Université Jagellon

L’université Jagellon de Cracovie (Uniwersytet Jagielloński w Krakowie) fondée en 1364 par le roi de Pologne Casimir III le Grand sous le nom d'Académie de Cracovie (Akademia Krakowska) est la plus ancienne université d'Europe centrale après l'Université Charles de Prague. Son nom actuel de Jagellon est celui de la dynastie royale qui régna sur la République des Deux Nations (Pologne-Lituanie) et dont le premier roi Władysław II Jagellon, refonda l'université d'une manière durable en 1400[1].

Université Jagellonne
Blason de l'université
Histoire
Fondation
1364
Statut
Type
Nom officiel
Uniwersytet Jagielloński
Régime linguistique
Fondateur
Recteur
Jacek Popiel (depuis )
Devise
Plus ratio quam vis Plutôt convaincre que vaincre »)
Membre de
Site web
(pl + en + ru) www.uj.edu.pl
Chiffres-clés
Étudiants
41 661 ()
Effectif
7 246 ()
Localisation
Pays
Ville

En 2018, les Times Higher Education World University Rankings classe l'université dans la bande 601-800 dans le monde[2].

Histoire

Fondation de l'Académie, toile de Jan Matejko.

L'université Jagellon de Cracovie fut fondée, sous le nom d'Akademia Krakowska, le , par le roi Kazimierz le Grand qui reçut la permission du pape d'établir une université à Cracovie (alors capitale de la Pologne). Cependant, le Studium Generale à Cracovie ne fonctionna qu'en 1367 avec seulement trois facultés (arts libéraux, médecine et droit), le pape Urbain V ayant refusé de fonder une faculté de théologie (alors la discipline la plus noble). Le Studium Generale naissait sur le modèle de l'université de Paris.

Le premier chancelier de l'université fut le juriste et évêque de Cracovie Piotr Wysz de Radolin, et les premiers professeurs étaient tchèques, allemands et polonais et étaient presque tous issus de l'université Charles de Prague, où leur grand maître était Matthieu de Cracovie[3]. Dans le monde universitaire de cette époque, on attendait beaucoup des conciles et les professeurs de Cracovie étaient favorables à celui de Pise en 1409. Lors du concile de Constance de 1414, le recteur de l'université de Cracovie, Paweł Włodkowic, se rendit célèbre en Europe en défendant le principe de la tolérance religieuse envers les non-chrétiens et condamna la conversion par la force[4].

Le développement de l'université fut interrompu par la mort du roi Kazimierz. Le monarque polonais suivant, Louis Ier de Hongrie, ne s'intéressait pas aux sciences, ce qui fut la cause d'un long retard. Cependant, l'université fut remise sur pied en 1400 par le roi Władysław Jagellon, fondateur de la dynastie Jagiellon. Sa femme Hedwige (Jadwiga), couronnée « roi » de Pologne, contribua largement à cette restauration en léguant dans son dernier testament en 1399, une partie considérable de son domaine privé à l'Université[5]. En 1397, elle persuada le pape Boniface IX de rétablir l'université en y intégrant la faculté de théologie. L'université de Cracovie était la seule université de Pologne jusqu’au XVIe siècle où furent fondée l’Académie de Vilnius par le roi Stefan Batory en 1578 et l’Académie de Zamość par le chancelier Jan Zamoyski en 1594.

L'influence de l'Académie sur le pays, toile de Jan Matejko figurant des étudiants et professeurs célèbres : Zbigniew Oleśnicki, Jan de Capistran, Jan de Kenty, Jan de Kolno, Jérôme de Prague, Grzegorz de Sanok, Jan Długosz, Filippo Buonaccorsi, Conrad Celtes, Albert Brudzewski, Nicolas Copernic et Michał z Wielunia.

Au XVe siècle, l'université connut son siècle d'or. Au nombre des facultés les plus prospères se trouvaient la faculté du droit, où enseignaient Stanisław de Skarbimierz et Paweł Włodkowic, et celle d'astronomie et de mathématiques, sous l'enseignement de Wojciech Brudzewski (qui mettait en doute le géocentrisme)[6]. Ses étudiants les plus célèbres furent Nicolas Copernic, Conrad Celtes et Bernard Wapowski. Y étudia aussi le créateur de la langue biélorusse, Francysk Skaryna.

L'université et son chancelier furent des partisans du Concile œcuménique de Bâle.

En 1473, l’imprimeur Kasper Straube de Bavière installa à Cracovie la première presse[7]. Il est suivi par Johann Haller qui établit à Cracovie sa imprimerie avant 1500. Parmi les personnalités qui influencèrent la philologie classique, figurent Grzegorz de Sanok, Paweł de Krosno, Stanisław Grzebski et Jakub Górski[8] ; l'hébreu y était aussi enseigné[9].

Au XVIe siècle, l'université commença à tomber en crise. L'Académie de Cracovie se réformait trop lentement, tandis que les universités allemandes, sous l'influence de la Réforme abandonnèrent les scolastiques médiévaux plus tôt. Aussi le magicien Johann Georg Faust et avant lui l'alchimiste Pan Twardowski seraient ses étudiants de l'époque. Malgré tout, l'Université attira toujours des humanistes, dont des célébrités comme Jan Kochanowski, Andrzej Frycz Modrzewski ou Marcin Kromer.

