Bataille de Romagné
La bataille de Romagné a lieu le lors de la Chouannerie. Elle s'achève par la victoire des républicains qui repoussent une attaque contre un convoi.
Date | |
---|---|
Lieu | Romagné |
Issue | Victoire des républicains |
République française | Chouans |
• Deruan | • Auguste Hay de Bonteville |
1 000 hommes[1] | 2 500 à 3 000 hommes[1] |
1 mort[1] 13 blessés[1] | 8 morts[1] 20 à 30 blessés[1] |
Batailles
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Prélude
Lors de l'hiver 1795-1796, la ville de Fougères, encerclée par les chouans, se retrouve à court de subsistances[2]. Elle manque alors de vivres, de bois de chauffage et de souliers pour les troupes de sa garnison[2]. Le , à Rennes le général Gabriel de Hédouville, commandant de l'Armée des côtes de Brest, écrit au général Lazare Hoche, commandant en chef de l'Armée de l'Ouest, que seulement 2 400 hommes sont répandus dans les districts de Vitré, La Guerche, Fougères et Châteaubriant, où « les cantonnements sont bloqués sans pouvoir communiquer entre eux »[3],[2],[4].
Début janvier 1796, un convoi républicain sort de Rennes et se porte en direction de Fougères[2]. Aimé Picquet du Boisguy, chef de l'Armée royale de Rennes et de Fougères, est alors malade, mais il charge son second, Auguste Hay de Bonteville, de réunir ses troupes et d'attaquer le convoi[1],[5],[6]. Celui-ci fixe le lieu du rassemblement au village de la Chène, entre Saint-Jean-sur-Couesnon et Romagné[1],[5],[6].
Dans ses mémoires, l'officier royaliste Toussaint du Breil de Pontbriand place la date du combat vers fin février 1796[5],[6], mais le rapport républicain indique qu'il se déroule en réalité le [1],[2],[6].
Forces en présence
Selon le rapport au département de Lebeschu, commissaire provisoire du directoire exécutif, l'escorte est forte de 600 hommes, plus tard renforcée par un détachement de 400 hommes de la garnison de Fougères[1],[2],[6]. Les chouans sont quant à eux estimés entre 2 500 et 3 000[1],[2],[6].
Dans ses mémoires, l'officier royaliste Toussaint du Breil de Pontbriand ne précise pas le nombre total des combattants, mais il indique que les trois colonnes de la division de Fougères sont réunies pour ce combat[1],[5],[6]. René Augustin de Chalus est à la tête de la colonne Brutale, Michel Larchers-Louvières de la colonne Centre et Louis-François Dauguet, des Normands de la colonne de Saint-James[1],[5],[6]. En l'absence d'Aimé Picquet du Boisguy, malade, Auguste Hay de Bonteville prend le commandement de la division[1],[5],[6]. Du côté des républicains, Pontriand porte à 1 800 le nombre des hommes de l'escorte, mais il ne donne pas d'estimation pour les renforts[1],[5],[6]. Selon lui, les patriotes sont commandés par un officier nommé Déruan[1],[5],[6].
Un autre officier chouan, Marie Eugène Charles Tuffin de La Rouërie, semble également évoquer ce combat dans un mémoire qu'il rédige en Grande-Bretagne au début de l'année 1796[6]. Il y fait alors mention d'un convoi de 700 républicains secourus par une colonne d'un millier d'hommes[6].
Déroulement
Le colonnes royalistes se réunissent à la Chène, entre les bourgs de Saint-Jean-sur-Couesnon et de Romagné, sur la route de Rennes à Fougères[1],[5],[6]. Cependant les chouans prennent du retard dans leur marche et manquent de peu le passage du convoi[1],[5],[6]. Bonteville se lance alors à sa poursuite, mais ses trois colonnes attaquent de manière désordonnée, sans pouvoir se coordonner[1],[5],[6]. Les républicains parviennent à gagner le bourg de Romagné, où ils arrêtent leur marche pour se retrancher[1],[5],[6].
Les chouans lancent alors l'assaut sur le bourg par deux côtés[1],[5],[6]. Selon Pontbriand, Bonteville pénètre « deux fois jusqu'aux dernières voitures du convoi », tandis que sur la droite les Normands avancent dans les jardins du bourg[1],[5],[6]. Cependant, les républicains, galvanisés par leur commandant, Deruan, contiennent les assauts[1],[5],[6]. Pendant une heure et demie, les chouans et les républicains s'affrontent dans de longues fusillades, mais les combattants des deux camps restent embusqués et subissent peu de pertes[1],[5],[6].
