Solaris (film, 2002)
Solaris est un film américain écrit et réalisé par Steven Soderbergh, sorti en 2002. Le film met notamment en scène les acteurs George Clooney et Natascha McElhone. Il est adapté du roman du même nom de l'écrivain polonais Stanisław Lem, paru en 1961 et déjà adapté sous le même titre:en 1968 par Lydia Ichimbaïeva et Boris Nirenburg (Solaris, téléfilm soviétique); et en 1972 par Andreï Tarkovski (Solaris, film soviétique).
Cet article concerne le film de Steven Soderbergh. Pour le film d'Andreï Tarkovski, voir Solaris (film, 1972). Pour les autres significations, voir Solaris.
Titre original | Solaris |
---|---|
Réalisation | Steven Soderbergh |
Scénario | Steven Soderbergh |
Musique | Cliff Martinez |
Acteurs principaux | |
Sociétés de production |
20th Century Fox Lightstorm Entertainment |
Pays de production | États-Unis |
Genre | science-fiction, drame |
Durée | 99 minutes |
Sortie | 2002 |
Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution
Pendant plusieurs années, James Cameron avait l'intention d'en signer la réalisation mais, pris par de nombreux autres projets, il se résout à en confier la réalisation à Steven Soderbergh, bien qu'il continue à y veiller en assurant la production. Le scénario est alors entièrement retravaillé par Steven Soderbergh. La musique, largement reconnue pour ses qualités méditatives et intimistes, est signée par le compositeur Cliff Martinez. Le film a reçu un accueil mitigé du public, désorienté par ce qu'il pensait être un film de science-fiction classique, alors que celui-ci est avant tout un drame, plus précisément un drame psychologique.
Solaris raconte l'histoire du psychologue Chris Kelvin, envoyé à bord d'une station spatiale tournant autour de l'étrange planète Solaris et qui voit réapparaître sa femme, pourtant décédée quelques années plus tôt. Il se trouve alors confronté à sa culpabilité, se sentant responsable du suicide de celle-ci, et assimile cette réapparition à une seconde chance que le destin lui donne.
Fortement influencé par 2001, l'Odyssée de l'espace de Stanley Kubrick et les questionnements de mythes anciens comme le mythe d'Orphée et Eurydice, le film est décrit comme un « lent psychodrame méditatif » ayant pour objet la mémoire, la culpabilité et la rédemption.
Synopsis
Dans un futur indéterminé mais proche, Chris Kelvin (George Clooney) est un psychologue menant une morne vie. Alors qu'il se blesse au doigt en cuisinant, deux employés de la DBA (l'agence spatiale qui a succédé à la NASA) lui apportent un message vidéo d'un de ses amis, Gibarian (Ulrich Tukur). Celui-ci, parti en observateur dans la station Prometheus orbitant autour de la planète-océan Solaris, lui lance un appel de détresse. Mais il reste mystérieux quant à la teneur de ses problèmes, annonçant : « J'imagine que la solution la plus évidente consisterait à partir mais aucun d'entre-nous n'en a envie. » Dans la mesure où il s’agit du dernier message de l'équipage à être parvenu sur Terre, les autorités fondent beaucoup d'espoir dans l'envoi de Chris, d'autant plus qu'une équipe de secours a déjà été envoyée sur la station et n'a plus donné de nouvelles depuis.
Le psychologue se rend donc à son tour sur la station. À son arrivée, il est confronté à divers incidents inquiétants, des traces de sang sur les murs et le sol, la découverte de deux cadavres dont celui de Gibarian, des cris et des bruits étranges, la présence incongrue d'un enfant dans les coursives de la station… Chris découvre qu'il ne reste que deux survivants, Snow (Jeremy Davies), l'informaticien du bord, et Gordon (Viola Davis), le médecin de l'équipage. Bien que réagissant différemment, tous deux montrent un esprit tourmenté par un mal étrange. Chris ne parvient pas à leur soutirer d'informations significatives sur ce qui se passe. Gordon ne fait qu'une description froide et médicale des syndromes qui la frappent (« État dépressif, accompagné d'accès hypomaniaque, insomnie ») mais ne révèle rien de leurs causes. Snow, bien que plus accessible, demeure tout aussi énigmatique : « Je pourrais vous dire ce qu'il se passe mais ça ne vous dirait pas vraiment ce qu'il se passe ». Il informe cependant Chris que Gibarian s'est suicidé et que l'enfant aperçu précédemment est le fils de ce dernier, ce qui est en principe impossible, celui-ci étant resté sur Terre. Snow conseille qu'il ne faut pas s'endormir.
Pourtant Chris va se coucher et s'endort. Le premier des flashbacks qui émaillent le film a lieu. Il se remémore dans son songe de sa toute première rencontre avec Rheya (Natascha McElhone), celle qui devint son épouse. Celle-ci a lieu alors qu'il parlait avec Gibarian, qui annonce justement être sur le départ pour Solaris. À son réveil, Chris est confronté au mystère de la station lorsque Rheya lui apparaît en chair et en os. Passé la stupéfaction initiale, il décide aussitôt de l'éliminer en la projetant dans l'espace à l'aide d'une capsule de secours. Après cet épisode, il reconnaît devant Snow que ce « visiteur » ressemblait à sa femme mais que celle-ci est morte sur Terre.
La seconde nuit de sommeil est l'occasion d'un autre flashback narrant les premiers temps de sa fréquentation amoureuse avec Rheya. Celle-ci y apparaît indécise dans la suite de sa relation avec Chris et, par ailleurs, fragile psychologiquement, notamment lorsqu'elle raconte sa vie avec sa mère dont elle dit qu'elle était « cliniquement folle ». À son réveil, Chris découvre de nouveau Rheya à ses côtés et lui avoue : « Je ne sais pas comment tu es venue. » Elle répond : « Je ne suis pas celle dont je me souviens. » Les souvenirs, sous forme d'un autre flashback, remontent à l'esprit de la jeune femme : sa grossesse, sa décision d'avorter, les souffrances au sein de leur couple liées à son caractère dépressif, puis son suicide…
Lors d'une réunion entre les quatre occupants de la station, Gordon explique que Rheya est en fait une création de Solaris s'appuyant sur les souvenirs de Chris : « Elle n'est pas humaine ! », s'exclame-t-elle, « C'est une copie, un trompe-l'œil qui vous fait le coup du revenez-y ! ». Elle propose de la détruire à l'aide d'un faisceau qui rendrait son retour impossible. Chris refuse.
Il s'endort de nouveau. Cette fois, c'est Gibarian qui lui apparaît. La scène se déroule dans la station, si bien qu'on ne sait pas vraiment si Chris dort ou s'il est éveillé :
- Chris : « Mais enfin, qu'est-ce que Solaris veut de nous ? »
- Gibarian : « Il n'y a pas de réponse. Il n'y a que des choix. »
De son côté, Rheya profite de ce sommeil pour tenter de se suicider en avalant de l'oxygène liquide. Néanmoins, sa blessure se cicatrise sous les yeux incrédules de Chris, Gordon et Snow, prouvant le caractère non humain de l'entité. « Je n'arrive jamais à m'y faire, lance Gordon. À ces résurrections. »
Gordon explique alors à Chris que le seul moyen de faire définitivement disparaître une entité consiste à la bombarder « d'anti-bosons de Higgs », ce qu'elle affirme avoir testé sur la sienne. Rheya abonde dans son sens car elle a compris n'être qu'une image vivante envoyée par la planète. Mais la raison de Chris a vacillé. Refusant encore, il s'enferme dans sa cabine avec Rheya. Là, il finit par de nouveau s'endormir. À son réveil, il découvre que Rheya a demandé à Gordon de la désintégrer. Cette scène est entrecoupée de flashbacks narrant la découverte par Chris de Rheya lors de son suicide.
Cela fait, Gordon annonce qu'elle quitte la station et invite Chris à la suivre. C'est à ce moment précis que Chris découvre le corps de Snow, conservé dans le plafond de la chambre froide. Gordon et lui comprennent que Snow n'est qu'une entité qui avait pris la place de « son » humain en le tuant. Les deux personnages s'apprêtent à l'éliminer mais l'entité les informe que l'utilisation par Gordon de la « machine à anti-bosons » afin de désintégrer les autres entités a fait acquérir à Solaris « de la masse de façon exponentielle », attirant inexorablement la station vers elle. Par ailleurs, cette dernière a épuisé toutes ses réserves de carburant. Ils n'ont d'autre choix que de s'enfuir sans attendre vers la Terre, à bord de la navette avec laquelle Chris est arrivé.
L'heure du départ a sonné, Gordon et Chris doivent partir en laissant la planète ainsi que l'entité Snow derrière eux. Pourtant, au dernier instant, Chris choisit ; ne pouvant se résoudre à abandonner Rheya, il laisse partir Gordon seule et reste sur la station. Cette dernière commence à se désintégrer sous l'effet de l'attraction de Solaris. Se produit alors un retour brutal sur Terre. Dans sa cuisine, la scène où Chris passe son doigt blessé sous l'eau se répète. Mais cette fois, la blessure disparaît comme par magie, à l'image de ce qui s'était passé précédemment pour Rheya, mutilée par l'oxygène liquide. On peut dès lors comprendre qu'il est devenu lui-même une de ces entités.
Les dernières images du film se situent sur Terre, dans une réplique de l'appartement de Chris. Elles mettent en scène le dernier dialogue entre Chris et Rheya :
- Chris : « Je suis vivant ou je suis mort ? »
- Rheya : « On n'a plus à penser en ces termes-là. On est ensemble. Tout ce que nous avons fait est pardonné ».
Principaux personnages
- Chris Kelvin (joué par George Clooney) est psychologue et veuf. Il porte la culpabilité du suicide de sa femme, Rheya, quelques années auparavant[1]. On peut supposer que c'est cette forte culpabilité qui fera que Solaris « choisit » d'envoyer l'entité Rheya à Chris. Après quelques résistances (il « tuera » la première apparition), Chris choisit de rester avec elle jusqu'à la destruction finale de la station spatiale Prometheus.
- Rheya (jouée par Natascha McElhone) est la femme de Chris Kelvin. Elle n'apparaît pas en tant que telle dans la station spatiale puisqu'elle s'est suicidée avant que l'histoire ne commence. Elle est un double, créé par la planète Solaris, et n'est donc pas humaine. De fait, elle est un personnage double[2], ni tout à fait elle-même ni tout à fait une autre : ainsi, dans les flashbacks (constitués des souvenirs de Chris avant la mort de Rheya), apparaît-elle instable[3], présentant des troubles de l'humeur et imprévisible, tandis qu'elle est douce, réfléchie et posée en réapparaissant sur la station. Lucide, l'entité Rheya réalise qu'elle n'est qu'une copie d'une personne disparue et la simple image du souvenir qu'en a Chris Kelvin[4].
- Snow (joué par Jeremy Davies) est l'informaticien de bord. Dès sa première apparition dans le film, il apparaît étrangement affecté par les évènements, à la fois détaché et impressionné. Il se révèle être, comme l'est Rheya, l'entité du véritable Snow qu'il a assassiné avant l'arrivée de Chris dans la station.
- Gordon (jouée par Viola Davis) est le médecin de l'équipage. Elle apparaît, dès les premières images, comme la plus affectée par les évènements étranges se déroulant à bord de la station[5]. Néanmoins, elle est celle qui, finalement, comprend le mieux le mal qui la frappe[6], qui sait expliquer la nature physique des entités envoyées par Solaris (puisqu'elle en propose un moyen efficace de les détruire) et qui propose une explication quant à la motivation de cette dernière[7]. Elle est la seule à réussir à fuir la station.
- Gibarian (joué par Ulrich Tukur) est le commandant de bord et un ami de Chris Kelvin. C'est lui qui demande à Chris de venir les aider, lui et son équipage, pour faire face aux « événements étranges » survenus dans la station. Gibarian est déjà mort lorsque Chris y arrive[Note 1]. De fait, on ne le voit que dans la vidéo adressée à Chris et dans les souvenirs de celui-ci.
On ne compte ainsi que quatre personnages principaux (Chris Kelvin, Rheya, Snow et Gordon) dans l'histoire, cela permet d'avancer que Solaris appartient au domaine du huis clos.
Fiche technique
Sauf indication contraire ou complémentaire, les informations mentionnées dans cette section peuvent être confirmées par la base de données IMDb.
- Titre original et français : Solaris
- Réalisation : Steven Soderbergh
- Scénario : Steven Soderbergh, d'après le roman Solaris de Stanisław Lem
- Musique : Cliff Martinez
- Photographie : Steven Soderbergh (sous le pseudonyme de Peter Andrews)
- Montage : Steven Soderbergh (sous le pseudonyme de Mary Ann Bernard)
- Décors : Philip Messina
- Son : Larry Blake
- Costumes : Milena Canonero
- Production : James Cameron, Jon Landau et Rae Sanchini
- Coproducteurs : Charles V. Bender et Michael Polaire
- Producteur délégué : Gregory Jacobs
- Sociétés de production : 20th Century Fox et Lightstorm Entertainment
- Distribution : 20th Century Fox (États-Unis), UGC Fox Distribution (France), United International Pictures (Belgique)
- Budget : 47 millions USD
- Pays d'origine : États-Unis
- Format : Couleurs - 2,35:1 - Dolby Digital - 35 mm
- Genre : science-fiction, drame, romance
- Durée : 99 minutes
- Dates de sortie[8] :
- États-Unis : (avant-première à Los Angeles)
- États-Unis, Canada :
- Allemagne : (Berlinale 2003)
- France :
Distribution
- George Clooney (VF : Samuel Labarthe) : Chris Kelvin
- Natascha McElhone (VF : Marjorie Frantz) : Rheya
- Jeremy Davies (VF : Vincent Ropion) : Snow
- Viola Davis (VF : Adèle Soria) : Gordon
- Ulrich Tukur (VF : Joachim Seitz) : Gibarian
- John Cho : l'un des émissaires de la DBA
- Michael Ensign : un ami
- Elpidia Carrillo : une amie
Production
Développement
James Cameron avait le projet de faire ce film depuis plusieurs années[9]. Après une longue procédure avec le gouvernement russe, il achète les droits du roman de Stanisław Lem via sa société Lightstorm Entertainment[9],[10]. Mais en raison de nombreux autres projets dans les années 1990, il ne peut concrétiser son projet.
En 2000, alors que Steven Soderbergh travaille sur Traffic, il parle à James Cameron et aux producteurs Rae Sanchini et Jon Landau d'une adaptation de Solaris, qu'il pourrait faire lui-même. James Cameron est intrigué par les idées du réalisateur et lui propose de retravailler sur le projet. Ainsi y travaillent-ils ensemble, lors de longues discussions où ils échangent leurs points de vue et où Soderbergh peut exposer ses idées[11]. Alors que le développement de Traffic stagne, Steven Soderbergh commence à écrire un premier jet de Solaris. Pour cela, il visionne le film russe de 1972, réalisé par Andreï Tarkovski. Ce dernier y développe des thèmes qu'il n'a jamais pu aborder dans ses films précédents[11]. Soderbergh insiste pour écrire seul le scénario : « Je leur ai dit que j'avais une idée de comment le faire mais je voulais [l']écrire seul. Je ne voulais pas avoir à négocier pour le faire. Je leur ai exposé ma vision, ce que je voulais développer et comment je comptais faire pour me démarquer du roman et me démarquer du film de Tarkovski »[12]. Soderbergh reconnaît avoir écrit un scénario beaucoup plus court que la moyenne des scénarios proposés par les réalisateurs (75 pages au lieu d'une centaine habituellement) mais il désirait pouvoir étirer ses scènes afin de donner son rythme lent au film[13]. Le projet est ensuite présenté à 20th Century Fox.
