Théodore Ier Lascaris
Théodore Ier Lascaris (grec byzantin : Θεόδωρος Αʹ Λάσκαρις), véritable fondateur de l'Empire de Nicée, né vers 1174 et mort en novembre 1222[1], est un empereur byzantin de 1205 à 1222, fils de Manuel Lascaris et de Jeanne Karatzine. Parent de la famille impériale des Comnènes, il s'illustre comme l'un des proches de l'empereur Alexis III Ange, jusqu'au renversement de ce dernier par Alexis IV, dans le contexte de la Quatrième Croisade. Théodore est alors contraint de s'exiler en Asie Mineure, où il profite de l'effondrement de l'Empire byzantin qui fait suite au sac de Constantinople pour se tailler une principauté autour de Nicée, qui devient l'Empire de Nicée. Rapidement, il s'oppose aux forces latines qui se sont installées à Constantinople et sur bon nombre des anciens territoires byzantins, mais aussi avec l'Empire de Trébizonde et le despotat d'Épire, deux États byzantins qui se posent en successeur de l'Empire byzantin. Grâce à une habile politique d'alliances, des réussites militaires qui stabilisent ses frontières face aux Latins et aux Seldjoukides ainsi que la mise en place d'une administration réduite mais efficace, Théodore instaure un Empire solide, capable d'envisager une reconquête progressive des terres perdues sous la conduite de la dynastie qu'il crée, celle des Lascaris. A terme, c'est bien de l'Empire de Nicée que part la reprise de Constantinople en 1261.
Pour les articles homonymes, voir Théodore Ier, Lascaris et Lascaris (homonymie).
Théodore Ier Lascaris Θεόδωρος Αʹ Λάσκαρις | |
Empereur de Nicée | |
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Portrait de Théodore Ier Lascaris (manuscrit du XVe siècle). | |
Règne | |
- 17 ans, 7 mois et 16 jours |
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Période | Lascaris |
Précédé par | Constantin Lascaris |
Suivi de | Jean III Doukas Vatatzès |
Biographie | |
Naissance | vers 1174 |
Décès | novembre 1222 (~48 ans) |
Père | Manuel Lascaris |
Mère | Ioanna Karatzaina |
Épouse | Anne Ange Philippa d'Arménie Marie |
Descendance | Nicolas Jean Irène Marie Eudoxie Constantin |
Origines
Théodore Lascaris est d'origine noble mais sa famille ne semble pas particulièrement prestigieuse. Il naît vers 1175 et l'identité de ses parents reste un mystère. En règle générale, les Byzantins donnent à leur premier fils le nom de leur grand-père. Dans le cas de Théodore, son père s'appellerait Nicolas[2]. La mère de Théodore appartient à une branche inconnue de la famille impériale des Comnènes, expliquant que Théodore met en avant ce patronyme prestigieux[3]. Il a six frères : Constantin, Georges, Alexis, Isaac, Manuel et Michel. Les deux derniers sont nés d'une mère différente car ils ont comme nom de famille Tzamantouros et non Comnène. Enfin, Théodore est rattaché à la famille des Phocas, probablement par le mariage d'une de ses tantes[4].
Les propriétés des Lascaris sont principalement situées à l'ouest de l'Asie Mineure. Tant Théodore que Constantin font figurer Saint-George sur leur sceau, avec l'inscription Diasoritès, ce qui indique un lien avec le monastère de Saint-Georges Diasoritès en Lydie, dans la vallée du fleuve Caÿstre[4],[5].
Dans son ouvrage "The Byzantine Hellene" (2019) Dimiter Angelov (Dumbarton Oaks, université de Harvard) avance que la famille Lascaris descend très certainement du patrice Artasir Laskaris, identifié sur un sceau trouvé à Klicevac, sur le Danube (édité en 1990 par L. Maksimovic et M. Popovic) dans les termes : "Artaseiras, fils du frère de Phaltoum, prince du pays des kantzakènes" donné en otage à Byzance en 1055.
Cet otage définitivement établi à Byzance, patrice et général, serait dans cet ordre d'idée fils d'Ali Laskar II, ou Lashkari Ali ben Musa, gouverneur de Gandja, de la dynastie Kurde des Cheddadides.
Cette hypothèse s'accorde avec l'étymologie perse du nom Laskar et explique l'insertion de cette famille dans les milieux aristocratiques.
