Constanța

Constanța (prononcé [konˈstant͡sa] et parfois écrit Constanza) est une ville portuaire de l'est de la Roumanie, située sur les rives occidentales de la mer Noire. Elle est le chef-lieu du județ de Constanța, en Dobrogée.

Constanța

Héraldique

Drapeau
De haut en bas et de gauche à droite : le Casino de Constanța, le musée d'histoire et d'archéologie (ancienne mairie), le quartier de Mamaia, le port de pêche et de plaisance et la cathédrale orthodoxe Pierre et Paul.
Administration
Pays Roumanie
Județ Constanța (chef-lieu)
Maire
Mandat
Vergil Chițac (d)
depuis
Code postal 900003–900746
Démographie
Gentilé Constantais(e)
Population 283 872 hab. ()
Densité 2 273 hab./km2
Géographie
Coordonnées 44° 10′ 24″ nord, 28° 38′ 18″ est
Altitude 25 m
Superficie 12 489 ha = 124,89 km2
Fuseau horaire +02:00 (heure d'hiver)
+03:00 (heure d'été)
Localisation
Géolocalisation sur la carte : Roumanie
Constanța
Géolocalisation sur la carte : Roumanie
Constanța
Liens
Site web http://www.primaria-constanta.ro/

    La municipalité de Constanța compte une population de 283 812 habitants en 2011[1] (la cinquième du pays par le nombre d'habitants), mais l'agglomération compte environ 450 000 habitants avec les communes limitrophes sur une superficie de 1 013,5 km2, soit la seconde agglomération du pays après Bucarest.

    Étymologie

    Le nom de Constantiana lui a été donné par l'empereur romain Constantin Ier (274-337) en l'honneur de sa sœur Constantia. Auparavant la cité se nommait en grec ancien Tomis ou Tomes signifiant « tranché », qui selon les archéologues et historiens Theodor Capidan, George Vâlsan et Adrian Rădulescu aurait désigné la forme du port antique, aujourd'hui enfoui sous la gare maritime moderne, qui tranchait la ligne de côte, à l'ouest de ce qui était alors la presqu'île de Tomis. Sur les portulans génois du XIVe siècle, la cité apparaît sous le double nom de « Constanza » ou « Tomi ». Depuis qu'elle est roumaine (1878) elle se nomme Constanța prononcé « konˈstánt͡sa ». Son nom est Κωνστάντζα / Konstantsa en grec, Köstence en turc, Custantsa en aroumain, Кюстѐнджа (Kioustendja) en bulgare et Կոնստանցա (Konstanc’a) en arménien.

    Mythologie

    La mythologie grecque relie le nom antique Tomis à deux légendes. La plus connue fait référence à Jason et aux Argonautes, qui, s'enfuyant de Colchide (l'actuelle Géorgie) avec la toison d'or, et avec Médée et Absyrte, enfants du roi Éétès, auraient été poursuivis par la flotte de ce dernier. Sur le point d'être rattrapés, les Argonautes auraient mouillé ici, tué et tranché Absyrte en morceaux et dispersé ceux-ci afin de retarder Éétès, obligé de les rechercher et de les ramasser pour donner des funérailles honorables à son fils[2],[3].

    Une autre légende rapportée par Cassiodore et Jordanès relie le nom antique de la ville à Tomyris, reine des Massagètes[4].

    Histoire

    Constanța en 1893 (carte du Service hydrographique de la Marine française).
    Centre de Constanța.
    Port de Constanța.
    La mer Noire gelée en hiver autour du casino de Constanța.

    Durant la préhistoire, la presqu'île de Constanța abritait un village de pêcheurs mésolithiques, ayant laissé des traces d'habitations, d'outils et de coquilles antérieures aux Gètes (Thraces septentrionaux).

    Au Ve siècle av. J.-C., après la colonisation du Pont Euxin, les Ioniens donnent à la localité le nom de Tomis. Au IIIe siècle av. J.-C., son développement atteint son apogée. Ovide, le célèbre poète latin, y est exilé en 8 apr. J.-C. et y meurt en 17. Entre-temps arrivent des Scythes, qui se mêlent aux Gètes, aux Grecs et aux Romains. La région est alors surnommée Scythie Mineure et fait partie de la province romaine de Mésie.

    En l'an 311, lorsque l'empereur romain Galère décrète la liberté de religion pour les chrétiens, la ville est élevée au rang de métropole de la Scythie mineure (patrie de Jean Cassien), avec 14 évêchés. On y parle et écrit alors autant le grec que le latin.

