Diaspora arménienne en France

Les Arméniens de France (en arménien Ֆրանսահայեր) sont les personnes d'origine arménienne vivant en France.

Arméniens de France

Populations importantes par région
Population totale 750 000 (2015)
Autres
Langues français, arménien
Religions Christianisme, surtout apostolique arménien, ainsi que arménien catholique, arménien évangélique et protestants divers.

Démographie

Il y avait environ 600 000 Arméniens en France en 2011 (dont 400 000 nés en France) selon des estimations du Comité de défense de la cause arménienne (CDCA) et du Centre de recherches sur la diaspora arménienne (CRDA), mais le président du CRDA déclarait en même temps que « Tout recensement précis est impossible dans ce domaine ». Hratch Varjabedian, directeur du Bureau français de la cause arménienne, parlait à la même époque de 400 000 électeurs français d'origine arménienne[1],[2].

Selon l'INSEE, en 2008, il y avait en France métropolitaine 14 732 personnes nées en Arménie[3] ainsi que 1 704 enfants de moins de dix-huit ans nés en France et d'origine arménienne[4].

La communauté est concentrée principalement à Marseille (principale ville de débarquement des Arméniens après le génocide[5]), Lyon, Valence, Paris et sa banlieue (principalement à Arnouville, Alfortville, Clamart, Châtillon et Issy-les-Moulineaux[6]).

La communauté arménienne est surtout localisée dans la périphérie de Lyon (150 000 personnes), notamment à Décines-Charpieu, surnommée « La Petite-Arménie »[7].

Histoire

Il faut remonter au XVe siècle pour voir des marchands arméniens présents dans le port de Marseille. Cette communauté arménienne, par ses liens avec l'Orient, est la première à importer des indiennes et à initier des artisans locaux à leur reproduction, avec des peintures colorées.

Leur présence amène le ministre Jean-Baptiste Colbert à créer en 1669 le port franc de Marseille des Arméniens. Ruinés par la chute de Candie, ils rejoignent la ville[8]. Appelés chofelins[9], ils apprennent aux maîtres cartiers marseillais à peindre les cotonnades de façon différente. Ils maîtrisent en effet la technique des « indiennes de Masulipatnam », appelée aussi Machilipatnam.

Mais ce sont essentiellement les immigrations de la fin du XIXe et du début du XXe siècle qui amenèrent à Marseille la majorité de sa population arménienne actuelle[10]. Comme c'est souvent le cas dans la diaspora arménienne, la plupart des Arméniens de France ont immigré après le génocide arménien de 1915. Les arméniens ont dû fuir la violence avant de s'installer dans des conditions difficiles notamment dans les alentours de Marseille. En effet, l'installation à la périphérie permet, via des activités d'agriculture d'améliorer très relativement les conditions de vie comme en témoigne cet extrait sonore pour la région de Berre-l'Étang.

À l'automne 2020, dans le contexte de la guerre au Haut-Karabagh, les tensions entre communautés arménienne et turques s'intensifient. En réaction au blocage d'un péage d'autoroute par des manifestants pro-arméniens, des expéditions punitives sont menées par des activistes turcs armés à Décines-Charpieu, aux cris de « Allahou Akbar ! ». Des graffitis sont aussi tagués sur la façade du Centre national de la mémoire arménienne de la commune (« Loups gris ») et du mémorial du génocide (« Nique l'Arménie »). Par la suite, le gouvernement français dissout sur son territoire le mouvement paramilitaire des Loups gris, l'organisation de jeunesse d'un partenaire de coalition du président Erdogan en Turquie ; cette décision est critiquée par le ministère des Affaires étrangères turc. Elle ne risque cependant pas d'atténuer l'influence de l'AKP, le parti d'Erdogan, sur la diaspora, la Turquie contrôlant (légalement) de nombreuses mosquées sur le territoire français[7].

Organisations

Les organisations communautaires arméniennes en France sont très nombreuses sur le plan religieux, culturel, social, sportif et politique.

Chacune des trois Églises arméniennes dispose de sa propre organisation, trois diocèses (Lyon, Marseille, Paris) dépendant du diocèse arménien de France (apostolique, dépendant du catholicossat de tous les Arméniens), l'éparchie Sainte-Croix-de-Paris des Arméniens (catholique) et l'Union des Églises évangéliques arméniennes de France (protestante).

