Thierry Casasnovas
Thierry Casasnovas, né le à Perpignan (Pyrénées-Orientales), est un entrepreneur et vidéaste web français controversé.
Genre | Conseils en alimentation et en hygiène de vie |
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Naissance |
Perpignan (Pyrénées-Orientales), France |
Nationalité | Français |
Vidéos populaires |
Soignez définitivement l'arthrose en 30 min Un jus pour « maigrir », c'est un jus pour éliminer Aloe vera, la plante « miraculeuse » |
Nombre d'abonnés | 583 000 (août 2022) |
Autres activités | Vente au détail |
Site internet | regenere.org |
Chaîne(s) | Regenere / Thierry Casasnovas |
Sans formation médicale, il donne des conseils en matière de santé et nutrition sur le web, se référant à la naturopathie et à l'hygiénisme. Sa doctrine est que l'ensemble des pathologies humaines découlent de l'alimentation et des conditions de vie. Il promeut la pratique du crudivorisme et du jeûne. Certaines pratiques qu'il conseille sont considérées comme dénuées de fondement scientifique, voire dangereuses pour la santé par des diététiciens et médecins.
Il est l'auteur de plus de mille vidéos diffusées depuis sur YouTube totalisant des dizaines de millions de vues. Il organise également des stages via l'association Régénère, dont il est le fondateur, qui commercialise en ligne divers objets et produits, en particulier des extracteurs de jus.
Souvent présenté comme chef de file du crudivorisme dans les médias, il est accusé d'être un gourou se rémunérant grâce à des conseils inefficaces et dangereux qui laissent entendre ou prétendre que la guérison de maladies graves peut découler de ce qu'il propose. L'Union nationale des associations de défense des familles et de l'individu victimes de sectes (Unadfi) dénonce des pratiques relevant du charlatanisme ainsi qu'une emprise sectaire sur son public.
Il est suivi depuis par la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) qui indique que des centaines de signalements lui sont parvenus. La Miviludes lui reproche d'encourager l'arrêt des traitements médicaux en cas de maladies. À la suite d'un signalement de cet organisme, une enquête à son sujet est ouverte à l'été 2020 par le parquet de Paris pour mise en danger de la vie d'autrui et en pour « abus de faiblesse, exercice illégal de la médecine et pratique commerciale trompeuse ».
Son discours sur les questions de santé va souvent à l'encontre des connaissances scientifiques et du consensus médical. Pendant la pandémie de Covid-19, il participe à la désinformation à propos de cette maladie.
Biographie
Thierry Casasnovas est né à Perpignan[1].
Activités publiques et popularité
Thierry Casasnovas affirme qu'il a été gravement malade entre 2001 et 2007, souffrant d'hépatite C, de tuberculose avancée, de pancréatite aiguë [Note 1],[2] ,[3], d'infection à la salmonelle, de dépression, et qu'il a connu plusieurs arrêts cardiaques. Il aurait vu dans l'alimentation crue « sa dernière chance »[4].
Le , il fonde sa chaîne YouTube[5].
Le , il fonde l'association Régénère, plate-forme d'organisation de stages et formations[6].
Son audience se développe rapidement. En , Rue89 qualifie Thierry Casasnovas de « star du « manger cru » sur YouTube malgré son discours douteux »[7], et pour 20 Minutes, il est devenu en quelques années « le chef de file du crudivorisme, cette tendance à ne manger que des aliments crus pour recouvrer ou rester en bonne santé, selon lui »[4]. En , Europe 1 le qualifie de « puissant youtubeur complotiste », et estime que sa chaîne YouTube est « très suivie et influente », avec 526 000 abonnés[8]. France Info le qualifie de « pape du crudivorisme[9] » et L'Express estime qu'il est devenu « incontournable dans le monde des médecines et régimes alimentaires alternatifs[10] »[Note 2].
Son discours opposé à la médecine conventionnelle plaît à une partie de l'extrême droite[11]. À partir de 2014, l'association Égalité et Réconciliation, fondée notamment par Alain Soral, relaie et invite Thierry Casasnovas[12]. Thierry Casasnovas anime des conférences chez cette association à Roanne[13]. Il se rapproche aussi de la mouvance d'extrême droite conspirationniste en invitant Dieudonné lors d'un festival sur le crudivorisme en 2019[14],[11],[15]. L'année suivante, Dieudonné lui remet une « quenelle d'or » dans la catégorie « lanceurs d'alerte », lors du « Bal des quenelles » qu'il organise à son domicile[14],[16],[17]. Par la suite Thierry Casasnovas s’éloigne progressivement des conseils centrés sur l’alimentation, et du « dogme du cru », pour transmettre un message holistique, ce qui pour le collectif l’Extracteur ne serait qu’une façade pour lisser son image car il adresserait toujours depuis un message anti-médecine, ce qui entrainerait un refus des soins de ses adeptes[12]. Selon la sociologue et nutritionniste Emmanuelle Lefranc, il adopte alors une posture de « penseur critique de nos modes de vie » et un discours eschatologique[12]. Sa popularité sur YouTube explose, et il devient un personnage public, en élargissant son audience auprès de personnes doutant des autorités institutionnelles, politiques, scientifiques et médicales[12].
