Boycott, désinvestissement et sanctions

Boycott, désinvestissement et sanctions[Note 1] (BDS) est une campagne qui vise au boycott d'Israël. La campagne promeut les boycotts économiques, académiques, culturels et politiques contre Israël, ses citoyens et d'autres cibles (personnalités, entreprises, etc).

Ne doit pas être confondu avec BDSM ou boycott d'Israël.

Pour les articles homonymes, voir BDS.

Un des logos utilisés en 2016.

Formellement lancé par 171 organisations non gouvernementales palestiniennes[1],[2],[3], le mouvement est dirigé par un comité national palestinien[4].

La campagne soutient le nationalisme palestinien et l'antisionisme et a fixé comme objectifs de mettre fin à l'occupation d'Israël « des territoires capturés en 1967 »; l'égalité des citoyens arabes d'Israël et le droit au retour des réfugiés palestiniens en Israël. Tandis que les opposants y voient une tentative de mettre fin à l'État juif et défendent le système judiciaire et la société israélienne comme étant égalitaire et démocratique[5].

Le , la campagne BDS demande à exercer des pressions sur l’État d’Israël. Diversement suivie dans de multiples pays où elle rencontre parfois des obstacles légaux, cette initiative peut donner lieu à un débat portant sur son étendue, son efficacité, son opportunité, sa légitimité, sa légalité et jusqu'à la sincérité de ses intentions ou du moins de celle de nombre de ses acteurs. Un débat aux accents polémiques naît quand est questionné, sinon affirmé, le lien entre antisionisme et antisémitisme, tandis qu'est exprimée la crainte que cette campagne, en dépit de ses déclarations légalistes, n'aboutisse à une délégitimation, non pas tant seulement de la politique conduite par différents gouvernements israéliens dans les territoires occupés, que de l’État d’Israël lui-même[6].

Les soutiens au mouvement se réfèrent explicitement aux campagnes de boycott ayant été conduites contre le régime d'apartheid d'Afrique du Sud, tandis que ses opposants y voient une ressemblance avec les boycotts antisémites au cours de l'histoire, comme le boycott des commerces juifs sous le IIIe Reich[7].

Contexte historique du boycott d'Israël

Durant la Palestine mandataire

À la suite des accords d'Oslo, les pays du conseil de coopération du Golfe cessent leur participation au boycott de la Ligue arabe contre Israël, et déclarent que la suppression du boycott est une étape nécessaire pour la paix et le développement économique de la région.

Au cours du conflit en Palestine mandataire, certains meneurs arabes pensent entreprendre un boycott anti-juif. Le boycott est mis en œuvre lors de la révolution arabe de 1929 à Jérusalem. Les Arabes ayant commercé avec des Juifs, sont physiquement attaqués et leurs marchandises endommagées[8]. À la suite de la révolte arabe, diverses organisations arabes lancent des appels à boycotter les commerces juifs. En 1936, les dirigeants palestiniens lancent un dernier appel au boycott infructueux[9].

Le premier boycott économique de grande ampleur fut le fait de la Ligue arabe contre la communauté juive de Palestine dès le 2 décembre 1945, puis contre Israël, avec pour objectif d'empêcher la réalisation des objectifs du sionisme[10]

Conférence de Durban I

Du 31 août au 8 septembre 2001 a lieu en Afrique du Sud, à Durban, la troisième conférence internationale sur le racisme sous l'égide de l'Unesco. Présidée par Mary Robinson, cette conférence a été problématique à tous les stades de son déroulement. Dès sa préparation, deux questions portées à son agenda s'avèrent particulièrement épineuses : d'abord celle des réparations dues aux victimes de l'esclavage (réparations auxquelles s'oppose pourtant l'Afrique du Sud engagée alors dans la délicate entreprise de réconciliation nationale), ensuite celle de la qualification de la politique israélienne à l'égard des Palestiniens. Tandis que les délégués de la Ligue arabe notamment souhaiteraient assimiler le sionisme à une forme de racisme (ressuscitant en cela la résolution 3379 de l'Assemblée générale des Nations unies adoptée en 1975 mais révoquée en 1991 : « sionisme = racisme »), les États-Unis et Israël notamment y sont fermement opposés. Les propos tenus et les actes devenant outrés, le , les délégations américaines et israéliennes se retirent de la conférence[11],[12].

Pays refusant l'entrée aux Israéliens en vert clair.
Pays refusant l'entrée à toutes personnes s'étant rendue en Israël, en vert foncé.

Une déclaration finale, expurgée des passages ayant justifié le retrait des deux délégations, ne satisfait ni l'Iran ni la Syrie, qui restent avec la forte volonté d'assimiler Israël à un État raciste. Ces questions sont reprises dans le cadre du forum d’organisations non gouvernementales qui se déroule parallèlement à la conférence de l'Unesco. Du au , ce forum réunit dans le stade Kingsmead 8 000 représentants de 3 000 ONG[12]. Selon le gouvernement britannique, une rhétorique anti-israélienne et antisémite aveugla les participants de ce forum au point que la commissaire britannique rejeta la déclaration des ONG[13]. Quant à l'historienne Larissa Allwork, elle parle de ce forum comme d'un « festival de haine anti-juive »[14].

Seconde Intifada

Au printemps 2002, en pleine opération Rempart, des militants de la CCIPPP (campagne civile pour la protection du peuple palestinien) s'introduisent dans la Mouqata'a où est retranché Yasser Arafat pour faire de leurs personnes un bouclier humain. Cet épisode aurait marqué une première « opposition frontale » de ces militants extra-nationaux[15].

La seconde intifada débutée en 2000 prend fin en 2003 avec l'adoption de la « feuille de route ». Le 4 novembre 2003, des personnalités représentatives de la gauche israélienne et des différentes forces palestiniennes (sauf les islamistes) signent, à Genève, un plan de paix alternatif précédemment présenté le 12 octobre à l'issue de l'initiative de Genève[16],[17].

Conférence de Durban II

En 2009, à Genève (Durban II), le Canada, Israël, les États-Unis, l’Italie, l’Australie, les Pays-Bas, l’Allemagne, la Nouvelle-Zélande et la Pologne ont boycotté la conférence[18],[19] du fait des propos du président iranien qualifiant Israël d’« État raciste »[19], provoquant ainsi le retrait provisoire des pays de l'Union européenne (UE) de la conférence[20]. 22 des 27 pays de l’UE choisissent néanmoins d'assister au reste de la conférence[21],[22].

John Kerry et Benjamin Netanyahu à Jérusalem, septembre 2013

Négociations

Alors que se seraient achevées le 29 avril 2014 les négociations israélo-palestiniennes sous l'égide du secrétaire d’État américain, John Kerry, un propos de celui-ci, avertissant d'un risque d'intensification du mouvement de boycottage d'Israël en cas d'échec des négociations, suscite l'indignation des officiels israéliens[23].

Initiatives en Grande-Bretagne pour un boycott académique

Tandis que se déroule l'Opération Rempart, une campagne de boycott universitaire et culturel en Europe est proposée en Grande-Bretagne en 2002 à l'initiative de Hilary et Steven P. Rose. Dans une lettre ouverte publiée dans The Guardian le 06 avril 2002 et signée par 123 autres universitaires ainsi que par 23 artistes et écrivains, ils appellent à la suspension de la collaboration des universités et des organismes de recherche européens avec Israël[24],[25]. Cet appel à un moratoire (Israel academic moratorium call) est suivi d'autres initiatives similaires : l'appel signé par Colin Blakemore et Richard Dawkins et ceux de l'AUT (en) ou du Natfhe (en) (à tel point que l'expression academic boycott of Israel s'impose).

Si quelques universitaires israéliens apportent leur signature à ces initiatives, celles-ci ne recueillent quasiment pas de soutien en Israël. Entre avril et juillet, deux contre-pétitions - dont celle de l'Université de Chicago - sont par ailleurs lancées. En juin, une polémique internationale divise les universitaires après une décision prise par une signataire du moratoire initié par Steven Rose, Mona Baker : le 06 juin 2002, ce professeur en traductologie à l'université de Manchester révoque du comité éditorial de deux revues, à faible tirage, dont elle est l'éditrice (resp. : Translation Studies Abstracts et The Translator) deux universitaires israéliens, le Dr Miriam Shlesinger de l'Université Bar-Ilan et le Prof. Gideon Toury de l'Université de Tel Aviv. Tout cela s'accompagne, de l’aveu même du « Guardian », d'une certaine confusion : il est parfois difficile de savoir qui a signé quoi[26]. Par ailleurs les pétitions peuvent diversement être interprétées (cf. Prof Baker said the interpretation of the boycott was her own and she did not necessarily expect other signatories in a similar position to follow her lead.)[26], ce sur quoi insiste Hilary Rose dans le courrier des lecteurs du « Guardian » début juillet (Every signatory does not automatically sing off the same hymn sheet and institutions are not abstractions)[27].

Le 22 avril 2005, lors d'une réunion abordant différentes questions relatives tant à la politique intérieure qu'extérieure, le Conseil de l'AUT adopte cinq motions concernant la Palestine. S'appuyant explicitement sur l'appel des universitaires palestiniens de 2004 (cf.paragraphe suivant), tout en faisant référence à des faits précis, l'AUT vote pour le boycott de deux universités israéliennes, les universités de Haïfa et Bar-Ilan (l'AUT conditionnant par ailleurs une décision de boycott de l'université de Jérusalem aux résultats d'une enquête)[28],[29],[30]. Le Conseil de l'AUT fait valoir que l'université de Bar-Ilan organise des cours dans les universités de la Cisjordanie (à l'université d'Ariel) et qu'elle « est ainsi directement impliquée dans l'occupation des territoires palestiniens contraire aux résolutions des Nations unies » ; La prise de position de l'AUT concernant Haïfa est motivée par des pressions exercées sur le Pr Ilan Pappé et un de ses étudiants, Teddy Katz[31].

À la suite d'une campagne vigoureuse, l'AUT revient sur sa décision le 26 mai suivant. (En 2007 toutefois la question ressurgira ; l'UCU, qui a entre-temps absorbé l'AUT, adoptera le 30 mai une motion appelant à débattre de la question du boycott au sein des différentes fédérations du syndicat ; cette motion, qui prévoit d'organiser un débat contradictoire et équilibré[32], suscitera un vive polémique et un retentissement international)[33],[34].

Initiatives norvégiennes

En avril 2002, la chaîne de supermarché norvégienne Coop Norge (qui réalise 25 % du chiffre d'affaires du secteur) annonce sa décision de boycotter les produits israéliens et fait savoir qu'elle incitera ses partenaires suédois et danois à faire de même[35]. À la suite du refus de ceux-ci, Coop Norge revient sur sa décision[36].

Manifestation à Melbourne (Australie), 2010

Aux États-Unis, le 14 octobre 2002, plusieurs centaines d'étudiants issus de mouvements de solidarités avec la Palestine se réunissent à l'Université du Michigan tandis que des pétitions appelant les universités à se désinvestir circulent à Harvard, au MIT, à Princeton, à l'Université de Michigan, à l'Université du Texas (Austin) et à Berkeley. Samuel G. Freedman, qui rapporte ces faits dans USA Today, met sérieusement en doute les déclarations pacifiques des acteurs à l'origine de cet évènement pourtant formé sous le slogan For Peace, For Justice : il pointe notamment le refus des acteurs à condamner explicitement la violence terroriste et rappelle que ce mouvement coïncide avec une recrudescence d'actions et de propos antisémites incitant 300 présidents d'universités à publier une lettre ouverte demandant que soient interdits sur les campus ces débats confinant à « l'intimidation et à la haine »[37].

Initiatives israéliennes

En septembre 2003, lors de la Conférence internationale de la société civile à l’appui du peuple palestinien à l'ONU, Avia Pasternak, représentante de Taayoush, organisation israélienne qui milite pour la paix entre Juifs et Arabes, s’est déclarée favorable à un boycott des sociétés internationales ayant des installations de production dans les colonies de peuplement juif dans les territoires palestiniens occupés par Israël.

Positions de militants sud-africains sur le boycott d'Israël

L'archevêque Desmond Tutu, prix Nobel de la paix pour son rôle dans le combat contre l'apartheid, promeut de mettre fin à l'occupation par Israël des territoires occupés grâce à un boycott[38],[39]. Fin avril 2002, Ronnie Kasrils, ministre des Eaux et forêts, et d'origine juive, se déclare favorable à des actions de boycott et de sanctions contre Israël[40],[41]. Quelques années plus tard, en mai 2005, il publie dans The Guardian, sa thèse selon lequel Palestiniens et Israéliens bénéficieront tous deux d'un boycott[42].

Le 14 juin 2002 Desmond Tutu exprime son soutien aux initiatives, qui promeuvent le désinvestissement afin d'inciter l’État d'Israël à mettre fin à une situation qu'il compare à celle de l'apartheid [réf. souhaitée]. Concernant l'Afrique du Sud, il juge que les initiatives étudiantes avaient été importantes pour initier un mouvement ensuite relayé par des institutions. Il indique que dans plus de 40 campus des États-Unis, les étudiants ont demandé aux conseil d'université de réviser leurs investissements, tandis qu'en Europe se développent des appels à des embargos sur les armes ainsi qu'à des boycotts au niveau des consommateurs[39][source insuffisante].

Mise en place de BDS

Premiers appels

Omar Barghouti lors du rallye national BDS à Ramallah, 2016

En avril 2004, le Qatari Omar Barghouti, avec un groupe d'universitaires[43][source insuffisante] et de militants[Qui ?] réunis à Ramallah lance la Palestinian Campaign for the Academic and Cultural Boycott of Israel (en) Campagne palestinienne pour le boycott académique et culturel d'Israël »)[44],[45]. Les objectifs de cette campagne, qui fait suite à un précédent appel émis en 2003 par des universitaires et des intellectuels de Palestine et de la Diaspora, seront précisés lors d'une déclaration en juillet[44]. Le 6 juillet est lancé l'« appel pour le boycott universitaire et culturel d’Israël » (« Call for academic and cultural boycott of Israel ») ; Omar Barghouti tient à préciser que le PCACBI dans cet appel comme dans toutes ses autres déclarations, ne vise pas des individus mais vise seulement des institutions[46]. La PACBI a travaillé étroitement avec le Comité britannique pour les universités de la Palestine (BRICUP (en)) qui fait pression sur l'Association des Enseignants en Université (AUT (en)) pour adopter un boycott académique des universités israéliennes[47].

En janvier 2005, l'Occupied Palestine and Syrian Golan Heights Advocacy Initiative (en) (OPGAI), une coordination d'ONG[48], présente au 5e Forum social mondial l'appel palestinien pour les « boycott, désinvestissement et sanctions »[49],[47].