Jeunes années
Selon l'historien Nicétas Choniatès, Théodore est un jeune audacieux et un vaillant guerrier[6]. Georges Acropolite, qui écrit plus tardivement, rapporte que Théodore est de petite taille sans excès, de teint sombre et avec une longue barbe qui se sépare en deux. Ses liens avec les Comnènes lui assurent une ascension sociale. Le premier sceau qu'on lui connaît mentionne les titres de sébaste et de protovestiarite, relativement prestigieux. Le premier est un titre aulique réservé d'abord aux parents de l'empereur, avant d'être étendu à d'autres catégories sociales sous Alexis III Ange (1195-1203). En tant que protovestiarite, il dirige une unité de jeunes membres de la garde impériale[7].
A cette époque, l'empereur Alexis III, sans descendance mâle, est confronté au défi de sa succession. Il marie ses deux filles aînées : Irène revient à Alexis Paléologue et Anne à Théodore. Alexis devient despote, ce qui en fait de facto l'héritier du trône mais il s'éteint avec 1203 et c'est Théodore qui hérite de ce titre.
La prise de Constantinople
L'événement majeur du monde byzantin au début du XIIIe siècle reste la Quatrième Croisade, qui aboutit au sac de Constantinople en 1204. Dès 1203, les Croisés, assistés par Alexis IV Ange, le fils d'Isaac II Ange renversé par Alexis III, s'emparent de la rive nord de la Corne d'Or et menacent directement la cité impériale. Théodore s'illustre alors par des raids contre les Croisés, ce qui ne les empêche pas d'assiéger la ville. Face au danger, Alexis III s'enfuit dans la nuit du 17 au 18 juillet 1203, emmenant le trésor impérial avec lui.
Isaac II est relâché dans la foulée et gouverne avec son fils, Alexis IV. En revanche, Théodore, partisan d'Alexis III, est arrêté mais parvient à s'échapper en septembre. Selon Choniatès, il parvient à échapper à ses ravisseurs grâce à son esprit pratique et un esprit brave, ce qui reste très laconique. Il semble se cacher dans une église dédiée à Saint-Michel, avant de rejoindre l'Asie Mineure où se trouvent ses fiefs, accompagné de sa femme et de sa fille. Il atteint Nicée, où il se heurte à une relative hostilité des autorités, qui craignent les représailles d'Alexis IV. Théodore se met alors à vagabonder d'une région à l'autre. Il est significatif qu'il ne rejoigne pas Alexis III, alors en Thrace et il semble s'être brouillé avec lui, lui reprochant peut-être d'avoir fui face à l'ennemi.
Dans le même temps, Alexis IV est pris à son propre jeu quand il ne parvient pas à payer les Croisés, qui refusent de quitter Constantinople et se mettent à piller les alentours. La tension monte et l'armée byzantine finit par se détourner de son souverain au profit d'Alexis V Doukas Murzuphle, proclamé empereur le 28 janvier 1204. Isaac est alors mort et Alexis IV ne tarde pas à être assassiné, ce dont les Croisés se saisissent comme d'un prétexte pour mettre le siège devant la ville. Le 12 avril, ils percent les remparts et Alexis V s'enfuit. Un groupe d'aristocrates tente de confier la couronne impériale à Constantin, le frère de Théodore mais il la refuse, tandis que les Croisés mettent à sac Constantinople.
La résistance
Quand Théodore se trouve en Anatolie, celle-ci est en proie à une certaine anarchie, qui dure depuis quelques décennies déjà, depuis au moins le règne mouvementé d'Andronic Ier Comnène avec l'émergence de révoltes aux visées parfois séparatistes. Théodore Mancaphas, aristocrate de Philadelphie, s'est rendu maître de cette cité tandis que Sabas Asidénos tient Priène[8] et que Nicéphore Kontostéphanos contrôle le cours supérieur du Méandre. Jusqu'à la fin de 1204, Théodore parvient à s'assurer la loyauté de plusieurs cités de Bithynie, en prétendant agir au nom d'Alexis III. Il devient de facto le stratège de cette région et établit sa capitale à Pruse. Il devient le principal chef d'une résistance opiniâtre aux Croisés qui tentent de s'étendre dans la région. Il est assisté en cela par son frère, Constantin Lascaris, parfois inclus dans les listes impériales mais qui semble avoir rapidement laissé la main à Théodore. En parallèle, il s'assure de la paix avec les Seldjoukides en négociant directement avec le sultan Suleiman, bien que ce dernier s'éteint dès juin 1204, remplacé par Kılıç Arslan III.