Il est élu conseiller municipal aux élections municipales de 2020 à Taulis. Il obtient 24 voix (soit 71 % des exprimés) et est élu dès le premier tour, étant donné qu'il y a autant de candidats que de sièges à pourvoir[18],[19].
Remise en question de sa guérison
La chaîne YouTube « l'Extracteur » a remis en cause la biographie avancée par Thierry Casasnovas. En effet, en étudiant les 1 500 vidéos publiées par Thierry Casasnovas sur YouTube, ainsi que les interventions qu'il a réalisé sur différents forums, l'Extracteur a découvert de nombreuses incohérences dans le discours de Thierry Casasnovas[1].
Dans un article de Society de , des proches lui reprochent de ne pas appliquer ses propres conseils, comme le fait qu’il mange de la viande, boit de l’alcool et fume, et aussi d’avoir une attitude consumériste[12]. Lors d'un entretien accordé au journal et après qu'on lui a fait remarquer l’incohérence et les contradictions dans son discours, il répond « J’ai eu tendance à m’inventer une vie pour mieux me faire accepter des groupes », et évoque également des pertes de mémoires dues à un accident[12].
Formation
Thierry Casasnovas n’a pas de formation scientifique[4], il fonde ses connaissances sur Internet, les livres qu’il a lus, et ses propres expériences personnelles[20]. Selon Rue89, Thierry Casasnovas « aime lancer pêle-mêle de nombreux termes techniques qui donnent l’impression d’un très grand savoir scientifique »[21].
Thierry Casasnovas est adepte de l'hygiénisme[17]. Rue89 note qu’il est possible de voir dans une vidéo de Thierry Casasnovas que sa bibliothèque comporte des livres ésotériques et des publications proches de la théorie hygiéniste d’Herbert M. Shelton[21].
En 2006, il séjourne trois semaines à l’Institut Hippocrate en Floride, centre dédié à « l’alimentation vivante » et à la « régénération »[12]. Pour Pascale Duval porte-parole de l’Unadfi, ce parcours est lié à ce qu’il est devenu par la suite : « On retrouve très souvent l’Institut Hippocrate dans le parcours des gourous New Age. Il n’est pas devenu un gourou pour rien, mais parce qu’il en a fréquenté d’autres »[12].
Activité commerciale et associative
Vente des extracteurs de jus
En , Thierry Casasnovas affirme que l'association Régénère à but non lucratif ne perçoit sur l'activité commerciale de vente d'extracteurs de jus qu'« une petite commission » qui permet à l'association de vivre[7],[Note 3].
Fin , Nicolas Wailer, directeur de la société Groupe Altra et ancien partenaire de l'association Régénère avec laquelle il s'est brouillé, dit avoir été chargé de l'aspect commercial de l'activité de Thierry Casasnovas qui ne souhaitait pas « apparaître comme quelqu’un dans le commerce »[7], et indique que les produits en vente rapporteraient plusieurs centaines de milliers d'euros[7]. Il fournit à Rue89 des documents montrant que les ventes des produits, notamment les extracteurs de jus, ont rapporté « plus de 210 000 euros de commissions à l'association pour les seuls cinq mois de février à mai 2014 » et que, pour le mois de , 893 extracteurs ont été vendus, rapportant une commission à l'association de « 40 000 euros » pour ce seul mois[7]. D'après Rue89, un extracteur de jus vendu sur le site de Thierry Casasnovas coûte environ 300 euros[21], pour un coût d'achat en Corée d'environ 150 euros, avec une commission pour l'association « d’au moins 36 euros nets »[7].