    Du IVe au XIe siècle, toute la région subit les invasions des Goths, Huns, Slaves, Avars et autres. À la suite de la bataille d'Ongal au VIe siècle, l'Empire romain d'Orient perd la région au profit du Khanat bulgare du Danube et la ville est abandonnée : plus aucune mention n'est parvenue des quatre siècles suivants, jusqu'à ce que l'Empire romain d'Orient (ultérieurement appelé byzantin) en reprenne le contrôle en 977 et la relève, car c'est un abri naval important entre Constantinople et les bouches du Danube. Des populations grecques, valaques, bulgares et arméniennes laissent alors des inscriptions et sont signalées par les chroniques byzantines[5].

    Après les invasions russes et petchénègues, le royaume des Bulgares et des Valaques (dans les documents de l'époque), indépendant de Byzance en 1186, hérite de la ville, mais la grande invasion tatare de 1223 la réduit à nouveau en cendres. Entre 1325 et 1389, la Dobrogée est indépendante et Constanța devient une escale génoise (comme de nombreux autres ports en mer Noire et sur le Bas-Danube)[6],[7]. La ville fait partie pendant une trentaine d'années, entre 1389 et 1422, de la principauté de Valachie, qui doit la céder à l'Empire ottoman. À partir du XVe siècle la ville, alors appelée Köstence (prononcé Queustendjé) connaît un nouveau déclin et ne compte plus, selon les recensements turcs du XVIIIe siècle, qu'une centaine de foyers : ce sont des pêcheurs ou charpentiers de marine grecs pontiques, des bergers roumains (les « Diciens »), des jardiniers bulgares, des marchands arméniens et des militaires turcs, soit pas plus de mille habitants.

    Du XVIIIe siècle à 1812, la région devient champ de bataille entre la Russie et l'Empire ottoman ce qui dépeuple encore plus la ville. De 1812 à 1856 et après 1878, la Russie ayant annexé la Bessarabie, l'Empire ottoman a désormais une frontière commune avec l'Empire russe. En 1850, le journaliste français Adolphe Joanne décrit la ville (Kustendgé) comme étant « un pauvre hameau composé de huttes assez semblables aux habitations des castors »[8]. La guerre de Crimée ravage à nouveau Köstence et le médecin français Camille Allard la trouve quasi-désertée en 1855[9] mais ensuite la ville devient un refuge, où des Lipovènes, des Tatars et des bergers transylvains (les « Mocans ») s'ajoutent à la population revenue. En 1861 les Britanniques construisent un chemin de fer qui la relie au Danube, pour écouler les grains de la Valachie. C'est le début d'une expansion urbaine que seules les deux guerres mondiales stopperont provisoirement.

    Dans la guerre russo-turque de 1877-1878, la Roumanie combat du côté russe et y gagne la reconnaissance de son indépendance et la Dobroudja du Nord avec Constanța qui devient son principal port maritime et évolue en prospère centre industriel et commercial grâce à des capitaux britanniques, français et allemands. La ville devient alors le port d'attache de la flotte du Service maritime roumain. En 1893, elle retrouve l'étendue qui fut la sienne à son apogée antique, au IIIe siècle av. J.-C., puis dépasse rapidement ce périmètre. Constanța fut parmi les premières villes d'Europe à utiliser l'électricité pour l'éclairage public[10]. Dans l'Entre-deux-guerres, Odessa et les autres ports soviétiques périclitent en raison de la guerre civile russe, de la terreur rouge, des famines et des Grandes Purges : Constanța devient alors le port le plus fréquenté de la mer Noire, avec plus de 70 % du trafic de celle-ci[11]. C'est aussi l'un des terminus de l'Orient-Express, qui dépose les touristes occidentaux fortunés à la gare maritime, d'où les paquebots Dacia, Împăratul Traian ou Medeea (construits à Saint-Nazaire) les emmènent à Istanbul, Smyrne, Le Pirée, Alexandrie, Haïfa, Beyrouth et retour.

    Comme toute la Roumanie, Constanța est soumise aux régimes dictatoriaux carliste, fasciste et communiste de février 1938 à décembre 1989. Entre autres, Nicolae Ceaușescu fait ici une partie de sa carrière à ses débuts.

    Après la chute des régimes communistes en Europe, l'ouverture du rideau de fer et le rétablissement de la démocratie, Constanța devient une ville très dynamique au niveau de vie parmi les plus élevés du pays dont elle devient la seconde agglomération après Bucarest, mais, suite de la crise financière mondiale débutant en 2007, au regain régional de tension internationale lié au retour de la Russie aux pratiques soviétiques, à la crise de Crimée et à la guerre du Donbass, ainsi qu'au mandat à Constanța même, du maire controversé Radu Mazăre qui finit condamné pour corruption et association de malfaiteurs[12],[13], les activités maritimes déclinent fortement et la ville, surnommée Mazaristan par ses habitants, perd sa prospérité et son rang de seconde agglomération du pays, que revendiquent en 2020 la métropole moldave Iași et la métropole transylvaine Cluj[14].

