Grigori Potemkine
Grigori Aleksandrovitch Potemkine ou Potiomkine[2] (en russe : Григорий Александрович Потёмкин, /ɡrʲɪˈɡorʲɪj ɐlʲɪkˈsandrəvʲɪtɕ pɐˈtʲɵmkʲɪn/), né le à Tchijovo et mort le durant un voyage de Iași à Nikolaïev, est un militaire et homme d'État russe du XVIIIe siècle. Beau et intelligent, il devint l'amant puis le favori de l’impératrice Catherine II jusqu'à sa mort. Il est l'un des colonisateurs de la steppe pontique du Sud de l'Ukraine, qui devint russe par le traité de Küçük Kaynarca (1774), et du Sud du Don. Il fonde les villes de Kherson, Nikolaïev, Sébastopol et Iekaterinoslav faisant partie des territoires de la Nouvelle-Russie.
Pour les articles homonymes, voir Potemkine.
Grigori Aleksandrovitch Potemkine Prince de Tauride[1] | ||
Le prince Potemkine. | ||
Naissance | Tchijovo |
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Décès | Rădenii Vechi (en) (Moldavie) |
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Origine | Russe | |
Allégeance | Empire russe | |
Grade | Feld-maréchal | |
Commandement | Président du conseil militaire | |
Conflits | Guerre russo-turque de 1768-1774 Guerre russo-turque de 1787-1792 |
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Distinctions | Ordre de Saint-André, ordre de Saint-Vladimir, ordre de Saint-Alexandre Nevski, ordre de Saint-Georges 1er, 2e et 3e degrés, ordre de l'Aigle blanc, ordre de Sainte-Anne, ordre de Saint-Stanislas, ordre de l'Aigle noir, ordre du Séraphin, ordre de l'éléphant | |
Hommages | Cuirassé Potemkine | |
Autres fonctions | Fondateur des villes de Kherson, Nikolaïev, Sébastopol et Iekaterinoslav | |
Biographie
Origines
Grigori Aleksandrovitch Potemkine naît dans le village de Tchijovo, près de Smolensk dans une famille d'officiers subalternes. Après des études inachevées à l’université de Moscou[3], il s'engage dans la garde à cheval. Sergent-major, il participe au coup d'État de 1762 qui détrône Pierre III et couronne son épouse Catherine II[4],[5]. Il reçoit le grade de second lieutenant des gardes. Catherine demandait des adjoints dignes de confiance et appréciait l'énergie de Potemkine et ses capacités d'organisation. Les anecdotes biographiques récentes, comme celle de son implication dans le meurtre de Pierre III, sont obscures et souvent apocryphes.
Amant de Catherine II
À l'issue de la première guerre victorieuse contre l'empire ottoman, les relations de l'impératrice avec Potemkine, son cadet de dix ans, prennent un caractère plus intime. Succédant à Grigori Orlov et à Aleksandr Vassiltchikov, Potemkine devient le favori de la tsarine[6]. De la relation de Potemkine avec la souveraine, naît en 1775 une fille, Élisabeth Temkina[5].
Durant les dix-sept années qui suivent, Potemkine est le personnage le plus influent de Russie. Catherine II souhaite, dans le cadre de son projet grec, expulser les Turcs d'Europe et envisage de reconstruire l'Empire byzantin pour le donner à son petit-fils Constantin Pavlovitch : cet empire néo-byzantin aurait englobé Constantinople, la Grèce, la Thrace, la Macédoine et la Bulgarie, tandis que les principautés danubiennes auraient formé un « royaume de Dacie », promis à Potemkine ; le reste des Balkans, c'est-à-dire la Bosnie, la Serbie et l’Albanie, aurait été donné en compensation à l'Autriche, tandis que Venise aurait obtenu la Morée, la Crète et Chypre[7]. Ces projets restent finalement non concrétisés, mais Potemkine reçoit de nombreuses récompenses ainsi que d'importants postes, notamment sa nomination au poste de président du conseil militaire de 1774 à 1791.
Comme Catherine, Potemkine est guidé par l'esprit des Lumières dans de nombreuses actions, mais tombe dans la tentation de l'absolutisme. Il trouve du plaisir dans le luxe ostentatoire et la richesse personnelle. Dans sa politique de colonisation slave de la Nouvelle-Russie, il se montre tolérant à l'égard des différentes religions, et protège les minorités polonaises catholiques, juives, tatares musulmanes et autres. En tant que commandant en chef de l'armée russe (nommé en 1784), il prône une approche plus humaine de la discipline, exigeant que les officiers prennent soin des soldats d'une manière paternelle. En 1787, au retour du voyage de Catherine II à qui il fait découvrir la Nouvelle-Russie (voyage qu'il organise lui-même) cette dernière le récompense par le titre de prince de Tauride ainsi qu'une somme de 100 000 roubles[1].