Lancement de la campagne

La campagne BDS prend naissance durant la Seconde intifada[50].

Le 9 juillet 2005, 170 organisations lancent un appel à la société civile pour s'engager dans le BDS. Le boycott est à la fois perçu comme un changement non-violent à la violence généralisé de la Seconde intifada et, par Israël, comme la poursuite de la « guerre par d'autres moyens ». Il permet de rassembler des Palestiniens de la diaspora ainsi que des groupes avec des objectifs politiques différents et parfois opposés[50].

Les 12 et 13 juillet 2005, soit quelques jours plus tard, siège à Paris, à l'UNESCO, la Conférence de la société civile pour la paix au Moyen-Orient qui adopte un plan d'action[51],[52]. La Conférence adopte à l'unanimité l'appel palestinien à la campagne BDS ; la résolution finale annonce un plan d'action pour « une campagne générale de boycotts, de désinvestissements et de sanctions pour forcer Israël à terminer l’occupation et à se conformer au droit international et à respecter toutes les résolutions des Nations unies concernées »[53].

Selon Maia Carter Hallway, Il y a deux courants au mouvement, l'un qui se concentre sur le sionisme et un autre sur l'occupation israélienne. Alors que la tactique entre les deux courants peut être la même, les cibles sont différentes[50].

Objectifs de la campagne BDS

L'appel du 9 juillet 2005 se fixe trois objectifs :

« Ces mesures punitives non-violentes devraient être maintenues jusqu’à ce qu’Israël honore son obligation de reconnaître le droit inaliénable des Palestiniens à l’autodétermination et respecte entièrement les préceptes du droit international en :

  1. Mettant fin à son occupation et à sa colonisation de toutes les terres arabes et en démantelant le Mur (ending its occupation and colonization of all Arab lands [occupied in 1967] and dismantling the wall[54]) ;
  2. Reconnaissant les droits fondamentaux des citoyens Arabo-Palestiniens d’Israël à une égalité absolue (recognizing the fundamental rights of the Arab-Palestinian citizens of Israel to full equality[54]) ; et,
  3. Respectant, protégeant et favorisant les droits des réfugiés palestiniens à revenir dans leur maison et propriétés comme stipulé dans la résolution 194 de l’ONU (respecting, protecting and promoting the rights of Palestinian refugees to return to their homes and properties, as stipulated in UN resolution 194[54])[1]. »

Le boycott est perçu comme utilisant une « tactique de pression » alors que la diplomatie n'aurait pas eu les résultats souhaités. L'appel au boycott par des figures islamiques est quant à lui justifié comme un jihad des civils, alors que les gouvernements n'auraient abouti « à rien »[50].

La campagne BDS se refuse à prendre explicitement position sur la question de la bipartition ou de la « solution à un État ». Dans un article de 2011, écrit en réponse au philosophe Bernard-Henri Lévy, Omar Barghouti fait remarquer que la coalition d'associations à l'origine de l’appel est partagée sur cette question, la solution à deux États recueillant toutefois le soutien de la majorité des associations. Lui-même, à titre personnel, se dit par contre favorable à la constitution d'un seul État laïc[55]. Omar Barghouti appelle également également à « la fin » et « la destruction » de l'État juif[56].

Organisation et financement

Manifestation pour le boycott d'Israël lors de l'International Workers' Day, Trondheim (Norvège), 2013

Plusieurs gouvernements internationaux, des fondations et des organismes de charité islamiques sont les sources principales de soutien financier de BDS[57]. La campagne BDS est également soutenue financièrement par le Fatah ainsi que par des organisations inscrites sur les listes terroristes européennes et des États-Unis[56].

Dans le cadre des lignes de conduite définies par l'appel de 2005, une grande latitude est laissée aux initiatives locales, nationales, pour déterminer les cibles de leurs actions et les tactiques à adopter[55].

La première Conférence palestinienne BDS a lieu à Ramallah en novembre 2007 et un « comité BDS » (BDS National Committee ou BNC) est formé à cette occasion, auquel participe entre autres Omar Barghouti[58]. La conférence est ouverte par Dr Gabi Baramki et réunit 300 activistes palestiniens conversant avec des activistes en Grande-Bretagne, Canada, Norvège, Espagne et Afrique du Sud[59].

Naomi Paiss, chargée des relations publiques pour le New Israel Fund affirme que son association, qui soutient le boycott des productions issues des colonies, veille à ne pas attribuer de financement aux entités qui feraient la proposition d'un boycott total d’Israël[60]. Edwin Black, dans un article paru fin février 2014, révèle que le New Israel Fund a contribué à l'émergence du mouvement BDS par des aides financières apportées à l'association Coalition of Women for peace qui appelait à un boycott total (et nonseulement sur les productions des territoires occupés)[61].

D'après Ghada Karmi (en), en Grande-Bretagne, le British boycott committee est composé en grande majorité de personnes d'origine juive (article de 2007)[33].

Critiques

S'appuyant notamment sur des déclarations de certains supporters de BDS  tels qu'Omar Barghouti ou Ali Abunimah (en), fondateur du site electronic intifada (en)  qui ne cachent pas être défavorables à la coexistence d'un État palestinien et d'un État israélien, Bernard-Henri Lévy affirme que « cette campagne, en fait, contrevient aux coutumes aux règles et aux lois internationales et particulièrement aux lois françaises ou américaines »[62]. Tous les signataires eux-mêmes ne s'accordent pas sur l'extension géographique à donner au boycott et de nombreuses voix militant pour une paix juste et durable au Proche-Orient s'opposent à cette campagne qui ne prône ni le droit des Palestiniens à l'autodétermination, ni un règlement basé sur le principe de deux États pour deux peuples, mais contre l’existence même de l’État d’Israël.

La campagne BDS est critiquée pour être une tactique indiscriminée et peu définie, qui s'en prend parfois à des cibles juives. D'autres critiques la campagne pour soutenir directement ou indirectement les violences palestiniennes[50].

« Ce qui se dissimule derrière la pseudo lutte contre les produits des territoires, c'est la négation du droit d'Israël à l'existence » écrivent le 23 juillet 2015 David Chemla, secrétaire général de JCALL Europe, Alain Rozenkier, président de La Paix Maintenant France et Gérard Unger, président de JCALL France.

En réponse à une interview d'Omar Barghouti publiée dans Le Monde le 4 juillet 2015, ils écrivent : « Monsieur Barghouti accuse la France d'être hypocrite face à Israël. Le compliment ne peut qu’être retourné. BDS ne l'est-il pas face à Israël lorsqu'il se dissimule derrière la lutte contre les produits des territoires alors que, lorsqu'on gratte un peu, on constate que c'est d'autre chose dont il s'agit : la négation du droit d'Israël à son existence, résurgence d'un passé que l'on croyait révolu ? Le discours tenu nous ramène près de 30 ans en arrière, avant la reconnaissance d’Israël par l’OLP. De grâce, ne perdons plus de temps ! ».

Laurent Joffrin, directeur de la rédaction du journal Libération, signe dans un billet d'août 2015, un éditorial intitulé « BDS, les dessous d'un boycott » dans lequel il écrit : « Quand Omar Barghouti [...] met Israël sur le même plan que le Soudan du général Omar el-Bechir, islamiste implacable, où la guerre civile et la répression ont causé quelque deux millions de morts, il pratique un amalgame inacceptable. Il est vrai que dans certains textes, le même Omar Barghouti compare aussi les Israéliens à des nazis... ». « Aussi bien, les militants du boycott, qui agissent en principe au nom des valeurs universelles — le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et le droit international — se gardent bien de dénoncer les atteintes à ces principes quand elles sont le fait de certaines formations palestiniennes, par exemple le Hamas qui gouverne Gaza en pratiquant une répression impitoyable et qui use lui aussi de moyens de lutte cruels et contraires aux conventions internationales. »

Manifestation pour le boycott d'Israël, Catalogne (Espagne), 2013.

Actions menées dans différents pays

En septembre 2009, Willy Jackson écrit dans Le Monde diplomatique : « Après quatre ans de quasi-sommeil [après sa création en 2005], la campagne de boycott, de désinvestissement et de sanctions (BDS) menée contre Israël connaît une montée en puissance[2]. »

Campagne BDS en Europe

Dès juillet 2005, la campagne BDS est impulsée en Europe par le Comité européen de coordination des ONG sur la question de la Palestine (ECCP) en Belgique présidé alors par le sénateur socialiste belge Pierre Galand[63].

En novembre 2008 en Espagne, à Bilbao, une coalition d'association définit les modalités de la campagne BDS en dix points[64]. C'est à cette occasion qu'est lancée la campagne européenne contre Veolia et Alstom, qui portera ses fruits notamment en 2015 quand Veolia Environnement, cédant aux pressions, a « bouclé la vente de toutes ses activités en Israël, et notamment celles de gestion de l’eau, des déchets et de l’énergie »[65],[66].

À l'automne 2010 est créée The European Platform for the Academic and Cultural Boycott of Israel qui se réfère au lignes directrices dessinées par le Pacbi[46].

En France

Avant le lancement officiel de la campagne BDS en 2005, plusieurs actions sont conduites qui la préfigurent. Pascal Markowicz, du comité directeur du CRIF, recense ainsi : en , la CCIPP (Campagne Civile Internationale pour la Protection du Peuple Palestinien) fabrique des autocollants et des affiches pour lancer une campagne de boycott des produits israéliens ; la CAPJPO dirigée par Olivia Zemor publie l'appel (d') pour un moratoire sur les relations scientifiques et culturelles avec Israël ; l'Association France Palestine Solidarité, bientôt suivie par un collectif d’associations d’extrême gauche et de mouvements alternatifs, vote une motion appelant au boycott des produits israéliens dont le slogan est « Non à l’occupation, non à l’apartheid, boycott des produits israéliens » ; à Marseille, le (date anniversaire de la seconde intifada), le Collectif pour le Respect des Droits du Peuple Palestinien, soutenu par d'autres organisations organise la première manifestation unitaire du boycott d’Israël[67][source insuffisante].

En France[Note 2], la guerre de Gaza de l'hiver 2008-2009 suscite une large prise de conscience et accélère les mobilisations autour de l'appel des Palestiniens. Ainsi un appel au boycott académique est publié en et possède une cinquantaine de signatures[68]. Des actions et campagnes sont menées, notamment contre des sociétés telles Carrefour, Ahava et autres[69]. Par exemple, une coalition appuyée par le « Comité BDS » palestinien s'organise contre le projet d'implantation d’Agrexco (en) à Sète et plus largement en Europe[70]. On peut également considérer la poursuite en justice des sociétés françaises impliquées dans la construction du tramway de Jérusalem comme une manifestation de cette campagne[71],[72],[73],[74],[75] ; de même que la requête en justice déposée à l'initiative de Gilles Devers auprès la Cour pénale internationale[76],[77].

Le , le blog internet du BDS France publie la Charte de la Campagne BDSFrance, ainsi que la liste des 93 associations et partis politiques français qui soutiennent le boycott. En , l’organisation de la campagne BDS en France se structure et une plateforme unique est créée, avec un site internet dédié.

Une du mensuel anarchiste Alternative libertaire sur la campagne BDS, en 2010.

En , Imen Habib coordonnatrice du mouvement BDS en France, et membre de l'Agence Media Palestine[78], fait le point sur les différents aspects du mouvement[79]. En novembre 2014, une manifestation pour le boycott d'Israël se déroule à Paris ; sur l'une des banderoles, Gaza est indiqué être un « camp de concentration ».

Le 1er avril 2017, à l'appel d'une quarantaine d'organisations dont le BDS, une manifestation pour « célébrer la résistance palestinienne à l’occupation et à la colonisation » ne rassemble qu'environ 200 personnes sur la place du Châtelet à Paris, les policiers bloquant les accès « pour éviter les débordements »[80].

En 2021, lors du boycott de l'exposition parisienne sur les « Juifs d'Orient » à l'Institut du monde arabe (IMA), le journaliste pro-palestinien Dominique Vidal rappelle que lors des voyages qu'il a organisés en Israël-Palestine, les participants ont discuté du boycott culturel avec Omar Barghouti, fondateur et coordinateur de BDS, qui a toujours répété qu'il n’est pas question pour son mouvement de boycotter individuellement des artistes israéliens[81].

En Irlande

Manifestation de soutien BDS, Londres, 27 avril 2017

En Irlande, l'appel au boycott est visible d'Israël depuis au moins septembre 2006[82]. À la suite des manifestations de appelant au boycott[83],’The Irish Times a publié une lettre ouverte le 23 janvier 2009[84] puis le samedi 31 janvier 2009 a publié, en page 5, un « appel irlandais pour une justice en Palestine » recueillant environ 300 signataires, dont des députés, des sénateurs, des leaders politiques (dont Gerry Adams et Tony Benn), des dirigeants de syndicats, des professeurs et des artistes[85].

Le , dans le contexte de répression de la marche du retour à Gaza, Dublin est devenue la première capitale européenne à soutenir BDS. Dans sa motion[86], elle mentionne le « blocus et le siège inhumain à Gaza » et s'engage à ne plus passer de contrat avec Hewlett-Packard et sa filiale DXC Technology[87],[88], mises en cause par le mouvement BDS pour leur collaboration avec Israël.

En Belgique

Tag encourageant le boycott d'Israël par le cercle étudiant de BDS à l'ULB.

L'université libre de Bruxelles reconnaît un cercle étudiant militant de BDS. Cette initiative a été critiquée, jugée comme contraire aux valeurs de l'Université : le libre examen et à la liberté académique « n'ayant pour objectif que cesse toute collaboration scientifique et universitaire avec Israël » et discriminante à l'égard des étudiants juifs[89].

En mars 2015, des incidents se produisent entre deux cercles d'étudiants sur le campus de l'université libre de Bruxelles. Au cours d'une manifestation de protestation contre la barrière de séparation israélienne organisée par BDS Belgium, des étudiants de l'Union des Étudiants juifs de Belgique (UEJB) sont pris à partie. Ceux-ci transmettent à la presse une vidéo des incidents qui accuse BDS de les avoir stigmatisés parce que Juifs aux mots de : « Sionistes ! Fascistes ! C'est vous les terroristes ! »[90]. BDS nie tout amalgame et affirme n'avoir jamais visé les étudiants de l'UEJB. La presse reprend les accusations d'antisémitisme et la Ligue Belge contre l'Antisémitisme (LBCA) annonce déposer une plainte[90]. Le recteur de l'université, Didier Viviers, organise une rencontre entre les deux cercles en vue d'apaiser les esprits. À l'issue de celle-ci, les cercles étudiants publient un communiqué commun « où ils s'engagent à se respecter mutuellement » et dans lequel BDS reconnaît que les propos tenus étaient « maladroits » tandis que l'UEJB reconnaît que la vidéo diffusée à la presse ne reflétait pas parfaitement la réalité[91],[92].