Thierry Casasnovas ne conteste pas les informations données par Altra, mais déclare : « il n’y a pas d’histoire d’argent sinon celle d’une association à but non lucratif employant (directement en salariat ou indirectement sous forme de contrats externes) douze personnes et donnant gratuitement tout. Que des marchands se fassent des marges colossales pour s’enrichir personnellement ne semble poser de problème à personne mais qu’une association gagne de l’argent sous forme de commissions sur des ventes tout en utilisant cet argent pour offrir gratuitement semble être un parjure… »[7]. La société Groupe Altra publie alors un enregistrement audio réalisé par Thierry Casasnovas en , où il s'adresse à l'un de ses partenaires commerciaux et présente des projets de ventes d'extracteurs de jus et de bar à jus – propos jugés par L'Obs très différents de sa déclaration[7].
Vente de formations
En 2019, il lance six formations, notamment sur l'hygiénisme et l'iridologie, pour un coût minimum de 200 euros chacune. Le chiffre d'affaires cette année-là est de 1,8 million d'euros et il touche 61 251 euros de salaire via sa société Actinidia, avec laquelle il a racheté le nom de l'association Régènère. Actinidia a démarré en 2015, et, selon une membre de Régénère, Casasnovas a commencé par un salaire de 1 000 euros par mois, avec un objectif de se rémunérer essentiellement sur les dividendes. Casasnovas a refusé de livrer ses comptes aux journalistes, mais, selon lui, sa rémunération tourne autour de 2 500 euros par mois pour un chiffre d'affaires annuel de 150 000 euros, excepté l'année exceptionnelle de 2019[12].
Un article de BFM TV de 2020 indique que Thierry Casasnovas propose des formations thématiques au prix de 300 euros par participant[24]. En 2020, Le Journal du dimanche affirme que son chiffre d'affaires est constitué pour l'essentiel par les formations. La session « Cure de Jouvence » ou « Vieillir en santé » vaut 300 euros et Thierry Casasnovas déclare en vendre plusieurs centaines par an. Le coût des stages peut monter jusqu'à 700 euros pour six jours, hors hébergement. Thierry Casasnovas affirme qu'une quinzaine de personnes vivent de cette activité, donc quatre salariés[13].
Polémiques et accusations
Conseils de nutrition et santé
En 2014, pour Thierry Casasnovas, « l’alimentation moderne est la source des maladies »[25]. Selon Rue89, Thierry Casasnovas estime que la totalité des pathologies humaines découlent de l'alimentation et des conditions de vie, que ce soit le cancer ou la sclérose en plaques en passant par l'obésité et la dépression[21]. Pour lui, les maladies sont le symptôme de la présence en surnombre de « toxines » et produits acides dans le corps. Il considère que l'espèce humaine mange actuellement tout au long de sa vie des aliments qui ne sont pas faits pour elle, remettant par exemple en cause le gluten et le lait. Il déclare que manger principalement des fruits et des légumes, majoritairement crus, est « ce qui a été prévu pour nous », et que cela permet de détoxifier et désacidifier le corps[26]. Il conseille en outre de prendre du temps pour se reposer, et d'arrêter de se « surstimuler »[21],[27].
Selon Rue89, les conseils de Thierry Casasnovas séduisent de très nombreux internautes. Dans les commentaires écrits sous ses vidéos, dont certaines ont plus de 100 000 vues, de nombreuses personnes témoignent se sentir mieux grâce à ses conseils. Pour expliquer pourquoi ceux qui suivent les conseils de Thierry Casasnovas se sentent mieux, Rue89 cite Laurent Chevalier, nutritionniste au CHRU de Montpellier, qui déclare : Thierry Casasnovas « dit qu'il faut se reposer plus, diminuer le café, le tabac et l'alcool, manger plus de fruits et légumes et moins de produits transformés. C'est du bon sens et en suivant ces conseils, on se sent forcément bien au bout de quelques jours, surtout si jusque-là, on mangeait mal. Mais, à long terme, il faut un équilibre avec notamment certains féculents, sinon on risque d'avoir des excès, par exemple de certains sucres difficiles à digérer, et bien sûr des carences ». Rue89 affirme aussi qu'il est possible, « en cherchant bien », de trouver des témoignages de personnes qui ont eu des problèmes de santé ou des problèmes familiaux après avoir suivi les conseils de Thierry Casasnovas. Rue89 cite Elodie, une blogueuse qui estime de manière générale que de nombreuses personnes quittent les mouvements alternatifs « en silence », car elles sont devenues des « pestiférées » « honteuses » après avoir connu l'échec avec les pratiques alimentaires concernées[21].