Distribution des rôles
Steven Soderbergh souhaite à l'origine Daniel Day-Lewis pour le rôle principal[9]. L'acteur est cependant engagé sur Gangs of New York de Martin Scorsese. George Clooney, partenaire du réalisateur au sein de la société Section Eight, reçoit une copie du script. Bien qu'ils soient proches, il réalise qu'il n'a pas été le premier choix des producteurs. Un mois plus tard, alors que Ocean’s Eleven est en cours de montage, il fait parvenir au réalisateur une lettre dans laquelle il annonce être prêt à endosser le rôle[14]. Sa force de conviction et son lobbying ont été déterminants pour Soderbergh qui évoque l'inspiration que lui a conférée « la volonté radicale [de Clooney] de sauter d'une falaise chaque jour »[15]. De fait, l'implication de George Clooney est importante puisqu'il constitue une force de propositions : ainsi, c'est lui qui propose à Soderbergh l'indice final de la coupure au doigt qui se soigne seule montrant que Chris est resté sur Solaris[16].
Concernant Natascha McElhone[17], Soderbergh l'a remarquée dans Surviving Picasso (1996). Dans ce film, dit-il, elle lui a « rappelé les grandes actrices européennes des années soixante et soixante-dix, comme Jeanne Moreau et Dominique Sanda »[18]. Il songe donc rapidement à elle pour le rôle de Rheya. Pour elle aussi, le casting s'est révélé peu commun puisqu'il a pris la forme d'un dialogue improvisé avec Soderbergh qui s'est trouvé subjugué par ses réponses et qui l'a donc retenue.
Steven Soderbergh s'est tourné vers Jeremy Davies après avoir visionné un casting effectué par ce dernier pour un film consacré au criminel américain Charles Manson. Le film ne s'est pas fait mais la performance dans cette vidéo était tellement convaincante que Soderbergh l'a engagé[19].
Steven Soderbergh fait appel à Viola Davis[17] qu'il retrouve ainsi pour la troisième fois, après Hors d'atteinte (1998) et Traffic (2000). Dans son commentaire audio du DVD, Soderbergh dit l'avoir engagée pour la force de son caractère : « Une des raisons qui m'ont fait choisir Viola, c'est qu'elle se bat contre George. Il me fallait quelqu'un de fort[20]. ».
Enfin, concernant le choix de l'acteur allemand Ulrich Tukur[17] pour jouer Gibarian, celui-ci s'est fait après un casting particulier. Soderbergh a demandé à Tukur de lui faire parvenir une vidéocassette en guise d'audition. Ce sont les choix étranges de mise en scène de cet « auto-casting » qui ont décidé Soderbergh à le prendre.
Décors
Le décor de la station spatiale Prometheus est créé par Philip Messina[21]. Ce chef décorateur travaille pour la quatrième fois sous la direction de Steven Soderbergh après Erin Brockovich, seule contre tous, Traffic et Ocean’s Eleven[21]. Ce décor est imposant, haut de deux étages et mesure 46 mètres sur 67[22].
Concernant la station Prometheus, la demande de Soderbergh à son chef décorateur est qu'elle paraisse la plus réaliste possible ; ainsi, loin d'imaginer une station hyper-futuriste mais improbable, Messina et Soderbegh choisissent plutôt de s'inspirer de la Station spatiale internationale tant dans pour l'extérieur que pour l'intérieur[23]. Ils ajoutent néanmoins certains éléments dans le but d'en rendre l'intérieur plus brut, plus « industriel »[24]. Enfin, l'environnement et les extérieurs de la station ont été en grande partie recréés à l'aide de l'informatique[25] par l'entreprise britannique Cinesite[26] avec laquelle il a déjà collaboré sur cinq autres films[26] : Out Of Sight, The Limey, Erin Brockovich, Traffic et Ocean's Eleven.
Pour Soderbergh, cette station n'est pas, contrairement aux films de science-fiction traditionnels, un personnage de l'histoire : le fait de placer l'action dans une station spatiale ne constitue qu'un prétexte afin de faire progresser l'histoire et faire accepter plus facilement certains partis pris scénaristiques[27]. C'est pourquoi l'autre demande de Soderbergh à Messina est que le décor de la station donne une impression d'isolement, voire de claustrophobie, afin de rendre l'aventure intérieure plus oppressante et profonde[28].
Tournage
Le tournage principal débute le à Downtown Los Angeles. Il a ensuite lieu sur les plateaux 19 et 20 des studios de la Warner à Burbank en Californie. De l'aveu même de Steven Soderbergh, ce tournage a été relativement court, puisqu'il n'a duré que 43 jours. De même, la phase de montage a été rapide, puisque le tournage a débuté au mois d' pour une sortie en avant-première le [29]. La construction de la station Prometheus ayant duré plus de temps que prévu, elle n'est pas terminée alors que le tournage a déjà commencé, ce qui oblige le réalisateur à modifier son planning et intervertir l'ordre de tournage de certaines scènes[30].
Esthétique
Solaris est un film dont les qualités esthétiques sont reconnues[31], qualité de l'image, cadrages… tout concourt à rendre l'œuvre plus belle[32]. Les choix esthétiques de Soderbergh sont tournés vers ce qui pourrait s'apparenter à une certaine ligne claire, décors épurés, lumière tranchante et directe, plans resserrés… Tout est fait pour diriger l'œil du spectateur vers les personnages, leurs pensées, leurs sentiments et leurs actions[33],[34].
Concernant l'environnement, l'aspect visuel le plus significatif concerne la planète Solaris qui apparaît dans trente-sept plans différents à travers les hublots du vaisseau Athena ou de la station Prometheus. Soderbergh fait appel à l'entreprise Rhythm & Hues sous la direction de l'artiste Richard Baily[35] qui a travaillé sur les films de science-fiction Tron (1982) et Battlefield Earth (2000)[36]. La plus grande difficulté fut de rendre l'atmosphère de la planète, composée de gaz colorés desquels s'élancent de larges volutes lumineuses semblables à celles se produisant sur le Soleil. Il a fallu restituer cette atmosphère, pratiquement point lumineux par point lumineux afin de ne pas étouffer l'image, pour la rendre la plus éthérée possible[37] ; autre contrainte, sur les indications de Soderbergh, en cohérence avec les descriptions présentes dans le roman, la lumière devait émaner de la planète même[38],[Note 2]. C'est ainsi qu'il a fallu utiliser pas moins de sept couches d'images[39] ainsi que 60 000 vues différentes de la planète[40] pour recréer toute la complexité de son apparence. Cette dernière évolue au cours du film, la planète présente d'abord une atmosphère calme et sereine, aux volutes basses, douces et aux couleurs pastel ; vers la fin, l'atmosphère est plus agitée, plus tourmentée, les volutes sont beaucoup plus vastes et les couleurs plus électriques[41],[42]. C'est que, même si la planète ne constitue pas un personnage en soi, elle laisse à voir des changements notables, certainement en réponse à l'activité humaine se déroulant à sa proximité. Cela s'explique, selon Richard Baily, par la volonté du réalisateur d'accentuer l'aspect dramatique au cours du film[43].
Enfin, le réalisateur joue sur les oppositions visuelles afin de mieux situer et caractériser les passages concernant la station Prometheus et ceux concernant la Terre[44] ; pour la Terre, une image sombre, marquée par la pluie et tirant sur le vert, afin de mieux marquer que la narration est de l'ordre d'un souvenir marqué du sceau du regret[45] et, pour la station, une image très claire, jouant sur le contraste du blanc sur le noir, froide, où tout est épuré[46].
De fait, Soderbergh use d'un parti pris esthétique très proche de celui de Stanley Kubrick pour son 2001, l'Odyssée de l'espace, même solitude de l'Être humain face à un vide sidéral imposant, mêmes jeux de lumières sur les casques des scaphandres[47] lorsque Chris arrive à la station, à comparer avec la séquence finale de 2001, l'Odyssée de l'espace où David Bowman est envoyé « au-delà de l'infini »… Soderbergh ancre ainsi son œuvre dans le cadre d'un film réfléchi et lent[13], aux antipodes du film d'anticipation où se mêleraient action et science-fiction[48].
Sons
Le travail sur le son se fait avec Larry Blake[49]. Ce chef du département sonore a travaillé sur tous les films Steven Soderbergh depuis sa première réalisation : Sexe, Mensonges et Vidéo, Kafka, King of the Hill, À fleur de peau, Gray's Anatomy, Schizopolis, Hors d'atteinte, The Limey, Hors d'atteinte, Erin Brockovich, seule contre tous, Traffic, Ocean’s Eleven et Full Frontal[49].
Steven Soderbergh a porté la même attention à l'aspect sonore du film qu'à son aspect visuel. Ainsi, quand certaines scènes sont non dialoguées et ne comportent pas de musique, Soderbergh s'appuie sur les bruitages pour créer une tension. C'est ce que remarque James Cameron dans les commentaires audios du film, à propos de l'arrivée de Chris sur la station : « La tension monte, les effets sonores la servent bien. On n'entend que la climatisation. Tu ne crées pas la tension avec de la musique et c'est finalement très efficace[50]. » Ainsi, sur la station, de même qu'il a souhaité rendre les décors industriels et bruts, il accorde une importance dans le bruit continu des ventilateurs et de la climatisation qui accompagne le héros, tout en éliminant le maximum d'autres bruitages. Il l'exprime ainsi : « J'en ai parlé avec Larry Blake, le concepteur sonore. […] Dans la plupart des endroits, c'est la clim ou des ventilateurs qui refroidissent les disques durs. On a éliminé tous les petits bruits. On a aussi remarqué que quand on travaillait trop les sons d'une scène, ça entravait tellement les répliques que ça en devenait gênant[51]. » De fait, Soderbergh choisit de privilégier le même dépouillement, la même épure sonore que visuelle : « On s'apprêtait à fonctionner sur plusieurs niveaux, à la David Lynch. Mais on a préféré, à mi-chemin, privilégier la simplicité[51]. »
Bande originale
Sortie | 2002 |
---|---|
Enregistré |
décembre 2002 |
Durée | 43:30 |
Genre |
Electro classique |
Label | Superb Records |
Critique |
Albums de Cliff Martinez
Cliff Martinez, fréquent collaborateur de Steven Soderbergh, a composé une musique originale pour les besoins du film, même si Soderbergh a d'abord tenté d'illustrer son film avec des musiques déjà existantes composées par Pink Floyd ou Beck Hansen. Mais James Cameron a fini par le convaincre d'utiliser la composition de Cliff Martinez[53]. Batteur ayant appartenu au groupe des Red Hot Chili Peppers, ce dernier a travaillé sur la plupart des films de Sorderbergh. Ses compositions les plus connues sont Sexe, Mensonges et Vidéo (1989) et Traffic (2001). Pour ce film, il utilise un orchestre symphonique[54] alors qu'il n'a employé jusque-là que des sources électroniques pour composer. La bande originale du film est largement reconnue pour ses qualités artistiques et a été applaudie par la critique. Ainsi, est-elle fréquemment utilisée pour illustrer des émissions de télévision, comme dans le reportage « À l'ombre du volcan » de l'émission Thalassa diffusé le [55]. La bande originale est parue sur CD et a fait l'objet de plusieurs rééditions, dont une, en 2011, sur disque vinyle[56]. Pour certains, il s'agit de l'œuvre la plus accomplie de Cliff Martinez, qui affirme qu'elle est sa composition préférée car, dit-il, elle « joue un vrai rôle dans le film, [et y] apporte une réelle contribution[57]. » Et en effet, cela correspond bien à la demande de Soderbergh selon laquelle la musique devait soutenir littéralement la narration, certaines scènes comprenant peu voire pas de dialogues[58].
L'objectif de Soderbergh, en commandant ce travail à Cliff Martinez, est double : que la musique constitue une source puissante d'émotion et, en même temps, qu'elle contribue à instiller une ample lenteur[59]. En cela, le film de Soderbergh se rapproche de celui d'Andreï Tarkovski : les effets musicaux tendent à toucher les mêmes ressorts émotionnels grâce à une même musique électronique aussi éthérée et lente[60].
L'instrumentation fait appel à un orchestre composé de bassons, clarinettes, flûtes, cors, hautbois, trombones, trompettes, tubas, violons, altos et violoncelles mais sans aucune percussion classique[61]. De même il fait appel à des instruments moins couramment usités tels que les ondes Martenot, un cristal Baschet et des steel drums[62]. Il fait également intervenir un ensemble instrumental traditionnel, le gamelan indonésien. Le travail des instruments se fait sous la forme de clusters, répétitions, dissonances, ostinatos… Ces procédés musicaux constituent l'essentiel de l'œuvre. Martinez a ensuite réarrangé électroniquement ce premier matériau — samples, boucles, échos… — afin d'amplifier l'effet de temps suspendu et d'état d'apesanteur recherché[63].
Même s'il est peu habitué à l'emploi des instruments classiques et de l'orchestre, Cliff Martinez a souligné l'intérêt de leur apport à la composition, car ils lui donne plus de chaleur et d'émotion[64]. Formellement, il joue sur l'opposition entre les deux types sources musicales. En effet, les contrastes dans les sonorités qu'elles produisent permettent d'associer chaque groupe instrumental à un aspect précis du film, l'électronique se rattache à la science-fiction tandis que la partie orchestrale illustre l'aspect humain de l'histoire[65].
Les sources d'inspiration de Martinez pour cette composition sont peu nombreuses mais très précises. À la demande de Soderbergh, Martinez s'est appuyé sur le travail de György Ligeti, notamment tel qu'il a été utilisé par Stanley Kubrick dans 2001, l'Odyssée de l'espace[66],[67]. Ainsi, dans les compositions Atmosphères (en) et Lontano, apparaissent les mêmes tenues sombres de cordes, cuivres et vents[68] donnant une impression de langueur et de fin du monde. On peut, de même, reconnaître l'influence — indirecte — de l'expérimentateur musical Brian Eno, inventeur de l'ambient, musique aux atmosphères minimalistes, sombres et froides, ainsi que celle du compositeur Philip Glass dont la musique répétitive et minimaliste, empreinte de tristesse et de pesanteur, a également été utilisée au cinéma[69].
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Soderbergh indique qu'il « ne souhaitait pas faire de Solaris un remake du film de Tarkovski, mais davantage une nouvelle version du roman de Stanisław Lem »[70]. Même s'il n'a pas vu le film, Lem considère l'adaptation comme un « remake du film de Tarkovski » et critique le film pour ce qu'il en sait comme s'écartant sensiblement des intentions originelles, en se focalisant exclusivement sur la psychologie des deux personnages principaux, et reléguant à quasi rien les réflexions sur l'humanité de l'étrange et gigantesque océan[71] :
« […] autant que je le sache, le livre n'était pas consacré aux problèmes érotiques de personnes dans l'espace… […] En tant qu'auteur de Solaris, je me permets de rappeler que je souhaitais seulement figurer une rencontre de l'homme avec quelque chose dont l'existence est certaine, peut-être imposante, mais qui ne peut être réduit à des concepts, des idées ou des images humains. C'est pourquoi ce livre s'intitule Solaris et non pas L'Amour dans l'espace[72] »
— Stanisław Lem, The Solaris Station[71]
Solaris a été l'objet de critiques très divergentes, dans lesquelles les points d'analyse soulevés peuvent être similaires mais appréhendés de façons opposées.