Quelques jours plus tard, le communiqué est dénoncé par l'UEJB et l'avocat de la LBCA attaque la gestion de la situation par l'ULB en déclarant qu' « organiser des débats dans lesquels le même temps de parole sera donné aux Juifs et aux antisémites/antisionistes » ne va rien résoudre et que « la tactique de l’apaisement adoptée par le rectorat, destinée à étouffer le scandale, est une compromission qui trahit les valeurs de l’ULB »[93]. Le recteur y répond le lendemain en affirmant que « les manifestants n’avaient pas d’intention antisémite ». Il estime que « [l]a fin ne justifie pas les moyens et (...) condamne les moyens utilisés en l’occurrence » : « comment peut-on espérer convaincre du risque des amalgames dangereux quand soi-même on en use avec une telle désinvolture ? Comment croire que l’on va aider la communauté juive à retrouver le calme et la sécurité auxquels elle a droit en s’abaissant à de telles manipulations ? »[94].

Deux semaines plus tard, un collectif de 75 alumnis de l'ULB lui répond dans une carte blanche publiée dans « Le Soir » et intitulée : « BDS : les moyens ne sont pas une fin en soi ! ». Les signataires dénoncent une dérive antisémite au sein de l'institution depuis plusieurs années et demandent de « retirer à BDS-ULB la reconnaissance officielle de l’université et l’autorisation de porter son sigle » en argumentant que le message et les actions de ce cercle, de par la stigmatisation d'étudiants juifs dont il est coupable, vont à l'encontre des valeurs du « Libre Examen » qui sont un fondement des statuts de l'Université[95]. Le journaliste Marcel Sel leur répond à son tour en prenant la défense de BDS-ULB. Il estime que cette carte blanche partisane et mensongère est indigne de défenseurs du Libre Examen. Il se plaint également de pressions subies à la suite de sa prise de position lui demandant de dévoiler les sources de son enquête. Il conclut : « le jour où je disposerai de vraies preuves d’antisémitisme dans le chef de BDS-ULB, je n’hésiterai pas une seconde à les brandir. En espérant que cela permettra d’oublier ce mauvais procès, contreproductif, qui ne convainc que deux genres de personnes : celles qui soutiennent Israël sans le moindre esprit critique, et celles qui imaginent qu’il existerait un lobby pro-israélien tentaculaire dont le pouvoir permettrait jusqu’à la déviation de l’orbite de Jupiter »[96].

Militantisme BDS en Catalogne

En Espagne

En août 2015, BDS obtient tout d’abord la déprogrammation du chanteur juif américain Matisyahu du festival de reggae Rototom Sunsplash, du 15 au 22 août à Benicassim. Les organisateurs finiront par le reprogrammer, en s’excusant d’avoir cédé « devant une campagne de pressions, menaces et contraintes exercées par BDS »[97].

En Allemagne

En décembre 2017, Munich a adopté un projet de loi interdisant les boycotts d'Israël, devenant ainsi la première ville allemande à refuser l'espace et les fonds publics pour la campagne BDS. Charlotte Knobloch, une survivante de l'holocauste et présidente de la communauté juive de Munich qui a fait campagne pour la législation, a déclaré que « Munich a envoyé un signal contre l'antisémitisme ».

Le 17 mai 2019, le Bundestag adopte une motion condamnant le mouvement BDS pour antisémitisme. Cette motion a été proposée par les partis majoritaires CDU, CSU et SDP, auxquels se sont joint les partis d'opposition FDP et Alliance 90 / Les Verts. Le parti de gauche Die Linke a rejeté le texte tandis que le parti nationaliste AfD s'est abstenu, souhaitant l'interdiction pure et simple du mouvement[98].

Initiative « Boycott, désinvestissement et sanctions » au Maghreb

Depuis novembre 2010, la campagne BDS a un relais au Maghreb : le groupe BDS Maroc est né. Répondant lui aussi à l'appel lancé depuis la Palestine en 2005, il a déjà réalisé plusieurs conférences et publié une première brochure dénonçant la participation de VEOLIA au tramway de Jérusalem. Une première campagne a été menée contre la tenue au Maroc de la Convention nationale de l'UEJF (Union des étudiants juifs de France)[99].

Manifestant lors de la « marche du retour » à Rafah, sud de Gaza, avril 2019

Marche pour Gaza

La Gaza Freedom March (en) est une marche non-violente contre le blocus de Gaza, soutenue par le comité BDS, qui a lieu le 27 décembre 2009 à l'anniversaire de la guerre de Gaza de 2008-2009[100],[101].

Acteurs, soutiens, oppositions et critiques

Soutiens

La campagne est soutenue par des citoyens israéliens (Naomi Klein[102], Neve Gordon[103],[104], Eyal Sivan et Yael Lerer[105],[106]), des fédérations comme la JEPJ et la UJFP (dont [Michel Warschawski)[53], le mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples[107], le président de l’Assemblée générale de l’ONU Miguel d'Escoto Brockmann[108], l'islamologue Tariq Ramadan[109], la politologue Phyllis Bennis[110], des universitaires britanniques[111], canadiens[112], français[113] ou libanais[114], des personnalités de gauche[115], de syndicats canadiens, britanniques et sud-africains[116].

Le mouvement appelle à un boycott à la fois économique, politique, universitaire et culturel d'Israël. Le boycott culturel est soutenu par le musicien Roger Waters[Note 3], l'écrivain John Berger, Eduardo Galeano et Arundhati Roy[117],[118], ainsi que par les cinéastes Ken Loach[119] Jean-Luc Godard[120] et Eyal Sivan qui décident qu'ils ne participeront pas au festival de films israéliens.

Manifestation d'associations (Palestine Solidarity Campaign (en), Stop the War Coalition, British Muslim Initiative (en), etc.) pour le boycott des produits israéliens, Londres, 3 janvier 2009

La campagne est active dans des pays comme l'Australie[121], les Philippines[122], le Canada, l'Angleterre et dans d'autres paysBDS.

En réaction à la guerre de Gaza de 2008-2009, les gouvernements vénézuéliens et boliviens ont décidé un boycott politique à partir du 14 janvier 2009.

Le principal argument de soutien à la campagne BDS pour l'UJFP est un moyen, non pas « d’affamer le peuple israélien », mais plutôt touche une question d'« impunité »: l'objectif est de « faire comprendre aux Israéliens comme au reste du monde qu’il ne saurait y avoir d'impunité »[123].

Le sélectionneur norvégien de l’équipe nationale de football Egil Drillo Olsen et une centaine de personnalités norvégiennes issues du milieu de la culture ont signé une pétition ; selon le sélectionneur, le boycott est « nécessaire non seulement pour aider les Palestiniens mais aussi les opposants israéliens »[124].

En 2011, dans le cadre de la campagne de boycott, à la suite de pressions de l'association EuroPalestine à la sortie de l'un de ses concerts[125], la chanteuse Vanessa Paradis décide d'annuler un concert qu'elle devait donner le 10 février, à Tel Aviv-Jaffa[126],[127].

En mai 2013, dans le cadre de la campagne de boycott, Stephen Hawking fait savoir qu'il ne participera pas à un important colloque prévu en juin à Jérusalem. Dans une déclaration publiée avec son accord, le Comité britannique pour les universités palestiniennes (CBUP), qui soutient ce boycott et s'oppose à l'occupation des territoires palestiniens, explicite « sa décision prise en toute indépendance de respecter le boycott, sur la base de sa connaissance de la Palestine et des conseils unanimes de ses contacts académiques là-bas »[128],[129].

Opposition

Parmi les partis politiques qui s'opposent au BDS, on peut citer le Parti libéral d'Australie ainsi que les deux principaux partis politiques aux États-Unis[130],[131]. L'Union Européenne a aussi exprimé son opposition au boycott d'Israël[132]. Les raisons invoquées pour l'opposition au BDS sont que cela favorise l'antisémitisme et porte atteinte à la légitimité de l'État d'Israël.

Gene Simmons, chanteur du groupe de hard rock Kiss, déclara que les artistes qui boycottent Israël devraient plutôt diriger leur colère contre les dictateurs du monde arabe[133]. D'autres artistes ont exprimé leur opposition au BDS dont le chanteur John Lydon[134], le philosophe et romancier Umberto Eco[135], les réalisateurs Joel et Ethan Coen[136], l'auteur à succès J. K. Rowling[137], l'écrivain Hilary Mantel[137], l'actrice Helen Mirren[137], le guitariste Ziggy Marley[138], le musicien Jon Bon Jovi[139], l'animateur radio Howard Stern[139] ou l'acteur Edward Asner[140].


En 2013, Norman Finkelstein militant anti-sioniste prend position contre BDS ; selon lui, le mouvement Boycott, désinvestissement et sanctions a pour objectif de détruire Israël en utilisant le droit international, tout en niant son existence légale : « C’est de la pure et simple hypocrisie. Et personnellement, je ne veux rien n’y avoir à faire. Politiquement parlant, cette stratégie (celle de BDS) n'ira nulle part »[141],[142].

Critiques du boycott académique

Près de quarante lauréats du prix Nobel sont signataires d'une « Déclaration des Prix Nobel en réponse à la campagne BDS d’appel au boycott académique » dans laquelle ils indiquent :

« Convaincus que les appels au boycott, au désinvestissement et aux sanctions des institutions académiques et culturelles :

  • Vont à l’encontre des principes de liberté académique et scientifique
  • Contreviennent aux principes de liberté d’expression et de recherche
  • Sont susceptibles de constituer une discrimination en vertu de l’origine relative à un État nation

Nous soussignés, Lauréats du Prix Nobel, appelons les étudiants, les enseignants et administrateurs de facultés à vaincre et dénoncer les campagnes d’appels au boycott, au désinvestissement et aux sanctions à l’encontre des institutions académiques, universitaires ou affiliées à des centres de recherche et de formation israéliens.

De plus, nous encourageons les étudiants, les enseignants et administrateurs de facultés à promouvoir et fournir des opportunités au débat académiques citoyen pour que les parties s’engagent vers une résolution des conflits et des problèmes plutôt que de servir d’incubateurs à la défiance polémique, la propagande et l’incitation à la haine.

Nous nous sommes dévoués, comme beaucoup d’autres, en faveur de l’amélioration de la condition humaine en consacrant notre tâche souvent difficile et insaisissable à la compréhension de phénomènes complexes et insolubles en apparence. Nous sommes convaincus que l’Université œuvre en sa qualité de communauté coopérative et collaborative à la fois ouverte, tolérante et respectueuse, dédiée aux pratiques de résolution de problèmes complexes[143]. »

Le 24 mai 2005, 21 prix Nobel se déclarent opposés au boycott académique[144].

Le New Criterion, magazine culturel new-yorkais signale qu'« environ 300 présidents d'université déclarent que le BDS est hostile à l'esprit académique »[145].

Positions au sein des Nations unies

Le 29 novembre 2007, le Rapporteur spécial sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967 rend son rapport, en conclusion duquel il suggère d'interroger la Cour internationale de justice sur les conséquences légales d'un régime prolongé d'occupation comportant « des formes de colonialisme et d'apartheid »[146].

Le 28 novembre 2008, le président de l’Assemblée générale de l'ONU Miguel d'Escoto Brockmann appelle à envisager de participer à la campagne de Boycott, Désinvestissement et Sanctions[108].

En 2012, dans un rapport à l'assemblée générale de l'ONU, le controversé Richard Falk, rapporteur spécial de l'ONU sur la situation des droits de l'homme dans les territoires palestiniens occupés « considère que toutes les entreprises qui opèrent dans les colonies de peuplement israéliennes ou traitent avec elle (..) devraient être boycottées jusqu'à ce que leurs activités soient pleinement conformes aux normes et pratiques du droit international humanitaire ». Il demande à la « société civile » dans chaque pays de mener « de vigoureuses campagnes de boycottage, de désinvestissement et de sanctions » à l'encontre de ces entreprises[147]. Ce rapport sera désavoué par le secrétaire général de l’ONU et retiré du site de l’ESCWA[148]. Le soutien de Richard Falk à la campagne BDS est plus explicite encore dans une déclaration faite en 2012, par laquelle il manifeste sa solidarité avec Penn BDS, une organisation étudiante de l'université de Pennsylvanie[149].

Le 29 novembre 2012, juste avant le vote sur l'accession de la Palestine au rang d’État observateur non membre auprès de l'ONU, une réunion spéciale du Comité pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien donne la parole à plusieurs intervenant dont Roger Waters, fondateur des Pink Floyd. Celui-ci, après avoir rappelé les dernières déclarations du Tribunal de Russell sur la Palestine du 6 et 7 octobre, dit se féliciter des appels au boycott formulés par des étudiants de Californie ainsi que de l'appel de l’assemblée des églises presbytériennes des États-Unis, qui, à l'été 2012, ont demandé à boycotter les sociétés Caterpillar, Motorola et Hewlett-Packard[150].

Le 21 mars 2014, les médias rendent compte des propos tenus par Richard Falk, quelque temps avant la fin de son mandat auprès du Conseil des Droits de l'Homme des Nations unies pour les territoires palestiniens occupés. Ce professeur emeritus de l'Université de Princeton - mais néanmoins qualifié d'antisémite et de complotiste par différents organes officiels, des politiques ou des diplomates[148] - y dénonce à nouveau la politique d’Israël dans les territoires occupés, affirmant qu'elle présente, selon lui, les caractéristiques de « l'apartheid » et du « nettoyage ethnique »[151],[152].

Positions par diverses instances supranationales

En 2006 et 2007 l'OPGAI lance des appels en faveur de la campagne BDS au Forum social mondial altermondialiste[153].

Le mercredi 04 mars 2009, Ken Coates, Leila Shahid et Nurit Peled annoncent la création du Tribunal Russell sur la Palestine[154] lors d'une conférence de presse à Bruxelles. D'après ses initiateurs, ce tribunal d'opinion vise à « réaffirmer la primauté du droit international comme base de règlement du conflit israélo-palestinien » et à « éveiller les consciences sur la responsabilité de la communauté internationale dans la perpétuation du déni du droit du peuple palestinien »[155]. Lors de sa troisième session, au Cap, du 05 au 07 novembre 2011, le Tribunal se demande si « Les pratiques d’Israël envers le Peuple palestinien violent l'interdiction internationale de l'apartheid » ; circonstanciée, la réponse du « jury » est affirmative[156]. Après des sessions à Barcelone, Londres, Le Cap et New York, le Tribunal se réunit une dernière fois mi-mars 2013 à Bruxelles où il adopte 26 recommandations pour de futures actions[157].