Le bruit des combats porte jusqu'à Fougères, à seulement cinq kilomètres de Romagné[1],[5],[6]. Le général Gabriel-Venance Rey fait alors sortir une colonne de 400 hommes de la garnison et de la garde nationale de Fougères qui viennent au secours des hommes de Déruan[1],[2],[6]. Dans son rapport Lebeschu affirme que sans son arrivée, « c'en était fait du convoi »[1],[2],[6].
Les républicains reprennent alors courage et contre-attaquent, tandis que sur leurs arrières les voitures du convoi reprennent leur route en direction de Fougères[1],[2],[6]. L'issue du combat diverge alors selon les sources. Selon Lebeschu, les chouans sont « mis en pleine déroute », tandis que d'après Pontbriand, les républicains se replient « en très bon ordre » sur Fougères et ne sont suivis par les royalistes que sur un quart de lieue[1],[2],[5],[6]. Cependant, Bonteville constate que la prise du convoi est manquée et que ses troupes ont gaspillé beaucoup de munitions[1],[5],[6]. Les chouans battent alors en retraite en emportant leurs morts et leurs blessés[1],[2],[6].
Pertes
Selon le rapport de l'administrateur patriote Lebeschu[A 1], les pertes républicaines sont d'un officier tué et de treize hommes blessés, dont trois dangereusement, tandis que les pertes des chouans sont estimées à au moins 100 morts et beaucoup de blessés[1],[2],[6].
Dans ses mémoires[A 2], l'officier royaliste Toussaint du Breil de Pontbriand affirme que les pertes des chouans ne sont cependant que de huit hommes tués et de 20 à 30 blessés, tandis que celles des républicains sont de 60 hommes[1],[5],[6]. De son côté, Marie Eugène Charles Tuffin de La Rouërie conclut dans son mémoire[A 3] que les républicains ne perdent que 25 hommes[6].
Notes et références
Notes
-
« Le convoi que vous nous avez envoyé avec le dernier courrier, a été attaqué avant-hier par les chouans, quoique escorté de six cents hommes, et si un renfort d'environ quatre cents autres hommes, dont la majeure partie de notre garde nationale, n'avait volé à son secours dès qu'on entendit la fusillade, qui ne se passait qu'à une lieue et demi de nos murs c'en était fait du convoi; mais le renfort ayant relevé le courage ordinaire de nos frères d'armes, les chouans ont bientôt été mis en pleine déroute, quoique le rassemblement fut de deux mille cinq cents à trois mille hommes. Notre perte est d'un officier tué et 13 blessés, dont 3 très dangereusement. On ne sait jamais celle des chouans, parce qu'ils sont dans l'habitude d'enlever leurs morts et leurs blessés, mais on l'estime à 100 tués au moins et beaucoup de blessés. Malgré cet avantage, citoyens, nous n'avons pas à beaucoup près, reçu toutes les dépêches puisque sur les quarante-quatre annoncées on n'en n'a reçu que treize ; il en manque donc trente et une. J'ai cru devoir vous faire part de cet accident, afin d'y apporter le remède qu'il sera en votre pouvoir, pour le bulletin des lois surtout, que nous ne recevons pas[2],[1]. »
— Rapport au département de Lebeschu, commissaire provisoire du directoire exécutif, le
-
« Du Boisguy était malade depuis près d'un mois, et Bonteville commandait la division de Fougères pendant son absence. Il reçut avis qu'un convoi considérable venait de Rennes à Fougères avec une escorte de dix-huit cents hommes. Du Boisguy lui fit dire de réunir ses trois colonnes et de l'attaquer. Bonteville indiqua le village de la Chène, situé entre Saint-Jean-sur-Couesnon et Romagné. Chalus commandait ce jour-là la colonne Brutale; le chevalier de Saint-Gilles et Louvières arrivèrent avec la colonne du Centre, et Dauguet, avec les Normands. Mais il y eut du retard dans leur marche, et l'ennemi était déjà passé à leur arrivée ; néanmoins, Bonteville se décida à l'attaquer quand même, mais il y eut de l'indécison dans ses mouvements, et, au lieu de faire donner toutes les troupes à la fois, l'attaque se fit par colonnes séparées, ce qui empêcha de rompre la ligne des Républicains et leur donna le temps d'entrer dans le bourg de Romagné, où il leur était plus facile de se défendre. Bonteville fit attaquer le bourg par deux endroits à la fois, et, suivi, du chevalier de Saint-Gilles, il pénétra deux fois jusqu'aux dernières voitures du convoi, tandis que Chalus repoussait l'ennemi sur un autre point. Les Républicains se défendaient faiblement, et les Normands avançaient sur la droite et attaquaient les jardins du bourg ; déjà une partie des troupes prenait la route de Fougères, et Bonteville avait l'espoir de vaincre, lorsqu'un officier nommé Deruan, ancien gendarme de Lunéville, vint ranimer le moral était ébranlé. Il dirigea les opérations et fit marcher une partie des siens pour repousser Bonteville et Chalus ; mais ceux-ci avaient pris de bonnes positions, dont il ne put les débusquer, et le feu continuait ainsi, de part et d'autre, depuis une heure et demie, lorsqu'une partie de la garnison de Fougères parut. Déruan fit aussitôt filer le convoi, sous l'escorte de ces nouvelles troupes, et continua le combat pour protéger la marche des voitures, qui prirent la route de Fougères. Lorsque Déruan et les officiers qui commandaient la colonne républicaine les jugèrent assez loin, ils commencèrent leur retraite en très bon ordre et toujours en combattant, de manière que Bonteville ne put les atteindre. Il les suivit un quart de lieue, mais il regrettait d'avoir perdu le convoi.