Rue89 déclare que les préceptes de Thierry Casasnovas sont « considérés comme fumeux par les nombreux spécialistes de la nutrition » que le journal a contactés[21]. Commentant les préceptes de Thierry Casasnovas, Rue89 affirme que « la cuisson n’est pas une ennemie » avant de rapporter les propos de Jean-Paul Blanc, diététicien-nutritionniste. Ce dernier estime que si les crudités présentent de « véritables bénéfices », le gain en fibre ayant selon lui un « impact positif » sur le transit intestinal, l'« énergie » et la « santé en général », cependant « la cuisson à la vapeur ou à l’eau rend aussi les aliments plus faciles à digérer » et que si la cuisson des aliments a l'inconvénient de faire disparaître une partie des vitamines et nutriments, il est possible d'y remédier par des températures de cuisson basses ou en consommant l'eau de cuisson en bouillon[21].
D'après 20 Minutes, la mouvance crudivore à laquelle appartient Thierry Casasnovas s'appuie sur le fait que lorsqu'on chauffe les aliments, à partir d'une certaine température, « les minéraux, vitamines ou enzymes nécessaires à l’organisme peuvent être altérés »[4].
François Morel, chirurgien cancérologue à Rouen, affirme : « Dans ses paroles, il y a toujours un fond scientifique qu'il pervertit totalement pour le faire coller à son idéologie »[28].
Le magazine télévisé Temps présent de porte sur l'« obsession de manger sain[29] » et mentionne Thierry Casasnovas. La rédaction affirme qu'« après plusieurs échanges » Thierry Casasnovas a annulé leur « rendez-vous ». Le numéro diffusé vise spécifiquement, entre autres thématiques connexes, les modalités problématiques susceptibles de découler de certaines pratiques alimentaires vécues sur un mode « obsessionnel », notamment les dangers d’orthorexie[29].
L'UNADFI considère que Thierry Casasnovas est un charlatan qui invite ses abonnés à manger cru pour traiter le diabète ou la dépression[30]. Selon Europe 1, Thierry Casasnovas laisse « entendre que les cancers peuvent être soignés par des jus de fruits »[8].
Dans les stages qu’il organise, il encourage la pratique du « sungazing », le fait de regarder le soleil tous les matins plusieurs secondes à ses adeptes. Thierry Casasnovas aurait affirmé que ça pourrait améliorer la vue, et que « des gens étaient passés de 7 sur 10, à 10 sur 10 grâce à ça »[12].
D'après Jean-Michel Lecerf, chef du service nutrition de l'Institut Pasteur de Lille, cité par Rue89, l'acidité dont parle Thierry Casasnovas fait référence à l'équilibre acido-basique du sang, qui est un élément effectivement très important. Mais selon Jean-Michel Lecerf, seul le cas extrême d'une alimentation essentiellement carnée et sans aucun fruit et légume peut conduire à un léger déséquilibre, tandis que manger « uniquement des fruits et légumes, c'est n'importe quoi, c'est de l'antinutrition »[21].
Autour du diabète
Le docteur en physiologie et spécialiste du diabète Filipe de Vadder dénonce des propos erronés et dangereux de Thierry Casasnovas au sujet de cette maladie[31].
D'après Futura Science, un adolescent a dû être hospitalisé après avoir suivi les conseils de Thierry Casasnovas[32].
Rejet de la médecine conventionnelle
Il accuse de nombreux traitements et examens de la médecine d’être nocifs pour la santé ou inefficaces, comme la plupart des médicaments, les mammographies, qu'il accuse de causer le cancer du sein, et la chimiothérapie[11],[26]. De plus, il s'oppose aux vaccinations[14], et, malgré les preuves scientifiques, il affirme que le virus de l'immunodéficience humaine (VIH), responsable du syndrome d'immunodéficience acquise (SIDA), n'existe pas[17]. D'après le psychosociologue Sylvain Delouvée, l'approche de Thierry Casasnovas consiste à faire croire à des personnes en situation de souffrance et de fragilité que la science et la médecine classique traditionnelle constituent un système qui contribue à les rendre malades[33].
Pandémie de Covid-19
Pendant la pandémie de Covid-19, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) s'inquiète du « nouveau positionnement », « plus politique », de Thierry Casasnovas, qui amène « une vision du monde qui fait système pour certains ». La Miviludes estime qu'il s'agit de théories complotistes, et que celles-ci, d'une manière générale, font de l'audience et peuvent être en soi très rémunératrices[13].