En septembre 2009, le Conseil œcuménique des Églises se dit convaincu de la nécessité d'« un boycott international des biens produits dans les implantations israéliennes illégales en territoires occupés »[158]. Le Conseil œcuménique héberge sur son site l'appel lancé le 11 décembre 2009 par le collectif Kairos Palestine : A Moment of Truth ; A Word of Faith, Hope and Love from the Heart of Palestinian Suffering[159] (l'intitulé du document fait très explicitement référence à un document datant de 1985 et publié en Afrique du Sud pour lutter contre l'apartheid). Parmi les signataires du document Cairos, on trouve le centre théologique palestinien Sabeel (en)[160].

Le 26 avril 2010, a lieu à Bil'in une Conférence Internationale sur la Résistance Populaire de Bil’in qui appelle au renforcement de la campagne BDS[161].

En juin 2010, lors du deuxième congrès international de la Confédération syndicale internationale à Vancouver, Ofer Eini, le président de l'Histadrout, s'oppose avec succès à l'adoption d'une résolution en faveur de la campagne BDS[162]. En décembre 2010, la CSI exprime ses inquiétudes accrues et assure la PGFTU de son soutien[163].

Le 20 juillet 2016, la FIDH produit le communiqué de presse suivant : « La FIDH a tenu à formellement reconnaître et réaffirmer [à l’occasion de son Bureau international] le droit des personnes à participer pacifiquement et à appeler à des mesures de boycott-désinvestissement-sanctions (BDS) pour protester contre les politiques d’occupation et de discrimination du gouvernement israélien, et demande instamment aux États de respecter et de défendre les droits connexes de liberté d’expression, d’opinion, d’association et d’assemblée »[164].

Le 8 décembre 2016, une déclaration d'une centaine de juristes issus de 15 pays de l'Union Européenne est publiée sur le site du BDS et se positionne contre les mesures adoptées par certains gouvernements visant à proscrire le mouvement BDS[165].

Positions des autorités officielles européennes

Peinture murale réalisée par BDS UAB, Barcelone.

Le 15 septembre 2016, lors d'une séance du Parlement Européen, le Haut représentant de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, et vice-présidente de la Commission européenne, Federica Mogherini, répond à une question qui lui a été posée le 24 juin précédent par la députée irlandaise Martina Anderson. À celle-ci qui lui demandait de se prononcer d'une part sur les propos tenus par Yisrael Katz - en présence d'un représentant de l'Union Européenne en Israël - et d'autre part sur la liberté d'expression des militants BDS, Mme Mogherini répond d'abord que, de manière générale, l'UE condamne toute forme de menace et de violence à l'égard de défenseurs des droits de l'homme. Tout en réaffirmant fermement le principe de la liberté d'expression, dût-elle choquer certaines parties de la population, et rappelant la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, la vice-présidente précise toutefois ensuite que l'UE est opposée à la campagne BDS comme à tout boycott d’Israël[166],[167].

Dans son arrêt rendu le 11 juin 2020, la Cour européenne des droits de l’Homme (CECDH) reconnaît le boycott comme un « droit citoyen » et condamne les poursuites de la justice française contre des militants BDS de Colmar[81].

Position des États-Unis

La Chambre des représentants des États-Unis débat à partir de février 2015 d'une loi visant à interdire les accords commerciaux entre les États-Unis et les pays ou entités discriminant Israël. Le 29 juin 2015, le président Obama promulgue la loi Trade Promotion Authority (TPA) (en) qui autorise le président des États-Unis à négocier des accords de libre échange notamment l'Accord de partenariat transpacifique. Cette loi intègre des amendements qui, selon leur initiateur, le représentant Peter Roskam (co-président du groupe républicain du Congrès d'amitié avec Israël ou House Republican Israel Caucus), visent également à terme à conditionner tout accord de libre-échange avec l’Union européenne (Partenariat transatlantique de commerce et d'investissement) à son rejet de BDS[168],[169]. Ces dispositions de la loi TPA ont été adoptées à l'unanimité de la Chambre des représentants et du Sénat[168]. Un porte-parole du département d'État, John Kirby remarque toutefois dès le lendemain, qu'« en confondant Israël et les territoires contrôlés par Israël, l'amendement va à l'encontre de la politique longuement établie des États-Unis »[170].

S'il n'existe pas au niveau fédéral de loi s'opposant au mouvement BDS, plusieurs états américains ont fait adopter par leurs parlements des textes destinés à contrer le développement de la campagne de boycott d’Israël. Plus précisément la Floride, l’Illinois, la Caroline du Sud, l'Indiana et l'Arizona ont fait adopter en 2015 des lois qui obligent l'état à désinvestir de toute compagnie qui boycotte Israël sur base d'une liste établie par l'organisation Americans for Peace Now (en). De même le Sénat de la Géorgie a adopté le 24 mars 2016, par 41 voix contre 8, une loi déjà votée par la Chambre des Représentants (95 pour – 71 contre), qui interdit à l’État de passer quelque contrat que ce soit avec des entreprises ou des individus qui ne s’engageraient pas, pour toute la durée des relations contractuelles avec l’État, à ne pas boycotter Israël et/ou les entreprises dans les territoires contrôlés par Israël[171].

En outre, onze autres états – notamment la Californie, le Colorado, l’Iowa, le Massachusetts, le New Jersey l’état de New York et la Virginie – envisagent d’adopter des dispositions similaires. Le Kansas et la Pennsylvanie débattent sur une législation qui priverait de subventions publiques les universités qui boycottent Israël. Enfin six autres états, dont le Tennessee, le Maryland et le Massachusetts, ont adopté ou envisagent d’adopter une résolution non-contraignante condamnant le boycott d’Israël. Au total en janvier 2018, ce sont 24 États qui ont déjà adopté une législation anti-BDS[172].

En Allemagne

Le 17 mai 2019, le Parlement allemand adopte une résolution condamnant le BDS comme étant antisémite et exhorte le gouvernement à ne pas financer ou soutenir des groupes ou activités qui remettent en question le droit d’Israël à exister et à se défendre. Cetter résolution est votée par la CDU, le Parti social-démocrate d'Allemagne (SPD), les Verts (Alliance 90 / Les Verts) et le Parti libéral-démocrate (FDP)[173].

En Autriche

Le 11 décembre 2019, l'ensemble des partis représentés au Parlement autrichien acceptent de soutenir le texte d’une résolution qui condamne l'antisémitisme et accuse le BDS de recourir «  à des rhétoriques antisémites » et « de remettre en doute le droit d’Israël à exister en réclamant un droit du retour pour les réfugiés palestiniens et leurs descendants ». il est prévu que le Parlement adopte cette résolution en janvier 2020[174].

En France

Selon une enquête Ipsos commandée par la Fondation du Judaïsme Français en 2017, il semblerait que cette campagne ait trouvé un écho limité dans l’opinion publique en France. Seuls 33 % des Français disent en ont déjà entendu parler. Le mouvement de boycott d’Israël est très majoritairement désapprouvé des Français, sauf au sein de la gauche radicale. Ainsi, près d’un sympathisant de gauche radicale sur deux (46 %) est en accord avec cette opinion, contre un tiers (32 %) des Français dans leur ensemble. 68 % des Français pense que « ce boycott est mis en place par des organisations qui souhaitent avant tout détériorer l’image d’Israël, quelles que soient les politiques mises en place par ses gouvernements »[175].

Positions gouvernementales et situation législative

Le 10 décembre 2002, l'Assemblée nationale adopte à l'unanimité une loi visant à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe (loi no 2003-88 du 3 février 2003 parue au JO no 29 du 4 février 2003 appelée aussi Loi Lellouche d'après Pierre Lellouche qui en prit l'initiative)[176],[177].

En mars 2003, c'est à la demande du ministère de la Justice que le procureur interjette appel du jugement de première instance qui disculpait Jean-Claude Willem, maire de Seclin de toute accusation de discrimination après qu'il a appelé au boycott de jus de fruits israéliens par ses services communaux. La procédure aboutit en juillet 2009 à la condamnation du maire[178].

Le mercredi 20 mai 2009, interrogée lors des questions d’actualité par le député Éric Raoult (auquel s'associent Claude Goasguen, Patrice Calméjane, Gérard Gaudron et Patrick Beaudouin) au sujet de l’intervention d’associations de défense de la cause palestinienne dans des grandes surfaces, Madame Michèle Alliot-Marie, alors ministre de l’Intérieur, répond que « si des plaintes précises étaient déposées, ou si des infractions pénales étaient constituées, des poursuites auraient lieu » ; elle indique qu’à cette date, aucune plainte n’a été déposée et ajoute que « ces opérations, il faut bien le préciser, touchent des produits importés d’Israël et non des produits casher »[179],[180].

Le 3 février 2010, lors d'un dîner au CRIF, le Premier Ministre, François Fillon rappelle que l'appel au Boycott expose à des sanctions pénales[181]. À l'occasion de ce dîner, François Fillon déclare « Nous devons rester lucides sur l’incroyable facilité avec laquelle se développent et s’expriment les amalgames les plus odieux. Je pense ainsi à ces scandaleux mouvements de boycott de produits cashers ou israéliens »[182]. Le 16 février 2010, le député Daniel Garrigue, pose une question écrite au Premier Ministre, François Fillon, au sujet de l'amalgame que ce dernier avait fait entre les produits israéliens et les produits casher lors du déjeuner du Crif (la réponse, partielle, ne sera publiée qu'un an et demi plus tard, en septembre 2011)[179].

Le 10 février 2010, Sakina Arnaud, qui avait participé à une action dans un supermarché de Mérignac, le 30 mai 2009, est condamnée par le tribunal correctionnel de Bordeaux à une amende pénale de 1 000 euros pour « incitation à la discrimination raciale, nationale et religieuse » ; la militante, qui ne nie pas les faits, fait appel du jugement[183].

Le 12 février 2010, sous l'autorité de Michèle Alliot-Marie, Ministre de la justice, la Direction des Affaires criminelles et des grâces publie une circulaire de politique pénale ayant pour objet les « Procédures faisant suite à des appels au boycott des produits israéliens ». Par cette circulaire (CRIM-AP, 12 février 2010, no 09-900-A4)[184] ultérieurement qualifiée de « circulaire Alliot-Marie », la ministre demande aux procureurs une « réponse cohérente et ferme » face aux appels au boycott des produits israéliens en se basant sur la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse réprimant en son article 24, alinéa 8, la provocation publique à la discrimination.

Le 19 février 2010, lors d'un dîner du CRIF, Michèle Alliot-Marie affirme sa détermination à poursuivre tout acte antisémite ; c'est dans cette perspective qu'elle déclare notamment: « Je n’accepte pas que des personnes, responsables associatifs, politiques ou simples citoyens, appellent au boycott de produits au motif qu’ils sont kasher ou qu’ils proviennent d’Israël »[185].

Après le remaniement ministériel du 14 novembre 2010, Stéphane Hessel, l’ancienne garde des Sceaux Élisabeth Guigou et la vice-présidente du Sénat Catherine Tasca, rencontrent le nouveau garde des Sceaux, Michel Mercier, pour lui remettre un appel demandant que cessent les poursuites contre les militants de la campagne BDS[186].

Le 19 novembre 2010, Benoist Hurel, secrétaire général adjoint du syndicat de la magistrature, dénonce dans le journal Libération l'« attentat juridique » assimilant les appels au boycott à une « provocation publique à la discrimination envers une nation » punie d’un an d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende[187]. Cette tribune s'accompagne d'une pétition signée par des professeurs des universités, avocats, magistrats et personnalités dont Eva Joly, Pierre Joxe et Élisabeth Guigou, Olivier Besancenot, Marie-George Buffet, Daniel Cohn-Bendit, ou Cécile Duflot, d’intellectuels comme le philosophe Edgar Morin, et de journalistes comme Hubert Debbash ou Laure Adler[188].

Le 15 mai 2012, deux jours avant la prise de fonction de Christiane Taubira, la circulaire Alliot-Marie est précisée et complétée par une nouvelle circulaire adoptée sur les instructions du garde des Sceaux Michel Mercier : circulaire ayant pour objet les « Poursuites engagées sur le fondement de l’article 24 alinéa 8 de la loi du 29 juillet 1881 en matière de boycott des produits israéliens », (CRIM-AP no 2012-0034-A4)[189],[188].

Dans un article paru dans Libération en avril 2014, Rony Brauman avec le professeur de droit international François Dubuisson, le magistrat Ghislain Poissonnier et l'avocat Pierre Osseland contestent le bien-fondé juridique de la « circulaire Alliot-Marie ». D'après eux, cette circulaire interprète la loi de 1881 (en son article 24 alinéa 8) « de manière extensive, en contradiction avec la règle de l’interprétation stricte des lois pénales ». Ils indiquent également que la Garde des Sceaux, Christiane Taubira, a reconnu que cette circulaire contenait une interprétation de la loi qui pouvait être considérée comme «injuste» ou « abusive ». Affirmant enfin que le droit européen, notamment la convention européenne des droits de l'homme, interdit la pénalisation de propos appelant à des mesures coercitives (boycott, embargo, suspension de la coopération, gel des avoirs, retrait des investissements, etc.) contre un État critiqué pour ses violations du droit international, les auteurs de l'article demandent l'abrogation immédiate de la circulaire Alliot-Marie[190]. Dans un article publié en ligne début 2015 dans la « Revue des Droits et Libertés Fondamentaux », Ghislain Poissonnier et Jean-Christophe Duhamel contestent les fondements juridiques des circulaires Alliot-Marie et Mercier[188].

Lors de la séance des questions au gouvernement du 16 décembre 2015, le Premier ministre Manuel Valls estime que les campagnes de boycott n’ont « aucun sens ». Il ajoute : « Il y a trop souvent, dans un certain nombre d’initiatives (…) la volonté de confondre critique légitime de la politique de l'État d’Israël, avec l’antisionisme, et l’antisionisme qui bascule dans l’antisémitisme »[191]. Le 18 janvier 2016, il fustige une manifestation de BDS devant l'Opéra Garnier qui accueillait la troupe israélienne Batsheva : « Cette manifestation devant l’Opéra Garnier était d’autant plus absurde qu’on mettait en cause la culture »[192]. Parallèlement, la majorité des artistes de Batsheva sont pro-palestiniens (certains sont Arabes) et l'un des fondateurs de BDS, Omar Barghouti, est défavorable au boycott culturel.

Dans les médias

Le Monde diplomatique[193], Le Monde libertaire[194], Le Monde[195],[196],[197],[198],[199],[200],[201],[202],[203], Libération[204] et d'autres médias publient des tribunes sur l'implication de BDS dans le conflit du Moyen-Orient.