En 1776, à la requête de Catherine, l'empereur autrichien Joseph II élève Potemkine au rang de prince du Saint-Empire romain germanique. En 1775, il est remplacé dans les grâces intimes de Catherine par Piotr Zavadovsky, mais les relations entre Catherine et son ancien amant continuent à être amicales, et son influence n'a jamais été remplacée par celle d'aucun des amants suivants de l’impératrice. De très nombreux faits attestent de la grande et constante influence de Potemkine durant les dix années suivantes. Les plus importants documents d'État passent entre ses mains.
Controverse
Potemkine reste un personnage controversé et suscite des opinions opposées. Le pamphlet German, publié en 1794, affiche l'opinion de ceux qui l'ont considéré comme un « génial démon » de Catherine et de la Russie. Mais beaucoup, et l'impératrice elle-même, le considéraient comme un homme à multiples facettes : commandant de génie, administrateur doué, mais exigeant. Il fut indubitablement le plus éminent de tous les amants de Catherine.
Comme beaucoup d'aristocrates de l'époque, son caractère était empreint de morgue, d'immoralité, d'extravagance et de cynisme, mais il était loyal, généreux et magnanime. Selon Vladimir Volkoff, presque toutes les anecdotes du diplomate saxon Georg von Helbig à son sujet, dans la biographie pour le journal Minerva, et abondamment utilisées par les biographes suivants, sont fausses, à commencer par celle des « villages Potemkine »[8].
Turbulent, susceptible, il perd un œil dans un duel. La légende affirme qu'Orlov et son frère sont ses adversaires, mais c'est peu probable[5]. Plus tard, c'est même Orlov qui, sur ordre de Catherine, le prie de revenir à la cour.
Mort
Malade depuis quelque temps, Grigori Potemkine demanda à être transporté à Nikolaïev : au cours de ce voyage il décède le à Rădenii Vechi (en) en Moldavie[9] et fut d'abord inhumé en la cathédrale de Kherson, mais après son accession au trône impérial, Paul Ier de Russie fit disperser les restes de celui qui fut pendant des années l'amant de sa mère, Catherine II de Russie.
Postérité
Son nom est surtout resté pour la légende de la mise en scène de façades prospères sur de misérables « villages Potemkine », ainsi que pour le cuirassé qui portait son nom durant la Révolution russe et qui inspira le célèbre film d'Eisenstein.
Il a fondé la ville de Iekaterinogradskaïa dans le Caucase, dans laquelle Catherine II a fait élever un arc de triomphe à sa gloire.
Notes et références
- Hélène Carrère d'Encausse, Catherine II, Un âge d'or pour la Russie, Dépôt légal septembre 2002, Edition 25614, Impression 14552 (ISBN 2-213-61355-9) Fayard p. 460.
- La translittération ‹ Potemkine › provient d'une confusion entre ‹ е › et ‹ ё ›.
- Heller, Histoire de la Russie et de son empire, p. 589
- Heller, ibid.
- Stéphane Bern, Secrets d'Histoire, vol. 8, Paris, Albin Michel, , 368 p. (ISBN 978-2-226-43841-6), pp. 46 à 61.
- Croisant Orlov dans un escalier du palais d'hiver, Potemkine lui demande poliment ce qu'il y a de nouveau. Orlov répond : Rien, monsieur, sinon que vous montez et que je descends !
- Georges Florovsky, Les Voies de la théologie russe, Paris, 1937, trad. et notes de J.C. Roberti, Paris, Desclée de Brouwer, 1991, p. 150.
- Vladimir Volkoff, Petite histoire de la désinformation, Éditions du Rocher, 1998, p. 57.
- Un obélisque de 13 mètres portant l'inscription „Hа семъ местъ преставился князъ Григорiй Александровичъ Потемкинъ Таврическій” (« Ici la vie a quitté le comte Grigori Alexandrovitch Potemkine de Tauride » le 5 octobre 1791) a été élevé en 1792 à l'emplacement de sa mort par la comtesse Branitskaïa : article sur NOI.md .
Sources et bibliographie
- (en) « Grigori Potemkine », dans Encyclopædia Britannica, 1911 [Potemkine (en) Lire en ligne sur Wikisource].
- Michel Heller (trad. du russe par Anne Coldefy-Faucard), Histoire de la Russie et de son empire, Paris, Flammarion, coll. « Champs Histoire », (1re éd. 1997), 985 p. [détail de l’édition] (ISBN 2081235331)
- (en) Simon Sebag Montefiore, Catherine the Great's Imperial Partner, 2005, 688 pages, Vintage Books, (ISBN 1400077176) ;
- Henri Troyat, Catherine la Grande, collection « J'ai Lu », no 1618, , (ISBN 9782290319116).
Liens externes
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