En , le médecin Cyril Vidal, président de l'association FakeMed, un collectif de professionnels de santé et de citoyens mobilisés pour contrer les infox dans le domaine de la santé[34], dénonce, dans le magazine L'Express, la dangerosité des recommandations publiques faites par Thierry Casasnovas, à propos de la pandémie de Covid-19 en cours de développement dans le monde. Sur sa chaîne YouTube, le vidéaste web français donne divers conseils pour lutter contre le virus SARS-CoV-2. Selon Cyril Vidal, Thierry Casasnovas « explique qu'il faut jeûner et manger cru pour se protéger du virus, tout comme se rapprocher des gens plutôt que de limiter les contacts physiques »[35]. Le vidéaste suggère dans une vidéo publiée le et supprimée plus tard qu'il est facile de soigner cette maladie : « Si j’étais ministre de la santé, moi, ce serait réglé rapido : bain froid et jeûne pour tout le monde, un petit peu de jus de carotte et vas-y que je t’envoie ! »[36].
En , il est cité dans un article du Parisien intitulé « Coronavirus : l’épidémie, business béni des charlatans en tout genre ». Selon Le Parisien, Casasnovas conseille « de presser toutes sortes de choux, avec un extracteur de jus, et d'avaler cette décoction le matin pour « éliminer les toxines respiratoires » »[37].
Mediapart relève qu'à l'occasion de cette pandémie il offre aussi une caisse de résonance aux théories conspirationnistes sur cette maladie, en particulier lorsqu'il publie une vidéo commune de deux heures avec Jean-Jacques Crèvecœur, dans laquelle il explique vouloir « révéler ce qui est caché » et « proposer une autre histoire » sur cette pandémie. Jean-Jacques Crèvecœur, conférencier conspirationniste belge, y donne libre cours à ses théories sur un grand complot de Bill Gates, sur la 5G ou encore sur « le gel nanotechnologique qui sera dans le vaccin et qui permettra de nous pucer »[36],[30]. En juin, Dieudonné remet à Thierry Casasnovas une quenelle d'or dans la catégorie Lanceurs d'alerte[36].
Une étude de sciences comportementales de cherchant à comprendre les mécanismes cognitifs des individus ayant conduit à soutenir les affirmations du professeur Didier Raoult durant la pandémie souligne notamment le rôle joué par les promoteurs de la pensée intuitive et des pseudomédecines, parmi lesquels figurent ceux que l'étude qualifie de « gourous des pseudomédecines », citant Thierry Casasnovas en exemple[38].
En , dans un article de L'Express intitulé « pourquoi il faut prendre au sérieux les charlatans », il est présenté comme faisant partie des guérisseurs « niant l'épidémie » et qui « assurent qu'il suffirait de "booster" son système immunitaire avec des aliments naturels »[39]. Par ailleurs, L'Express affirme que, pendant la crise sanitaire lié à la Covid-19, il profère des « diatribes complotistes antimasque, antivaccin, antistratégie gouvernementale »[10],[40]. Selon France Info, Thierry Casasnovas propose « dans une vidéo une recette pour améliorer son immunité et lutter contre la Covid-19 à base de jeûne et d’un régime crudivore »[9].
Un gourou se rémunérant sur des conseils dangereux ?
Le Soir cite Thierry Casasnovas comme faisant partie des « gourous autoproclamés » du « milieu du crudivorisme », et indique qu'il « prétend s’être guéri d’une tuberculose avancée, d’une hépatite C et d’une pancréatite aiguë grâce à une alimentation vivante »[3]. Cette déclaration de Thierry Casasnovas est également relevée par L'Expansion, qui ajoute que Thierry Casasnovas conseille à ses abonnés de l'imiter pour guérir de leur « cancer […] diabète ou […] dépression ». L'Expansion conclut : « des conseils bidons, une importante communauté, de l'argent : il n'en fallait pas plus pour alerter la Miviludes, la mission interministérielle chargée de repérer et de lutter contre les dérives sectaires »[41],[26]. Rue89 relève de nombreux conseils et préceptes de Thierry Casasnovas, notamment ceux concernant le cancer : selon Rue89, Thierry Casasnovas conseille de renoncer à la chimiothérapie, qui « ajoute de la toxicité à la toxicité de notre corps », et il estime que le cancer n'est « rien de très grave », qu'il suffit pour l'éviter de faire des choses qui paraissent « tout bête », comme manger « des fruits et légumes parce que c’est la nourriture qui est faite pour toi »[21].
En , Rue89 publie un article sur Thierry Casasnovas, et reçoit ensuite de très nombreux messages de personnes témoignant « de la dérive d'un de leurs proches après le visionnage des vidéos de Thierry Casasnovas ». Selon Le Soir, sur son site, Thierry Casasnovas « se prémunit d’emblée contre toute attaque pour exercice illégal de la médecine avec un grand placard revendiquant la liberté d'expression et rappelant que la consultation de son site ne remplace en aucune façon une consultation médicale »[3]. BFM TV note qu'en 2020 un avertissement est présent sur la page de présentation de sa chaîne YouTube : il y indique que ses conseils ne doivent pas être mis en œuvre avant consultation d'un médecin[24].