Partis politiques

En décembre 2009, les élus du groupe Parti de Gauche et apparentés, rassemblant des élus du Parti de gauche et du NPA, ont déposé un vœu au Conseil régional de Rhône-Alpes afin d'inciter la région à participer à la campagne « Boycott, désinvestissement et sanctions » ; ce vœu n'ayant pas eu le quorum de soutiens nécessaire, il n'a pas été examiné[205]. Un représentant du groupe UDC (rassemblant UMP et divers droite) s'exprimant lors de l'examen d'une délibération déposée par son groupe, parla, à propos de ce vœu, d'une « dérive », soulignant notamment que ce vœu ne faisait pas partie des attributions de la Région, et qu'il n'en ressortait rien permettant une action de la Région[206].

Le 21 septembre 2010, dans un communiqué de presse, le NPA (Nouveau Parti Anticapitaliste) qui se dit « totalement engagé dans la campagne BDS » appelle « à intensifier celle-ci » et déclare qu'il « apportera son soutien aux militantes et militants poursuivi-e-s »[207].

Le 8 novembre 2010, Martine Aubry, alors première secrétaire du Parti socialiste, réaffirme la position du PS concernant la campagne BDS, lors d'un repas organisé par le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), en indiquant notamment : « J'ai toujours combattu avec la plus grande détermination les tentatives faites par certains de vouloir importer le conflit du Proche-Orient dans notre ville. », « Je pense que ceux qui prônent le boycott se trompent de combat : au lieu de porter la paix, ils portent l'intolérance, ils portent la haine. Et quand on veut un chemin de paix, on ne commence pas par porter cela. » La secrétaire du PS a rajouté que si « deux, trois » autres élus socialistes soutiennent ce boycott, « nous discutons avec ces camarades pour essayer de leur faire comprendre que ce n'est pas pour nous l'élément qui va conduire à ce que nous recherchons ensemble »[208].

Le 16 novembre 2013, le Bureau national du Parti de gauche s’engage à nouveau dans le soutien aux campagnes de BDS France[209].

Le 16 février 2015, le Conseil de Paris adopte un « vœu » condamnant le mouvement de boycott d'Israël. Ce « vœu » rappelle que Paris et sa maire Anne Hidalgo (PS) « ont de manière constante affirmé leur opposition au mouvement de boycott d'Israël et dans le même temps, leur attachement à la promotion de la paix entre Israéliens et Palestiniens ». Les élus PS, Républicains PRG et UDI-Modem ont approuvé ce vœu quand les élus PCF-FG et EELV ont voté contre[210].

Associations
  • Association culturelle israélite du Nord

À la suite d'un appel au boycott lancé en octobre 2002 par le maire de Seclin lors d'un conseil municipal, propos repris par « La Voix du Nord », l’Association culturelle israélite du Nord dépose plainte auprès du ministère public qui décide des poursuites pour provocation à la discrimination nationale, raciale et religieuse, au titre de la loi sur la presse du 29 juillet 1881. Le 26 mars 2003, le tribunal correctionnel de Lille rend d'abord un jugement favorable au maire ; sur demande du ministre de la Justice, le procureur général interjeta appel de ce jugement, l’association culturelle s'associant ultérieurement à cette procédure. L'affaire parvient finalement devant la Cour européenne des droits de l’homme, le 17 mars 2005, qui rend un avis définitif le 16 juillet 2009, défavorable au maire. Un des sept juges, Karel Jungwiert émet une opinion dissidente[178].

  • BNVCA

Le 11 juillet 2010, le BNVCA (Bureau national de vigilance contre l'antisémitisme), sous l'autorité de son président Sammy Ghozlan, déclare porter plainte pour « incitation à la haine raciale » contre Stéphane Hessel à la suite de l'article de celui-ci dans le « Huffington Post » (cf ci-dessus)[211] (le site du BNVCA ne donne aucune information sur la suite donnée à cette initiative ; à propos de laquelle, au décès de Hessel en 2013, aucune information ne semble connue)[212]. Le 2 mars 2011, le président du CRIF, Richard Prasquier, lassé par la forme plutôt que le fond des initiatives prises par S. Ghozlan « depuis quelques mois », estimant qu'elles peuvent aller à l'encontre des intérêts défendus par son organisation, décide de suspendre Ghozlan pendant trois mois de sa participation au comité directeur du Crif ; il lui renouvelle toutefois son estime[213].

  • MRAP

Le 06 septembre 2010, le MRAP (mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples) réaffirme son « appel au boycott des produits israéliens issus des colonies »[214].

  • Ligue des droits de l'homme (LDH)

Le 22 septembre 2010, Jean-Pierre Dubois, alors président de la Ligue des droits de l'homme (LDH), se déclare « clairement hostile au boycott des produits israéliens ». Fort de cette déclaration, faite peu avant une audience à Bordeaux dans le cadre du procès intenté à Sakina Arnaud, il s’élève « avec force contre la qualification des accusations qui ont été portées contre elle », les trouvant « dramatiquement illogiques » et même insultantes, voire infamantes et se dit solidaire de Sakina Arnaud pour « défendre sa liberté constitutionnelle d’expression, laquelle inclut à l’évidence la critique de la politique menée par un État étranger quel qu’il soit »[215].

  • CRIF

Dans un texte intitulé « Délégitimation de l’État d’Israël par la campagne de boycott BDS », Pascal Markowicz se dit mandaté par le CRIF pour surveiller de « très près tous les évènements qui touchent au boycott », « en étroite collaboration avec l’Ambassade d’Israël en France ». Il indique avoir créé avec Marc Knobel « une cellule BDS au sein de l’Ambassade... afin de faire le point sur la campagne BDS, les procédures judiciaires en cours ainsi que sur les autres réponses ». Il écrit encore : « le CRIF par le biais de sa Commission Juridique recense et encourage les associations qui décident de poursuivre devant les tribunaux, les groupes et personnes physiques qui veulent boycotter Israël »[67]. En février 2012, le CRIF fait connaître son opposition à la tenue d'un colloque « Des nouvelles approches sociologiques, historiques et juridiques à l'appel au boycott international : Israël, un État d'apartheid ? » prévu les 27 et 28 février dans le cadre de l'« Israël Apartheid Week » à l'université Paris-VIII. La direction de l’université, qui avait pourtant non seulement accordé son autorisation mais également soutenu l’initiative en lui attribuant un financement du Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes, décide d'annuler le colloque[216],[217].

  • LICRA

La LICRA, Avocats sans frontières France, l’Alliance France Israël, le BNVCA et la Chambre de commerce France Israël se sont portées parties civiles dans un procès intenté contre douze militants de la région mulhousienne qui avaient incité des consommateurs à boycotter les produits d’Israël[218]. Dans une interview du 04 février 2010 au « Figaro » à l'occasion de son élection au comité directeur du CRIF, William Goldnadel, président de France-Israël et d'Avocats sans frontières, se dit « très engagé judiciairement dans la lutte contre le boycott des produits israéliens depuis le début »[219].

  • UJFP

L'UJFP (Union Juive Française pour la Paix) soutient activement et avec constance la campagne BDS.

Syndicats

Annick Coupé porte-parole nationale de l'Union syndicale Solidaires manifeste son soutien à la campagne BDS en signant l'appel publié dans Le Monde en novembre 2010[220].

Le 25 mai 2010, la Commission exécutive de la CGT publie un long communiqué où, après avoir rappelé l'illégalité de l'occupation, la « répression mais aussi à l’exploitation » des travailleurs palestiniens, mais aussi l'opacité de l'étiquetage des produits made in Israël, elle déclare que « Les campagnes actuelles de boycott ne s’inscrivent pas dans cette logique politique » (faisant référence à la logique que la CGT entend poursuivre). Par ailleurs, la CGT, malgré cette prise de distance, déclare qu'« il y a urgence à multiplier et à renforcer les pressions et les sanctions contre la politique israélienne, pour cela elle appelle ses organisations et les citoyens à se mobiliser pour le respect du droit international »[221].

le 31 janvier 2014, Thierry Lepaon secrétaire général de la CGT fait une mise au point en précisant que, contrairement à ce qu'avait affirmé le CRIF, son syndicat ne s'opposait pas à la campagne BDS mais plutôt « ne s’inscrivait pas dans cette campagne » ; à cette même occasion il réaffirme les droits des Palestiniens et précise que des militants CGT participent à titre individuel à la campagne BDS. Thierry Lepaon déclare même : « nous considérons que le boycott global d’Israël ne favorise pas cette stratégie de paix et la coexistence de deux États, l’État Palestinien et l’État d’Israël. Par contre, la CGT s’inscrit totalement dans la campagne d’interdiction des produits fabriqués dans les colonies et dans l’obligation de transparence sur l’origine des produits israéliens destinés à l’exportation afin que l’État d’Israël soit contraint de respecter le droit international »[222].

Développements judiciaires

Plusieurs actions juridiques ont accompagné les campagnes de boycott des produits israéliens. Devant les tribunaux, les tenants dénoncent la qualification d'origine israélienne des produits cultivés par des colons israéliens en Cisjordanie et dans le Golan dont ils soulignent l'occupation. Les opposants avancent quant à eux une « discrimination commerciale » voire « raciale », en particulier quand l'appel au boycott vise l'ensemble des produits israéliens.

Le 18 décembre 2013 Christiane Taubira fait état de 45 procédures (dont certaines en appel) et de deux condamnations (d'amende avec sursis).

Le recueil Dalloz dans son édition du 23 janvier 2015 consacre dans ses actualités un article intitulé « Appel au Boycott (produits israéliens) : entrave à l'exercice normal d'une activité économique »[223].

En octobre 2015, la Cour de cassation a confirmé la condamnation de militants du BDS qui avaient « invité à deux reprises les clients d’un supermarché alsacien à ne pas acheter des produits israéliens dans le cadre de la campagne BDS »[224],[225]. Ces arrêts ont fait de la France l'un des seuls pays du monde, et la seule démocratie, à interdire l'appel au boycott par un mouvement associatif ou citoyen pour critiquer la politique d’un État tiers[226]. En juin 2020, la CEDH condamne la France dans cette affaire estimant qu'il y a atteinte à la liberté d’expression, le cour estime que les propos reprochés concernaient un sujet d’intérêt général et que l'Article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme « ne laisse guère de place pour des restrictions à la liberté d’expression dans le domaine du discours politique ou de questions d’intérêt général. Par nature, le discours politique est souvent virulent et source de polémiques. Il n’en demeure pas moins d’intérêt public, sauf s’il dégénère en un appel à la violence, à la haine ou à l’intolérance »[227],[228].

Fin décembre 2015, le gouvernement britannique annonce qu'il est en train de rédiger de nouvelles directives pour empêcher les autorités locales de mettre en place leurs propres campagnes de boycott et de sanction[229].

Autour de la campagne BDS
  • En septembre 2010, un collectif d'organisations marseillaises[230] porte plainte contre la société Carmel-Agrexco, contrôlée à 50 % par le gouvernement israélien et qui exporte des fruits et légumes vers la France. Cette plainte s'appuie sur l’arrêt BRITA rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 25 février 2010, qui affirme qu'Israël ne peut faire bénéficier les produits fabriqués en Cisjordanie des accords préférentiels UE-Israël.
  • Sakina Arnaud, militante de la Ligue des droits de l'homme qui participait à la campagne BDS en apposant des autocollants sur des produits israéliens, est poursuivie pour « incitation à la discrimination raciale, nationale et religieuse ». Elle affirme être contre « l’occupation des territoires palestiniens » et déclare ; « Je serai la première à acheter des produits israéliens quand cessera l’occupation »[231]. La Ligue des droits de l'homme a vivement contesté l'incrimination[232]. Le MRAP justifie l'action de Sakina Arnaud en évoquant la provenances des produits israéliens (les Territoires occupés) déclarant que « demander le boycott des produits israéliens qui ne respectent pas les accords UE-Israël, imposant une traçabilité des produits des colonies, est légitime et la campagne BDS (Boycott, Désinvestissement, Sanctions) - dans laquelle s’inscrit l’action de Sakina Arnaud - ne peut être suspectée de racisme, sauf à considérer que le boycott de produits importés dans des conditions illégales au regard des lois internationales représente une discrimination raciale ou religieuse »[233]. La Chambre de Commerce France-Israël s'est également exprimée sur le sujet[234], en déclarant que « l’objectif des organisations qui appellent au boycott est de nier la légitimité de l’État d’Israël en faisant passer la seule démocratie du Moyen-Orient pour un état raciste qui pratique l’apartheid », remarque que le boycott des produits fabriqués en Cisjordanie pénalise aussi bien les Israéliens que les Palestiniens, et dénonce l'attitude des organisations favorables au boycott, qui au lieu de porter plainte, s'érigent en gendarmes. M. Goldanel, président de l'association Avocats Sans Frontières s'étonne de la focalisation sur Israël en soulignant que le MRAP n'a jamais appelé au boycott de produits fabriqués dans des dictatures comme l'Arabie saoudite ou le Soudan génocidaire[235]. Condamnée en appel, Sakina Arnaud s'est pourvue en cassation. Déboutée en cassation, Sakina Arnaud a décidé de porter l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme avant de se raviser.
Autour du boycott général des produits israéliens
  • En 2002, un maire français est condamné à 1 000 euros d'amende pour « provocation à la discrimination » à la suite d'un appel demandant à « ses services de boycotter les produits originaires de l'État hébreu pour protester contre la politique du gouvernement israélien vis-à-vis du peuple palestinien. » La condamnation est confirmée en 2009 par la Cour européenne des droits de l'homme qui estime que le maire devait faire preuve de réserve dans des actes engageant sa communauté et que la condamnation vise à protéger les producteurs, un acte « nécessaire dans une société démocratique ». Le droit à la liberté d'expression n'est retenu que par un juge sur les 6[236].
  • Le 14 octobre 2010, la sénatrice Alima Boumediene-Thiery (Verts) et Omar Slaouti (NPA) sont convoqués par le Tribunal Correctionnel de Pontoise à la suite de leur participation à une action de boycott des produits israéliens dans le magasin Carrefour de Montigny. Ils sont accusés de discrimination raciale et commerciale. Se portaient parties civiles lors de cette audience les associations Avocats sans frontières, France-Israël, le Bureau National de Vigilance Contre l'Antisémitisme, et la Chambre de Commerce France-Israël. Le Tribunal a relevé lors de cette audience une irrégularité de forme concernant la procédure, considérée comme prescrite et n'a pas examiné le fond du dossier[237].

En Grande-Bretagne

Le gouvernement britannique annonce le 15 février 2016 qu'il allait interdire aux institutions anglaises recevant des fonds publics, telles que les universités ou les mairies, de boycotter des produits israéliens. Les boycotts « empoisonnent et polarisent le débat, affaiblissent l'intégration et alimentent l'antisémitisme », a estimé le gouvernement dans un communiqué[238].