Ainsi, en 2010, Solaris apparaît sur la liste Top 10 Hollywood Remakes du magazine Time pour « sa réalisation exquise et experte » et sa « façon d'extraire ce but trop rarement atteint dans un film de science-fiction : l'émotion[70]. »
Il se présente selon certains critiques comme un film intellectuel, où même l'amour est avant tout cérébral ; ainsi, selon Jean-Pierre Dufreigne de l'Express, « le lieu des amours, conjugales, fraternelles, filiales, n'est pas le cœur, muscle rouge, mais le cerveau, amas de cellules grises grésillantes[73]. » Dès lors, il permet de soulever un questionnement dont ce même critique souligne la profondeur : « Est-ce une seconde chance, celle qu'on n'obtient jamais, de recouvrer l'amour suicidé ? Au fond de l'espace, peut-on gommer le passé ? Au fond de soi, peut-on aimer un « fantôme » redevenu chair, sans trahir ce même amour ? Quelle est la solution ? Que choisir ? Se perdre dans l'océan de Solaris et y renaître autre ou fuir vers les pluies de la Terre ? Une forme d'éternité rabâchée ou la survie en solitaire endeuillé ? En art, seule la beauté est une solution. Solaris est une heure et demie de beauté désespérée[73]. » Olivier De Bruyn, du magazine Le Point, s'inscrit dans cette vision du film puisque, selon lui, « découvrir « Solaris » demeure une expérience singulièrement troublante. Un film adulte et subtil qui touche au plus profond[74]… »
Solaris est également considéré comme un film aux visées esthétiques proposant, selon Olivier De Bruyn, « une expérience sensorielle envoûtante »[74], ce que confirme Jean-Claude Loiseau de Télérama qui affirme que « tout le film, mis en scène avec une élégance millimétrée, tend vers une épure à la fois dramatique et visuelle[75]. » Pour Grégoire Bénabent de Chronicart.com, cette esthétique épurée sert l'œuvre puisqu'elle lui permettrait de faire progresser efficacement l'histoire : « Soderbergh décide […] de nous faire entrer de plain-pied dans un univers technologique abstrait et glacé, dans une certaine irréalité qui prépare l’apparition surnaturelle de Rehya[76]. »
Ce sont néanmoins ces mêmes caractéristiques — un film intellectuel et esthétique — qui sont sujettes à des critiques négatives de la part d'autres observateurs. Nombreux ont été les critiques qui ont été déroutés par le rythme lent du film ainsi que son parti pris méditatif. Le film est aussi jugé esthétisant. Ainsi, Didier Péron du quotidien Libération, considère que Solaris est « invendable comme science-fiction, peu probant comme mélo romantique, effroyablement lent et opaque, antispectaculaire »[77]. Affirmant même que le film « relève explicitement du suicide commercial », il en conclut que « la [20th Century] Fox […] n'y a vu que du feu jusqu'à ce que l'évidence éclate : personne aux États-Unis n'irait voir un truc pareil ». De même, les Inrocks à travers la voix d'Olivier Père, constatent que, « loin de la puissance métaphysique de Tarkovski, ce remake est un simulacre auteuriste, un vide glacé et ennuyeux »[78]. Bref, Solaris serait un film se voulant tellement cérébral qu'il en perdrait toute âme[79].
C'est que l'œuvre serait victime d'une interprétation proprement américaine du film de Tarkovski à travers l'exploitation de l'idée de « seconde chance » qui semble avoir cours dans les films hollywoodiens : « […] cela consiste ici à rejouer une énième fois le scénario de la seconde chance, moteur rouillé de trois-quarts des fictions hollywoodiennes. Il n’est pas question de trahison ou de révision [de l'œuvre de Tarkovski], mais bien d’américanisation d’une œuvre à des années-lumière de tout ce flan »[78],[Note 4].
Autre sujet de critique négative, son esthétique dont Olivier Père, des Inrocks, regrette les partis pris : « embarrassantes scènes de regards », « images froides et léchées », « terrible manque d’inspiration », « grande complaisance dans le glacis esthétique »[80], « à l’esthétisme publicitaire »[78]. Bref, Soderbergh donnerait « une place excessive aux valeurs formelles » et serait donc « esthétisant ». Il s'agit d'une analyse proche de celle de Didier Péron, pour qui, « film immobile, photographique, transi comme à l'heure de l'image ultime, Solaris s'approche des expériences sensorielles de l'éther, pupilles dilatées, lèvres bleues »[77].
Le film de Soderbergh ne laisse donc pas indifférent. Décrit comme un film expérimental, il est néanmoins reconnu comme une œuvre désirant — en bien ou en mal — sortir du lot des productions hollywoodiennes, ce qu'Olivier De Bruyn souligne, lorsqu'il écrit : « Soderbergh, épaulé pour l'occasion par son confrère James Cameron, est parvenu à convaincre un grand studio (Twentieth Century Fox) de produire ce film de science-fiction à vocation métaphysique qui n'entretient aucun rapport (doux euphémisme !) avec les blockbusters mitonnés à longueur d'année du côté de l'usine à rêves »[74]. C'est pourquoi Jean-Claude Loiseau, dans Télérama, remarque que Soderbergh « est allé, en fait, au bout d'une vision très personnelle, qui a tout pour dérouter les amateurs de périples bien balisés ». Dès lors, l'auteur de l'article peut finalement conclure que, « Soderbergh a fait un beau pari sur la curiosité du public[75]… »
Accueil par le public
Le film ne trouve pas son public, pour un budget estimé à 47 millions $US, le film rapporte 14 973 382 $US en Amérique du Nord et 15 029 376 $US dans le monde, soit une trentaine de millions $US. Le film subit donc un relatif échec[81]. En raison de ces mauvais résultats, Soderbergh a reproché les carences de la promotion qui n'aurait pas permis au film d'obtenir la publicité qu'il aurait mérité[82].
À l'époque, George Clooney rétorque pourtant que la promotion autour du film ne porte aucune responsabilité dans cet échec. Il souligne que le film a été victime d'un malentendu initial qui lui a été fatal : le public l'aurait boudé car, présenté comme un film de science-fiction, Solaris est en fait une histoire d'amour[83]. L'analyse de l'acteur n'est pas infondée, le choix de faire évoluer les personnages dans cette station spatiale constitue moins une exigence indispensable pour le scénario qu'un prétexte, un moyen de narration, permettant de faire accepter le principe de base de l'histoire, à savoir l'apparition d'« entités ». De même, grâce à cet artifice, l'isolement des personnages et le sentiment d'abandon qui en découle permet de faire efficacement évoluer l'histoire[84],[85].
De fait, Soderbergh corrige par la suite son analyse, concédant que le film est trop cérébral pour le public américain qui aurait, différemment du public européen, besoin de films plus accessibles[86]. C'est ce qu'il confirme dans le commentaire audio du film où il affirme que le film peut être difficile d'accès : « J'ai prévenu les spectateurs que s'ils n'entraient pas dans le film dès les 10 premières minutes, […] il valait mieux renoncer »[87].
Distinctions
Récompenses
Année | Cérémonie, récompense ou festival | Lieu / Pays | Prix | Lauréat |
---|---|---|---|---|
2002 | Washington D.C. Area Film Critics Association Awards | États-Unis | Biggest Disappointment (« plus grande déception »)[88] | Solaris |
2003 | Satellite Awards | États-Unis | Prix du meilleur son[89] | Larry Blake |
Nominations
Année | Cérémonie, récompense ou festival | Lieu / Pays | Prix ou sélection | Nommé(e) |
---|---|---|---|---|
2003 | Saturn Award | États-Unis | Meilleur film de science-fiction[90] | Steven Soderbergh |
Meilleur acteur[90] | George Clooney | |||
Meilleure actrice[90] | Natascha McElhone | |||
2003 | Festival international du film de Berlin | Berlin, Allemagne | Ours d'or[91]. | Steven Soderbergh |
2003 | Black Reel Awards | États-Unis | Theatrical - Best Supporting Actress[92] | Viola Davis |
2003 | Central Ohio Film Critics Association Awards | Ohio, États-Unis | Meilleure image[93] | Solaris |
2003 | Irish Film and Television Awards | Dublin, Irlande | Meilleure actrice[94] | Natascha McElhone |
2003 | Satellite Awards | États-Unis | Meilleur second rôle[89] | Jeremy Davies |
Analyse
Entre adaptation du roman de Lem et remake du film de Tarkovski
Solaris de Soderbergh (2002) est à la fois redevable du roman de Stanisław Lem, datant de 1961, et de l'adaptation cinématographique qu'en a faite Andreï Tarkovski en 1972. Il est à noter qu'il a également été fait du livre de Stanisław Lem une adaptation télévisuelle réalisée par Boris Nirenburg et Lidiya Ishimbayeva pour la télévision soviétique en 1968 mais à laquelle Soderbergh ne fait aucune référence dans ses sources d'inspiration.
La trame de fond des trois œuvres est très proche, un résumé de chacune d'elles permettant de le constater :
- Solaris de Stanisław Lem (1961) : « Une équipe scientifique débarque sur Solaris, un monde inhabité tournant autour de deux soleils. L'immense océan protoplasmique qui recouvre entièrement la planète reste depuis des siècles un irritant mystère. Dès son arrivée, le Dr Kelvin est intrigué par le comportement du physicien Sartorius et du cybernéticien Snaut, qui semblent terrorisés par la visite d'une femme, Harey ; une femme que Kelvin a autrefois aimée et qui s'est suicidée plusieurs années auparavant. Impossible… À moins qu'une entité intelligente n'essaie d'entrer en contact avec eux en matérialisant leurs fantasmes les plus secrets, et qu'en l'océan lui-même réside la clé de cette énigme aux dimensions d'un monde[95]. »
- Solaris de Andreï Tarkovski (1972) : « Kelvin est projeté sur la station orbitale de Solaris où il doit rejoindre les trois autres cosmonautes déjà sur place… Le désordre règne à bord du laboratoire spatial. Kelvin rencontre le chercheur Snaut, au comportement énigmatique et Sartorius, un autre savant plus agressif. La station est hantée par des apparitions, un petit garçon et une jeune femme. Kris apprend que Gibarian, le troisième savant et l'un de ses plus proches amis, s'est suicidé… Sur un enregistrement audiovisuel adressé à Kelvin, Gibarian explique avoir été visité par des « hôtes » et que des problèmes de conscience l'ont poussé au suicide. La jeune femme entr'aperçue se révèle être Khari la femme qu'il a aimée, et qui, à la suite d'une querelle — elle ne plaisait pas à ses parents, il a ignoré sa souffrance — a choisi de se suicider. Connaissant la nature artificielle de cette apparition, Kelvin lui tend un piège et l'expédie dans l'espace à bord d'un engin téléguidé[96]. »
- Solaris de Steven Soderbergh (2002) : « Kelvin, un psychologue, vit avec le souvenir de sa femme décédée. Un message, envoyé par un ami en mission autour de la planète Solaris, le tire de sa déprime : c'est un appel à l'aide. Une équipe de sauvetage, envoyée pour secourir le vaisseau en orbite, n'est pas revenue de son périple. Kelvin se rend sur place, seul, pour tenter de comprendre ce qui a pu se passer. Il découvre, dès son arrivée, le corps de son ami. Les deux autres astronautes, psychologiquement perturbés, rechignent à donner une quelconque explication. Selon eux, leur compagnon se serait suicidé. Au cours d'une nuit agitée, Kelvin voit apparaître son épouse, telle qu'elle était dans son souvenir. D'autres visiteurs, surgis du passé, se manifestent également[97]. »
Or, si de telles similitudes existent entre les Solaris de Lem et Tarkovski d'une part et la version de Soderbergh d'autre part, de nombreux points de divergences existent, les trois proposant chacun une vision très différente : quand Lem s'interroge sur la rencontre de l'Humanité avec une intelligence extraterrestre qui le dépasse[98], et que Tarkovski s'interroge sur les limites de l'esprit humain[99], Soderbergh, lui, centre son film sur une histoire d'amour[100]. Si bien qu'il est difficile de savoir dans quelle mesure le Solaris de Soderbergh constitue plus un remake du film de Tarkovski qu'une adaptation du roman de Lem. Ainsi, dans leurs déclarations-mêmes, le réalisateur et la production du film sont ambigus sur les influences réelles qu'ont eu les œuvres Lem et Tarkovski sur Soderbergh : d'un côté, les commentaires issus de la production du film avancent que le film est exclusivement « inspiré du livre de Stanislas Lem »[101], et d'un autre, dans certaines interviews, Soderbergh affirme que son film est une adaptation de celui de Tarkovski[102].
C'est pourquoi les analyses des observateurs peuvent diverger du tout au tout, ce qui ne permet d'avancer que des hypothèses. Si pour l'auteur scientifique et critique de la science-fiction, Gary Westfahl, « le producteur James Cameron et le réalisateur Soderbergh […] étaient apparemment plus intéressé à refaire Tarkovski que de filmer Lem. »[103], pour Télérama, ayant « adapt[é] Solaris, de Stanisław Lem, [Soderbergh] fait à peine un film de science-fiction, et encore moins un remake du chef-d'œuvre, aujourd'hui « canonisé » [d']Andrei Tarkovski […] »[104].
Comparaisons avec le roman de Lem
Le Solaris de Soderbergh s'inscrit dans la lignée du roman de Stanisław Lem. Ainsi, de nombreuses scènes s'inspirent de ce dernier : comme dans le livre, Rheya-Harey a conscience de sa propre nature, Chris tente de la tuer à leur première rencontre ; de même, Soderbergh reconnaît avoir gardé intégralement la scène « où Gibarian […] rend visite à Kelvin dans son rêve. Et elle est intégralement tirée du livre[105]. » De même, Soderbergh affirme que la scène où Gordon plaide devant Chris pour la destruction de Rheya est largement inspirée par le livre de Lem[106].
Une première différence entre les deux œuvres apparaît dans la composition de l'équipage de la station voguant au large de la planète-océan : chez Lem, sont présents Snaut qui est cybernéticien et Sartorius qui est physicien ; chez Soderbergh, ces deux personnages sont respectivement remplacés par Gordon[107], médecin de l'équipage, et Snow, informaticien de bord. Il est à noter que Soderbergh introduit une femme noire (Gordon), ce qui, selon certains chercheurs n'est pas neutre et induit de nouvelles relations avec le visiteur de Chris Kelvin[108]. De même, concernant le statut de ces personnages, si le héros (Kris Kelvin) est un chercheur respecté en « solaristique »[Note 5] chez Lem, ce même héros (devenu Chris Kelvin) occupe l'emploi de psychologue.
Néanmoins, les différences entre les deux œuvres sont plus profondes et tiennent à leur finalité respectives : chez Lem, il s'agit de présenter un homme, et partant l'Humanité entière, placé face à une intelligence extraterrestre qui le dépasse[98] et avec laquelle il est difficile, voire impossible de communiquer[109],[110] ; chez Soderbergh, il s'agit plutôt de raconter une histoire d'amour[100]. Stanisław Lem a bien compris cette différence de parti-pris de la part de Soderbergh et le fait savoir lors de la sortie du film en 2002 : « Autant que je le sache, le livre n'était pas consacré aux problèmes érotiques de personnes dans l'espace. »[111]
Face à cet objectif, la description et l'étude de la planète-océan Solaris sont fondamentales et développées dans le roman de Lem qui énonce ainsi l'intérêt d'une telle description : « La vision de la planète Solaris était très importante pour moi. Pourquoi cela était-il important ? Le globe solarien n'était pas seulement une sphère entourée de gelée - il était un être vivant (même s'il n'était pas humain). Il ne construit ni ne crée rien qui puisse être traduit dans notre langage. »[112]. La solaristique constitue donc une branche scientifique à part entière[113]. À l'inverse, chez Soderbergh, ces descriptions et étude sont anecdotiques, la « solaristique » n'étant que très brièvement évoquée lors d'un flashback par Gibarian devant Chris, celui-ci s'en désintéressant rapidement, étant plutôt captivé par l'apparition de Rheya.