Dans les communes à forte implantation arménienne, on compte des associations à vocation culturelle comme la Maison de la culture arménienne de Décines (près de Lyon) ou la radio AYP FM (région parisienne), sociale comme la Maison des étudiants arméniens à Paris, sportive comme l'Union de la jeunesse arménienne d'Alfortville et l'Union Sportive de la Jeunesse d'Origine Arménienne de Valence (clubs de football), ou catégorielle comme l'Association nationale des anciens combattants et résistants arméniens ou l'Association des gays et lesbiennes arméniens de France.

Les équivalents arméniens les plus proches du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), du Conseil représentatif des Français d'outre-mer (CREFOM), qui a pris la suite du Collectifdom, ou du Conseil représentatif des associations asiatiques sont le Forum des associations arméniennes de France, créé en 1991[11], et le Conseil de coordination des organisations arméniennes de France, nouvelle dénomination en 2001 du « Comité du 24 avril »[12],[13]. Le Comité de défense de la cause arménienne (CDCA), créé en 1965, milite principalement pour la reconnaissance du génocide et la lutte contre le négationnisme.

Médias

La communauté arménienne de France publie un certain nombre de périodiques. Ceux-ci sont principalement écrits en arménien au XXe siècle mais ils sont peu nombreux aujourd'hui, avec la perte du nombre de locuteurs. Ainsi, persiste une publication en langue arménienne, Nor Haratch, publiée à partir de 2009 et dont la volonté est de prendre le relai de Haratch, fondé en 1925 à Paris par Chavarche Missakian et tenu jusqu'en 2009 par sa fille Arpik Missakian.

Les autres principaux périodiques sont principalement rédigés en français, comme Nouvelles d'Arménie Magazine ou France Arménie.

Il existe aussi des stations de radio, à l'image d'AYP FM en région parisienne.

Reconnaissance du génocide arménien

En 2001, le Parlement français vote une loi reconnaissant le génocide arménien[14]. En 2006, une proposition de loi est adoptée par l'Assemblée nationale, qui vise à rendre sa négation punissable de cinq ans de prison et de 45 000 euros d'amende[15]. Le , une exception d'irrecevabilité à la proposition de loi, est présentée au Sénat par Jean-Jacques Hyest et est adoptée[16],[17] : cela implique que la proposition de loi ne sera pas, elle-même, soumise au vote au Sénat.

Le , l'Assemblée nationale vote une nouvelle proposition de loi[18] condamnant la négation d'un génocide, y compris celui des Arméniens, et prévoyant une peine d'emprisonnement d'un an et 45 000 euros d'amende[19]. Cette proposition de loi est adoptée à son tour par le Sénat le [20]. Elle est néanmoins jugée contraire à la constitution par le Conseil constitutionnel le [21].

Depuis 2019, le décret n° 2019-291 rend officielle la commémoration du génocide arménien de 1915 en France[22].

Personnalités notables[23]