Au Canada

Le 22 février 2016, le Parlement canadien adopte à une large majorité une motion condamnant le mouvement BDS[239].

Unifor, le plus grand syndicat canadien du secteur privé avec plus de 310 000 membres à travers le pays, adopte une résolution soutenant le mouvement BDS lors d'un congrès à Winnifred du 18 au 20 août 2017[240].

En août 2016, une enseignante de Mississauga (Ontario) est suspendue de ses fonctions pour avoir pris la parole lors d’un rassemblement en faveur du mouvement[241].

Au Chili

Le Contrôleur général du Chili (en) déclare, en début décembre 2018, illégal le boycott d'Israël par des municipalités car les relations internationales relèvent de l'État. Cela intervient après que la municipalité de Valdivia a décidé de boycotter Israël[242],[243].

Aux Émirats arabes unis

Après l'accord de normalisation entre Abu Dhabi et l'État hébreu annoncé le 13 août 2020, le président des Émirats arabes unis, cheikh Khalifa ben Zayed Al Nahyane abroge le 29 août « le boycott d'Israël ainsi que les sanctions en découlant »[244].

Réactions en Israël

Société civile

En Israël, les adversaires de l’occupation se montrent divisés sur la question du boycott[245]. Déjà en 1997 l'organisation pacifiste Bloc de la paix (Gush Shalom) préconise déjà le boycott des seules entreprises et institutions israéliennes actives dans les territoires colonisés de Cisjordanie[246].

En mai 2003, lors d'une brève visite aux États-Unis, l'universitaire Israélien Ilan Pappé, qui regrette l'incompétence du lobby pro-palestinien américain, fait part de son opinion sur les pressions qu'il conviendrait d'exercer sur le gouvernement israélien. Lors d'une rencontre privée, interrogé par le Washington Report on Middle East, qui rapporte ces propos, Pappé appelle la communauté palestinienne des États-Unis à s'organiser et à lancer une vaste campagne d'information et d'action. Il précise : « If a divestment campaign is to succeed, it must have as wide a coalition as possible and it must make clear that it isn’t designed to de-Zionize Israel, but that it rather is a means of putting an end to the occupation »[247].

En 2003 est créée AATW (Anarchists Against The Wall) une association dont la direction est surtout palestinienne et qui promeut l'action directe. Certains de ses membres se joindront plus tard à Boycott! Supporting the Palestian BDS Call from Within. Tel est le cas du mathématicien Kobi Snitz[248].

Le 20 août 2009, Neve Gordon, qui enseigne les sciences politiques à l'université Ben-Gurion University de Beersheba, appelle au boycott d’Israël dans un article paru dans le Los Angeles Times[249],[250].

L'historien Ilan Pappé appelle les universitaires israéliens à se joindre au boycott[251]. Le professeur de linguistique Tanya Reinhart, décédée en mars 2007, soutenait le boycott universitaire[252].

La réponse de la Coalition of Women for Peace lors du lancement de la campagne BDS, qui suscite en son sein des débats soutenus, consiste d'abord à créer (en 2006) un groupe d'étude baptisé Who Profits from the Occupation ? ; sur la base des informations rassemblées, au vu aussi du développement de la campagne BDS mais aussi des évènements dramatiques survenus entretemps, la coalition décide en novembre 2009 de soutenir l'initiative BDS[253]. L'ONG Who Profits, née de la coalition d'associations féministes israélo-palestiniennes arrive au constat que les productions des colonies juives ne représentent qu'un faible enjeu financier ; l'ONG fait par contre valoir qu’il existe une grande implication de l’économie israélienne en son entier dans les territoires occupés[254].

En 2009 est créée l'organisation Boycott! Supporting the Palestian BDS Call from Within (en)[46]

Fin août 2010, 60 acteurs, scénaristes et metteurs en scène israéliens font connaître leur refus de se produire dans le nouveau théâtre de la colonie d'Ariel. Cette prise de position, qui vient briser ce qui apparaissait jusqu'alors comme un consensus (le rattachement d'Ariel à Israël), intervient peu après la publication de la programmation théâtrale pour la saison 2010-2011 et alors que des négociations de paix pilotées par les Américains redémarrent. (Cinq institutions théâtrales renommées, recevant des fonds publics - Théâtre National d’Israël, le théâtre municipal de Tel Aviv notamment - prévoient de tourner des spectacles à Ariel)[255],[256]. Le 30 août 150 universitaires israéliens font connaître leur soutien par voie de presse aux artistes ; une autre lettre de soutien, émanant d'écrivains et d'artistes, est alors attendue[257]. Début septembre, le soutien aux artistes prend une dimension internationale (parmi les 150 signataires du monde du cinéma ou du théâtre on trouve : Julianne Moore, Theodore Bikel, Vanessa Redgrave et Tony Kushner). Fin septembre, l'architecte Frank Gehry et le chef d'orchestre Daniel Barenboim rejoignent la campagne internationale de soutien aux acteurs israéliens ayant refusé de se produire dans la colonie d'Ariel[258].

Le 27 janvier 2010, l'ICAHD réitère son appel (formulé en 2005) en l'associant explicitement à la campagne BDS.

Le 30 janvier 2014, Zeev Sternhell signe un important article dans l'Haaretz[259],[260].

Réactions des autorités israéliennes

En 2005, avec l'aide d'une agence de marketing américaine, l’État d’Israël lance une vaste campagne de communication appelée « Brand Israel » la « marque Israël »[261]. Aux artistes israéliens souhaitant se produire à l'étranger il est proposé depuis 2008 un contrat très explicite où, en échange du financement de leur billet d'avion et des frais sur place, les artistes s'engagent à « promouvoir les intérêts politiques de l’État d'Israël à travers la culture et les arts, ce qui inclut de contribuer à créer une image positive d'Israël »[262]. Sarah Schulman pointe le recours au Pinkwashing par les autorités israéliennes[263].

En décembre 2009, en réaction à la décision de Londres de marquer les produits israéliens fabriqués en Cisjordanie ou dans le Golan, un peu moins de 50 députés signent une pétition appelant à boycotter les entreprises et les produits britanniques[264].

En février 2010 le Reut Institute (en), un important think tank Israélien, recommande aux autorités israéliennes de considérer BDS comme une menace stratégique. Le ministère des Affaires Étrangères israélien lance une campagne intitulée The Campaign to Defame Israel[265],[266].

Le 11 juillet 2011, la Knesset (parlement israélien) vote, par 47 voix contre 38, une « Loi pour la Prévention des dommages envers l'État d'Israël par le boycott » (en). La loi, initiée par le député Zéev Elkin[267], est votée en deuxième et troisième lecture alors que le Premier ministre et plusieurs ministres de premier plan étaient absents (comme Ehud Barak, le ministre de la Défense, ou Avigdor Liberman le ministre des Affaires étrangères) ; Reuven Rivlin, le président de la Knesset n'a pas pris part au vote ; les députés du parti Haatzmaout, dirigé par Ehud Barak, n’ont eux non plus pas voté. Le conseiller juridique de la Knesset, Eyal Yinon décrit certains points de la loi comme « à la limite de l’anticonstitutionnalité » mais affirme que cette loi pourra être défendue devant la Cour suprême si des recours sont déposés devant cette juridiction (comme beaucoup s'y attendent)[268]. La loi est entrée en vigueur à partir du 11 octobre 2011 et permet à toute partie qui se sentirait lésée de poursuivre au civil toute personne ou organisation qui appellerait à un boycott économique, culturel ou académique d'Israël[269]. 53 organisations de la société civile d'Israël avaient conjointement signé une lettre adressée au président de la Knesset, M. Reuven Rivlin, en février 2011, pour protester contre la proposition de cette loi[270]. Uri Avnery dans Haaretz développe des arguments contre cette loi[271].

À la suite des recours déposés, la Haute Cour de Justice suspend la loi anti-boycott en décembre 2012.

Dimanche 09 février 2014, un recours est déposé devant la Haute Cour contre l’illégalité de l'appel au boycott de biens issus de Cisjordanie[272]. Le dimanche 16 mars 2014 une commission composée de neuf magistrats de la Haute Cour entend les arguments de représentants d'ONG (Bloc de la paix, Adalah (en), l'association pour les droits civils en Israël (ACRI), Liste arabe unie - Ta'al), contestant la constitutionnalité de la loi. Si les magistrats sont prêts à reconnaître l'illégalité de l'interdiction de l'appel au boycott de produits issus des territoires occupés après 1967, ils sont par contre d'avis que cette interdiction, portant sur le territoire d’Israël de 1948 est condamnable[273].

Haredim israéliens, militants pro-palestiniens dont ceux du groupe religieux juif Naturei Karta, 2009

Début 2014, au vu du contexte international, et de la progression de l'adhésion des opinions à l'idée d'un boycott - sinon total du moins partiel -, les autorités israéliennes sont divisées sur la position qu'il convient d'adopter par rapport à la campagne BDS. Fin janvier, des propos publics du ministre des finances israélien suscitent une émotion certaine : s'interrogeant sur la réaction des européens consécutive à un éventuel échec des négociations en cours avec les palestiniens, Yair Lapid donne une brève évaluation de l'impact économique qu'aurait un boycott européen sur l'économie israélienne. Le ministère des finances israélien a fait savoir qu'il disposait d'un rapport plus substantiel sur ce sujet[274],[275]. Yair Lapid a tenu ces propos le 29 janvier lors d'une conférence ayant lieu à l'institut d'études sur la sécurité nationale, quelques heures seulement après une réunion de travail de Benjamin Netanyahu avec ses principaux ministres au sujet du boycott. Cette réunion, une première du genre pour ce gouvernement, était suscitée par les récentes décisions d'un fonds de pension hollandais PGGM[276].

Signe de l'écho de la campagne BDS dans la société israélienne, mais également de l'usage médiatique qui peut en être fait, la menace du boycott est brandie à des fins et avec des intentions différentes de celles défendues par les militants BDS. Ainsi, début mars 2014, Meïr Porush, ancien ministre fait savoir qu'il résiste à grand peine aux pressions émanant de sa communauté haredim en faveur d'un boycott des produits issus de Cisjordanie (ces appels au boycott manifestent l'opposition des haredim au projet de réforme du service militaire mettant fin à l’exemption dont bénéficient les étudiants des yeshivot)[277],[278].

Position de représentants palestiniens

Graffiti à Hebron (Cisjordanie)

En janvier 2002, Shaher Saed figure éminente du PGFTU (Palestinian General Federation of Trade Unions) appelle les européens à exercer des sanctions contre le gouvernement Sharon ; Saed demande notamment à l'Europe de cesser d'importer des biens d’Israël tant que dure l'occupation des territoires[279].

Jusqu'à septembre 2009, l’Autorité Palestinienne observe un prudent silence sur le sujet[245].

En novembre 2009, l'Autorité Palestinienne, par la voix du directeur de cabinet de Mahmoud Abbas, le Dr Rafiq Husseini, fait une déclaration lors d'une conférence du BNC qui montre une adhésion accrue de l'Autorité à l'idée de boycott[280].

Début 2010, remettant en vigueur une loi de 2005 inappliquée, Salam Fayyad, alors Premier ministre, lance une campagne visant à interdire la vente et la consommation de produits fabriqués dans les colonies juives de peuplement. Recrutés par l’intermédiaire d’une organisation créée par le ministère palestinien de l’Économie[281], des milliers de bénévoles, faisant du porte, mènent une campagne de sensibilisation. Un volet répressif accompagne cette campagne. En juillet, le projet de l'extension de la campagne à la proscription de l'embauche de Palestiniens dans les colonies juives suscite quelques inquiétudes auprès des entrepreneurs israéliens cependant très dubitatifs sur les capacités des palestiniens à financer une telle initiative[282]. En mai 2010, Mahmoud Abbas, qui avait précédemment signé un décret interdisant la vente et le négoce des produits fabriqués dans les colonies/implantations juives en Cisjordanie, appelle les Palestiniens à boycotter les produits fabriqués dans ces mêmes colonies en précisant bien que cet appel au boycott ne doit pas s'appliquer aux produits fabriqués dans le reste du territoire israélien[283]. Cette campagne a provoqué une vive colère en Israël ; le Conseil de Judée et Samarie s’est joint à l’appel du président de l’Union des industriels israéliens, Shraga Brosh, demandant que les ports israéliens soient fermés aux importations et aux exportations palestiniennes jusqu’à la levée du boycott[281].

Le 21 avril 2010, devant un parterre de militants et une vingtaine de diplomates, notamment européens, Salam Fayyad ouvre une conférence sur le thème de L'Intifada Blanche, un mouvement d'action non-violente initiée notamment en 2005 dans le village de Bilin[284]. Non violente, parce qu’aucune arme de guerre n'est utilisée, cette intifada blanche s'accompagne tout de même, à l'occasion, de jets de pierres[285].

En octobre 2010, l’Autorité palestinienne exige que les États-Unis imposent un boycott des produits israéliens issus des colonies, à l’instar du boycott observé par plusieurs syndicats européens[286].

Fin 2010 début 2011, l'opinion de Leila Chahid, représentante en Europe de l'Autorité Palestinienne, est qu'il est plus efficace d’appeler au respect de la législation européenne et donc de cibler les produits issus de colonies plutôt que d'appeler aux boycott des produits israéliens[287].

En décembre 2012, en réponse à la suspension du transfert du produit des taxes décidée par le gouvernement Netanyahu, Salam Fayyad lance un appel au boycott des produits israéliens (et pas seulement de ceux issus des colonies). Afin de se prémunir d'une éventuelle mesure de rétorsion des autorités israéliennes qui pourraient être tentées d'imposer un embargo sur les exportations palestiniennes, M. Fayyad n'appelle pas à un embargo sur les importations mais à un boycott volontaire (seulement sur les produits ayant un substitut local)[288],[289].

Lors d'une visite en Afrique du Sud à l'occasion des funérailles de Nelson Mandela, le 13 décembre 2013, Mahmoud Abbas fait une déclaration dénuée d’ambiguïté qui lui vaut la vive hostilité de militants de la campagne BDS qui l'accusent même parfois de traîtrise. Le président de l’Autorité palestinienne dit en effet : « Nous ne soutenons pas le boycott d’Israël. Mais nous appelons au boycott des produits issus des colonies » (« We do not support the boycott of Israel. But we ask everyone to boycott the products of the settlements »). Omar Barghouti, un des initiateurs du mouvement BDS voit dans cette déclaration l'illustration qu'Abbas manque de légitimité et est déconnecté des vraies aspirations de son peuple à la liberté. Toutefois, le journal britannique The Guardian rapporte que des milliers de Palestiniens font des affaires avec Israël, travaillent dans les colonies de Cisjordanie ou en Israël et achètent des produits israéliens. Le montant des importations palestiniennes sont d'environ 600 millions d'euros par an. Samia Botmeh, une conférencière de l’université de Birzeit et militante palestinienne pour le boycott académique des universités israéliennes a déclaré que les Palestiniens étaient « fâchés » et se sentaient « abandonnés par Abbas » du fait de ses déclarations. Elle a ajouté : « Bien entendu que nous faisons des affaires avec Israël, chaque chose dans notre vie est contrôlé par Israël, mais il y a des choix que nous pouvons faire et nous demandons au reste du monde d'agir »[290].