Selon LCI, alors que la notoriété de Thierry Casasnovas augmente pendant la pandémie de Covid-19, ce dernier « arrondit les angles, supprime des vidéos ou en modifie le titre ». C'est le cas par exemple avec une vidéo intitulée « soigner tous les diabètes en 20 minutes » renommée par la suite « comprendre les diabètes ». LCI cite le collectif L'Extracteur qui accuse Thierry Casanovas en 2020 ainsi : « depuis plusieurs semaines, il modifie les titres et descriptions, ajoute du conditionnel, rappelle qu'il n'est responsable de rien et complexifie son discours afin de diluer sa responsabilité »[17].
Selon L'Express, des proches des « adeptes » de Casasnovas sonnent souvent l'alarme et leurs témoignages dessinent des « récits de rupture », où les « convertis » modifient leur alimentation, arrêtent des traitements médicaux même pour une maladie grave comme le cancer métastasé, font des sauts à trampoline pour « faire circuler la lymphe » en espérant y gagner une meilleure immunité, et n'acceptent « aucune critique constructive » sur Casasnovas[10].
Autres similitudes avec les mouvements sectaires
En , d'après Rue89, Thierry Casasnovas utilise des « méthodes clairement sectaires », notamment en misant sur la peur et « les légitimes inquiétudes alimentaires du moment autour de la viande, du gluten, des additifs et des pesticides », « pour vous convaincre d’acheter ses produits » et regarder ses vidéos[21].
Selon une ancienne participante d'un stage de naturopathie organisé par Régénère : « il y avait même comme des séances de prières, subtilement il trouvait le moyen de faire passer un message religieux. Ce n'était pas du tout l'idée du stage, ce n'était pas prévu […] J'ai pensé qu'il s'apparentait à un gourou, et que ses activités étaient sectaires »[42].
Dans le livre Management et spiritualité de Jean-Yves Duyck, Gaëlle Moal-Ulvoas, et Catherine Voynnet-Fourboul, les auteurs estiment qu'il y a deux récits qui se développent sur Thierry Casasnovas. D'un côté se trouve le récit des adeptes, qui ont changé d'alimentation et pensent que le monde irait mieux si tout le monde suivait Thierry Casasnovas. Selon les trois auteurs, ces adeptes ont un ensemble de « croyances, plus ou moins exactes », notamment que les extracteurs de jus conservent les nutriments des aliments, que les jus ne nécessitent aucune digestion, que le procédé d'extraction élimine ce qu'ils appellent la « pollution », que les jus de légumes permettent d'éliminer du corps des impuretés et prévenir les maladies, etc. Certains adeptes, d'abord débutants, deviennent des initiés, puis des experts, et enfin des « évangélistes ». De l'autre côté se trouvent les détracteurs, qui avancent que Thierry Casasnovas aurait été disciple de Raël et qu'il existerait une filiation sectaire entre eux. À la suite d'une mésentente, Thierry Casasnovas se serait détourné de Raël et aurait alors étudié les problématiques écologiques et humanistes soulevées par Pierre Rabhi. De ce dernier, Thierry Casasnovas reprendrait le concept de « révolution intérieure », qui, selon les trois auteurs, explique le succès de Casasnovas. Ce dernier explique que les maladies sont dues à l'ignorance et causées par l'individu lui-même. L'individu pourrait donc reprendre le contrôle de sa vie en connaissant les « lois » et en s'intéressant à la cause et non au symptôme. Selon ces auteurs, « ce processus de culpabilisation de ces individus en quête de sens, rend visible le rôle central de la croyance dans la diffusion, puis la réception de l'invention technique de l'extracteur de jus »[43].