A Constantinople, les Croisés s'entendent pour se partager les vestiges de l'Empire byzantin. En Asie Mineure, ils fondent un duché de Nicée, confié à Louis de Blois et un duché de Philadelphie à Etienne du Perche, mais encore faut-il s'emparer des territoires concernés. Les Vénitiens s'emparent eux de Lampsaque, port asiatique de l'Hellespont et Pierre de Bracieux s'arroge Pegae[9]. Enfin, le nouvel Empire de Trébizonde essaie de s'étendre en Paphlagonie en prenant plusieurs villes côtières sur la mer Noire. Quant à Théodore, il est sèvèrement battu par Pierre de Bracieux à Poemanenum le 6 décembre 1204, permettant au Croisé de s'emparer de nouvelles cités en Bithynie.
Dans le même temps, le nouvel Empire latin tente d'éliminer tout esprit de résistance en faisant exécuter Alexis V puis en capturant Alexis III et en l'obligeant à leur livrer les insignes impériaux. Pour renforcer ses positions, Théodore réussit à formaliser un accord avec Manuel Maurozomès, petit-fils de l'ancien empereur Manuel Ier Comnène et un sultan turc déposé, Kay Khusraw Ier. Il s'engage à soutenir ce dernier à récupérer son trône s'il l'aide dans ses actions militaires contre les Croisés. Dès mars 1205, Manuel et Kay Khusraw renversent Kilic Arslan et s'emparent du sultanat de Roum.
En Europe, les Latins s'imposent assez aisément en Thessalie et dans le nord de la Grèce. Michel Ier Comnène Doukas, cousin d'Alexis III, organise la résistance byzantine au sein du despotat d'Épire mais se voit contraint de jurer allégeance au pape Innocent III pour éviter d'être attaqué[10]. En 1205, l'empereur latin Baudouin envoie son frère, Henri, à l'assaut de l'Asie Mineure. Il s'impose d'abord face à Mancaphas et à Constantin Lascaris au cours de la bataille d'Adramyttion le 19 mars mais en Thrace, l'intervention du tsar bulgare Kaloyan change la donne. Les Latins doivent redéployer leurs forces mais subissent une lourde défaite lors de la bataille d'Andrinople avec la mort de plusieurs chevaliers et la captivité de Baudouin, qui meurt rapidement.
Pour Théodore, c'est ue aubaine. Les Latins apparaissent plus faibles que leurs derniers succès ne le laissaient escompter. Théodore peut consolider ses positions en Asie Mineure et expulser les quelques garnisons des Croisés en Bithynie. Il déplace sa capitale vers Nicée, instaurant de fait ce que l'on appelle l'Empire de Nicée, réunissant les populations byzantines de la région sous une seule autorité. En effet, Mancaphas abandonne ses prétentions et Asidénos se met au service de Théodore Lascaris. Dans les deux cas, le dirigeant nicéen est attentif à les gratifier de titres et de privilèges puisque les Mancaphas gardent d'importantes propriétés et Asidénos devient sébastocrator[11]. Au-delà, Théodore bénéficie du soutien des élites locales, qu'il récompense par l'octroi de titres. Il parvient même à obtenir un serment d'allégeance de la part de Théodore Comnène Doukas, le frère de Michel Ier d'Épire, avant de le laisser repartir en Europe[12].
Règne
Couronnement
Théodore doit aussi composer avec des rivaux byzantins, en l'occurrence l'Empire de Trébizonde, qui tente une invasion stoppée par Théodore à Nicomédie. De même, il consolide la frontière avec les Turcs en les battant dans la vallée du Méandre. En effet, Maurozomès, qui a des vues sur le titre impérial, a convaincu le sultan d'entreprendre une offensive. Une fois la paix avec conclue avec les Seldjoukides, Maurozomès reçoit du sultan le gouvernorat des forteresses de Chônai et de Laodicée du Lycos[13],[14]. Dès 1205, Théodore assume le titre d'empereur, se posant en successeur des souverains byzantins chassés de Constantinople, soit après son succès contre l'Empire de Trébizonde, soit après le traité avec Maurozomès. Pour autant, les Latins ne reconnaissent en rien son titre, de même qu'une partie des Byzantins, qui estiment que seul un couronnement par le patriarche de Constantinople peut le légitimer. De ce fait, Théodore approche Jean X Kamateros, patriarche exilé en Thrace mais celui-ci refuse de se rendre à Nicée[15].
