Joseph Pitton de Tournefort

Joseph Pitton de Tournefort (, Aix-en-Provence, Paris) est un botaniste français.

Pour les articles homonymes, voir Tournefort.

Joseph de Tournefort
Joseph Pitton de Tournefort
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Joseph Pitton de Tournefort
Abréviation en botanique
Tourn.
Nationalité
Française
Domicile
Formation
Activités
Autres informations
A travaillé pour
Membre de
Maîtres
Pierre Magnol, Guy-Crescent Fragon (d)
Œuvres principales

Naissance et études

Joseph Pitton de Tournefort serait en fait né un peu avant la date du car les registres de la paroisse Saint-Sauveur d'Aix-en-Provence précisent qu'il a reçu le baptême le [1],[2].

Sa famille est originaire de Tours. Son arrière-grand-père a eu deux fils :
  • Jean Martin Pitton, père de Scholastique Pitton, historien célèbre de la ville d'Aix-en-Provence et auteur d'une Histoire de la ville d'Aix (1666) ;
  • Louis Pitton, grand-père de Joseph.
[réf. nécessaire]

Son père, Pierre Pitton, écuyer, seigneur de Tournefort, époux d'Aimar de Fagone, possède une fortune assez considérable ; il destine son fils Joseph à l'état ecclésiastique. Joseph fait ses études chez les Jésuites où il acquiert de solides connaissances. Il se passionne très vite pour la botanique et en reçoit les premières notions chez un apothicaire d'Aix-en-Provence. La mort de son père le laisse libre de suivre ses intérêts personnels, notamment dans le domaine de la botanique.[réf. nécessaire]

Le chercheur et l'enseignant

En 1678, il parcourt, parfois accompagné de Charles Plumier, la Savoie et le Dauphiné d'où il rapporte quantité de plantes pour commencer son herbier[3]. En 1679, il part à Montpellier étudier la médecine et l'anatomie mais aussi la flore de cette région. En 1681, il gagne Barcelone dont il explore les environs. Sa vie y est rude, on[Qui ?] dit qu'il doit cacher son argent dans son pain noir pour échapper aux voleurs. À la fin de 1681, il rentre à Montpellier et à Aix-en-Provence pour augmenter son herbier de ses dernières récoltes.[réf. nécessaire]

En 1683, l'herbier qu'il a constitué est si riche et sa renommée telle que par l'entremise de Mme de Venelle, Guy-Crescent Fagon (1638-1718) le fait venir à Paris pour lui confier sa chaire de botanique au Jardin des Plantes (1683) établi par Louis XIII pour l'instruction des jeunes étudiants en médecine. Ses cours sont célèbres et attirent de très nombreux auditeurs, y compris de l'étranger. Il continue néanmoins de voyager en Espagne et au Portugal, en Andalousie où il s'intéresse à la reproduction des palmiers. Il va aussi en Hollande où il rencontre Paul Hermann (1646-1695), professeur de botanique à Leyde, qui lui propose sa place de professeur. Il refuse cette offre.[réf. nécessaire]

François Pigeot, Tournefort, gravure d'après Amédée Maulet

Tournefort est suppléant de Guy-Crescent Fagon au Jardin royal des plantes médicinales, et en 1691, est reçu à l'Académie des sciences[4]. Il s'oppose à Nicolas et Jean Marchant, qui développe sous la protection de Colbert un jardin de plantes rares autonome au sein du Jardin des Plantes, et décrivent pour les Mémoires pour servir à l'histoire des plantes de Denis Dodart de nouvelles espèces.

En 1694, année de l'abandon par l'Académie de Histoire Naturelle des plantes, monumental projet de catalogage des espèces végétales, il publie son premier ouvrage Éléments de botanique ou méthode pour connaître les plantes en trois volumes. Il précise dans la première page de son « Avertissement » que « la méthode suivie est fondée sur la structure des fleurs et des fruits. On ne saurait s'en écarter sans se jeter dans d'étranges embarras… ». L'ouvrage est illustré de 451 excellentes planches de Claude Aubriet[5] et obtient immédiatement un énorme succès[6] ; il le traduit lui-même en latin sous le titre Institutiones rei herbariae pour qu'il puisse être lu dans toute l'Europe.[réf. nécessaire]

La même année, il fait replanter l'école de botanique du Jardin royal pour la distribuer suivant son célèbre système et fait supprimer le poste indépendant de « directeur de la culture » de Jean Marchant[4].

