier notamment, et tout de suite ils ont eu la popularité qu'ils méritaient.

Admirable destin de ce jeune poète qui chante en même temps que celle qu'il aime et qui l'aime ; c'est une chose inédite dans la littérature française. Certes Mme de Lamartine a été une femme intelligente et lettrée, mais elle n'a rien écrit en vers ; Rosemonde Gérard, si elle n'avait pas épousé Edmond Rostand, eût été connue et célèbre pour sa valeur personnelle ; la gloire de son mari a éclipsé sa propre réputation[10].

En a-t-elle souffert en son amour propre d'auteur ? Elle ne l'a point dit. Sans ambition personnelle, elle a semblé toute dévouée à l'art et à la gloire de son mari.

Savinien de Cyrano, qui ne fut pas de Bergerac, Rosemonde Gérard en avait trouvé la trace en Seine-et-Oise, au château de Mauvières où il vécut vingt ans. Elle en avait raconté à son mari...

Ce n'est qu'en pardonnant qu'on ne se trompe pas (Rosemonde Gérard et Maurice Rostand, extrait d’Un bon petit diable)

Publications

Rosemonde Gérard vers 1900.
  • Les Pipeaux, poèmes, 1889
  • Les Vieux, interprété par Sarah Bernhard en 1903
  • « A mon fils », L'Illustration, , p. 5-9 (lire en ligne).
  • « Les jardins », L'Illustration, , p. 7-10 (lire en ligne).
  • Un bon petit diable avec Maurice Rostand, féerie en 3 actes en vers, d'après la comtesse de Ségur, Gymnase,
  • « Le voyage d'une coccinelle », L'Illustration, no 3669, (lire en ligne).
  • « L'impossible amitié », L'Illustration, no 3672, (lire en ligne).
  • « Les voyages », L'Illustration, no 3694, (lire en ligne).
  • La Marchande d'allumettes, co-auteur Maurice Rostand, livret d'opéra-comique, 1914, musique Tiarko Richepin, Paris. Opéra-Comique, lire en ligne sur Gallica. Un film du même nom, réalisé par Jean Renoir fut saisi après quelques jours d'exploitation en , à la requête de Rosemonde Gérard, auteur d'un opéra-comique adapté du conte d'Andersen et qu'elle estimait plagié.
  • La Robe d'un soir, pièce en 4 actes, en vers, 1925, musique de scène de Claude Corbreuse, joué au Théâtre de l'Odéon, 1924-1925[11]
  • La Vie amoureuse de Madame de Genlis, 1926
  • L'Arc-en-ciel, poèmes, 1926
  • Mes souvenirs : Cyrano de Bergerac, avec un dessin d'Edmond Rostand, 1927
  • Le Féminisme, avec son fils Maurice Rostand, conférence, 1930
  • La Forêt enchantée, pièce de théâtre par Rosemonde Gérard et Maurice Rostand, 1931
  • Les Papillotes, pièce en un acte en vers, 1931, jouée au Théâtre de l'Odéon en 1931[12]
  • Féeries, 1933
  • Les Masques de l'amour, théâtre en vers, 1928
  • Les Papillotes, théâtre en vers, 1928
  • À quoi rêvent les vieilles filles, théâtre en vers, 1928
  • La Tour Saint-Jacques, pièce en un acte, en vers, représentée pour la première fois sur la scène de la Comédie-Française le
  • Edmond Rostand, 1935
  • Rien que des chansons, 1939
  • Les Muses françaises, poèmes, 1943. De Marie de France à Rosemonde Gérard, qui fait précéder les poèmes de ses consœurs par leur portrait en vers
  • Méditations poétiques et harmonies poétiques de Victor Hugo, sonnet, préface de Rosemonde Gérard, 1930
  • Histoire d'amour et Lettre de rupture, deux chansons de Rosemonde Gérard et Tiarko Richepin enregistrée par Jeanne Aubert en 1942
  • Lettres à sa fiancée, Edmond Rostand, Editions Nicolas Malais, 2009, lettres d'amour de Rostand à sa future femme
  • Vous êtes mon espoir et ma désespérance Poème pour Mélodies d'Ivan Devriès (paroles de Gérald Devriès, Rosemonde Gérard, Paul Éluard, Guillaume Apollinaire) Lire en ligne

Bibliographie

Correspondance adressée par Edmond Rostand à Rosemonde Gérard lire en ligne sur Gallica

En 2006, Laurence Catinot-Crost publie chez Empreinte-Séguier une biographie "Rosemonde Gérard, la fée d'Edmond Rostand".

En 2020, Thomas Sertillanges publie "Edmond Rostand, les couleurs du panache" (Atlantica), la première biographie illustrée du poète, 580 pages et 500 illustrations dans lequel plusieurs chapitres sont consacrés à l'épouse du poète.

Hommage

La rose « Madame Edmond Rostand[13] » a été créée en 1912 par Joseph Pernet-Ducher.

Notes et références

Notes

  1. Première répétition intégrale en costumes, elle précède immédiatement la « générale ».

Références

  1. « Lorsque tu seras vieux... Gérard, Rosemonde », sur Bibliothèques spécialisées de la Ville de Paris (consulté le )
  2. http://www.academie-francaise.fr/prix-archon-desperouses.
  3. Poètes et écrivains du XVIIe arrondissement de Paris, Jean Rimeize, Presses de Valmy, 2002, (ISBN 9782910733919)
  4. Pierre Espil, Edmond Rostand, une vie : Une famille extraordinaire, Les éditions du Mondarrain, , 320 p. (ISBN 978-2-402-14213-7, lire en ligne), chap. VII (« Le Miracle »)
  5. Jean Lorrain, Mes expositions universelles : 1889-1900, H. Champion, coll. « Textes de littérature moderne et contemporaine » (no 57), , 435 p. (ISBN 978-2-7453-0654-8, lire en ligne).
  6. Philippe Séguy, Les Rostand, Paris, Pygmalion, , 312 p., 24 cm (ISBN 978-2-75641-786-8, OCLC 932110207, lire en ligne).
  7. Dossier sur la base Léonore
  8. Archives de Paris 16e, acte de décès no 1332, année 1953 (vue 14/20).
  9. Jacques Hillairet, Dictionnaire historique des rues de Paris, Les Éditions de minuit, septième édition, 1963, t. 2 L-Z »), « Rue des Réservoirs », p. 336-337.
  10. Edmond Rostand Par Jacques Lorcey Publié par Séguier, 2004 (ISBN 2-84049-385-3), 9782840493853
  11. La Petite Illustration - théâtre - n°148 du 26 septembre 1925
  12. Le texte de la pièce et un commentaire sont publiés dans La Petite Illustration - théâtre- du 26 décembre 1931
  13. La rose Madame Edmond Rostand

Bibliographie

  • Laurence Catinot-Crost, Rosemonde Gérard, la fée d'Edmond Rostand, Paris, Séguier, 2006 (ISBN 2-84049-458-2), (ISBN 978-2-84049-458-4).
  • Marcel Migeo, Les Rostand, Paris, Stock, 1973.

Liens externes

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