    Démographie

    Évolution de la population
    AnnéePop.±%
    1853 5 200    
    1879 10 419+100.4%
    1900 13 000+24.8%
    1912 27 201+109.2%
    1930 59 164+117.5%
    1948 78 586+32.8%
    1956 99 676+26.8%
    1966 150 276+50.8%
    1977 256 978+71.0%
    1992 350 581+36.4%
    2002 310 471−11.4%
    2011 283 872−8.6%

    Ethnies

    Composition ethnique en 2011[1]

    Ethnie 1853[15] 1895[16] 1913[17] 2002[18] 2011[1]
    Roumains 279 5,4 % 2 519 24,1 % 15 663 57,6 % 286 332 92,2 % 83,1 %
    Tatars 1 853 35,6 % 2 202 21,1 % 277 1,0 % 8 724 2,8 % 2,6 %
    Turcs 104 2,0 % 2 451 9,0 % 9 018 2,9 % 2,3 %
    Grecs 1 542 29,6 % 2 460 23,6 % 3 170 11,6 % 546 0,2 %
    Bulgares 342 6,5 % 1 060 10,1 % 940 3,4 % 48 > 0,1 %
    Juifs 344 6,6 % 855 8,2 % 1 266 4,6 % 44 > 0,1 %
    Roms 127 2,4 % Données indisponibles 2 962 0,95 %
    Total 5 204 100,0 % 10 419 100,0 % 27 201 100,0 % 310 471 100,0 % 100,0 %

    Religions

    Lors du recensement de 2011, 83 % des habitants de Constanța ont déclaré être de tradition orthodoxe et 5 % de confession musulmane, 1,5 % pratiquant une autre religion et 10,5 % n'ayant pas souhaité répondre à cette question[19].

    En raison de son passé ottoman, la ville abrite près d'un quart de la population musulmane de Roumanie  14 557 des 64 337 musulmans de Roumanie (soit 23 %) vivent à Constanța[19] , ainsi que la plus grande mosquée du pays, bâtie en 1911 par le roi Carol Ier.

    Politique et administration

    Liste des maires successifs
    Période Identité Étiquette Qualité
    Les données manquantes sont à compléter.
    1 janvier 1990 10 janvier 1990 Radu Marian Front de salut national  
    janvier 1990 août 1990 Călin Marinescu Front de salut national  
    août 1990 1991 Adrian Manole Front de salut national  
    1991 1992 Tudor Baltă Front de salut national  
    1992 1996 Corneliu Neagoe PNȚCD  
    1996 2000 Gheorghe Mihăieș PD  
    2000 2015 Radu Mazăre Indépendant, puis PSD  
    2015 2020 Decebal Făgădău PSD par intérim jusqu'en juin 2016
    2020 En cours Vergil Chițac PNL  
    Élections municipales de 2020[20]
    Parti Sièges
    Parti national libéral (PNL)10
    Alliance 2020 USR-PLUS (PSD)9
    Parti social-démocrate (PSD)8

    Économie

    Constanța est le premier port de Roumanie, avec des terminaux pétroliers et à conteneurs. La ville a une importante industrie, commerce et tourisme naturel. Beaucoup d'industries pétrolières et d'entreprises d'import-export se situent à Constanța du fait de ses installations portuaires.

    Transports

    L'aéroport international Mihail-Kogălniceanu (Aeroportul Internațional Mihail Kogălniceanu Constanța) est situé à une vingtaine de km de Constanța (code AITA : CND).

    La ville est aussi desservie par des trains Rapid sur la ligne BucarestMangalia de la CFR.

    Sous le mandat du maire controversé Radu Mazăre élu en 2000 et qui a enchaîné quatre mandats, le transport urbain a suivi une évolution à l'envers des politiques européennes privilégiant les transports électriques et par rail (trolleys et trams) : à Constanța, les transports électriques ont été supprimés (on a même enlevé les rails des trams) et remplacés par des bus à énergies fossiles, comme on le faisait aux États-Unis et en France dans les années 1950 et 1960, lorsque le pétrole était abondant et bon marché.

    Constanța est l'extrémité orientale de l'itinéraire européen E 60 au départ de Brest (France) via Nantes, Mulhouse, Zurich, Salzbourg, Vienne, Bratislava, Budapest, Bucarest.