Théodore parvient à renforcer sa position en donnant l'asile à des aristocrates dont les possessions en Thessalie ou dans le Péloponnèse sont désormais occupées. Parmi ces grandes familles, citons les Paléologue, les Cantacuzène ou les Branas. Si son administration est de taille réduite, il attire d'importants dignitaires byzantins. L'oncle de sa femme, Basile Doukas Kamateros, ancien logothète du drome, l'aide à mettre en place son nouveau régime. Il s'offre les services d'un pirate calabrais, Jean Steirionès, pour diriger sa flotte dans la mer de Marmara. Enfin, il peut s'appuer sur ses frères à qui il confie des commandements militaires.
Après la mort de Baudouin, c'est Henri de Flandres qui devient le nouvel empereur. Il s'oppose à la nomination d'un nouveau patriarche orthodoxe après la mort de Jean Kamatéros en juin 1206 et s'allie avec David Comnène contre Théodore. Ce dernier a décidé de reprendre Héraclée du Pont, occupée par David mais les Latins l'attaquent par derrière alors qu'il approche de la ville. Il doit alors se retourner pour les affronter, abandonnant son objectif. En outre, Henri envoie des troupes s'emparer de Nicomédie et de Cyzique au cours de l'hiver 1206-1207. Acculé, Théodore fait alliance avec Kaloyan pour renverser la tendance. Les Bulgares lancent un raid en Thrace, obligeant Henri à rappeler ses troupes en Europe, puis à faire la paix avec Théodore alors que ce dernier a mis le siège devant Nicomédie. Une trêve de deux ans est signée.
Face à la vacance du trône patriarcal, Théodore tente de convaincre le pape de le laisser nommer un nouveau patriarche et de le reconnaitre comme chef de l'Eglise orthodoxe mais il échoue un refus. Quand les Latins brisent la trêve en 1208, Théodore essaie à nouveau de se rapprocher d'Innocent III pour qu'il joue les médiateurs et propose de fixer la frontière entre son Empire et celui de Constantinople sur la mer de Marmara.
En 1208, pressé par le clergé, Théodore finit par réunit un concile à Nicée pour désigner un nouveau patriarche. C'est Michel IV Autorianos qui est élu le 20 mars 1208. C'est un parent de Kamatéros, le principal conseiller de Théodore et son premier acte est de couronner Théodore comme empereur et autocrate des Romains, le 6 avril. Désormais, Théodore peut se prévaloir de cette cérémonie pour légitimer ses prétentions au trône impérial byzantin. Néanmoins, ses opposants persistent en estimant que la procédure de nomination de Michel Autorianos est viciée par l'illégitimité même de Théodore, qui a convoqué le concile sans en avoir la capacité juridique. Cette situation atypique, héritée de la chute de Constantinople, met surtout en lumière la concurrence entre les différents prétendants à l'héritage byzantin.
Politique étrangère et militaire
En 1209, quatre puissances régionales principales s'opposent pour Constantinople : l'Empire latin qui y est installé, l'Empire de Nicée en Anatolie occidentale, le despotat d'Épire en Europe et l'Empire de Trébizonde, de plus en plus isolé géographiquement. Michel Ier Doukas fait figure de concurrent principal car il gagne peu à peu des positions en Europe. De son côté, Henri Ier conclut une alliance avec Kay Khusrwa contre Théodore, qui reste proche de Kaloyan, puis de son successeur, Boril. Quant à Alexis III, délivré suite au paiement d'une rançon par Michel Doukas vers 1209-1210, il s'exile à Konya.