Sur le site Electronic Intifada, Omar Barghouti affirme que les déclarations d'Abbas, qui ont stupéfié les journalistes autant que les activistes, sont contredites par « le consensus national palestinien en faveur de la campagne BDS qui prévaut depuis 2005 » (« with the Palestinian national consensus that has strongly supported BDS against Israel since 2005 »)[291].

Impact en Israël et en Palestine

Les partisans de BDS se félicitent de l'impact de leur campagne sur l'économie israélienne, notamment du boycott d'entreprises israéliennes telles Sodastream, la banque Hapoalim, la compagnie des eaux Mekorot (en) par des organisations européennes ou américaines[292]. Toutefois, BDS a aussi un impact sur l'emploi en Palestine. Ainsi, Sodastream a été obligé de fermer son usine dans la colonie de Ma'aleh Adumim et donc de licencier 500 employés palestiniens au profit d'Israéliens travaillant dans la nouvelle usine de Rahat en Israël[293].

Question de l’étiquetage de produits issus de Cisjordanie

Sous l'effet conjugué de la pression de l'opinion publique et de décisions réglementaires et jurisprudentielles, manifestant un souci de cohérence de la pratique avec les principes déclarés, les pays européens, individuellement d'abord, puis communautairement, sont amenés à accepter l'idée d'un étiquetage différencié des produits. Tandis que des guides de conduite, facultatifs, sont déjà édictés par quelques pays, l'Union européenne travaille à une réglementation commune.

La problématique développée au seul niveau des échanges commerciaux se développe ensuite dans différents domaines de l'investissement.

Initiative de la société civile anglaise

En Grande-Bretagne, l'association Palestine Solidarity Campaign (en) (PSC) engagée dans une campagne de boycott contre les produits israéliens depuis 2001, a réorienté son action en demandant non plus le boycott, mais l'étiquetage de la provenance des produits notamment de ceux venant de Cisjordanie. Cette demande relayée d'abord par les groupes comme Jews for Justice for Palestinians (en) et par les quakers reçoit ensuite le soutien du Trades Union Congress qui, en 2006, adopte une résolution soutenant les actions du PSC. Devant l’inaction gouvernementale, le mouvement accentue sa pression. En mai 2009 Lawyers for Palestinian Human Rights menace les enseignes de distribution britanniques d'action judiciaires ; en septembre 2009, le Trade Union Congress vote le boycott des produits issus des colonies/implantations. Le 2 décembre 2009, Phyllis Starkey (en) interpelle le ministre de l'agriculture à l'occasion d'une séance de questions au gouvernement[294]. Quelques jours plus tard, le Defra (Ministère pour l'environnement, l'alimentation et les affaires rurales) émet un avis à l'attention des distributeurs préconisant de distinguer sur les étiquettes les « produits de Cisjordanie (produit de colonies israéliennes) » des « produits de Cisjordanie (produit palestinien) ». Le HMRC met en place une ligne téléphonique dédiée pour permettre aux distributeurs de déterminer l'origine géographique des produits[295]. À la suite de cette directive, le groupe TESCO étiquette désormais ces produits -alimentaires- conformément à la directive de la manière suivante : « Product of Westbank, Israeli settlement produce » et « Product of Westbank, Palestinian produce »[296].

Dans le souci d'apaiser les craintes soulevées en Israël par l'adoption de ces préconisations, l’ambassade de Grande-Bretagne en Israël déclare : « Il n’existe aucune instruction qui oblige à marquer les produits en provenance des colonies israéliennes. À la suite de demandes de la part de distributeurs et de citoyens, le Département de l’Environnement, de l’Alimentation et de l’Agriculture a publié une recommandation, que l’on peut même qualifier de conseil. Le gouvernement britannique s’est toujours opposé aux boycotts et continue à s’opposer à tous les appels au boycott d’Israël »[297].

Initiative trouvant écho en Afrique du Sud

En mai 2012, un projet[298],[299] du gouvernement sud-africain suscite la vive désapprobation du ministre israélien des affaires étrangères[300]. Peu après, le ministre danois des affaires étrangères, Villy Søvndal Søvndal, annonce lui aussi un projet d'étiquetage différencié.

Le 22 août 2012, le gouvernement sud-africain préconise l'apposition d'une mention spécifique sur les étiquettes de produits importés des territoires occupés[301],[Note 4].

Action pouvant prendre appui sur le droit européen

L'Union européenne entretient un partenariat avec l'État d'Israël depuis l'accord de coopération économique avec la Communauté Européenne signé en 1975. À la suite du processus de Barcelone, un nouvel accord est conclu le 20 novembre 1995.

Depuis cette date, les échanges commerciaux entre l'Europe et Israël sont soumis à l’accord d'association (ou accord euro-israélien de stabilisation et d'association). La négociation de cet accord se déroule sur fond de négociations de paix (Déclaration de principes du 13 septembre 1993) ; sa ratification, après la suspension consécutive au gel du processus de paix par le gouvernement Likud, permet au traité d'entrer en vigueur le 1er juin 2000[302]. Cet accord stipule qu’un traitement préférentiel doit être accordé aux marchandises « produites ou substantiellement transformées » sur le territoire des États membres de l’UE et le territoire de l’État d’Israël, et uniquement à elles.

À la suite des élections du 20 janvier 1996 établissant l'Autorité nationale Palestinienne, des négociations sont entamées pour conclure un accord commercial entre l'Union Européenne et l'OLP, quand bien même n'existe encore aucun État Palestinien. Cela aboutit à l'accord d'association euro-méditerranéen intérimaire relatif aux échanges commerciaux et à la coopération signé le 24 février 1997 et qui entre en vigueur dès le 1er juillet 1997. L'accord prévoit de s'appliquer au territoire de la Cisjordanie et à la bande de Gaza (alors qu'au moment de la signature, l'ANP n'exerce son autorité que sur la bande de Gaza et la ville de Jéricho). Les israéliens manifestèrent leur opposition à la signature de cet accord, en faisant valoir qu'il n'apportait aucun avantage à l'exportation aux produits issus de territoires pouvant déjà bénéficier des clauses inhérentes au traité euro-israélien ; mais surtout ils firent savoir qu'en cas de litige issu de contradictions entre les deux traités, c'est le traité euro-israélien qui à leurs yeux prévaudrait[302].

Le Protocole de Paris définissant les relations économiques entre l’État d’Israël et l'Autorité Palestinienne est caractérisé par un certain flou concernant la souveraineté économique et douanière sur les colonies/implantations israéliennes incluses dans les territoires occupés[302].

Peu après la signature de l'accord d'association euro-israélien, le Mattin Group, une ONG basée à Ramallah, soutenu par des ONG européennes, fait remarquer qu’Israël exporte des produits originaires des colonies, ces derniers arrivant alors sur le marché communautaire avec le certificat d’origine EUR1, qui leur fait ainsi bénéficier d’un tarif douanier préférentiel. Alors que la valeur des produits concernés ne représente qu'une très faible portion de la totalité des exportations israéliennes vers l’UE, cette question soulève immédiatement une controverse.

Par ailleurs, le 10 avril 2002, le Parlement européen vote une proposition de résolution demandant la suspension de l'accord d'association au motif que son article 2 ne serait pas respecté par Israël ; le Conseil n'accède pas à cette demande[303].

Position de principe de l'Europe concernant les frontières israélo-palestiniennes

Réaffirmée à de multiples reprises ces dernières décennies, la position de principe de l'Union européenne est de considérer que les colonies israéliennes implantées au sein des territoires palestiniens occupés sont « illégales au regard du droit international ; [qu'] elles constituent un obstacle à l'instauration de la paix ; [qu'] elles risquent de rendre impossible une solution fondée sur la coexistence de deux États »[304]. Ces principes ont notamment été réaffirmés le 10 décembre 2012 lors du Conseil des ministres des Affaires étrangères de l'Union Européenne[305].

L'enlisement du processus de paix constaté ces dernières années pose toutefois la question de la faisabilité de la solution « à deux États »[306].

Arrangement technique de 2004

Le 8 novembre 1997, l'UE fait paraître un avis aux importateurs mettant en garde ces derniers contre les déclarations d'origine de tous les produits israéliens importés en Europe. Cette publication, fruit d'une enquête d'abord motivée par des soupçons sur l'adjonction aux jus de fruits de la marque Jaffa importé en Europe de jus d'origine brésilienne, provoque une forte tension politique. Le président de la Knesset diligente une enquête auprès des douanes israéliennes et le ministre israélien de l'Industrie et du Commerce vient à Bruxelles présenter ses excuses aux commissaires européens[307].

Le 12 mai 1998, une publication de la Commission européenne rapporte les soupçons d'infractions au traité d’association euro-israélien concernant les certificats d'origine de biens produits en Israël. Les services des douanes de différents pays européens sollicitent des informations de la part de leurs homologues israéliens sans en obtenir de réponse satisfaisante. La commission chargée aux termes du traité d'association de régler les éventuels différends se réunit pour la première fois en juillet 2001 Jérusalem, mais n'aboutit à aucune solution. Le 20 novembre 2001, lors de la deuxième session du Conseil d’association UE‑Israël, l'instance d'arbitrage n'arrive pas non plus à résoudre ce problème[308].

Les limites de l’État d'Israël, auxquelles font référence les accords d'association euro-israéliens, sont l'objet d'un différend entre les deux parties. En 2001, la commission européenne avertissait les importateurs du risque d'être exposé à des redressements de droit de douane (cf. l'avis aux importateurs publié le 23 novembre 2001 dans le JOCE C 328, page 6[309]). Le 12 décembre 2004, le comité de coopération douanière Europe-Israël s'accorde sur l'apposition du code postal comme référent d'origine ; cette disposition prenant effet en 2005[295]. Cet accord, connu sous l’appellation d'arrangement technique, donne la possibilité aux services douaniers de l’UE de faire la distinction entre les produits des colonies et ceux d’Israël proprement dit, puisque les certificats d’origine des produits israéliens exportés vers le marché européen comportent, aux termes de cet arrangement, le code postal de leur lieu de production. Ce compromis ménage les positions de principe des deux parties : d'un côté, l'Union Européenne se donne éventuellement les moyens de respecter dans la pratique commerciale sa position officielle selon laquelle les territoires occupés ne font pas partie d’Israël au regard du droit international, de l'autre, Israël, parvient à consolider ses échanges avec l'Union Européenne sans avoir à reconnaître dans un document officiel que les territoires occupés sont en droit distincts de son propre territoire.

L'arrangement technique de 2004 est conçu de telle manière que son application effective n'est pas garanti, comme le montre une enquête diligentée en 2008 par le gouvernement britannique et dont les conclusions sont présentées par le ministre britannique des finances lors d'un débat à la Chambre des Communes en janvier 2010 : les services douaniers européens, incapables d'inspecter tous les certificats d'origine accompagnant les biens importés d'Israël, certaines cargaisons pourtant issues des territoires occupés bénéficient d'un traitement préférentiel auquel elles ne devaient pas prétendre[310].Pour rendre l'arrangement technique de 2004 plus efficace, l'Union Européenne peut en demander la renégociation dans le cadre de la procédure de règlement des litiges prévue par l'Accord d'association, qui prévoit d'ailleurs le recours à un arbitrage en cas de blocage de la négociation.

Arrêt Brita

En février 2010, le différend quant aux limites territoriales concernées par l'accord d'association a été tranché par un arrêt de la Cour de justice de l'Union européenne. Suivant les conclusions avancées le 29 octobre 2009 par l'Avocat général, M. Yves Bot[311], la CJUE met ainsi un terme à une procédure initiée par la société allemande Brita, contre une décision du service des douanes de Hambourg qui contestait le certificat d'origine israélienne attaché à l'importation des gazéificateurs d'eau importés par cette société depuis un site de production implanté à Mishor Adumim (en) (près de Ma'ale Adumim).

Par cet arrêt (Affaire C-386/08 Brita GmbH/Hauptzollamt Hamburg Hafen), dit « arrêt Brita », la CJUE statue que « les produits originaires de Cisjordanie ne relèvent pas du champ d’application territorial de l'accord CE-Israël et ne sauraient donc bénéficier du régime préférentiel instauré par celui-ci » (le commerce entre la Communauté européenne et l'Autorité Palestinienne est régi par l'accord d'association euro-méditerranéen intérimaire relatif aux échanges commerciaux et à la coopération signé le 24 février 1997)[312],[313]. La Cour de Justice confirme que les autorités douanières des États importateurs doivent refuser un régime préférentiel, en vertu de l'accord d'association UE-Israël, pour les produits exportés vers l'Union et provenant des territoires occupés par Israël OU pour lesquels les autorités israéliennes ne fournissent pas suffisamment d'informations pour permettre de déterminer la véritable origine de ces produits[314]. Les produits issus de Cisjordanie comme de Gaza ne peuvent être exportés que sous certificat douanier palestinien.

Gestation d'une réglementation en Europe

En 2010, les chefs de mission diligentés par l'Union européenne à Jérusalem et Ramallah concluent leur rapport en invitant l'Union à une action plus résolue en accord avec les lois internationales et dans la perspective de deux états[315].

Les décisions européennes visant à l'étiquetage des produits provenant des territoires occupés, si elles devaient être adoptées, doivent s'inscrire dans le cadre plus général de législation actuellement en vigueur dans l'Union en matière d'étiquetage. Celui-ci est notamment réglé par la directive de l’UE 2000/13, adoptée le 20 mars 2000 stipulant que l’étiquetage mentionnant l’origine, s’il existe, doit être exact et précis. La législation européenne distingue les catégories de produits pour lesquelles l'indication de l'origine géographique est obligatoire (notamment cosmétiques et certains produits alimentaires tels que les fruits et légumes frais, le vin, l'huile d'olive...) de celles pour lesquelles l'étiquetage est facultatif (le producteur ou le distributeur étant alors libre d'indiquer ou non l'origine du produit)[316].

Finalement la Commission européenne indique qu'elle considère que l'inspection sanitaire israélienne n'a pas le pouvoir d'exercer dans les territoires occupés. En conséquence, les produits provenant de ces territoires ne peuvent être considérés comme correctement inspectés. Prenant acte de cette décision, Israël arrête les exportations de certains produits alimentaires issus des colonies à partir de septembre 2014[317]. Les agriculteurs des colonies ont largement anticipé cette décision, tenant pour acquise l'hostilité européenne[318].