En 1696, il est reçu docteur de la faculté de médecine de Paris.[réf. nécessaire] En 1698, il fait paraître une flore parisienne sous le titre d'Histoire des plantes qui naissent aux environs de Paris, avec leur usage en médecine, petit volume de 543 pages dédié à Fagon[7].

Nouvelle classification

Il fait avancer la classification en botanique, en s'appuyant sur une classification en fonction de la forme des fleurs et des fruits : le type de fleur détermine la classe ; celui du fruit donne le genre ; et les feuilles, le port de la plante,, etc. indiquent l'espèce. En comparaison, le système de Linné (1735-1758[n 1] et surtout 1753[8]) distingue les plantes principalement par le nombre, la proportion et la situation des étamines et des pistils des fleurs[9]. Pour autant, Tournefort n'abandonne pas encore la distinction traditionnelle arbres/plantes. Pour lui, « il est absolument nécessaire [...] de rassembler comme par bouquets les plantes qui se ressemblent et de les séparer de celles qui ne se ressemblent pas » ; il dit également : « Il faut appliquer une méthode précise au baptême des plantes de peur que les noms des plantes n'atteignent le nombre même des plantes[10] ». Il introduit le concept moderne de genre[11] en classant quelques dizaines de milliers d'espèces végétales dans 700 genres répartis en 22 classes ; il réalise sa classification en fonction du caractère de la corolle : apétales (sans pétale), dialypétales ainsi que gamopétales.[réf. nécessaire]

Cependant, pour la fertilisation des fleurs il passe à côté du rôle du pollen, dans lequel il ne voit qu'un excrément[10].

Le voyage au Levant

Les voyages de Tournefort.

Sur proposition de Pontchartrain et afin de faire des observations non seulement sur l'histoire naturelle et la géographie mais encore sur tout ce qui concerne le commerce, Tournefort reçoit l'ordre de Louis XIV de se rendre au Levant, ce qu'il fait avec enthousiasme. Pour cette expédition il se fait accompagner par le botaniste allemand Andreas von Gundelsheimer (1668-1715) et le peintre Claude Aubriet (1651-1743).[réf. nécessaire]

Il part de Paris le pour s'embarquer à Marseille. Il en profite, dans l'attente d'un bateau, pour visiter la ville et ses environs. Il prend la mer le . Il s'arrête d'abord en Crète puis visite les Cyclades en faisant des escales dans de nombreuses îles : Milos, Siphanto, Paros, Naxos, Amorgós, Syra, Zia, Andros, Tinos, Chios… Il visite la mer de Marmara et Constantinople. Il se rend à Sinope et Trabzon, ports de la mer Noire. À partir de cette dernière ville, il se rend par caravane à Erzurum, Kars, puis Tiflis en Géorgie qu'il qualifie de plus beau pays du monde. Il visite ensuite Erevan en Arménie et le Mont Ararat. Il revient par Kars, Angora (Ankara), Brousse, Smyrne d'où il s'embarque pour Marseille où il arrive le . Ce voyage est minutieusement rapporté dans son livre, Relation d'un voyage au Levant, publié après sa mort et constitué de XXII lettres à Ponchartrain.[réf. nécessaire]

Tournefort et ses deux compagnons connaissent au cours de ce voyage de nombreuses aventures : tempête dans les Cyclades, suspicion des autorités locales de la ville de Kars où ils sont pris pour des espions russes, manque d'encre et de papier pour constituer l'herbier. De plus Tournefort manque de se noyer avec son cheval en traversant une rivière près du Mont Ararat. Malgré ces difficultés, il se conforme aux instructions données par Louis XIV.[réf. nécessaire]

Dans le domaine de la botanique il fait non seulement un herbier, mais il décrit différentes récoltes. Ainsi à l'île de Chio il décrit la production du mastic à partir de la résine coulant des incisions faites dans les troncs du pistachier térébinthe (Pistacia terebinthus). Il décrit également la récolte du laudanum, utilisé autrefois en parfumerie, à partir de la gomme résineuse du Cistus ladanifer (Ciste à gomme).[réf. nécessaire]

Page de titre d’Institutiones rei herbariae, editio altera (1700).