La crise dura jusqu'à la réforme inspirée par les Lumières et menée par Hugo Kołłątaj, représentant de la Commission de l'éducation nationale, administration centrale d’instruction publique fondée en Pologne après la suppression des Jésuites en 1773.

En 1817, l'université prit le nom de Jagellon en l'honneur de cette dynastie de rois de Pologne. Parmi ses grands professeurs du XIXe siècle figurèrent Karol Olszewski, Zygmunt Wróblewski, Józef Szujski, Michał Bobrzyński, Stanisław Tarnowski, Jan Niecisław Baudouin de Courtenay, Stanisław Estreicher, Napoleon Cybulski et Marian Smoluchowski.

Tout au long de son histoire, l'université attira des milliers d'étudiants venus de toute l'Europe. Au cours de la seconde moitié du XVe siècle, près de 40 % des étudiants venaient de l'étranger. Au cours des siècles, presque toute l'élite intellectuelle polonaise y fut instruite.

En 1939, les Allemands menèrent l'Opération Tannenberg, connue aussi sous le nom d'Intelligentzaktion dont le but était l'extermination des cadres de la société polonaise. À Cracovie, au cours de la Sonderaktion Krakau, le chef la Gestapo Bruno Müller demanda au recteur Tadeusz Lehr-Spławiński (pl) de réunir tous les professeurs de l'université. Venus de bonne foi, ils furent arrêtés, puis déportés au camp de concentration de Sachsenhausen.

Aujourd’hui, l'Université compte seize facultés, dont trois facultés de médecine regroupé dans le Collegium Medicum. Environ 50 000 étudiants s'y inscrivent chaque année, dont 65 % sont des femmes[réf. nécessaire].

Bâtiments et campus

L'université Jagellon possède plus de 100 bâtiments. Le plus ancien est Collegium Maius construit au XVe siècle. Il abrite aujourd'hui le Musée de l'Université Jagellon et sa vaste collection d'instruments historiques en lien avec l'astronomie, la météorologie, la cartographie, la physique et la chimie.

Le Collegium Novum, bâti entre 1873 et 1887, est toujours le siège du recteur de l'université. D'autres bâtiments de valeur historique sont situés dans le centre historique de Cracovie (1er campus) dont le Collegium Minus, le Collegium Witkowski, Collegium Iuridicum, le Collegium Broscianum, le Collegium Wróblewski et l'Arsenal de Ladislas IV.

L'adaptation de l'université aux exigences de l'enseignement supérieur et de la recherche modernes a conduit à la modernisation du 2e campus et à la construction de l'Auditorium Maximum (en fonction depuis 2005), avec un amphithéâtre pour 1 200 personnes.

Le 3e campus (pl) situé dans le district de Ruczaj et de Pychowice, à côté du Parc technologique de Cracovie. L'ensemble compte 100 000 m2 dévolus à l'enseignement. Il comprend des bâtiments pour les facultés des sciences de la vie, biotechnologie, biophysique, biochimie, chimie, géographie, géologie, mathématiques, physique, informatique, astronomie, gestion et communication sociale, science politique et études internationales, ainsi que le parc technologique (LifeScience Park) - un élément du Centre Jagellon de l'innovation ; la plupart des bâtiments sont déjà en fonction. Une ligne de tramway a été mise en service en 2012 pour faciliter l'accès au campus[10].

Il existe également des bâtiments en dehors des campus, comme le Château de Przegorzały (Institut d'études européennes), le Parc botanique, ou le Fort Skala (Observatoire astronomique).

Étudiants célèbres

De revolutionibus orbium coelestium, de Copernic.

Professeurs

Par ordre chronologique.

Inscriptions

Avec 41 661 étudiants en 2018/2019 et 3 809 enseignants-chercheurs[12], c'est l'une des principales universités de Pologne[réf. nécessaire].

Facultés

L'université est composée de 16 facultés[12] :

  • Collegium Medicum (largement autonome, a été détachée de l'université de 1950 à 1993 ; a porté le nom d’Académie de médecine Nicolas-Copernic)
    • faculté de médecine (wydział Lekarski)
    • faculté de médecine pour les étrangers (wydział Lekarski – Szkoła Medyczna dla Obcokrajowców)
    • faculté de pharmacie (pl)
    • faculté des métiers de la santé (pl) (ancienne école de soins infirmiers)
  • Faculté de droit et d'administration (pl)
  • Faculté de philosophie (pl)
  • Faculté d'histoire (pl)
  • Faculté de philologie (pl)
  • Faculté de lettres polonaises (pl)
  • Faculté de physique, astronomie et informatique appliquée (pl)
  • Faculté de mathématique et informatique (pl)
  • Faculté de chimie (pl)
  • Faculté de biologie et sciences de la Terre (pl)
  • Faculté de gestion et communication sociale (pl)
  • Faculté de sciences politiques et études internationales (Wydział Studiów Międzynarodowych i Politycznych Uniwersytetu Jagiellońskiego)
  • Faculté de biochimie, biophysique et biotechnologie (pl)

Coopérations universitaires en Europe

Bibliothèque Jagellonne

La bibliothèque universitaire est l'une des plus importantes du pays et la plus ancienne, avec près de six millions de volumes. Elle abrite une importante collection de manuscrits médiévaux, comme Des révolutions des sphères célestes (De revolutionibus orbium coelestium) de Copernic, ou le Codex de Balthasar Behem[13],[14].