De même, si la planète-océan n'est qu'aperçue, de loin en loin chez Soderbergh, comme faisant partie du décor, elle est longuement décrite dans le roman de Lem. Ainsi ce dernier y dépeint-il longuement les formations visibles à la surface de l'océan, en particulier ce qu'il nomme les « arbres-montagnes » (« longus », « fongosités », « mimoïdes », « symétriades » et « asymétriades », « vertébridés » et autres « agilus »[114]). La représentation même de la planète est différente entre le roman (et le film de Tarkovski) où celle-ci est décrite comme un océan alors que Soderbergh décide d'en donner une représentation se situant entre une étoile et ce que serait un cerveau[115].
Si cet océan est présenté chez Lem comme une entité vivante possédant une certaine forme d'intelligence[116], ce questionnement est absent du film de Soderbergh[117].
Chez Lem, l'explication de la présence de ces apparitions fait l'objet d'une hypothèse : il s'agirait d'une tentative de communication de la part de la planète, ou, comme le dit Pascal Robert, « […] l'une des tentatives [de communication de la part de la planète] — du moins est-ce l'hypothèse avancée — prend la forme d'une femme aimée autrefois et morte depuis […]. »[118]. Or, dans le film de Soderbergh, une telle hypothèse est inexistante[119],[117].
Néanmoins, à ce propos, il existe tout de même un point commun aux deux œuvres : la planète-océan est rendue responsable de la présence des entités dans la station spatiale aussi bien chez Lem[120] que chez Soderbergh[121]
Le roman est donc communément présenté comme contenant une multiplicité de thèmes et de réflexions que l'on ne retrouve pas dans le film de Soderberg[117] : les avancées de la « solaristique »[122], un cadre scientifique omniprésent, la frustration humaine de ne pouvoir communiquer avec cette planète qui paraît si vivante[123], la nécessité qu'ont les humains, pour ce faire, de se connaître eux-mêmes[124], la richesse de la description de ces entités qu'envoie la planète… De fait, il s'agit d'un parti-pris expressément revendiqué par Soderbergh : il choisit d'éliminer tout le questionnement théorique, scientifique ou philosophique qui était présent chez Lem afin de s'ancrer tout à fait du côté de l'émotion[125].
Comparaisons avec le film de Tarkovski
Dans son film, Andreï Tarkovski emprunte une autre voie que Stanisław Lem. Le roman traite de la rencontre de l'Humanité avec une intelligence qui la dépasse[98]. Tarkovski, différemment, « pose la question du pouvoir de l'esprit et de ses limites »[99]. Soderbergh, quant à lui, centre son film sur une histoire d'amour[100].
Néanmoins, parce qu'ils utilisent le même support, il est aisé de comparer les deux films.
Esthétiquement d'abord, les deux réalisateurs proposent une vision commune de la représentation de la Terre ; il s'agit d'un lieu où dominent la pluie et le froid, métaphore de la tristesse qu'elle héberge[126]. Les effets spéciaux sont rares et ne constituent pas l'intérêt premier du film de Tarkovski (qui « repose sur un appareillage futuriste minimal. »[127]) ni de celui de Sodebergh (ce qui conduira même un critique à le qualifier d'« antispectaculaire »[128].)
Les jeux de lumière sont aussi similaires : contrastes et oppositions de couleurs et de tonalités chez Soderbergh (gris pour la Terre, blanc et couleurs pour la station et Solaris)[129],[130], passage d'une image en couleurs à une autre en noir et blanc chez Tarkovski[131]. Il existe chez les deux réalisateurs une même volonté d'associer fortement l'image à l'émotion[33]. De même, Soderbergh n'hésite pas à utiliser des procédés techniques développés par Tarkovski dans son film. Ainsi, lors de la résurrection de Rheya (après son suicide sur la station Prometheus), Soderbergh fait jouer la scène à l'envers puis fait dérouler le film lui-même à l'envers, ce qui laisse voir des mouvements étranges des corps[132], tout comme l'avait fait Tarkovski. Dès lors, il serait possible de conclure que Soderbergh s'est fortement appuyé sur le film de Tarkovski en ce qui concerne l'aspect visuel du film ainsi que les effets temporels qu'il lui confère.
Par ailleurs, les deux films se caractérisent par la même lenteur méditative, la même réflexion psychologique qui en font des films lents et méditatifs : le film de Soderbergh n'offre « pas d'accélérations intempestives de l'action, peu de coups de théâtre »[133], tandis que celui de Tarkovski est empreint de « lenteur » aux antipodes des « effets spéciaux […] de Star Wars de Georges Lucas »[134].
Contribuant à donner aux films leur lenteur méditative et mystérieuse[135],[136], les bandes originales des deux films utilisent les mêmes effets sonores. Union d'une musique aux instruments classiques et d'une musique électronique, elles sont composées respectivement par Edouard Artemiev[137] et Cliff Martinez[65].
Pourtant, ici aussi, des différences fondamentales inscrivent les deux films dans deux finalités différentes. Le but de Tarkovski est de mettre l'Humanité face à elle-même et face à ce qui la dépasse, c'est-à-dire sa propre Vérité (que l'on doit comprendre au niveau individuel comme l'impossibilité de la connaissance de son intimité)[138] et la Nature[139]. Soderbergh le reconnaît puisqu'il indique que « la différence la plus importante entre les deux films, c'est que, dans [sa] version, on voit la relation sur Terre entre Chris Kelvin (George Clooney) et sa femme Rheya (Natascha McElhone). Comme ce passé n'est pas montré dans le film de Tarkovski (ni, d'ailleurs, dans le livre), le personnage féminin semble beaucoup plus abstrait. Alors qu['il] voulai[t] que la relation de Chris et Rheya soit au cœur du film. »[140]. C'est ainsi que les deux films sont construits bien différemment. Soderbergh insère des flashbacks alors que Tarkovski propose deux parties distinctes[141] (la Terre avant le départ de Kris vers Solaris[Note 6], puis la vie à bord de la station - sans compter le retour ambigu sur Terre). Chez Tarkovski, ce découpage permet de faire apparaître des éléments absents chez Soderbergh : un rapport prégnant à la nature, dès les premières secondes du film, et qui se poursuit tout au long du film[142]. Car la nature constitue le seul lien qui semble opérant entre l'Homme et Solaris[143].
Chez Tarkovski, la « solaristique » est importante car elle permet de placer la Nature au centre des mystères auxquels l'Homme est confronté[144]. Il ne reste plus qu'à ce dernier à les accepter afin de pouvoir vivre en paix[145].
Bien que proposant une fin commune (Kris/Chris vivent l'illusion de continuer une vie désirée mais en restant à proximité de Solaris[146]), c'est l'approche philosophique qui distingue les deux films. C'est l'Homme face à la Nature et à lui-même que nous propose Tarkovski[147], tandis que Soderbergh met en scène un questionnement sur l'amour et la perte de l'autre.
Ainsi, en cohérence avec la finalité de son film (le pouvoir de l'esprit et de ses limites), Tarkovski met en scène un Kris Kelvin qui effectue une démarche initiatique vers cette vérité[148] : sa contemplation de la nature, ses gestes lorsqu'il choisit de rejoindre Solaris (le fait de brûler ses papiers, par exemple, comme on expulse une identité passée). C'est ce qui le conduit finalement à accepter de quitter Harey[149].
Au contraire, et en cohérence avec la finalité de son film (raconter une histoire d'amour), Soderbergh présente un héros qui ne peut se résoudre à abandonner sa femme. Aussi, le dénouement du film peut sembler heureux : le héros retourne chez lui et là, il la retrouve[150]. Mais il doit en payer le prix, car, non seulement Chris Kelvin ne sort pas du simulacre[151], mais devient lui-même une composante de ce simulacre (le fait que la blessure au doigt de Chris se soigne comme par magie tend à prouver que Chris est en fait sur Solaris et non sur Terre)[152].
Approche de Soderbergh
Le Solaris de Soderbergh est un « lent psychodrame méditatif » sur une histoire d'amour[100]. C'est cette voie originale que revendique explicitement le réalisateur[Note 7],[153]. Ainsi, le film pose-t-il la question de l'amour vrai ; celui-ci ne finit-il pas par emprisonner l'autre dans le désir et le souvenir ? Ne finit-il pas par annihiler la personnalité propre de cet autre pour une personnalité fantasmée, reconstruite, irréelle[154] ? Et soi-même, n'est-on pas que dépendance vis-à-vis de l'être aimé[155] ? Au sortir de ce drame, le héros ne vit plus que dans son rêve, un rêve proche de l'éternel recommencement et dont seule la mort peut l'en sortir[156]. Ces questionnements ne sont qu'anecdotiques dans le roman de Lem et le film de Tarkovski[Note 8], c'est l'une des raisons qui ont fait que ce film intellectuel a pris à contre-pied le milieu du cinéma américain (et Lem lui-même, mais pour d'autres raisons). Un des liens entre le roman et son adaptation par Tarkovski tient à leur environnement politique. Créés pendant la période communiste, en Pologne pour l'un et en URSS pour l'autre, le film et le roman constituent aussi une critique voilée du système productiviste soviétique[157], que l'Américain Soderbergh ignore.
Chez Soderbergh donc, pas d'expérience pour mieux connaître la planète-océan[117], voire interagir avec elle (à part le constat par Gibarian, lors d'un flashback, que la planète soulève beaucoup de questions), juste le constat que les personnages de la station sont en danger car subissant l'apparition des êtres habitant leurs rêves. Pas ou peu de questionnements sur l'humanité de ces êtres. Chez Soderbergh, cela est tranché par Gordon qui assène à Kelvin, comme une vérité établie : « C'est une copie. Un faux-semblant qui est en train de vous faire le coup du revenez-y ! » C'est ainsi qu'elle conclut : « On est dans une situation qui dépasse la morale. »[158]. Dans ce cadre, Chris Kelvin ne peut être entendu, ne parvenant que faiblement à contredire sa partenaire et s'enfonçant donc dans le déni[159].
C'est ainsi que, quoi que proposant une fin proche du film de Tarkovski (Kelvin qui choisit de ne pas repartir sur Terre[160]), le Solaris de Soderbergh contient un but différent. Au lieu d'un homme ayant trouvé une paix quasi mystique[161], c'est un Kelvin toujours enfermé dans son rêve de revivre avec Rheya[162], et donc incapable de sortir de ses traumas[163] qui est proposé par Soderbergh.
Références cinématographiques
Soderbergh s'est toujours déclaré inspiré par plusieurs réalisateurs, américains ou non[164]. Dans le cas de Solaris, ces références apparaissent dans le choix d'un thème (l'aventure spatiale) mais aussi dans les partis pris esthétiques. Ce sont donc les noms de James Cameron (co-créateur du film), Ridley Scott[165] et Stanley Kubrick qui viennent à l'esprit. Mais aussi Jean-Luc Godard, avec son film de science-fiction Alphaville, une étrange aventure de Lemmy Caution (1965) dans lequel un personnage est également envoyé, seul, régler un problème survenu sur une base située à des années-lumière de la Terre[166].
De l'aveu même de Soderbergh, après la version de Tarkovski, la source d'inspiration la plus importante pour son film demeure 2001, l'Odyssée de l'espace de Stanley Kubrick[167]. Tant dans l'aspect visuel (conception des éléments spatiaux[168], arrimage du vaisseau à la station orbitale[169]…) que sonore (la bande originale veut donner la même impression éthérée[170], irréelle, la plus expressive possible) que dans la vision méditative et complexe d'un futur extérieur à la Terre, 2001 est constamment évoqué.
Références littéraires
Solaris renvoie à des références littéraires anciennes. En effet, le film évoque le mythe grec d'Orphée et Eurydice[171], traitant de la perte de l'autre, du deuil et de l'incapacité de dépasser ce deuil. Orphée, inconsolable de la mort de sa femme Eurydice, parvient à la rejoindre dans les Enfers. Là, il réussit à convaincre Hadès, dieu et gardien des morts, de le laisser repartir avec Eurydice. Hadès consent, à la seule condition qu'Orphée ne se retourne pas pour voir sa femme. Malgré sa promesse, Orphée se retourne et Eurydice est renvoyée dans les enfers. Orphée, de nouveau inconsolable se suicide. Ce mythe est évoqué, retourné, bousculé, renversé dans Solaris[171]. Il s'agit d'une inversion totale, d'abord lorsque Chris rejette la première « entité » Rheya dans l'espace[172]. Autre inversion ensuite, lorsque Chris choisit à la fin du film de rester dans la station spatiale avec Rheya, tel un Orphée qui aurait choisi de rejoindre son Eurydice dans les enfers plutôt que de l'en sortir[171]. Enfin, plus conformément au mythe, lorsque, à Rheya qui lui demande qui elle est, Chris ne peut que répondre : « Tout ce que je vois, c'est toi. », ce qui lui est pourtant interdit et les perdra tous les deux.
Tout au long du film, Chris se trouve donc dans un état d'entre-deux, n'ayant pas encore plongé dans la mort mais n'étant plus du côté de la vie : ainsi, dans les derniers mots qu'il échange avec Rheya, au moment de la destruction de la station spatiale dans laquelle ils se trouvent, Chris montre qu'il est incapable de se situer entre ces deux issues[159]. À la question de Chris, « Je suis vivant ou je suis mort ? », la réponse de Rheya tombe, énigmatique, si ce n'est pour le héros, en tous cas pour le spectateur, « On n'a plus à penser en ces termes-là. On est ensemble. Tout ce que nous avons fait est pardonné. Tout. » Seule la citation du poète gallois Dylan Thomas, répétée comme un leitmotiv, « And death shall have no dominion »[Note 9] (titre d'un poème datant de 1933, que l'on peut traduire par « Et la mort n'aura pas d'empire. »), pourrait éventuellement éclairer cette réponse de Rheya ; chaque pensée et chaque geste des personnages serait le moyen de satisfaire ce désir ardent de transcender la mort[173].
Références mythologiques
Le film renvoie aussi au mythe de Prométhée, à travers le nom de la station spatiale, Prometheus[174]. Dans ce mythe, Prométhée est un Titan qui crée les hommes à partir de la boue. Mais il est surtout coupable, aux yeux des dieux, de leur avoir volé le feu sacré de l'Olympe, représentation du « savoir divin », puis de l'avoir communiqué aux humains. En guise de punition, Zeus, le roi des dieux, le condamne alors à être attaché à un rocher et à voir son foie dévoré durant la journée par un aigle. Ce supplice est sans fin puisque son foie se reconstitue durant la nuit. Or, comme dans le mythe, la station spatiale est le lieu de création d'entités (plus ou moins) humaines. Elle est le lieu de l'éternel recommencement, comme l'atteste le retour incessant des entités. Enfin, elle est le lieu où une part du savoir divin, à savoir la création de cette flamme qu'est la vie, est exposée à l'Homme. On comprend dès lors pourquoi la station Prometheus ne pouvait qu'être détruite à la fin du film.
L'homme et la mémoire
La question centrale du film est le rapport de l'Homme à sa mémoire, rapport qui fonderait et participerait de sa personnalité profonde[Note 10].
Cette question de l'absence et de la perte[175], conduisant l'amour de Chris pour Rheya à tourner en rond et à finir par ne plus se porter que sur lui-même[176], apparaît dès les premières images où l'on voit Chris écouter Rheya qui lui parle d'une voix éthérée, comme si elle avait déjà disparu[177].
Le film évoque ainsi les questionnements soulevés dans le film Théorème de Pier Paolo Pasolini, datant de 1968, où le souvenir d'un mystérieux personnage provoque des réactions proches de la folie au sein d'une famille dans laquelle il a séjourné avant de disparaître[178],[Note 11].