Surveillance par la Miviludes
En 2014, la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes) dit suivre ses vidéos à partir d'[21]. Audrey Keysers, de la Miviludes, déclare : « Le problème, c'est qu'il va jusqu'à qualifier la chimiothérapie de mort au rat ! Il appelle à remplacer les médicaments par le crudivorisme et non en complément, là, c'est la ligne rouge. On parle alors de perte de chance »[28]. En 2014 toujours, Serge Blisko, président de la Miviludes, affirme également que Thierry Casasnovas est bien connu dans le service, et qu'ils ont reçu « des dizaines et des dizaines de messages à son propos, de gens surpris, en colère, ou parfois qui ont été abusés ». D'après Serge Blisko, la surveillance de Thierry Casasnovas a conduit à « une procédure d’interdiction de vendre par lui-même des plantes aromatiques, après un signalement au conseil national de l’Ordre des pharmaciens ». Mais Serge Blisko affirme qu'il lui serait difficile de faire interdire la publication de vidéos par Thierry Casasnovas : « C’est toute la difficulté de notre métier, il n’est pas médecin, il n’a pas d’officine ou de bureau, il ne s’autorise que de lui-même [...]. C’est un combat à armes inégales, inconsciemment aidé par ceux qui les regardent. [...] On essaye de compléter notre dossier, on n’a rien déposé aujourd’hui devant le procureur de la République parce qu’on n’a pas envie d’avoir un non lieu. »[21]. Thierry Casasnovas a selon lui « une véritable emprise mentale sur ses abonnés. Certains se sont laissés embobiner. Ils étaient fragilisés et prêts à tout pour éviter la chimiothérapie ou une chirurgie invalidante. Ils ont tenté les jus à la place. ». Serge Blisko ajoute ne pas avoir, jusqu'alors (2014), « eu connaissance de cas dramatique »[41].
En 2018, sur demande de Thierry Casasnovas, la Miviludes lui envoie un courrier pour expliquer qu'elle estime que ses méthodes « présentent des risques pour la santé des adeptes », mais qu'elle « ne fait pas état de dérives avérées » le concernant[24].
En 2019, selon la Miviludes, Thierry Casasnovas a fait l'objet de plus de quatre cents signalements depuis 2016, dont plus de 250 en 2017, émanant de citoyens inquiets ou de proches des victimes[28]. Selon la Miviludes, ces signalements contiennent des éléments suggérant une emprise mentale. Pour Marie Drilhon, présidente de l'Association de défense des familles et de l’individu victimes de sectes, l'emprise sectaire se caractérise par une rupture avec soi-même (certains auditeurs de Casasnovas ont changé brusquement d'alimentation), par une rupture avec son environnement (ce qui a pu arriver lorsque les proches n'adhèrent pas aux principes de Casasnovas), et par la rupture avec la société et ses règles (par exemple le refus de la vaccination)[26]. Aucune plainte n'avait toutefois été déposée contre Thierry Casasnovas en 2019 ; Audrey Keysers, de la Miviludes, estime que « les gens qui se sont fait avoir n'osent pas le dénoncer. Ils ont souvent honte »[28].
En 2020, le docteur Bruno Boyer, président de la section santé publique du Conseil national de l'Ordre des médecins, estime que ce n'est pas tant les conseils de Thierry Casasnovas qui sont en cause, mais son attitude dogmatique proche du religieux qui conduirait certaines personnes suivant ces conseils à se détourner des traitements médicaux susceptibles de les soigner[24].
Au printemps 2020 se crée le collectif « L'Extracteur », qui alerte sur les dangers de la « méthode Casasnovas »[44],[24].
Pendant l'été 2020, à la suite d'un signalement de la Miviludes[27], une enquête est ouverte à son sujet par le parquet de Paris, au nom de l'article 40 du Code de procédure pénale, pour « mise en danger de la vie d'autrui »[13],[17],[26]. Au mois d'octobre, il supprime plus d'un millier de vidéos de sa chaîne YouTube, parmi lesquelles celles sur le diabète[45]. BFM TV rapporte les propos de Thierry Casanovas affirmant que « la maladie n'existe pas » et qu'il est possible de combattre certains symptômes sans traitements médicaux[24]. En , la porte-parole de l'Union nationale des associations de défense des familles et de l'individu victimes de sectes (UNADFI) considère qu'il est avec Jean-Jacques Crèvecœur et Christian Tal Schaller l'un des principaux influenceurs sur YouTube dont le discours s'apparente à une emprise sectaire[46].
Le sur France 5 est diffusé le reportage « La Fabrique du mensonge », dont la deuxième partie est consacrée à Thierry Casasnovas[47],[48] et dépeint ce dernier comme un « gourou » suivi par « des milliers d’adeptes qui suivent ses régimes jusqu’à mettre parfois leur santé en péril »[49].
Enquête de l'OCRVP
Le , l'Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) ouvre une enquête à l'encontre de Thierry Casasnovas sous le chef de mise en danger de la vie d'autrui[17],[40],[50].