Elle comporte aussi des ouvrages de la littérature clandestine (samizdat) de la période communiste (1945-1989).

L’une des propriétés les plus controversées de la bibliothèque Jagellonne est la collection dite du « fonds Berlinka » (en français : « fonds berlinois »). Ces fonds venus de la Bibliothèque d'État de Berlin, entreposés dans des châteaux et des grottes de l'Est de l'Allemagne d'alors (Silésie) pour les mettre à l'abri des bombardements de la fin de la Seconde Guerre mondiale, se sont retrouvés sur le territoire polonais à la suite des modifications territoriales de 1945. On y trouve les manuscrits originaux de compositions de Johann Sebastian Bach, Wolfgang Amadeus Mozart (plus de cent partitions), Ludwig van Beethoven (parmi eux l'Ode à la joie de la Symphonie no 9), Niccolò Paganini, Felix Mendelssohn, Luigi Cherubini, Franz Schubert, Robert Schumann, Johannes Brahms[15], les manuscrits des lettres de Martin Luther, de Gottfried Wilhelm Leibniz, d’Albrecht Dürer, de Johann Wolfgang von Goethe, des frères Grimm, de Georg Wilhelm Friedrich Hegel et d’Alexander von Humboldt[16]. Il n'y a aucun catalogue connu de cette curieuse collection, d’ailleurs rarement exposée.

Bibliographie

  • Casimir Morawski (pl), Histoire de l’université de Cracovie. Moyen Âge et Renaissance. Traduction de Pierre Rongier. Paris, A. Picard - Cracovie, Gebethner et Cie (pl). Vol.I, (1900), 311 p.; Vol. II, (1903), 297 p.; Vol. III, (1905), 359 p. (Index des noms propres, table analytique des matières)
  • Kazimierz Lepszy (pl), L'Université Jagellonne d'hier, d'aujourd'hui et de demain, Presses de l'université Jagellonne, 1964
  • Renata Dutkowa, L'Université Jagellonne aujourd'hui, Éditions de l'Université Jagellonne, 1990[17]
  • Guillaume de Laubier, Jean Serroy, « Université Jagellonne », in Les Plus Belles Université du monde, Éditions de La Martinière, 2015 (ISBN 978-2-7324-6644-6)[18]

Notes et références

  1. Jobert Ambroise, « L'Université de Cracovie et les grands courants de pensée du XVIe siècle », Revue d’histoire moderne et contemporaine, t. 1, no 3, uillet-septembre 1954, p. 213-225.
  2. (en) World University Rankings 2018
  3. Jean-Marie Mayeur, Luce Pietri, André Vauchez, Marc Venard, Histoire du christianisme, t. 6 : Un temps d'épreuves (1274-1449), Desclée/Fayard, , 952 p. (ISBN 978-2-213-02628-2), p. 810.
  4. Jacques Le Goff, L'Europe est-elle née au Moyen Âge ?, Seuil, , 341 p. (ISBN 978-2-02-056341-3).
  5. « History of the Jagiellonian University », sur site de l'Université Jagiellon
  6. (en) « History of the Jagiellonian University », sur Université Jagellon.
  7. Andrzej Zaranek, « Polscy drukarze : Oni byli pierwsi », sur albumpolski.pl/,
  8. (pl) « Historia Filologii klasycznej na Uniwersytecie Jagiellońskim », sur Faculté des Lettres classiques, Université Jagellonne (consulté le ), p. 13.
  9. (en) « Z historii orientalistyki w Uniwersytecie Jagiellońskim », sur Instytut Orientalistyki (consulté le ).
  10. http://www.dzielnica8.krakow.pl/index.php/prasa/242-kto-zbuduje-tramwaj-na-ruczaj.
  11. Johannes Manlius, Locorum communium collectanea, 1565, p. 38.
  12. (en) « Facts and Figures », sur Université Jagiellonne (consulté le ).
  13. (en) « Manuscripts », sur Bibliothèque Jagellonne (consulté le ).
  14. (en + pl) « Collection », sur Bibliothèque Jagellonne (consulté le ).
  15. (pl) W jaki sposób "Berlinka trafiła do biblioteki Jagiellońskiej?.
  16. "Berlinka do Berlina!"
  17. L'Université Jagellonne aujourd'hui
  18. http://www.en.uj.edu.pl/en_GB/news/-/journal_content/56_INSTANCE_SxA5QO0R5BDs/81541894/107910251

Voir aussi

Article connexe

Liens externes

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