De fait, le problème de Chris n'est pas tant l'amour qu'il porte à Rheya que, finalement, l'amour du souvenir[179], comme s'il ne faisait que se replier en boucle sur lui-même. Finalement, le film interroge sur la réalité de « l'Autre » : l'Autre a-t-il une réalité par lui-même ou n'est-il qu'une correspondance, une reconstruction, une projection d'un souvenir, d'un phantasme de notre part sur lui[180] ? Solaris questionne donc sur l'altérité, concept philosophique créé par Emmanuel Levinas[181], qui se définit comme la reconnaissance de l’autre dans sa différence. « L'Autre » du Chris de Solaris ne constitue qu'une incarnation en autrui de ses propres doutes, ses peurs et ses regrets[182].
La création artistique
D'aucuns ont vu le film comme le questionnement d'un artiste sur la création artistique en général et sur la création cinématographique en particulier[183]. En effet, il est facile d'associer la planète-océan Solaris qui projette des « entités » (projections de souvenirs d'êtres ayant existé) et les entreprises de la création artistique qui proposent une recréation et réinterprétation du monde[184].
La présence des « entités » envoyées par la planète Solaris renvoie aussi au thème de la « copie » que développe Platon dans son allégorie de la caverne, exposée dans le Livre VII de La République[185]. L'œuvre décrit en termes imagés les conditions d'accession de l'Homme à la connaissance de la réalité, ainsi que la non moins difficile transmission de cette connaissance[186]. Solaris renvoie également au livre Le Sophiste du même Platon : dans celui-ci, le philosophe évoque « la bonne copie » qu'il oppose à « la mauvaise copie » à propos de la parole du sophiste. Cela concerne les réactions de Chris face à l'apparition de Rheya lorsqu'il réalise qu'elle n'est que la copie de quelqu'un qui n'existe plus[187] ?
Le film fait donc écho au questionnement soulevé dans ses essais par Jean Baudrillard (et dans sa critique très dure sur la société actuelle du spectacle) portant sur l'original et la copie puis sur la distinction entre la simulation (faire comme le monde) et le simulacre (la simulation de la simulation)[188]. Dans le film, cela se traduit d'abord par la question suivante : quand l'entité Rheya cesse-elle d’être simulation pour devenir simulacre[189],[Note 12] ? Chris y répond à sa manière : c'est en faisant de la réalité elle-même un simulacre qu'il pourra rester avec Rheya[190]. Bien plus, et cela constitue le dernier paradoxe du film, Soderbergh compte-t-il sur l'acceptation par le spectateur lui-même de l'abolition de la réalité en faveur de la simulation pour achever Solaris[191].
Le grand paradoxe du film réside dans sa thématique de la place de la copie de la réalité ; le film est une copie (un remake), parlant de la copie (les entités). Solaris porte en lui une confusion entre le thème qu'il développe, le retour incarné du souvenir, et son statut de remake d'un film lui-même transposition d'une œuvre littéraire. Le film nous propose alors une mise en abyme ayant pour thème la création dans la création[192]. Cette mise en abyme se prolonge jusqu'aux acteurs eux-mêmes, et notamment Natascha McElhone, qui sont des êtres jouant le rôle d'autres êtres et, qui plus est concernant Rheya, duplication de ce personnage[193], eux-mêmes recréation de personnages d'un film original (le Solaris de Tarkovski), et eux-mêmes interprétations de personnages d'un livre (le Solaris de Lem).
Notes et références
Notes
- Lorsque Chris constate, sans marquer d'émotion particulière, la mort de Gibarian, le dernier lien concret avec sa vie antérieure disparaît ; la copie de Rheya peut intervenir sans que l'esprit de Chris ne puisse offrir de véritable résistance.
- Ce qui vient en contradiction avec les réalités physiques, une planète étant communément définie comme un corps céleste ne produisant pas de lumière par lui-même.
- Moyenne réalisée pour 22 titres de presse.
- Un exemple de la réinterprétation de l'œuvre de Tarkovski selon une vision qui serait proprement américaine apparaîtrait dans les choix des personnages. Ainsi, selon Steven Dillon, « Soderbergh, […] modifie significativement la composition de l'équipage. […] [I]l remplace le Dr Snauth, un homme blanc, par le Dr Gordon, une femme noire. Contrairement à ce qu'il paraît pour le personnage d'Uhura dans Star Trek, dans un tel équipage de taille réduite, le choix du nouveau Dr Gordon ne constitue pas un geste symbolique. La nouvelle distribution artistique complique, en effet, les relations de l'équipage avec l'entité, et le Dr Gordon elle-même commente en toute conscience son statut social. » (« Soderbergh, however, significantly alters the composition of the crew. […] [H]e makes Dr. Snauth, a white male, into Dr. Gordon, a black woman. In such a small crew, this casting of the new Dr. Gordon is not a gesture of tokenism, as it seems to be for a character like Star Trek's Uhuru. On the contrary, this recasting powerfully complicates the crew's relationship to the alien, and Dr. Gordon herself comments self-consciously on her social status. » Dillon 2006, p. 42).
- On désigne ainsi la discipline concernant l'étude de la planète-océan Solaris, longuement décrite dans le roman.
- Partie au cours de laquelle le professeur Burton, témoignant de sa visite de Solaris, fait une longue présentation de la planète.
- Rappelons le parti-pris annoncé par Soderbergh : « Je voulais que la relation de Chris et Rheya soit au cœur du film. »
- Notons tout de même l'encouragement de la part du romancier adressé à Soderbergh : « I found it interesting that although my book is quite old - almost half a century means a lot in present times - someone wanted to take the risk despite the fact that the plot did not meet the above mentioned » (« J'ai trouvé intéressant, bien que mon livre soit assez vieux — la durée d'un demi-siècle signifie beaucoup dans les temps présents — que quelqu'un veuille prendre le risque [de l'adapter], malgré le fait que l'intrigue ne réponde pas [à mes indications] ») (article de Lem à propos du film).
- C'est le réalisateur Mike Nichols qui a proposé à Steven Soderbergh le choix de ce poème : « Je remercie Mike Nichols au générique parce que je lui ai envoyé un e-mail en lui disant qu'il me fallait un poème romantique sur la mort et qu'il m'a répondu en me suggérant d'utiliser ce poème de Dylan Thomas. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 50 min 50 s).
- Pour plus d'informations sur ce sujet, un long développement est offert par Douglas McFarland 2010 qui conduit son intervention intitulée The philosophy of space and memory in Solaris dans l'ouvrage The philosophy of Steven Soderbergh sous la direction de R. Barton. La sous-partie Recollection and Repetition y développe plus précisément ce point de vue sur la mémoire.
- Pour plus d'informations sur ce sujet, un long développement est offert par Douglas McFarland 2010 dans le chapitre intitulé Modernity and the Philosophy of Eros (page 268) où il fait le lien entre la philosophie platonicienne, le film Théorème de Pier Paolo Pasolini et Solaris. Ce lien tiendrait selon l'auteur à la place offerte à la mémoire en tant que constitutive de l'identité.
- Il s'agit là d'un questionnement proche de celui que se posait déjà Jean Baudrillard dans son essai Simulacre et simulation : « De toutes les prothèses qui jalonnent l’histoire du corps, le double est sans doute la plus ancienne. Mais le double n’est justement pas une prothèse : c’est une figure imaginaire qui, telle l’âme, l’ombre, l’image dans le miroir hante le sujet comme son autre, qui fait qu’il est à la fois lui-même et ne se ressemble jamais non plus, qui le hante comme une mort subtile et toujours conjurée. Pas toujours cependant : quand le double se matérialise, quand il devient visible, il signifie une mort imminente. » (in Jean Baudrillard, Simulacre et simulation, Paris, Éditions Gallilée, 1981, p. 143), à cette nuance près que, dans le film, le double ne hante pas son original (Rheya) mais son conjoint (Chris).
Références
- « On Earth Rheya commits suicide after Kelvin leaves her » Moses 2010, p. 290.
- « She is Other as alien, but also a woman » Dillon 2006, p. 42.
- « […] the manifest reason for a failed marriage is Rheya's fear of abandonment […] » Moses 2010, p. 290.
- « Rheya realizes that she is a copy and that her identity is based exclusively on Chris's memory of Rheya. She recognizes, in short, that she lacks authenticity » Douglas McFarland 2010, p. 276.
- « Gordon is the exception, and she is initially unwilling go meet face to face with Kelvin, preferring to talk from behind the locked door of her cabin » Moses 2010, p. 296.
- « […] the crew exhibits an increasing paranoia that manifests itself in their need to keep watch over each other (Gordon provides the clearest case of this psychological malady) » Moses 2010, p. 297.
- « Soderbergh goes on to suggest that Gordon "may be right. It [Solaris] may just be playing with them, out of curiosity, without any real motive other than to learn how human beings react." » Moses 2010, p. 292.
- (en) Dates de sortie sur l’Internet Movie Database.
- « Secrets de tournage », sur Allociné (consulté le ).
- urbancinefile.
- « " Jim knows narrative backwards and forwards, " says Soderbergh respectfully. " He really understands how to set up and pay off a story. I would meet with him about Solaris and we would have three-hour conversations about the story, about technology, about what the future is going to be like, about space travel, and issues like isolation and sensory deprivation, because he’s studied all of it. I would tape our conversations and transcribe them and highlight things that I thought could find their way into the film, whether it was a sentence or an idea – anything I thought might stick " » urbancinefile.
- « I told them I had an idea of how to do this, but I wanted to write the screenplay on spec ; I didn’t want to make a deal to do it. I explained my approach and what I wanted to focus on and the ways in which I thought it would be different from the book and different from Tarkovsky’s movie. » urbancinefile
- Steven Soderbergh : « Tu le sais, mais beaucoup l'ignorent, le scénario faisait 75 pages, soit 20 ou 35 pages de moins que la moyenne. Je l'ai déjà dit : le rythme du film est tel que le film a une longueur normale, mais je voulais un coussin de sécurité. » James Cameron : « Tu voulais pouvoir, sur le plateau, composer tes plans avec le rythme qui te convenait. T'attarder sur certains plans, jouer avec le contexte. […] Avec un scénario de 120 pages, tu aurais sans arrêt dû le rogner. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 h 13 min 45 s).
- « Although the casting of Clooney may seem inevitable, given the relationship between the director and the star (they run the production company Section Eight), it didn’t really happen like that. In fact, it was Clooney who all but lobbied Soderbergh to let him play the part, which is very different from anything he has done before » urbancinefile.
- « Soderbergh, meanwhile, found himself looking at a whole new George Clooney. “When you see somebody that you know well and that you’ve worked with do something that surprises you almost every day, it’s pretty thrilling,” he says. “George would keep pushing his performance and taking it further. I live for working with actors, so watching that was incredibly exciting. His complete willingness to jump off a cliff every day was inspiring.” » urbancinefile.
- Steven Soderbergh : « George a dit « Il faudrait un indice comme quoi il n'est pas sur Terre. S'il se coupait le doigt ? » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 h 23 min 15 s).
- Pour Natasha McElhone, Viola Davis et Ulrich Tukur, voir sur la page Secrets de tournage, du site allocine.fr.
- « For the role of Rheya, Soderbergh found himself thinking back to an early performance by an actress who has gone on to become a Hollywood star: British-born Natascha McElhone. The film he remembered was James Ivory’s Surviving Picasso, in which McElhone plays the painter’s mistreated lover, Françoise, mother of Paloma. “She reminded me of the great European actresses of the sixties and seventies, like Jeanne Moreau and Dominique Sanda,” he says. “They were smart, sexy, complicated women. Not girls – women.” » urbancinefile.
- « Je savais que ce serait Jeremy, j'admirais son travail mais ce qui m'a convaincu de le vouloir dans le film, c'est une cassette faite avec les moyens du bord où il imite Charles Manson pour décrocher un rôle. […] Mais le projet ne s'est pas fait […] Il s'était procuré des discours de Manson et improvisait aussi pas mal. C'était si bon que j'ai dit : « Il nous faut ce type. » Certains éléments transparaissent dans son interprétation de Snow. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 12 min 45 s).
- Commentaires audio du film (Minutage DVD : 53 h 15).
- (en) Philip Messina sur l’Internet Movie Database.
- « The set was a two-story construction measuring 150 by 220 feet » Hanson 2005, p. 97.
- « To illicit this sense of realism, Soderbergh and Messina decided to develop the interior and exterior forms of Prometheus based on the International Space Station » Hanson 2005, p. 97.
- « […] based on the International Space Station, devising a more industrial, hi-tech, steel and composites look […] » Hanson 2005, p. 97.
- « Exteriors were all done using Cinesite created 3D models of the Prometheus and Athena spacecrafts » Hanson 2005, p. 97.
- Voir l’article sur le site postmagazine.com qui en décrit le travail.
- « « I'm not interested in making a film about what technology is going to be like a few decades from now, » Soderbergh stressed about the project. His motivation was more to create an off-world experience designed to give the viewer an off-kilter experience to parallel protagonist Dr Chris Kelvin's. » Hanson 2005, p. 97.
- « The emotional intensity and oppressive ambience of the movie was emphasized by Messina's creation of claustrophobic, true-to-life interiors that conserved space just like the real thing. The lack of portals and limited headroom strengthens this sens of entrapment. » Hanson 2005, p. 97.
- Steven Soderbergh : « Ça peut paraître étrange, mais ce film a été tourné en très peu de temps. On a commencé à tourner en avril, le film est sorti en . C'était du rapide. Le tournage a duré 43 jours pour les images 1re équipe, et 4 jours pour les prises supplémentaires. »Commentaires audio du film (Minutage DVD : 50 min).
- James Cameron : « Tu as d'abord tourné les scènes de leur relation passée pour qu'ils s'en inspirent pour jouer celles du présent sur Prométhée ? » Steven Soderbergh : « Au moment du planning, c'est ce qui semblait logique. Mais le vaisseau et la zone d'amarrage n'étaient pas finis. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 50 min).
- « Tout le film, mis en scène avec une élégance millimétrée, tend vers une épure à la fois dramatique et visuelle » Loiseau 2003.
- « Though by no means a commercial success upon its initial release, solaris marks one of soderbergh's most aesthetically successful attempts at fusing cinematic form and content. In his remake of Tarkovshy's classic […], Soderbergh found a conceit that concretely figures the hypperreality of our contemporary postmordern existence : the sentient planet » Moses 2010, p. 287.
- « Soderbergh has used enormous restraint with dialogue and rhythm, color and sound. In so doing, he has created a beautifully textural, multilayered 'in-between' space, where the viewer can explore deep questions of reality and the construction of themselves in and through their most intimate relationships and desires » Zanardo 2011, p. 64.
- Steven Soderbergh : « Je sais que cette version du film est différente de celle que tu aurais réalisée toi. Le décor est minimaliste. […] Cela t'inquiétait que je puisse faire quelque chose d'aussi dépouillé ? » James Cameron : « Tu as toujours parlé de minimalisme pour reprendre ton terme, et tu as dit que tu t'attacherais à la psychologie des personnages. Tu voulais que la profondeur du film réside dans les personnages eux-mêmes. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 min).
- « Rhythm & Hues, along with artist Richard "Doc" Baily, were responsible for creating elements making up the planet Solaris, which appears in 37 of the shots. » Doyle 2002.
- (en) Richard 'Dr.' Baily sur l’Internet Movie Database
- « "Solaris presented a really interesting problem. This planet is alive, and it needed to be characterized by complex, psychedelic light effects," Baily says. "[The software called] Spore, which I wrote for the fine-art projects I am creating at my company, specifically handles both advanced particle work and light effects. With it, I can easily render a scene containing at least 500 million points of light per frame. » Doyle 2002.