Mais ne se cantonnant pas à la botanique, il se fait tour à tour archéologue, géographe, ethnologue et multiplie les notes, observations et descriptions. Avec l'aide d'Aubriet, il redessine les cartes de la mer Noire et décrit les systèmes de défense et de fortification des ports qu'il traverse. Il décrit les religions orthodoxes et musulmanes. Les mœurs et coutumes des populations visitées font l'objet de récits savoureux. Dans l'île de Siphanto (Sifnos) il remarque dans sa lettre IV que « les femmes qui couvrent leur visage avec des bandes de linge pour protéger leur teint, ressemblent à des momies ambulantes ».[réf. nécessaire]
La lecture de son livre montre l'étendue de ses connaissances en dehors de la botanique, notamment dans le domaine de l'histoire antique. Ce périple permet d'engranger une moisson formidable : 1 356 plantes inédites et 25 genres nouveaux viennent compléter et enrichir l'inventaire du monde vivant.[réf. nécessaire]

Les derniers jours

Après son retour de son voyage au Levant, Tournefort est nommé en 1706 professeur de médecine et botanique au Collège royal.[réf. nécessaire]

En 1707 il rédige le premier traité connu mentionnant la culture du champignon de Paris[12].

Jouissant d'une santé robuste, il aurait pu pendant longtemps encore faire progresser la science. Or, revenant du jardin royal en portant un paquet de plantes sous le bras, il est violemment heurté par une charrette qui l'écrase contre un mur, dans la rue Lacépède, le . Il perd beaucoup de sang et après quelques mois de maladie, il meurt le , à l'âge de 52 ans[10].

Il lègue ses manuscrits à son élève et ami, Michel-Louis Reneaulme de Lagaranne (1676–1739). Son ami de toujours Pierre Joseph Garidel a dit à son sujet dans son livre Histoire des plantes qui naissent aux environs d'Aix-en-Provence et dans plusieurs autres endroits de la Provence « qu'il a été de nos jours et sera dans les siècles à venir un sujet d'admiration ».[réf. nécessaire]

Publications

  • [1694] Éléments de botanique ou méthode pour connaître les plantes (3 vol. avec 451 tables, dans lequel 7 000 espèces sont considérées ; dont t. 1), Paris, imprimerie royale, .
  • [1698] Histoire des plantes qui naissent aux environs de Paris avec leur usage dans la médecine, Paris, , sur gallica.
2e édition augmentée par Bernard de Jussieu, Paris, 1725, 2 volumes).
  • Institutiones rei herbariae, editio altera (Paris, 1700, 3 volumes, traduction latine augmentée d'Élémens de botanique). Voir tome 1 ; tome 2 ; tome 3.
Une autre édition avec un abrégé de la vie de Tournefort, un éloge de sa méthode a été publié par Bernard de Jussieu, Lyon, 1719).
  • Corollarium institutionum rei herbariae in quo plantae 1356 munificentia Ludovici Magni in orientalibus regionibus observatae recensentur et ad genera sua revocantur (Paris, imprimerie royale, 1703).
Il s'agit d'un supplément en latin aux "Institutiones..", joint à l'édition posthume de 1719.
  • [1717] Relation d'un voyage du Levant fait par ordre du roy (2 vol. (éd. de Paris), dont tome 1 et tome 2), Paris / Lyon, imprimerie royale / Bruyset éd., , sur gallica.
3 vol. pour l'édition de Lyon. Ouvrage traduit en néerlandais (1717), en anglais (1741), en allemand (1776).
  • Traité de la matière médicale ou l'histoire et l'usage des médicaments et de leur analyse chimique ouvrage posthume mis à jour par Besnier (Paris, 1717, 2 vol.).

Hommages

Notes et références

Notes

  1. Linné développe sa classification binomiale avec son Systema Naturæ système de la Nature »), qui connaît 10 éditions successives entre 1735 et 1758, chaque édition améliorant son système et l'élargissant.