En Europe, Boril et Michel ont tous deux pour ambition de reprendre Thessalonique, deuxième ville de l'orbite byzantine. En 1211, alors que Henri s'y rend, Théodore en profite pour lancer un premier assaut contre Constantinople, tandis que Boril pénètre en Thrace. L'empereur latin parvient malgré tout à se retirer à Constantinople tandis que Kay Khusraw envahit l'Anatolie, obligeant Théodore à redéployer ses forces. La bataille d'Antioche du Méandre, vers le 17 juin 1211, aboutit à une victoire décisive de Théodore, lors de laquelle il aurait tué en combat singulier le sultan turc et se serait emparé d'Alexis III. Cette victoire lui assure la signature d'une trêve durable avec Kay Kâwus Ier, le nouveau sultan[16].
Très vite, Théodore veut capitaliser sur cette victoire, y compris en incitant l'ensemble du monde grec à se révolter. Néanmoins, son succès masque les lourdes pertes subies par son corps de mercenaires latins, cœur de son armée et quand il rencontre celle de Henri Ier le 15 octobre 1211 sur le fleuve Rhyndakos, c'est lui qui est lourdement vaincu. Henri prend Nymphaion et Pergame et se vante auprès des puissances européennes de tenir toutes les terres jusqu'à la frontière avec les Seldjoukides. Pour autant, il doit vite revoir ses ambitions quand il est confronté au manque de troupes pour tenir le terrain conquis. Une paix est finalement signée entre 1212 et 1214, qui confirme les possessions latines en Troade. L'Empire de Constantinople peut notamment se prévaloir de la possession de forteresses en Bithynie qui lui assurent le contrôle de voies de communications importantes. De son côté, Théodore se lance dans un programme de constructions de fortifications pour renforcer la défense de son territoire, tout en y installant des colons, en leur conférant des terres arables pour les inciter à y rester.
Toujours actif, Théodore tourne aussi son regard vers l'Empire de Trébizonde. En 1214, il s'allie avec le sultanat de Roum pour envahir ce territoire, contraignant David Comnène à céder Héraclée du Pont. Dans l'ensemble, le bilan de cette campagne est positif car il permet à l'Empire de Nicée de bénéficier d'une fenêtre maritime sur la mer Noire et d'éloigner toujours plus l'Empire de Trébizonde de Constantinople.
Consolidation de l'Empire de Nicée
Dans les années 1210, Théodore est toujours confronté à la concurrence du despotat d'Épire, quand Michel Ier est assassiné en 1214 ou 1215. C'est son fils, Théodore Comnène Doukas qui lui succède, sans donner suite au serment qu'il a fait quelques années avant auprès de Théodore Lascaris. S'alliant avec Dèmètrios Chomatenos, archevêque d'Ohrid, il rejette la prétention au patriarcat de l'Empire de Nicée et les deux hommes nomment directement aux évêchés orthodoxes des Balkans. L'empereur Henri, inquiet des visées expansionnistes du despotat, tente d'intervenir militairement mais il s'éteint sur la route. C'est son beau-frère, Pierre II de Courtenay, qui prend sa suite, avant d'être capturé et tué en Épire en 1217. Cette vacance du pouvoir affaiblit l'Empire latin alors que Yolande de Hainaut assure une régence. Pour préserver la paix avec l'Empire de Nicée, un accord aboutit au mariage de Théodore avec Marie de Courtenay, fille de Yolande. De plus en plus, les puissances latines commencent à s'accomoder de la présence de Théodore et Pélage Galvani, légat du pape envoyé à Constantinople pour tenter de mettre de l'ordre dans l'Eglise orthodoxe, essaie en vain de se rapprocher de lui pour entamer des discussions sur la résolution du schisme qui dure depuis 1054.
Théodore s'éteint en novembre 1221 et un conflit successoral éclate entre ses deux frères, Alexis et Isaac, et son beau-fils, Jean Doukas Vatatzès. C'est ce dernier qui l'emporte et les deux premiers sont exilés. Théodore est enterré auprès de son beau-père et de sa première femme dans le monastère Sainte-Hyacinthe de Nicée.
Unions et postérité
Il épouse en premières noces en 1199 Anne Ange (1175-1212), fille d'Alexis III Ange et d'Euphrosyne Doukaina Kamatera, et a :
- Nicolas, mort en 1212
- Jean, mort vers 1212
- Irène (morte en 1239), mariée en 1212 à Constantin Paléologue (mort en 1212), puis à Jean III Doukas Vatatzès (1192-1254), empereur de Nicée.
- Marie (1206-1270), mariée en 1218 à Béla IV de Hongrie, roi de Hongrie (1206-1270).