- « "Thus, I can create images that possess a rare quality of photographic light, and appear to be self-illuminating." » Doyle 2002.
- « We're creating the seven stages of the planet's look that you see throughout the film by layering Doc's elements, and portions of the elements, on top of each other to create very interesting imagery. » Doyle 2002.
- « Baily supplied Rhythm & Hues with approximately 60,000 frames of atmospheric elements. » Doyle 2002.
- Steven Soderbergh : « On a décomposé ce changement en six étapes. D'abord, la couleur change, puis l'activité à la surface change à son tour : les espèces de vrilles qui l'entourent deviennent plus proéminentes. Ceux qui regardent avec le doigt sur « avance rapide » s'en rendront compte. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 34 min 50 s).
- James Cameron : « Solaris vire au rouge. » Steven Soderbergh : « Elle est en train de s'énerver. » James Cameron : « Ou bien elle s'intéresse. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 h 6 min 25 s).
- « "At the beginning of the movie these elements move in a gentle and subtle way because the planet is in a calm state. But as the movie progresses they become denser and appear increasingly agitated and emotional" » Doyle 2002.
- « Thus, the mournful tones, gloomy palette, and various narratives of loss in solaris are woven together into a complex tapestry of trauma, one that both the detective and the viewer are charged with unravelling » deWaard 2013, p. 90.
- « In Solaris, all of the scenes on Earth are rendered in gloomy sepia tones, whiles the rain which accompanies all of his actions reflects Kelvin's (George Clooney) bleak outlook » deWaard 2013, p. 91.
- James Cameron, commentant la découverte de l'intérieur de la station Prometheus par Chris : « J'adore les nuances. Les seuls éléments humains sont ses mains et son visage. Le reste est dans des tons froids : gris, gris-bleu ou gris-vert. Ça donne une impression aseptisée. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 10 min 10 s).
- « The extended sequence in which kelvin's space ship docks with the orbiting space station Propetheus, close-up shots of Kelvin's face behind the mask of his helmet that capture the multicolored reflections on its transparent surface, or the sudden appearance of an otherworldly manifestation (Rheya) next to Kelvin's bed when he awakens, all gesture in form or content toward Kubrick's science fiction epic » Douglas McFarland 2010, p. 283.
- Steven Soderbergh : « Il y avait aussi une séquence où on l'[Rheya]examinait au labo et où tout indiquait qu'elle était constituée de la même chose que les humains. On a fini par les enlever parce que je trouvais qu'on déviait trop vers un film de monstres typiquement science-fiction. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 h 0).
- (en) Larry Blake sur l’Internet Movie Database.
- Commentaires audio du film (Minutage DVD : 11 min 20 s).
- Commentaires audio du film (Minutage DVD : 11 min 30 s).
- (en) , Solaris Original Score sur AllMusic ()..
- Steven Soderbergh : « J'ai essayé plusieurs musiques sur cette séquence. Certaines étaient étranges, mais pas mal. Je les garde pour d'autres films. » James Cameron : « Tu as failli mettre du Pink Floyd. » Steven Soderbergh : « Oui, ça marchait bien d'ailleurs. […] Mais il y avait le problème des paroles. […] J'avais aussi choisi une chanson de Beck : « Round the Bend ». J'allais l'utiliser mais tu m'as convaincu de préférer une musique originale. Pas seulement parce que Cliff en avait composé une excellente, mais une musique originale garantirait qu'il ne s'agissait pas d'un film de science-fiction d'une autre génération. Au lieu de tout dévoiler à 10 minutes du début, on laissait les choses venir petit à petit. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 7 min 3 ss).
- « L'originalité vient donc ici de l'insertion d'un orchestre symphonique et d'un petit groupe d'instruments à percussion (steel drums, gamelan, célesta) que Martinez n'avait encore jamais vraiment utilisé pour un film de Soderbergh. » Quentin Billard.
- « Reportage : À l'ombre du volcan » [vidéo], sur france3.fr (consulté le ).
- « With the British label Invada having recently re-released the Solaris score on deluxe 180 gm vinyl picture disc » Dangerousminds.
- « - François-Luc Doyez : « Quelle est la BO dont vous êtes le plus fier ? » - Cliff Martinez : « Celle de Solaris, la seule que je peux encore supporter. J’en connais chaque seconde, chaque note… C’est difficile de savoir ce qu’un film donnerait sans la musique, mais j’ai l’impression que celle de Solaris joue un vrai rôle dans le film, qu’elle apporte une réelle contribution » Doyez 2013.
- « Je comptais sur la musique de Cliff pour me relayer dans la narration. Il y a de longues séquences où personne ne parle et où les indices sont donnés par la musique qui fait écho à d'autres passages du film. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 h 22 min 10 s).
- « Contrary to the earlier films, the soundtrack no longer conveys a clearly identifiable emotion. For example, when Kelvin falls asleep and Rheya appears for the first time, we hear mostly vibraphone and synthesized music stylized in percussionist and rhythmically repetitive fashion. […] When Rheya is eventually tricked into being ejected from the spaceship, orchestral chords proceed in quiet descending manner, yet without any pathos. And once again this scene turns quickly to white noise background sounds rather than allowing for any audible emotion to emerge » Bartkowiak 2010, p. 111.
- « Artemev's electronic not-quite-music/not-quite-sound-effects imply a turbulent hurtling through the cosmos in (en) Mark Bould, Solaris, New York, Palgrave Macmillan, , p. 51 ».
- (en) Cliff Martinez– Solaris: Original Motion Picture Score sur Discogs.
- « Celle-ci inclut les gamelans indonésiens, les steel drums tropicaux et le célesta » Quentin Billard.
- « Steven has always liked to make ambient music whenever appropriate, and he wanted something like that for Solaris, but [he] has also wanted the sound of the orchestra, which is unusual because he generally prefers an electronic sound. […] So I had to approach it as an ambient score, but not ambient electronic, an ambient, minimalist, orchestral score » Dangerousminds.
- « The music wasn’t initially intended to be emotional, so this kind of cold and austere music had a life to it that I didn’t really expect. It wasn’t until I heard it on the Fox studio stage that I realized the music had been transformed by this orchestra » Dangerousminds.
- « L'électronique est ici associée au côté surréaliste/science-fiction du film, tandis que la partie orchestrale est plus clairement liée à l'aspect humain du film » Quentin Billard.
- « Coïncidence, le film de Soderbergh rappelle par moment le 2001 de Kubrick, et ce n'est certainement pas un hasard si Kubrick avait déjà utilisé Atmosphères de Ligeti dans son propre film. On pourrait donc penser que c'est en ayant en tête l'atmosphère musicale incomparable du chef-d'œuvre de Stanley Kubrick que Steven Soderbergh a demandé à Cliff Martinez de se rapprocher de Ligeti » Quentin Billard.
- « Pour la BO temporaire, j'ai utilisé Ligeti connu pour les aires dont s'est servi Kubrick dans 2001, l'odyssée de l'espace. Ça rendait bien mais il était un compositeur particulier. Cliff a fait beaucoup de recherches sur ses méthodes de composition. Son utilisation de groupes de notes et d'accords qu'on trouve rarement chez les compositeurs. Il a réussi à recréer ces sonorités. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 h 22 min 10 s).
- « And the two things I really fell in love with that he had used were the work of Giorgi Ligeti and the music of Tangerine Dream, which was very rhythmic. Those two things were the biggest influences […] » Dangerousminds.
- « The composer Cliff Martinez […] follows in Solaris in the tradition of Brian Eno who is credited with the invention of ambient sound with its deliberate sub-audible sound worlds. In the film's sound world, the sound of technology and minimalist musical chords a la Philip Glass mix into a scenic sound that is removed from convertying the emotion of human characters » Bartkowiak 2010, p. 111.
- Glen Levy, « Solaris (2002) / Solyaris (1972) », Time, (lire en ligne, consulté le ).
- (en) Stanisław Lem, « The Solaris Station », sur english.lem.pl, (consulté le ).
- « Lem disliked the film, famusly objecting that Tarkovsky had not adapted his novel but had made crime an Punishment. A second adaptation, by Steven Soderbergh in 2002, likevise bemused Lem, who confided in an interview « Indeed, in Solaris I attempted to present the problem of an encounter in Space with a form of being that in neither human nor humanoid. » with characteristic irony he repudiated the pertinence of love, and especially romance, to his novel : « To my best knowledge, the book was not dedicated to erotic problems of people in outer space […] This is why the book was entitled Solaris and not Love in Outer Space » (Orlinski). Substituting his personal dilemmas of family and love for Lem's cooly intellectual investigation of man's encounter with alterity in the cosmic order, Tarkovsky subordinates the philosophical implications of that confrontation to Chris Kelvin'srelations – ostensibly with his dead wife, who appears as one of the space station's neutrino-based Phi-creatures, but in reality with his parents »Goscilo 2008, p. 258.
- Dufreigne 2003.
- De Bruyn 2003.
- Loiseau 2003.
- Bénabent 2003.
- Péron 2003.
- Père 2003.
- « La sophistication du cinéma de Soderbergh (mal dissimulée par une feinte sobriété) paraît ici terriblement déplacée : le cinéaste se comporte en artificier alors que les enjeux essentiels de Solaris réclamaient une certaine évidence, des choix simples et audacieux. […] En voulant ramener Solaris à une histoire d’amour et de seconde chance — des thèmes bien identifiables et qui tiennent dans un "story-line" —, Soderbergh en a détruit tout le mystère. Soutenu par aucune réflexion morale ni esthétique, Solaris est un remake bâclé et creux, auquel on peine à trouver une raison d’être. » Bénabent 2003.
- « Hélas, les flash-backs romantiques se résument à d’embarrassantes scènes de regards et de phrases sorties d’une pub pour parfum. Les images froides et léchées censées nous plonger dans un futur proche témoignent d’un terrible manque d’inspiration et d’une grande complaisance dans le glacis esthétique. Tout ce qui prétend à l’opacité n’est que flou, tout ce qui se veut complexe n’est qu’embrouillé. Solaris est le prototype du simulacre de film d’auteur, du projet estampillé ambitieux et « difficile » qui n’emprunte à la modernité que ses tics les plus grossiers (Soderbergh a dû réviser son Kubrick et son Boorman illustrés) » Père 2003.
- (en) « Solaris (2002) », Box Office Mojo (consulté le ).
- Steven Soderbergh : « Je crois que les gens ne s'attendaient pas à un film aussi émouvant et dépouillé, sauf quand il s'agit de leur relation. » James Cameron : « Beaucoup de gens ont eu du mal à passer outre ce dépouillement extrême. […] On va à contre-courant. J'aime bien. » Steven Soderbergh : « Mais je pense que les gens avaient besoin d'y être plus préparés. Le fait que le film soit bouclé juste avant la date de sortie aurait peut-être dû nous pousser à demander un délai pour projeter le film, le promouvoir. Les gens auraient eu un avant-goût du film parce qu'il est difficile de le résumer sur une affiche ou dans une bande-annonce. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 51 min 55 s).
- (en) Barry Koltnow, « Solaris is about more than just George Clooney's naked butt », The Seattle Times, The Orange County Register, (lire en ligne, consulté le )
- « Messina's [the production designer and long-time Soderbergh collaborator] approach was that : « Solaris needed to feel real because it is a love story, not a hardware film. Outer space is simply the backdrop » » Hanson 2005, p. 97.
- « Dans cette histoire d'un homme qui est allé aux confins de la galaxie pour se retrouver confronté aux questions qu'il avait toujours évité de se poser, le voyage est tout intérieur. » Loiseau 2003.
- « Je voulais que la vision de Solaris représente la moitié de l'intérêt du film. Et que l'autre moitié provienne des discussions sur les interprétations que l'on peut avoir de l'histoire, en sortant de la salle. Or, en Amérique, le public veut des films qui soient digérés au moment même de leur conclusion. J'espère que l'Europe recevra mieux Solaris. » Loiseau 2003.
- Commentaires audio du film (Minutage DVD : 2 min 30 s).
- Voir sur le site officiel à l'adresse suivante : http://www.wafca.com/awards/2002.htm
- (en) « Solaris Awards », sur IMDb.com, (consulté le ).
- (en) « Saturn Awards », sur IMDb.com, (consulté le ).
- (en) « ours d'or : Solaris en compétition », sur berlinale.de, archives (consulté le ).
- (en) « Black Reel Awards », sur imdb.com (consulté le ).
- (en) « Central Ohio Film Critics Association », sur cofca.org (consulté le ).
- (en) « Irish Film and Television Awards », sur imdb.com (consulté le ).
- Résumé réalisé par l'éditeur français du roman, Gallimard. Voir sur le site http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/Folio/Folio-SF/Solaris
- Résumé réalisé par Lacuve 2006.
- Résumé réalisé par Loiseau 2003.
- « I attempted to present the problem of an encounter in Space with a form of being that is neither human nor humanoid. » Stanislaw Lem.
- « Les intentions du cinéaste dépassent, en effet, largement le cadre fantastique de cet huis-clos spatial. Cette introspection analytique permet de nous interroger sur nous-même et sur nos actes. Sommes-nous libres de nos choix ? Ou bien sommes-nous manipulés et conditionnés par quelque force que ce soit ? » Saule 2009.
- « Je voulais que la relation de Chris et Rheya soit au cœur du film. Je voulais me démarquer de l'aspect strictement idéologique de l'histoire pour la ramener du côté de l'émotion. » Fabre 2002.
- « The credits of Soderbergh's Solaris say that the movie is based on the book by Stanislaw Lem. In interviews Soderbergh has repeatedly said that he adapted the movie from Lem's novel and certainly not from Tarkovsky’s film : one does not remake a cinematic masterpiece. […] For Soderbergh's Solaris is a remake of Tarkovsky’s film, and a much more interesting film if read that way. The screenplay credit that appears on the DVD is more honest. It says based on the novel by Stanislaw Lem and the script by Fridrick Gorenshtein and Andrei Tarkovsky »Dillon 2006, p. 39.
- « - Why did you choose to remake "Solaris" ? - Well, I'm a big fan of Tarkovsky. I think he's an actual poet, which is very rare in the cinema. The fact that he had such an impact with only seven features, I think is a testament to his genius. I really loved the film. I didn't feel his film could be improved upon. I really just had a very different interpretation of the Stanislaw Lem book, which has a lot of ideas in it, enough I think to generate a couple more films. » Pierce 2003.
- « Producer James Cameron and Soderbergh could have but were seemingly more intersted in remaking Tarkovsky than filming Lem. It would be possible for uninitiated audiences to come away with no idea of what is going on at all. » Westfahl 2005, p. 1240.
- « En adaptant un des grands classiques de la science-fiction, Solaris, de Stanisław Lem, le cinéaste fait à peine un film de science-fiction, et encore moins un remake du chef-d'œuvre, aujourd'hui « canonisé », qu'Andrei Tarkovski en avait tiré il y a trente ans. Déclarant que ce livre mythique était comme un test de Rorschach, ouvert à toutes les interprétations, il est allé, en fait, au bout d'une vision très personnelle, qui a tout pour dérouter les amateurs de périples bien balisés. » Loiseau 2003.
- « Il [ne] reste plus qu'une [scène], celle où Gibarian (Ulrich Tukur, un acteur fou avec qui j'ai adoré travailler) rend visite à Kelvin dans son rêve. Et elle est intégralement tirée du livre. » Fabre 2002.
- Steven Soderbergh : « Cette scène est largement inspirée du roman. Le plus gros changement, c'est que le fait que Rheya ait été renvoyée lui est révélé directement. Je trouvais important qu'elle l'apprenne avant les autres. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 55 min 30 s).