Cette affaire fut bien conduite et fit honneur à Bonteville, Chalus, Saint-Gilles, Louvières, Dauguet et à tous les capitaines, qui se battirent avec intrépidité ; mais les colonnes arrivèrent trop tard au rendez-vous, et perdirent ainsi l'avantage de l'attaque, de la position, et du choix du terrain. Les Royalistes ne purent empêcher l'ennemi d'entrer dans le bourg de Romagné avec son convoi, et, dès ce moment, vu le nombre et la qualité des troupes, il était presque impossible de le forcer ; de plus, il était certain que la garnison de Fougères allait, sous peu de temps, venir au secours. Il (Bonteville) regrettait d'avoir manqué le convoi, perdu huit hommes qui furent tués et vingt et quelques blessés, parmi lesquels : François Brard, de Parigné ; Jean Petitpas, du Châtellier ; François Dupas, de Javené ; Pierre Rougeille, de Luitré ; Joseph Le Lardoux, du Ferré ; Guillaume Le Roux, de La Chapelle-Janson ; Georges Hubert, de Billé ; Jean Chaussière, de Bazouges ; François Couillard, de Saint-Sauveur, et Louis Mal, de Romagné, qui le furent assez grièvement.
Deruan, à son arrivée à Fougères, reçut des éloges mérités pour sa consuite. On disait que, sans lui, le convoi eût été pris. La perte des Républicains fut de 60 hommes, qui périrent presque tous au moment de la première attaque, car il y eut peu de monde tué pendant la longue fusillade qui suivit, les deux partis étant embusqués. Les Royalistes regrettaient d'avoir perdu inutilement beaucoup de munitions[5]. »— Mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand
-
« Sur la route de Rennes à Fougères, les chasseurs attaquèrent un convoi escorté de sept cents hommes qu'ils mirent en déroute, et auxquels ils auraient pris le convoi sans qu'un renfort de mille Républicains sorti de Fougères vint rallier les fuyards et protéger le convoi qui leur échappa, excepté la poste qui resta seule a. leurs mains. Les Républicains, dans cette affaire, ne perdirent que vingt-cinq hommes[6]. »
Références
- Le Bouteiller 1988, p. 498-499.
- Lemas 1994, p. 233.
- Le Bouteiller 1988, p. 823.
- Savary, t. VI, 1827, p. 117-118.
- Pontbriand 1988, p. 281-284.
- Pontbriand 1904, p. 279-282.
Bibliographie
- Christian Le Bouteiller, La Révolution dans le Pays de Fougères, Société archéologique et historique de l'arrondissement de Fougères, , 839 p. .
- Théodore Lemas, Le district de Fougères pendant les Guerres de l'Ouest et de la Chouannerie 1793-1800, Rue des Scribes Éditions, (réimpr. 1994), 371 p. (ISBN 978-2-906064-28-7, lire en ligne).
- Paul-Marie du Breil de Pontbriand, Un chouan, le général du Boisguy : Fougères-Vitré, Basse-Normandie et frontière du Maine, 1793-1800, Paris, Honoré Champion éditeur, (réimpr. La Découvrance, 1994), 509 p. (lire en ligne).
- Toussaint du Breil de Pontbriand, Mémoire du colonel de Pontbriand sur les guerres de la Chouannerie, vol. I, Plon, (réimpr. Éditions Yves Salmon, 1988), 324 p.
- Jean Julien Michel Savary, Guerres des Vendéens et des Chouans contre la République, t. VI, Paris, Baudoin Frères, Libraires-éditeurs, , 360 p. (lire en ligne).
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