- Eudoxie, fiancée à Robert de Courtenay et mariée à Anseau de Cayeux, gouverneur d'Asie mineure.
Veuf, il se remarie en 1214 avec Philippa d'Arménie (1183- après 1219), fille de Roupen III d'Arménie, roi d'Arménie, et d'Isabelle de Toron. Il s'en sépare en 1216, mais un fils était déjà né de ce mariage : Constantin, né en 1214, duc de Thrace. D'après Alice Gardiner, le roi Roupen voulait réserver la main de sa fille à un autre parti et avait envoyé sa nièce à la place de sa fille à la Cour de Théodore ; lorsque ce dernier se fut aperçu qu'il avait été dupé, il renvoya en Cilicie la nièce ainsi que le fils qui leur était né[17].
Enfin, il épouse en troisièmes noces en 1219 Marie de Courtenay (1204-1222), fille de Pierre II de Courtenay, empereur latin de Constantinople, et de Yolande de Hainaut. Marie est aussi l'arrière-petite-fille du roi de France Louis VI le Gros.
Notes et références
- Georges Acropolite, R. J. Macrides: George Akropolites: the history, Oxford studies in Byzantium, Oxford University Press, 2007, p. 158
- Angelov 2019, p. 16.
- Angelov 2019, p. 16-17.
- Angelov 2019, p. 17.
- Volkoff 2015, p. 197.
- Angelov 2019, p. 19.
- Angelov 2019, p. 18-19.
- (en) Penelope Vougiouklaki, « Sabas Asidenos », dans Εγκυκλοπαίδεια Μείζονος Ελληνισμού, Μ. Ασία, Athènes, (lire en ligne)
- Angelov 2019, p. 25.
- Varzos 1984, p. 679.
- Kazhdan 1991, p. 207.
- Varzos 1984, p. 553.
- Kazhdan 1991, p. 1320.
- Magoulias 1984, p. 350.
- Kazhdan 1991, p. 1055.
- Macrides 2007, p. 131-132.
- Alice Gardiner, The Lascarids of Nicaea: the Story of an Empire in Exile, 1912 (Amsterdam: Adolf M. Hakkert, 1964), p. 87
Sources
- (en) Dimiter Angelov, The Byzantine Hellene: The Life of Emperor Theodore Laskaris and Byzantium in the Thirteenth Century, Cambridge University Press, (ISBN 978-1-108-48071-0)
- (en) Michael Angold, « The Latin Empire of Constantinople, 1204–1261: Marriage Strategies », dans Identities and Allegiances in the Eastern Mediterranean after 1204, Farnham: Ashgate Publishing Limited, , 47-68 p.
- (en) Michael Angold, « After the Fourth Crusade: the Greek rump states and the recovery of Byzantium », dans The Cambridge History of the Byzantine Empire, c. 500–1492, Cambridge University Press, , 731-758 p. (ISBN 9781409410980)
- (en) Joh Van Antwerp Fine, The Late Medieval Balkans: A Critical Survey from the Late Twelfth Century to the Ottoman Conquest, Ann Arbor, Michigan: University of Michigan Press, (ISBN 0-472-08260-4)
- (en) Alexander Kazhdan (dir.), Oxford Dictionary of Byzantium, New York et Oxford, Oxford University Press, , 1re éd., 3 tom. (ISBN 978-0-19-504652-6 et 0-19-504652-8, LCCN 90023208)
- (en) D.A. Korobeinikov, « Raiders and neighbours: the Turks (1040–1304) », dans The Cambridge History of the Byzantine Empire, c. 500–1492, Cambridge University Press, , 692-727 p. (ISBN 978-0-521-83231-1)
- Angeliki Laiou et Cécile Morrisson, Le Monde byzantin III, L’Empire grec et ses voisins, XIIIe-XVe siècle, Paris, Presses universitaires de France, coll. « L’Histoire et ses problèmes » (1re éd. 2006) (ISBN 9782130520085)
- (en) Filip Van Tricht, The Latin Renovatio of Byzantium: The Empire of Constantinople (1204–1228), Leiden: Brill, (ISBN 978-90-04-20323-5)
- (el) Konstantinos Varzos, Η Γενεαλογία των Κομνηνών [« La généalogie des Komnenoi »], Thessalonique, Centre for Byzantine Studies, University of Thessaloniki, .
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
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