- « [Soderbergh] makes Dr. Snauth […] into Dr. Gordon. » Dillon 2006, p. 42
- « Soderbergh, however, significantly alters the composition of the crew. […] [H]e makes Dr. Snauth, a white male, into Dr. Gordon, a black woman. In such a small crew, this casting of the new Dr. Gordon is not a gesture of tokenism, as it seems to be for a character like Star Trek's Uhuru. On the contrary, this recasting powerfully complicates the crew's relationship to the alien, and Dr. Gordon herself comments self-consciously on her social status. » Dillon 2006, p. 42
- « Stanislas Lem a écrit un grand livre […] sur la difficulté qu'il peut y avoir à communiquer […] avec une entité non humaine, une sorte d'océan que l'on est venu à qualifier de vivant et dont on suppose même qu'il est doté d'une forme d'intelligence […] ». Robert 2005, p. 12.
- « [...] Lem pose à travers et dans son roman la question […] de l'incommunication. » Robert 2005.
- « To my best knowledge, the book was not dedicated to erotic problems of people in outer space. » Stanislaw Lem.
- « The vision of the Planet "Solaris" was very important for me. Why was it important? The Solarian globe was not just any sphere surrounded by some jelly - it was an active being (although a non-human one). It neither built nor created anything translatable into our language that could have been "explained in translation". » Stanislaw Lem.
- « Quoi qu'il en soit cet Océan, lui, est bien là, distinct : mais sa forme de vie pose, avec entêtement, la question de ce qu'il est. Des générations de savants vont s'employer à développer une science solariste, à la recherche de récurrences, de constantes, de lois, de types, etc. » Robert 2005, p. 13.
- « Les « arbres-montagnes », les « longus », les « fongosités », les « mimoïdes », « symétriades » et « asymétriades », les « vertébridés » et les « agilus » ont une physionomie terriblement artificielle. » Chauvin 2012.
- Steven Soderbergh : « Ce n'était pas facile de trouver notre propre interprétation de Solaris. Dans le livre et dans le film de Tarkovski, c'est un océan. On en parle comme d'un océan. Je voulais plutôt créer un milieu plein de transmissions synaptiques. » James Cameron : « Oui, tu en as fait une sorte d'entité gazeuse géante, presque une étoile, vu les protubérances solaires. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 34 min 20 s).
- « One should not speak of a "thinking" or a "non-thinking" Ocean, however the Ocean certainly was active, undertook some voluntary actions and was capable of doing things which were entirely alien to the human domain. » Stanislaw Lem.
- « The nature and purpose of Solaris, the force that generates those memories, the set of motives that shape the human need to explore space and to encounter that which is alien – all the questions that the novel repeatedly asks and meditates on – have been relegated to the film's perifphery. ». Douglas McFarland 2010, p. 268.
- Robert 2005, p. 14.
- « Le cinéaste fait le vide, supprime les discussions scientifiques, effleure à peine les interrogations sur les limites du savoir humain et les possibilités de contact avec une intelligence extraterrestre. » Loiseau 2003.
- « He buried her on Earth and in a sense he buried her in his mind as well - until the Ocean made her come back at the "Solaris" Station. » Stanislaw Lem.
- « Solaris captures, mediates, and reproduces the dreams of those who come within its gravitational field, and in so doing, it transforms or remakes the dreamers in its own image. » Moses 2010, p. 282
- « Les explorateurs […] mettaient en place des appareils d'enregistrement et des caméras automatiques. Les satellites artificiels captaient par télévision le bourgeonnement des mimoîdes et des logus, communiquant fidèlement des images de maturation et d'anéantissement. Les bibliothèques débordaient, les archives ne cessaient de s'accroître, et le prix à payer pour toute cette documentation fut souvent très onéreux. » Lem 2002, p. 194-195.
- « […] la Terre a investi des sommes considérables dans l'instrumentation la plus sophistiquée pour apprendre et comprendre […] mais rien n'y fit, le contact ne fut jamais établi ! » Robert 2005, p. 14-15.
- « [Kris] ne trouvera pas, malgré ses efforts, le critère décisif […] susceptible de l'aider à faire le partage entre ce qui l'habite et ce qu'il côtoie, car « on ne pouvait pas penser autrement qu'avec son cerveau, on ne pouvait se voir de l'extérieur afin de vérifier le juste fonctionnement de ses processus internes » (p. 82). » Robert 2005, p. 12.
- James Cameron : « Je crois que tu as fait tout ton possible pour créer une base émotionnelle plutôt que philosophique. Le livre était très philosophique, scientifiquement parlant si on peut dire. C'était de la science-fiction des années 60 qui traitait de la matière et des limites du savoir. Tu abordes ces thèmes en les transposant aux limites de la connaissance de soi. Tu pars de l'idée de Lem selon laquelle… Lem a réagi à la physique quantique et au principe d'incertitude de Heisenberg. Tu as transposé ça à l'incertitude humaine, ce qui est plus intéressant. » Steven Soderbergh : « Au début, on a gardé certaines idées mais au montage, j'ai enlevé toutes les discussions philosophiques qui trainaient en longueur parce qu'on voulait un film guidé par les émotions avec une trame narrative simple. Ces développements ne correspondaient pas à notre version du film. » James Cameron : « […] au début tu étais très fidèle au roman de Lem. Certaines répliques de Gordon, Snow ou Gibarian se référaient à la réalité, la matière, les particules subatomiques et la nature de Solaris. Comme dans le roman et le film de Tarkovski. Tu t'es débarrassé de tout ça dès que le film s'est dessiné dans ton esprit. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 5 min 30 s).
- « In some respects Soderbergh's Solaris is almost as hyperdeliberate in its quotations of Tarkovsky as Gus Van Sant's Psycho (1998) is in its quotations of Hitchcock. Soderbergh's film begins with rain, and it continues to rain for the whole opening sequence. A movie that is called Solaris and that starts with rain has rain from Tarkovsky, not Lem » Dillon 2006, p. 39.
- « Contrairement à la plupart des films de science-fiction, le film de Tarkovski repose sur un appareillage futuriste minimal. Extrêmement limités, les effets spéciaux se réduisent à quelques maquettes, matte-paintings et autres incrustations éparpillées au fil du film. » Nicolas Debarle.
- « invendable comme science-fiction, peu probant comme mélo romantique, effroyablement lent et opaque, antispectaculaire » Péron 2003.
- « In Solaris both Earth and spaceship are tinted worlds. Scenes on Earth are strongly tinted brown, whether in the past or the present. […] Because everything on the ship is either silver or gray, the spaceship is, in effect, tinted, in a vastly reduced palette. » Dillon 2006, p. 43.
- James Cameron : « Je me souviens de ta satisfaction quand tu as trouvé les couleurs et la technique que tu voulais pour les flashbacks. […] On distingue le présent, sur la station Prometheus, des scènes passées qu'il revit dans son esprit.[…] Il y a une scène très forte où c'est elle qui se souvient. C'est grâce aux nuances [« tons » en anglais], au type de caméra, à l'épaule ou fixe, que le spectateur se retrouve. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 22 min 15 s).
- « On passe de la couleur au noir et blanc (et inversement) sans que cela corresponde systématiquement à une référence temporelle claire telle que le passé en noir et blanc et le présent en couleur. Les placements des personnages sont parfois incohérents. Les bougies du chandelier de la bibliothèque sont très consumées sur un plan et presque neuves sur le suivant. » Saule 2009.
- Steven Soderbergh : « Ici, j'ai utilisé une technique facile que j'ai empruntée au film de Tarkovski. Quand elle ressuscite, Tarkovski passe la scène à l'envers. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 1 h 1) Pout une description plus en détail de cette technique, voir le commentaire à partir de ce moment-là.
- « Pas d'accélérations intempestives de l'action, peu de coups de théâtre : tout [Solaris de Soderergh], mis en scène avec une élégance millimétrée, tend vers une épure à la fois dramatique et visuelle. […] Les péripéties, rares, ne sont que des jalons dans l'implosion psychologique qui guette le héros. Il est dommage, d'ailleurs, que les flash-back, longuets et assez banals, sur ce que furent jadis les relations du couple rompent cette sensation de flottement mental et affectif qui donne sa tonalité vraiment singulière au film. » Loiseau 2003.
- « À sa sortie, le film connaît un échec retentissant, les critiques portant essentiellement sur la lenteur et le manque de vision de l'avenir du film. Le huis clos analytique de Tarkovsky déplaît, car beaucoup s'attendaient, pour un film dit de science fiction, à une multitude d'effets spéciaux à l’instar de Star Wars de Georges Lucas qui sortira 5 ans plus tard. » Pommery 2003.
- « Le mystère est entretenu par une texture sonore nouvelle pour Tarkovski. » Saule 2009.
- « [The music] create an ambient soundscape beyond the repertoire of human emotional response » Bartkowiak 2010, p. 111.
- « [...] texture sonore nouvelle pour Tarkovski : la combinaison de la musique classique (Prélude en Fa Mineur de Jean-Sébastien Bach pour le générique de début) et des musiques électroniques (collaboration avec le compositeur Edouard Artemiev) » Saule 2009.
- « De retour sur Terre, Kris est pris dans le tourbillon de la question existentiale, c'est-à-dire celle qui permet de comprendre que rien n'est plus lointain que ma propre intimité. Rien n'est plus éloigné de moi-même que moi-même ; je suis pour moi-même le plus parfait étranger. Mais ce qui est vrai de moi est vrai également de l'Être. C'est que rien n'est plus étranger à l'Être que l'Être. Si l'Être est incompréhensible et Dieu mystère définitif, Solaris manifeste que selon la divination de Rimbaud « je est un autre ». » Saule 2009.
- « Ainsi, la finalité esthétique de Tarkovski est à la mesure du concept de mondéité de Heidegger, à savoir ce qui caractérise et détermine le Dasein comme être-au-monde, comme être-dans-le-monde. Or, on ne peut se comprendre soi-même que si l'on pénètre la proximité des choses et du monde qui nous entourent. Comprendre la chose, c'est-à-dire ici la Nature , c'est rassembler la Terre , le Ciel, les Divins et les Mortels. » Saule 2009.
- « La différence la plus importante entre les deux films, c'est que, dans ma version, on voit la relation sur Terre entre Chris Kelvin (George Clooney) et sa femme Rheya (Natascha McElhone). Comme ce passé n'est pas montré dans le film de Tarkovski (ni, d'ailleurs, dans le livre), le personnage féminin semble beaucoup plus abstrait. Alors que je voulais que la relation de Chris et Rheya soit au cœur du film. Je voulais me démarquer de l'aspect strictement idéologique de l'histoire pour la ramener du côté de l'émotion. De ce fait, j'ai fini par couper presque toutes les scènes expliquant leur présence sur la station Prometheus en orbite autour de Solaris. Elles rendaient le film moins mystérieux. » Fabre 2002.
- « Il [se] démarque [de l’œuvre littéraire] par […] son découpage en deux parties bien distinctes Terre/Solaris. » Pommery 2003.
- « Tarkovski commence par filmer la nature. Un cours d'eau, des algues chancelantes comme des cheveux, un chêne robuste. L'absence de la nature perturbe les savants dans la station orbitale de Solaris. Snaut découpera ainsi du papier pour l'attacher à un ventilateur pour reproduire le son du vent dans les feuillages. Kris a emporté avec lui comme un talisman la mystérieuse boite métallique du début qui, ouverte devant le hublot de Solaris avant son retour sur Terre, révèle qu'une plante y a poussé » Lacuve 2006.
- « Cette plante, comme acceptée par la conscience de Solaris, est le symbole de la communication future. » Lacuve 2006.
- « Le mystère plane autour de la planète Solaris. Elle paraît inquiétante et incompréhensible. Elle est l'objet de grandes interrogations de la part du corps scientifique. Le récit du professeur Burton, quant à ses difficultés rencontrées lors de son voyage vers Solaris, soulève davantage d'énigmes qu'il ne donne de réponses scientifiques. Sa traversée dans un épais brouillard, la force invisible qui l'empêche de contrôler sa navette, sa rencontre avec un bébé géant de quatre mètres restent inexpliquées) » Saule 2009.
- « [Kris] a acquis une connaissance supérieure de lui-même, une conscience que seule la solaristique a pu mettre en lumière. Ses relations sur Terre vont en être inévitablement modifiées : il devient un être aimant et humble. » Saule 2009.
- « Both versions end at the same point, with Kelvin seemingly at home on Earth, but actually living an illusion […] in a reconstructed country house on the surface of Solaris. » Westfahl 2005, p. 1240.
- « Or, c'est bien la perspective de la connaissance de soi qui marque l'originalité du film : le film de Tarkovski n'est pas tant une introspection psychanalytique qu'une entreprise fondamentalement ontologique » Saule 2009.
- « Mais cette préparation mentale devient obsessionnelle et relève de plus en plus du voyage initiatique. Kris brûle tous ses papiers inutiles, non pas en tant qu'il souhaite renier son passé, mais en tant qu'il ne souhaite conserver que l'essentiel » Saule 2009.
- « Pendant son voyage spatial, Kris a compris que son être était essentiellement et nécessairement voilé. Ce n'est qu'à partir de là que s'ouvrent devant lui les possibilités d'une éclaircie existentiale. […] C'est lorsqu'il semble prêt à ouvrir les yeux qu'il décide d'abandonner Harey et de retourner sur Terre » Saule 2009.
- « At the final moment, Soderbergh grants his audience the Hollywood ending. His hero and his long-lost beloved are reunited in a kind of afterlife or dream world for all eternity. […] But in reflexive fashion this final scene also allows Soderbergh's film to signal to its more critically minded audience that all is an illusion, a mere representation or simulacrum. ». Moses 2010, p. 288.
- « […]the planet pulls Kelvin into itself […], where he unaccountably rejoins Rheya in a simulacrum of the apartment he inhabited in the opening scene of the film. ». Moses 2010, p. 288.
- « An important detail, however, signifies that Chris is in fact on Solaris and that he has chosen to stay rather than return to Earth. As happened earlier, Chris slices his finger while cutting vegetables. His flesh, however, grows back almost immediately. As I said, it is apparent that Chris is not on Earth. He has chosen a place where, indeed, death has no dominion. He has chosen a place in which process has no power. » Douglas McFarland 2010, p. 277.
- James Cameron : « C'est un film profondément passionné, raconté avec le plus grand calme. […] Par « calme », pense à l'immobilité de la caméra et l'absence de musique. Pourtant, l'histoire est terriblement romantique : cet homme est prêt à faire l'ultime sacrifice pour la femme qu'il aime. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 41 min 35 s).
- Steven Soderbergh : « […] c'est une des idées qu'on voulait explorer : l'amour romantique par opposition à une forme d'amour plus pur qui consiste à ne rien projeter. Peut-on aimer quelqu'un sans forcément projeter ses attentes ? » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 40 min 30 s).
- « Est-ce une seconde chance, celle qu'on n'obtient jamais, de recouvrer l'amour suicidé ? Au fond de l'espace, peut-on gommer le passé ? Au fond de soi, peut-on aimer un « fantôme » redevenu chair, sans trahir ce même amour ? Quelle est la solution ? Que choisir ? Se perdre dans l'océan de Solaris et y renaître autre ou fuir vers les pluies de la Terre ? Une forme d'éternité rabâchée ou la survie en solitaire endeuillé ? » Dufreigne 2003.
- « Dans le livre de Stanislas Lem, Soderbergh a trouvé, dit-il, « une merveilleuse métaphore pour tout ce que nous ne comprenons pas ». Ne rien élucider. Laisser, pour l'essentiel, le mystère de Solaris intact. Le cinéaste fait le vide, supprime les discussions scientifiques, effleure à peine les interrogations sur les limites du savoir humain et les possibilités de contact avec une intelligence extraterrestre. Et il déporte toute l'action sur cette voie unique : la love story passée, présente et future de Kelvin et de Rheya » Loiseau 2003.