    Constanța est aussi une des extrémités de l’EuroVelo 6 (EV 6), également dénommée « la route des fleuves », une véloroute EuroVelo longue de 3 653 km faisant partie d’un programme d’aménagement de voie cyclable à l’échelle européenne, qui relie la mer Noire, au port atlantique de Saint-Nazaire en France.

    Tourisme

    Le tourisme est très développé dans la ville, grâce à ses monuments de toutes époques, depuis la Halle romaine aux mosaïques, jusqu'au Casino « art nouveau » à la grande baie vitrée en forme de coquille Saint-Jacques (aujourd'hui en ruines).

    Universités et institutions culturelles ou scientifiques

    • Université Ovidius
    • Université maritime (École navale)
    • Institut roumain de recherches marines (IRCM) : hydrographie, biologie marine, halieutique et océanographie
    • Centre de géologie et de géonomie marine, devenu Institut national de recherches et de développement GeoEcoMar.
    • Musée d'histoire et d'archéologie (MINAC) : histoire de la Mésie, province située entre le Danube et la mer Noire, du paléolithique à nos jours.
    • Musée d'art
    • Musée d'histoire de la marine
    • Centre d'histoire naturelle et des sciences de l'univers : aquarium, marineland et planétarium.
    • Théâtre d'État : Teatrul Fantasio

    Constanța possédant environ cinq cents centres d'enseignement, les élèves peuvent également suivre des cours de russe, grec ou turc (du fait de la présence des minorités lipovènes, helléniques, turques, bulgares ou tatars) comme LV3, après le roumain et, au choix en LV2, l'anglais, l'allemand, l'espagnol, l'italien ou le chinois.

    Sport

    La ville est célèbre en Roumanie comme en Europe pour son club de handball, le HCM Constanța.

    Jumelages

    La ville de Constanța est jumelée avec[21] :

    Constanța entretient également des accords de partenariat avec :

    Notes et références

    1. (ro) « Tab8. Populația stabilă după etnie – județe, municipii, orașe, comune », sur recensamantromania.ro.
    2. Virtualtourist.com, The Ancient City of Tomis consulté le 16 novembre 2008.
    3. Francis Vian, « Poésie et géographie : les retours des Argonautes », Comptes rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 131-1, 1987, p. 249-262 (en ligne).
    4. Jordanès, Origine et actions des Goths, chap. 10 - .
    5. Jean Skylitzès : Synopsis historiôn.
    6. Piero Boccardo (dir.) et Clario Di Fabio, Il secolo dei genovesi, Milan, Electa, , 472 p. (ISBN 978-88-435-7270-0)
    7. Octavian Iliescu, « Contributions à l'histoire des colonies génoises en Roumanie aux XIIIe et XVe siècles », Revue Roumaine d'Histoire, no 28, , p. 25-52.
    8. Adolphe Joanne, Voyage en Orient, volumes 1, Ixelles Lez Bruxelles : Delevingue et Callewaert, 1850, p. 22 (lire en ligne).
    9. Camille Allard, Entre mer Noire et Danube : Dobroudja 1855, Paris, Non Lieu, coll. « Via Balkanica », , 280 p. (ISBN 978-2-35270-135-4, présentation en ligne).
    10. Mihail Șerbănescu, Constanța, Romart Design, (ISBN 973-97864-2-1).
    11. Anton Bejan, Carmen Atanasiu, Raymond Stănescu, Neculai Pădurariu, Dicționar Enciclopedic de Marină, ed. Semne, 2006.
    12. (ro) Mariana Iancu, Cristian Stănescu, « Radu Mazare are un nou dosar la colectie », sur Cotidianul, (consulté le ).
    13. (ro) « Mazare, cercetat de DNA pentru retrocedari ilegale », sur Evenimentul Zilei, (consulté le ).
    14. Oana Crăciun, « Top 10 cele mai populate orașe din țară », sur Adevărul,
    15. (ro) Dobrogea în secolele VII : XIX : evoluţie istorică, Ed. DC Promotions, , 258 p. (ISBN 978-973-86782-3-1, lire en ligne).
    16. (en) Lucian Boia, History and Myth in Romanian Consciousness, Central European University Press, , 285 p. (ISBN 978-963-9116-97-9, lire en ligne), p. 182.
    17. La Dobrogea roumaine : études et documents, (lire en ligne).
    18. (ro) « Structura Etno-demografică a României », sur www.edrc.ro (consulté le ).
    19. (ro) « Tab13. Populaţia stabilă după religie – județe, municipii, orașe, comune », sur recensamantromania.ro (consulté le ).
    20. (ro) « Rezultate finale 27 septembrie 2020 », sur https://prezenta.roaep.ro/ (consulté le ).
    21. Orase infratite

    Voir aussi

    Liens externes

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