Cinéma

Littérature, théâtre, journalisme

Musique

Art

Politique

Sport

Science

Business

Autres domaines

Notes et références

  1. « Les Arméniens en France », sur lepoint.fr,
  2. Lucie Tourette, « Turcs et Arméniens de France, qui sont-ils ? », sur la-croix.com, (consulté le )
  3. Tableau CD-MF2 - Immigrés selon le sexe, la catégorie de population et le pays de naissance détaillé - France, Insee 2008
  4. Tableau MF34 bis - Enfants de moins de 18 ans vivant dans une famille immigrée selon le sexe, le lieu de naissance et la nationalité de l'enfant, et le pays de naissance de la personne de référence de la famille ou du conjoint - France, Insee 2008
  5. Anouche Kunth, « "Vu au débarquement. Marseille". Le refuge des arméniens en France dans les archives de l'Ofpra » [PDF], sur ofpra.gouv.fr, OFPRA,
  6. Liste alphabétique.
  7. Jean-Louis Tremblais, « Les Arméniens de France aussi sous la menace », Le Figaro Magazine, , p. 56-57 (lire en ligne).
  8. Musée de Marseille, Les belles de mai : Deux siècles de mode à Marseille : Collections textiles du Musée du Vieux-Marseille (XVIIIe – XIXe siècles), Marseille, Alors Hors Du Temps, , 187 p. (ISBN 978-2-9517932-1-7, lire en ligne), p. 35
  9. « Jean-Baptiste Colbert (1619-1683) et les Arméniens », sur globalarmenianheritage-adic.fr (consulté le )
  10. « Être Arménien... loin de l’Ararat : Arméniens de Marseille », sur armeniens.culture.fr (consulté le )
  11. « Diaspora en France - Les Associations », sur acam-france.org
  12. « Statuts du CCAF », sur ccaf.info
  13. « Liste des organisations membres du Conseil de coordination des organisations arméniennes de France », sur ccaf.info
  14. « Loi n° 2001-70 du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 » [lire en ligne (page consultée le 8 novembre 2011)]
  15. « Proposition de loi complétant la loi n° 2001-70 du 29 janvier 2001 relative à la reconnaissance du génocide arménien de 1915 », Assemblée nationale, 12 avril 2006 [lire en ligne (page consultée le 8 novembre 2011)].
  16. Scrutin n° 200 - séance du 4 mai 2011
  17. « Génocide arménien : « Laisser faire les négationnistes est une insulte à la diaspora » (Interview du sénateur Serge Lagauche) », sur nouvelobs.com,
  18. « Proposition de loi portant transposition du droit communautaire sur la lutte contre le racisme et réprimant la contestation de l’existence du génocide arménien », Assemblée nationale, 18 octobre 2011 [lire en ligne (page consultée le 26 décembre 2011)].
  19. Damien Meyer, « Loi sur le génocide : la Turquie rappelle son ambassadeur », sur lexpress.fr, (consulté le )
  20. « Génocide arménien : la loi adoptée », sur Le Figaro, (consulté le )
  21. « Décision n° 2012-647 DC du 28 février 2012 », sur conseil-constitutionnel.fr, (consulté le )
  22. « Décret n° 2019-291 du 10 avril 2019 relatif à la commémoration annuelle du génocide arménien de 1915 », sur legifrance.gouv.fr (consulté le )
  23. Jean-Christophe Buisson, « L'Arménie au cœur », Le Figaro Magazine, 20 novembre 2020, p. 57.
  24. « Alice Sapritch », sur fiches.lexpress.fr (consulté le ) : « Alice Sapritch, de son vrai nom Alice Sapric, née le à Ortaköy à Turquie et morte le à Paris, est une actrice et chanteuse d'origine arménienne naturalisée française. »
  25. « Henri Verneuil », sur ofpra.gouv.fr : « Réfugié arménien de Turquie de 1923 à 1949. Il est né Achod Malakian le à Rodosto (actuellement Tekirdag, Turquie) dans la région de Marmara. »
  26. François-Guillaume Lorrain, « Francis Veber règle ses comptes », sur lepoint.fr,  : « ...né d'un père juif directeur littéraire du Matin - son grand-oncle était Tristan Bernard - et d'une mère arménienne... »
  27. « Francis Veber : " Je ne me prends pas au sérieux " », presse.fr, (lire en ligne, consulté le ) :
    « De père juif et de mère arménienne, Francis Veber ... »
  28. (en) « Serge Avedikian's "The Last Round in Istanbul" to reflect on Armenian Genocide », sur armenpress.am,
  29. (hy) Irina Hovhannisyan, « Վարդան Պետրոսյանի փաստաբանը դիմել է նրան ազատ արձակելու հարցով », sur azatutyun.am, Radio Free Europe/Radio Liberty Armenian Service, (consulté le ) : « Վարդան Պետրոսյանի Ֆրանսիայի քաղաքացի լինելը »