Plainte de l'UNADFI
En , l'UNADFI porte plainte contre lui pour abus de faiblesse, escroquerie, exercice illégal de la médecine et de la pharmacie et mise en danger délibérée d'autrui[51]. Depuis le , une information judiciaire est ouverte à son encontre par le parquet de Perpignan pour « abus de faiblesse, exercice illégal de la médecine et pratique commerciale trompeuse »[52],[53]. Le , son domicile de Maureillas-las-Illas est perquisitionné par des gendarmes de la section de recherches de Montpellier et de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP)[54].
Liens avec l'extrême-droite
En 2020, Dieudonné lui décerne une Quenelle d’or du lanceur d’alerte[1]. Selon Libération, Thierry Casasnovas, qui exprime son opposition à l'interruption volontaire de grossesse, fait partie de « mouvances d’extrême droite, complotistes ou covidosceptiques [qui] font preuve d’une propagande intensive contre l’avortement »[55].
Filmographie
Thierry Casasnovas intervient dans deux films documentaires réalisés par Alexandre Ferrini : Régénération, sorti en , avec Joël de Rosnay, Idriss Aberkane, Thierry Janssen et Gilles Boeuf[56],[57], et Vivante !, sorti le [58],[59].
Notes et références
Notes
- « Un certain Thierry Casasnovas, qui, à 27 ans, ne pesait que 30 kg pour 1 m 75, atteint d'une hépatite C, d'une tuberculose avancée et d'une pancréatite aiguë dont il aurait réussi à [se] sortir ... »[2]
- En juin 2021, la chaîne YouTube de Thierry Casasnovas comporte 539 000 abonnés, 678 vidéos et plus de 80 millions de vues, « Regenere / Thierry Casasnovas » (consulté le ) ; en , le nombre de vidéos mises en ligne s'élevait à 1 384 « Regenere / Thierry Casasnovas » (version du 30 septembre 2020 sur l'Internet Archive)
- Association active sous le Code APE : 9499Z - Autres organisations fonctionnant par adhésion volontaire[22],[23].
Références
- « Qui est Thierry Casasnovas ? Son parcours, les inquiétudes qu’il suscite », sur UNADFI (consulté le ).
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- « Regenere / Thierry Casasnovas », sur socialblade.com, .
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- Thibaut Schepman, « La très juteuse générosité du gourou du « manger cru » Thierry Casasnovas », sur Rue89, .
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- François David, « Thierry Casasnovas, le youtubeur catalan qui affole les autorités », sur France Bleu, .
- « TEDx propose à ses abonnés une conférence du vidéaste controversé Thierry Casasnovas », sur Conspiracy Watch, (consulté le ). TedX a ajouté ce texte à la vidéo : « Avertissement de TED : Ne considérez pas cette intervention comme un avis médical. Nous posons un avertissement sur cette vidéo, qui a été filmée lors d'un événement TEDx, car elle ne respecte pas les directives TEDx relatives au contenu des interventions. »
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- Yannick Philipponat, « Occitanie : enquête sur les Dérives sectaires », Midi libre, (lire en ligne).
- Océane Laparade, « Pyrénées-Orientales : Enquête lancée sur Thierry Casasnovas, « le pape » du jeûne et du crudivorisme », L'Indépendant, (lire en ligne).
- Margot Brunet, « L'enquête sur le youtubeur controversé Thierry Casasnovas dans les mains d'un juge », Marianne, (consulté le ).
- Vincent Gautronneau, « Thierry Casasnovas, le pape du crudivorisme sur YouTube, perquisitionné par les gendarmes », Le Parisien, (lire en ligne).
- Pierre Plottu et Maxime Macé, « Complotistes, covidosceptiques et militants anti-avortement font croisade commune sur le Net », Libération (consulté le ).
- « Régénération », sur Allociné, .
- Eric Neuhoff, Olivier Delcroix et Nathalie Simon, « Sous les étoiles de Paris, Garçon Chiffon, ADN... Les films à voir ou à éviter cette semaine », Le Figaro, .
- « Vivante ! », sur Allociné, .
- « « Vivante ! »: synopsis et bande-annonce », 20 Minutes, .
Annexes
Articles connexes
Documentaires télévisés
- La Fabrique du mensonge : Fake news sur ordonnance (seconde partie : « Le Gourou du manger cru ») [production de télévision], Arnaud Liévin, Félix Suffert Lopez, Karim Rissouli, Elsa Guiol, Lucile Berland et Benjamin Teil () Together media et France Télévisions.
Liens externes
- Sites officiels : www.thierry-casasnovas.com et regenere.org
- Ressource relative à l'audiovisuel :
- [vidéo] La Tronche en Biais, Regenere.org : Quels sont les dangers ? sur YouTube, , 1 h 42.
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