Fil chronologique

Interrogé par la députée Nicole Kiil-Nielsen au sujet de la fiabilité des contrôles d'origine, le Conseil répond en mars 2010 qu'« Un examen effectué en 2007 a révélé que l'arrangement technique était mis en œuvre de manière satisfaisante »[319].

En septembre 2010, plusieurs membres du Parlement européen rédigent une déclaration écrite appelant à l'étiquetage des produits issus des territoires occupés ; faute de recueillir un nombre suffisant de signatures, cette proposition n'a pas été retenue[320],[321].

En janvier 2011, la députée européenne Nicole Kiil-Nielsen demande à la commission de lui communiquer la liste des codes postaux que les services israéliens auraient communiqués à celle-ci depuis 2004 ; elle demande également si cette liste peut-être rendue publique[322]. Moins d'un mois plus tard la commission répond que ces codes postaux ne peuvent être rendus publics (ils le seront en 2012[323])[322].

En 2012, réitérant le constat établi en 2010 par les autorités britanniques, le Parlement européen adopte une résolution demandant notamment à la commission d'établir une liste noire des entreprises israéliennes fraudant les dispositions prévues par l'accord technique de 2004[314].

Le 12 mai 2012, le ministre français des Affaires étrangères 12 de ses homologues européens affirment publiquement leur intention d'appliquer pleinement la législation européenne et les accords bilatéraux concernant les biens produits dans les colonies.

En France, Laurent Fabius, ministre des Affaires étrangères, interrogé par voie écrite le 5 juillet 2012 par le sénateur Michel Scouarnec, répondait : « la France étudie actuellement, en lien avec plusieurs de ses partenaires européens, la possibilité de publier un code de conduite similaire, dans le cadre d'une initiative concertée »[324],[296].

Le 9 juillet 2012, le journal The Independent porte à la connaissance du public les conclusions du rapport[325] transmis les mois précédents par un éminent juriste à de hauts responsables de l'Union Européenne : d'après James Crawford les gouvernements des pays membres de l’UE peuvent boycotter les produits fabriqués dans les implantations de colons israéliens en Cisjordanie sans violer les règles de l'Organisation mondiale du commerce[326].

Le 5 octobre 2012, le Danemark institue lui aussi un étiquetage spécifique.

En octobre 2012, un large collectif d’ONG publie un rapport intitulé La Paix au rabais : comment l’Union européenne renforce les colonies israéliennes[327] préfacé par l’ancien Commissaire de l’UE aux Relations extérieures, Hans van den Broeck, qui appelle les gouvernements européens à mettre leurs actes en cohérence avec leurs discours. La coalition des ONG à l’origine de ce rapport préconise l’adoption de mesures concrètes, dont l’étiquetage correct de tous les produits issus des colonies à l’attention des consommateurs[328],[329].

En novembre 2012, le journal Haaretz révèle que l'Irlande - appelée à présider l'Union Européenne en janvier 2013 - serait favorable à un boycott des produits issus de Cisjordanie ; le journal produit un courrier signé du ministre irlandais des Affaires étrangères, Eamon Gilmore[330],[331]. Le 10 décembre 2012, dans la foulée de l'obtention par la Palestine de la qualité de membre observateur à l'ONU (29 nov.2012), les États membres de l'UE affirment publiquement leur intention d'appliquer pleinement « la législation européenne et les accords bilatéraux concernant les biens produits dans les colonies »[305],[332]. Dans le quotidien Libération du même jour, deux membres du groupe des Global Elders, Mary Robinson et Martti Ahtisaari déclarent : « En établissant une distinction claire entre les produits importés des colonies et les produits israéliens, l’UE a une occasion unique de réconcilier ses principes et ses actes sur la question des colonies en Cisjordanie - et de restaurer sa crédibilité dans le processus de paix au Proche-Orient »[329].

Dans ses conclusions du 20 décembre 2012, le Conseil des Affaires étrangères de l'Union européenne affirme qu'il convient de distinguer clairement l’État d’Israël des Territoires occupés[333].

Le Co-operative Group annonce fin 2012 qu'il déréférencera tout fournisseur s'approvisionnant dans les colonies[334].

Un article du Jerusalem Post du 12 décembre, faisant suite à un précédent article du Ma'ariv, rapporte les récents propos d'un porte parole de la délégation de l'Union européenne en Israël qui exclut tout soutien de l'Union à un boycott des produits israéliens fussent-ils des colonies. L'article mentionne par contre que l'Union réfléchit à une réglementation sur l'étiquetage[335].

Le 28 février 2013, « Le Figaro » fait état des préconisations faites par les consuls généraux européens en poste à Ramallah et à Jérusalem. Dans ce rapport annuel, confidentiel mais que les consuls ont dévoilé à dessein, il est recommandé à l'Europe de veiller à une plus stricte application des accords commerciaux entre l'UE et Israël. Les consuls suggèrent également de mettre en place une surveillance accrue des programmes de coopération entre l'UE et Israël, afin que ces échanges ne bénéficient pas à des colonies, directement ou non. Enfin, l'activité de l'organisation Elad (en) retient particulièrement l'attention des consuls[336].

En mars 2013, le gouvernement des Pays‐Bas élabore des textes législatifs pour son secteur privé relatifs à l'étiquetage des produits des colonies israéliennes[337].

Le 13 avril 2013, 13[338] des 27 ministres des affaires étrangères de l'Union européenne se déclarent prêts à appuyer les démarches de Mme Catherine Ashton pour étiqueter les produits des colonies israéliennes[339],[337].

Le 19 mai 2013, « Haaretz » fait savoir que l'Union européenne aurait suspendu ses travaux sur ce point à la demande des États-Unis[340].

Le mardi 28 mai 2013, plusieurs députés français s'associent à la Plateforme des ONG françaises pour la Palestine, dans les locaux de l'Assemblée Nationale, en compagnie de l'ONG israélienne Who Profits, pour promouvoir l'étiquetage des produits en provenance des colonies israéliennes[341].

Le 23 juillet, un communiqué de l'AFP repris par la presse fait état d'instructions de Mme Ashton au président de la Commission européenne Jose Manuel Barroso, invitant ce dernier à mettre en application la législation actuelle sur l'étiquetage des produits des colonies. La porte-parole de Mme Ashton, Maja Kocijancic, ne dément pas l'existence de ce texte daté du 08 juillet, qu'elle réduit toutefois au rôle d'une consultation interne et non d'une injonction[342].

Le 31 juillet 2013, Catherine Ashton répondant à une question posée le 22 mai par deux parlementaires européens, Nicole Kiil-Nielsen et Yannick Jadot, rappelle que la mise en œuvre de la législation de l'UE relative à l'indication de l'origine relève des autorités compétentes des États membres. La haute représentante s'engage à « élaborer, dans le courant de l'année 2013, des lignes directrices applicables au niveau de l'UE, qui permettraient de renforcer la mise en œuvre homogène de la législation de l'UE dans ce domaine et sa cohérence avec les positions de l'UE en matière de politique étrangère »[343].

Le 27 août 2013, le ministre français des Affaires étrangères, M. Laurent Fabius, répondant à une question écrite que lui avait posée un mois plus tôt le député Claude Goasguen, réaffirme son soutien aux mesures d'étiquetage différencié tout en se déclarant hostile à tout idée de boycott[333].

Fin 2013, une administration britannique, le UK Trade & Investment publie, pour la première fois, un document avertissant les investisseurs des risques économiques et légaux inhérents aux investissements réalisés dans les territoires occupés. À cette occasion, toutefois, les Britanniques réaffirment leur opposition au boycott[344].

Fin mars 2014, Jimmy Carter, l'ancien président américain et prix Nobel de la paix (pour son rôle dans la signature des accords de Camp David de 1978) encourage les européens à adopter un étiquetage différencié. S'exprimant en tant que membre des Global Elders, il rajoute qu'il est opposé à toute action de boycott à l'égard d’Israël (We decided not to publicly endorse any kind of embargo, or so forth, against Israeli invasion, or occupying troops in Palestine)[345].

Le 11 novembre 2015, la Commission européenne adopte une décision et demande à ses 28 États membres de mettre en œuvre l’étiquetage des produits originaires des colonies israéliennes dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967[346]. Si, par cette « notice interprétative », la commission recommande bien l'adoption d'un étiquetage spécial, elle laisse toutefois la charge de sa mise en œuvre aux pays membres[347]. Cette décision provoque la fureur d'Israël[348] tandis que l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) salue celle-ci comme positive mais insuffisante[346]. Toutefois, les gouvernements hongrois et grecs annoncent peu après qu'ils ne se plieront pas à cette directive[349].

Peu de pays transposent cette recommandation de la commission en leur droit national ; la France s'y attelle en 2016 : le 24 novembre de cette année, le Ministère de l’Économie et des Finances publie un avis aux opérateurs économiques relatif à l'indication de l'origine des marchandises issues des territoires occupés par Israël depuis juin 1967[347],[350]. Le 24 et le 25 janvier 2017 l’Organisation Juive Européenne et la société de vins israélienne Psagot (celle-ci, avec l'appui du CRIF[347]) demandent l'annulation de cet avis devant le Conseil d'État ; celui-ci soumet le cas à la Cour de justice de l'Union européenne par le biais d'une question préjudicielle. Dans son arrêt du 12 novembre 2019, la CJUE affirme que "...les denrées alimentaires originaires d’un territoire occupé par l’État d’Israël doivent porter non seulement la mention de ce territoire, mais également, dans le cas où de telles denrées alimentaires proviennent d’une localité ou d’un ensemble de localités constituant une colonie israélienne à l’intérieur dudit territoire, la mention de cette provenance."[351],[352] Au regard de cette législation, des labels vagues utilisés par certains producteurs, tels que «made in West Bank», «vin du Golan» ou de «Judée-Samarie» (nom donné à la Cisjordanie par l’administration israélienne), sont considérés trompeurs[347].

Le 29 avril 2022, en France, le Conseil d’État, la plus haute des juridictions de l’ordre administratif suspend les décrets de dissolution du Comité Action Palestine et du Collectif Palestine Vaincra, publiés le 9 mars 2022 par le ministère de l’Intérieur. Ce dernier reprochait au Collectif Palestine Vaincra d’appeler « à la discrimination et à la haine envers Israël et les Israéliens », notamment à travers des campagnes de boycottage. Selon le Conseil d’État, l’appel au boycottage « traduit l’expression d’une opinion contestataire et ne saurait par lui-même (…) être regardé comme une provocation ou une contribution à la discrimination, à la haine ou à la violence envers un groupe de personnes »[353].

Autres domaines affectés

Le différend territorial existant entre l'Union Européenne et l’État d’Israël, rendu visible et traduit en droit à l'occasion des litiges sur les importations dans l'UE, se manifeste également à travers différents programmes de coopération et agences de l'Union comme les programmes cadres pour la recherche et le développement, ou encore Euromed Heritage.

En 2003, pour approfondir la coopération économique et renforcer la prospérité, la stabilité et la sécurité de tous, l'Union propose à ses voisins de l'Est et du Sud une relation privilégiée en instituant la politique européenne de voisinage (PEV) qui concerne plusieurs pays dont l’État d'Israël avec lequel l'Union conclut en 2005 un « plan d'action PEV ». Fin 2007, le gouvernement israélien transmet à l'Union européenne un document non officiel demandant un « statut spécial » dans le cadre de la politique européenne de voisinage afin de pouvoir participer à plusieurs politiques et programmes communautaires, notamment pour renforcer la coopération technologique et commerciale, mais également participer aux réunions du Conseil ayant trait à l'économie, l'environnement, l'énergie ou la sécurité. Le 08 décembre 2008, en dépit de l'opposition réitérée du Parlement européen, le Conseil se déclare favorable à l'intensification de ses relations avec Israël[303].

Le 30 juin 2013, la commission européenne adopte des lignes de conduites rendant inéligibles aux différents dispositifs d'aides européennes les entités (entreprises, associations, administrations...) israéliennes opérant dans les territoires occupés[354].

Le 17 juillet 2013, l'Union européenne adopte un texte excluant des aides européennes les entités israéliennes qui opèrent dans les « colonies ». Ces lignes directrices (Lignes directrices relatives à l'éligibilité des entités israéliennes établies dans les territoires occupés par Israël depuis juin 1967 et des activités qu'elles y déploient aux subventions, prix et instruments financiers financés par l'UE à partir de 2014) sont publiées au Journal officiel de l'Union européenne le 19 juillet[355]. Applicables dès janvier 2014, ces directives (2013/ C 205/05) prévoient que « tous les accords entre l’État d’Israël et l’UE doivent sans équivoque et explicitement indiquer leur inapplicabilité aux Territoires occupés par Israël en 1967 » (ces territoires, aux yeux de l'Union, comportent le plateau du Golan, la bande de Gaza, la Cisjordanie y compris Jérusalem-est)[356],[357]. Catherine Ashton, haute représentante de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, fait une déclaration au matin du 19 juillet[358].

En septembre toutefois, une quinzaine de personnalités européennes, comptant des ex-Premiers ministres et des ministres des Affaires étrangères, s'inquiètent publiquement du retard pris dans l'application des directives de la commission européenne[356].

Vers une législation au Canada ?

En juillet 2017 l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) demande qu’on retire de la vente les vins produits en Cisjordanie commercialisés sous l’étiquette « produit d’Israël ». Un jour plus tard, la même agence revient sur sa décision, justifiant son revirement par la prise en compte de l’accord de libre-échange Canada-Israël[359].

Le 29 juillet 2019, la Cour Fédérale du Canada donne raison à David Kattenburg dont la demande d'étiquetage différencié avait d'abord été rejetée par l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA)[360]. Le 6 septembre, le gouvernement canadien fait appel de cette décision[361].

Notes et références

Notes

  1. « Boycott, désinvestissement et sanctions » est la traduction francophone de la campagne « Calls for Boycott, Divestment and Sanctions against Israel » qui utilise principalement la langue anglaise pour ses communications.
  2. Auparavant, en 2002, l'université de Jussieu avait voté un accord de non-coopération. (fr) .
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  4. Cette décision, qui s'appuie sur une loi de protection du consommateur de 2008, est motivée par le souci d'éviter toute tromperie sur l'origine ; cela aboutira à l'adoption de la mention « Fabriqué dans les territoires palestiniens occupés » et non plus « Made in Israël ». cf L'Afrique du Sud bannit l'étiquette "Made in Israel" sur les produits des Territoires occupés. Le Monde.fr avec AFP | 22.08.2012

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Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

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