  30. « Pascal Légitimus : « Mon métissage a été un handicap pour m’introduire dans un groupe » », sur europe1.fr,  : « Sa mère est arménienne, son père guadeloupéen d’origine éthiopienne »
  31. « Simon Abkarian : c'est l'histoire d'un (beau) mec », Télérama, (lire en ligne, consulté le )
  32. (en) « Arthur Adamov », Encyclopædia Britannica (consulté le )
  33. Murielle Lucie Clément (dir.), Introduction aux Écrivains franco-russes, Amsterdam, Rodopi, , 236 p. (ISBN 978-90-420-2426-7, lire en ligne), p. 131
  34. « Jacques Hélian », sur ovguide.com (consulté le )
  35. The Armenian Genocide : Cultural and Ethical Legacies, New Brunswick, New Jersey, Richard G. Hovannisian, , 461 p. (ISBN 978-1-4128-3592-3, lire en ligne), p. 215
  36. | Le duo Ladaniva
  37. (en) « Michel Legrand is in Yerevan », Public Radio of Armenia, (lire en ligne, consulté le )
  38. (en) Rouben Paul Adalian, Historical Dictionary of Armenia, Scarecrow Press, , 750 p. (ISBN 978-0-8108-7450-3, lire en ligne), p. 201
  39. « Danyel Gerard », Olympia (consulté le ) : « Gérard Daniel Kherlakian, dit Danyel Gérard, est né à Paris le 7 mars 1939, d'un père arménien et d'une mère corse d'origine antillaise. »
  40. (en) « Sylvie Vartan Speaks of Her Armenian Origin », Azg Daily, (lire en ligne, consulté le )
  41. « Biographie d'André Manoukian », sur universalmusic.fr
  42. (en) « French Star Patrick Fiori Sings with Armenia's 'Belle' Nune », Asbarez, (lire en ligne, consulté le )
  43. (en) « Hélène Ségara to spend two days in Armenia », Armenpress, (lire en ligne, consulté le )
  44. Setian, Madlen E. et Capan, Levon M., « French-Armenian conductor Alain Altinoglu to debut at the Met next winter », The Armenian Reporter, (lire en ligne [archive du ], consulté le ) :
    « An Armenian whose parents are originally from Istanbul, Mr. Altinoglu was born in Paris ... »
  45. (en) « Zorayan museum, Stephanie's art gallery to host Jean Carzou exhibit », panarmenian.net, (lire en ligne, consulté le )
  46. (en) Huberta von Voss, Portraits of Hope : Armenians in the Contemporary World, New York, Berghahn Books, , 400 p. (ISBN 978-1-84545-257-5, lire en ligne), p. 101
  47. David Marsh, The Euro : The Battle for the New Global Currency, New Haven, Yale University Press, , 352 p. (ISBN 978-0-300-17390-1, lire en ligne), p. 1956
    « Chirac's appointee as finance minister - effectively No. 2 to the prime minister - was the prime, precisely-worded Edouard Balladur, born in Turkey of an Armenian family who emigrated to Marseille in the 1930s. »
  48. Elite Configurations at the Apex of Power, Leiden, Dogan, Mattei, , 301 p. (ISBN 978-90-04-12808-8, lire en ligne), p. 41
    « Edouard Balladur, former prime minister, is the grandson of an Armenian immigrant »
  49. Marc Epstein et Alain Louyot, « Arméniens de France: la mémoire intacte », L'Express, (lire en ligne, consulté le )
  50. (en) Huberta von Voss, Portraits of Hope : Armenians in the Contemporary World, New York, Berghahn Books, , 400 p. (ISBN 978-1-84545-257-5, lire en ligne), p. 205
  51. Lionel Froissart, « Alain Prost, 42 ans, dirige son écurie de F1. Ressemble-t-il encore à l'ancien pilote perfectionniste et plaintif, séducteur et économe? Il roule pour lui », Libération, (lire en ligne, consulté le )
  52. Paul Miquel, « «Aujourd'hui, la F 1 ne contente personne» », L'Express, (lire en ligne, consulté le )
  53. (en) « Soccer: Former French-Armenian player wants to coach Armenia », ArmeniaNow, (lire en ligne, consulté le )
  54. (hy) « Armenians of the World - Serj Churuk », Shant TV, (consulté le )
  55. (en) « Armenian capital’s mayor meets with architect Michel Mossessian », sur tert.am, (consulté le )
  56. (en) Julie Street, « Francis Kurkdjian, Parfumeur », France Today, (lire en ligne, consulté le ) :
    « Kurkdjian, a suave-looking Frenchman of Armenian descent ... »
  57. « Piquée au cœur », sur Libération.fr, (consulté le )

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

  • Portail de la France
  • Portail de l’Arménie
  • Portail des minorités
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.