Références

  1. (Acte de baptême, AD13, Aix, St-Sauveur, année 1656, vue 16/34)
  2. Roux-Alphéran, Les rues d'Aix ou recherches historiques sur l'ancienne capitale de la Provence, typographie Aubin, Aix-en-Provence, 1846, deux volumes, tome 1 p. 340.
  3. Philippe Jaussaud et Edouard-Raoul Brygoo, Du jardin au Muséum en 516 biographies, Paris : Muséum national d'histoire naturelle, 2004, p. 497.
  4. [Laissus 1969] Yves Laissus, « Les Plantes du Roi. Note sur un grand ouvrage de botanique préparé au XVIIe siècle par l'Académie royale des Sciences », Revue d'histoire des sciences et de leurs applications, vol. 22, no 3, , p. 193–236 (DOI 10.3406/rhs.1969.2592, lire en ligne [sur persee], consulté en ).
  5. [Tournefort 1694] (de) Joseph Pitton de Tournefort, « Élémens de botanique, ou Méthode pour connoître les plantes », sur gallica, (consulté en ).
  6. [Leroy 1956] Jean-François Leroy, « Tournefort (1656-1708) », Revue d'histoire des sciences, vol. 9, no 4, , p. 350-354 (voir p. 350) (lire en ligne [sur persee], consulté en ).
  7. Tournefort 1698 p.
  8. (la) Linné (1753), Species plantarum, 2 vol. [lire en ligne].
  9. « compte-rendu sur l'ouvrage Observations sur les plantes par Jean-Étienne Guettard », Histoire de l'Académie royale des sciences, , p. 79-81 (voir p. 80) (lire en ligne [sur gallica]).
  10. [Pelt 1999] Jean-Marie Pelt, « Joseph Pitton de Tournefort ou le refus du sexe », dans La Cannelle et le panda : les grands naturalistes explorateurs autour du Monde, éd. Fayard, (ISBN 978-2213-60466-4).
  11. Aline Raynal-Roques, La Botanique redécouverte, éditions Quæ, , p. 43.
  12. [Solar & Malagnac 2013] Philippe Silar et Fabienne Malagnac, Les champignons redécouverts, Paris, Belin, , 232 p. (ISBN 978-2-7011-5902-7), chap. 9 (« Champignons et alimentation »), p. 160.
  13. [[#1708fontenelle|]].
  14. [Pied 1906] Édouard Pied, Notices sur les rues de Nantes, , p. 299-300.
  15. Rue Tournefort sur le site officiel de la nomenclature des rues de la Ville de Paris.

Annexes

Bibliographie

  • [Aillaud, Ferrari & Hazzan 1982] Georges J. Aillaud, Jean-Patrick Ferrari et Guy Hazzan, Les botanistes à Marseille et en Provence du XVIe siècle au XIXe siècle (catalogue de l'exposition 18 mars-14 avril 1982), éd. par la Ville de Marseille, , 12 pl. + 136.
  • [Fontenelle 1708] Fontenelle, « Éloge de M. de Tournefort », Histoire de l'Académie des sciences, , p. 143- (lire en ligne [sur gallica]).
  • [Kolodny 1997] Émilie Kolodny, « Tournefort, un voyageur provençal dans l'Archipel grec au début du XVIIIe siècle », Provence Historique, t. 47, no 197, (lire en ligne [sur _ _ _], consulté en ).
  • [Michaud 1843] Louis-Gabriel Michaud, Biographie universelle ancienne et moderne, t. 42, Paris / Leipzig, chez Madame C. Desplaces / libr. F.A. Brockhaus, , 708 p., sur gallica (lire en ligne), p. 41-47.
  • [Morat, Aymonin & Jolinon 2004] Philippe Morat, Gérard-Guy Aymonin et Jean-Claude Jolinon, L'Herbier du monde. Cinq siècles d'aventures et de passions botaniques au Muséum national d'histoire naturelle, Paris, Musée d'histoire naturelle de Paris et Les Arènes/L'iconoclaste, , 240 p. (ISBN 2-286-00727-6).
  • [Pelt 1999] Jean-Marie Pelt, « Joseph Pitton de Tournefort ou le refus du sexe », dans La Cannelle et le panda : les grands naturalistes explorateurs autour du Monde, éd. Fayard, (ISBN 978-2213-60466-4, présentation en ligne).

Article connexe

Liens externes

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