- « L’écriture de ce romancier a ceci de remarquable qu’elle débouche non sans humour sur une virulente critique des conséquences de l’industrialisation et du collectivisme soviétiques, à l’aune de l’exploration spatiale et de la conquête de l’univers » Nicolas Debarle.
- « Gordon tells Chris that the second copy of Rheya is nothing other than an inauthentic facsimile of the original. It is a mistake, she emphatically asserts, to become emotionally attached to these copies ». Douglas McFarland 2010, p. 275.
- « We ([the audience]), by implication, are invited to join the characters and cast in a realm that does not recognize the distinction between life and death ». Moses 2010, p. 288.
- « When Gordon decides to leave the ship and make her way in the pod back to Earth, Chris is forced to decide whether he will return with Gordon or stay on Solaris. As he is about to board the craft, the film fades to a scene back on Earth. The scene appears to be either the projection of Chris's own memory/imagination or a jumping ahead to Chris's life back on Earth. The sequence begings with Chris in his bedrrom, the same scene with which the film began. It moves ahead just like the earlier sequence to the arrival of Chris at his apartment. An important detail, however, signifies that Chris is in fact on Solaris and that he has chosen to stay rather than return to Earth. […] He has chosen to remain in the eternal present tense of Solaris ». Douglas McFarland 2010, p. 276-278.
- « Depuis son retour sur Terre, les deux mondes semblent avoir fusionnés. Cette expérience extrême de vie sur Solaris a ouvert la possibilité d'une troisième dimension à partir de laquelle s'ouvre la question du sens de l'être. La vie de Kris prend désormais une autre dimension, il la regarde avec une conscience enrichie de questionnements. […] Le monde ne se réduit plus à son environnement proche et à ses seules connaissances. Kris s'inscrit désormais en tant qu'individu fini et ignorant dans le monde. Cette prise de conscience le grandit et le mène sur le chemin d'une meilleure connaissance de soi et de celle d'autrui, vers une plus grande tolérance, vers le vœu de perfectibilité. Il est le même et il est tout autre, parce qu'il sait qu'aucune connaissance n'est le véritable savoir. Il est devenu pleinement humain, c'est-à-dire paradoxale, complexe et ignorant de ses propres fins. » Saule 2009.
- « The ingenuity of Soderbergh's plot […] consists in its restagings and reenactments of Kelvin's troubled relationship with his wife. […] Solaris portrays a hero who repeatedly attempts to rectify the critical mistakes he has made in a failed relationship, but in the case of Soderbergh's much darker film the protagonist tends to repeat the same missteps with the same fatal outcome. […] the latent reason [for a failed marriage] is Kelvin's inability to see his wife as something other than a projection of his own desires. ». Moses 2010, p. 290-291.
- « […] the final scene of Solaris invites us to believe that a love without projection is possible, but of course, the prospect of such an utterly pure and unselfish love being made manifest before our eyes necessitates the intervention of a postmodern deus ex machina. ». Moses 2010, p. 291.
- Voir l'interview conduite par Pierce 2003.
- « C'est vrai que dans Blade Runner [de Ridley Scott], comme dans les séquences terrestres de Solaris, il pleut tout le temps. La pluie pour moi était un bon moyen de différencier les scènes à bord du Prometheus de celles sur Terre (sachant qu’à un certain point du film, elles s'enchaîneraient très rapidement), car une chose est sûre, la pluie ne peut pas ruisseler sur le hublot d'une station spatiale. C'était aussi, pour moi, une façon de rendre la Terre plus abstraite » Fabre 2002.
- « In the case of Solaris, Soderbergh owes his most obvious debt to Tarkovsky. But the visual details of his film, its cenematic textures, are also deeply indebted to the works of many other directores and auteurs, including Jean-Luc Godard, Ridley Scott, and James Cameron (all makers of science fiction classics, but perhaps most of all to Stanley Kubrick's 2001 : A Space Odyssey (1968) » Moses 2010, p. 283.
- « Avant de tourner Solaris, je me suis fait projeter une copie neuve, en 70 mm, de 2001. Ça m'a autant inspiré qu'effrayé. Car c'était effrayant de penser qu'un long métrage de cette importance était la référence pour le genre de film que j'allais tourner. Même si, de toute évidence, je voulais faire quelque chose de très différent. Cela dit, personne ne peut dupliquer ou surpasser ce que Kubrick a fait » Fabre 2002.
- « « 2001 » (1968) was a benchmark for creating the models. Because they needed to generate a heightened sense of realism through the animations, textures were applied to surfaces to give the illusion of detailing using Studio Paint, Photoshop, and Deep Paint. Hewitt adds Soderbergh was inspired by 2001 : A Space Odyssey, and in that film the spaceship was white. Initially, we started with textures that were much more metallic and darker. But he kept asking us to clean them up and go with whifer materials. When we did that, though, it got more and more difficult to see the textures » Hanson 2005, p. 98.
- « Avec 2001, il a tenté de donner au spectateur le sentiment de vivre un voyage spatial. Et il a eu le culot de prendre le temps nécessaire pour le faire. Ce n'est absolument pas ce que je recherchais dans Solaris, puisque, au bout de dix minutes, Kelvin est sur la station orbitale. J'ai juste insisté sur la scène d'arrimage entre les vaisseaux, pour donner une idée de la lenteur du voyage » Fabre 2002.
- « In his DVD comentary, Soderbergh reveals that he directed the composer, Cliff Martinez, to incorporate reworked musical tracks by György Ligeti (whose music was featured in 2001) into the film score of Solaris, therby « recreating the sound » of Kubrick's science fiction classic » Moses 2010, p. 284.
- « Much in the manner of the myth of Orpheus and Eurydice, Solaris traces the return of the beloved from the land of the dead » Douglas McFarland 2010, p. 268
- « [Chris], therefore, jettisons this false copy into space, like an Orpheus dispatching a false Eurydice back to Hades » Douglas McFarland 2010, p. 273
- « Willing withnesses to a self-consciously unorigianl reitaration of an endlessly recycled Hollywood denouement, we are encouraged to indulge in a projection of our desire for an immortal love, one that will survive even the limits of human finitude. (It is no accident that Kelvin recites or remembers the title of Dylan Thomas's poem during his courtship of Rheya and after her suicide : "And death shall have no dominion".) » Moses 2010, p. 288
- « [...] Soderbergh's film certainly toys with the possibility that Solaris may be a kind of god (the space station that orbits the sentient planet and seeks to discover its secrets is suggestively named Prometheus). » Moses 2010, p. 291
- « The Platonic understanding of recollection forms the basis of the philosiphical questions raised in Soderbergh's idiosyncratic adaptation of Lem's novel. That conceptual premise finds itself challenged in turn by Gilles Deleuze and Søren Kierkegaard, respectively » Douglas McFarland 2010, p. 268
- « And in a manner that speak to Solaris, he finds himself torn between love of the creator (the original) and love of the created (its copy). » Douglas McFarland 2010, p. 269
- « […] comes a soft, almost ethereal voici filled with a kind of incredulous innocence, almost childlike in its tone : I love you so much, Chris. Don't you love me anymore ? It seems to be, and it in fact is, the voice of a ghost that haunts his psyche [...] » Douglas McFarland 2010, p. 271
- « His absence creates a crisis to which each memeber of the familiy reacts differently. […] As a result, the young man is driven to create more and more, but each new production brings only dissatisfaction, failure, and frustration. […] If the son turns to art, his father falls into madness » Douglas McFarland 2010, p. 270
- « Je ne suis pas la personne dont je me souviens, constate celle-ci, troublée. Kelvin doit admettre qu'elle n'est en réalité que la projection mentale des souvenirs qu'il a gardés d'elle. Vertigineux. C'est bien sûr ce vertige qui fascine Soderbergh. » Loiseau 2003.
- Steven Soderbergh : « Je voulais dire que les femmes font face à ce que leur compagnon projette sur elles. Leurs attentes, etc. » Commentaires audio du film (Minutage DVD : 32 min 10 s).
- « [Chris] has also failed to grasp that "the humanity of consciousness is definitely not in its powers, but in its responsability : in passivity, in reception, in obligation with regard to the other. It is the other who is first, and there the question of my sovereign consciousness is no longer the first question" (Levinas, 1991, p.112). » Zanardo 2011, p. 63
- « Any sense of mutual intersubjective psychic emergence into relational being was lost. Had he been able to become consciously "undone", he might have been able to experience more of what was "lost within the recesses of loss", or, as Eigen puts it : "What does not exist is the you I say you are, the me you want me to be. My version of you does not cover the territory. What you say about you does not either [...] It is precisely the you I don't know than knowing is the Ein Sopf of you, the unknowable, indefinable You. Always, the inexhaustible Mystery." (Eigen, 1998 p.150) » Zanardo 2011, p. 63
- « […] Solaris may be understood as a film about the omnipresent influence and power of cinema itself » Moses 2010, p. 282.
- « The key to unlocking the mystery of Soderbergh's film is the recognition that the planet Solaris (which effectively controls the orbiting space station, Promotheus) is a dream factory ; its functions is precisely the ways that theoreticians of film have suggested that cinema in general, and Hollywood in particular, do. Solaris captures, mediates, and reproduces the dreams of those who come within its gravitational field, and in so doing, it transforms or remakes the dreamers in its own image » Moses 2010, p. 282.
- « The Platonic understanding of recollection forms the basis of the philosophical questions raised in Soderbergh's idiosyncratic adaptation of Lem's novel. [...] In The Republic […] Socrates asks Glaucon to imagine a cave with an entrance open to the light.[...] For Socrates, the pursuit of the "good" involves escaping this perceptual and epistemological bondage ; such a pursuit enables us to turn from this realm of mere shadows so that we may contemplate the realm of becoming and ideals, which, unlike the imprisoning cave, constitutes a true "region of being". » Douglas McFarland 2010, p. 268
- « In Solaris the distinction between true and false copy is made between the image Chris recollects in his memory (the image that appears in his dream) and the physical manifestation of Rheya in present time » Douglas McFarland 2010, p. 272
- « In The Sophist, Socrates makes the distinction between a good copy and a bad copy, that is, between one that is genuine and one that is counterfeit. [...] In Solaris the distinction between true and false copy is made between the image Chris recollects in his memory (the image that appears in his dream) and the physical manifestation of Rheya in present time. » Douglas McFarland 2010, p. 272
- « The writings of the French philosopher and social theorist Jean Baudrillard, and in particluar his influential work Simulacra and Simulation, provide several crucial concepts that can help to illuminate the most salient features of Soderbergh's Solaris. » Moses 2010, p. 284
- « In the first instance, we never directly see or hear the "original" Rheya. We know her only through Kelvin's memories and dreams, which could well be unreliable records of what her "original" was like. "Rheya" has already been mediated by Kelvin's conscious and unconscious mind even before she is projected by Solaris onto the plane of reality that her husband inhabits. » Moses 2010, p. 287
- « In much the same way that, according to Baudrillard, Western reality comes to an end via an ever accelerating implosion, the planet pulls Kelvin into itself (the protagonist remains aboard the space staion Prometheus rather than flee Solaris in the space pod, Athena), where he unaccountably rejoins Rheya in a simulacrum of the apartment he inhabited in the opening scene of the film. » Moses 2010, p. 287
- « The final scene between Kelvin and the simulacrum of Rheya depends for its full dramatic and psychological effect on our recognition that Soderbergh has momentarily suspended the distinction between reality and representation. » Moses 2010, p. 287
- « That Solaris is a « remake » of an earlier film is thus not merely incidental to Soderbergh's larger aim. Its status as a copy of a copy (Tarkovsky’s 1972 Solaris) that was, in turn, a visual translation of an earlier novel (Lem's 1961 Solaris) represents in formal terms what it (Soderbergh's film) presents thematically and dramatically : the story of a planet capable of projecting and reproducing an infinite number of « facsimiles », a narrative about characters who continually reappear as new avatars or manifestations of themselves (and yet who are always the same) » Moses 2010, p. 283.
- « [Rheya] is a visual projection of Natascha McElhone, who is only playing the part of Rheya. There is, after all, no « real » version or original of Rheya, only earlier cinematic and literary instantiations of the character in Tarkovsky’s film and Lem's novel » Moses 2010, p. 287.
Annexes
Bibliographie
- : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- Dans chaque partie, les ouvrages sont classés par ordre chronologique de publication.
Ouvrages sur Steven Soderbergh
- (en) Aaron Baker, Steven Soderbergh, Chicago, University of Illinois Press, coll. « Contemporary Film Directors », , 132 p. (ISBN 978-0-252-07796-8)
- (en) Andrew deWaard, The Cinema of Steven Soderbergh : Indie Sex, Corporate Lies, and Digital Videotape, New York, Wallflower Press / Columbia University Press, coll. « Directors' Cut », , 188 p. (ISBN 978-0-231-16551-8, lire en ligne).
Ouvrages sur Solaris de Steven Soderbergh
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- (en) Douglas McFarland, « The philosophy of space and memory in Solaris », dans R. Barton Palmer et Steven Sanders, The Philosophy of Steven Soderbergh, Lexington, The University Press of Kentucky, , 328 p., p. 267 à 280.
- (en) Michael Valdez Moses, « Solaris, cinema, and Simulacra », dans R. Barton Palmer et Steven Sanders, The Philosophy of Steven Soderbergh, Lexington, The University Press of Kentucky, , 328 p., p. 281 à 304.
- (en) Andre Zanardo, chap. 3 « Love, loss, imagination and the 'other' in Soderbergh's Solaris », dans Christopher Hauke et Luke Hockley, Jung & Film II : The Return : Further Post-Jungian Takes on the Moving Image, Hove, Routledge, , 368 p. (ISBN 978-0-415-48897-6), p. 49 à 65.
Ouvrages sur Solaris de Stanisław Lem
- Jerzyl Jarzebski, « Intertextualité et connaissance dans l'œuvre de Stanisław Lem », Revue des études slaves, Paris, vol. 63, nos 63-2, , p. 561-576 (lire en ligne)
- Stanisław Lem (trad. du polonais par Jean-Michel Jasienko), Solaris, Paris, Gallimard, coll. « Folio SF », , 336 p. (ISBN 2-07-042239-9)
Ouvrages sur Solaris de Andreï Tarkovsky
- (en) Helena Goscilo, « 10. Fraught Filiation : Andrei Tarkovshy's Transformations of Personal Trauma », dans Helena Goscilo et Yana Iashamova, Cineparternity : Fathers and Sons in Soviet and Post-Soviet Film, Bloomington, Indiana University Press, , 344 p. (ISBN 978-0-253-22187-2).
Ouvrages sur la science-fiction en général
- (en) Matt Hanson, Building Sci-fi Moviescapes : The Science Behind the Fiction, Waltham, Massachusetts, Focal Press, , 176 p. (ISBN 0-240-80772-3, lire en ligne), p. 97-98.
- (en) Gary Westfahl, The Greenwood Encyclopedia of Science Fiction and Fantasy : Themes, works and wonders : Volume 3, Wesport, Greenwood Press, , 152 p. (ISBN 0-313-32953-2, lire en ligne).
- (en) Steven Dillon, The Solaris Effect : Art and Artifice in Contemporary American Film, Austin, University of Texas Press, , 280 p. (ISBN 978-0-292-71345-1).
- Peter Szendy, Kant chez les extraterrestres : Philosofictions cosmopolitiques, Paris, Les Éditions de Minuit, , 160 p. (ISBN 978-2-7073-2147-3)
Ouvrages à portée philosophique
- Jean Baudrillard, Simulacres et simulation, Paris, Editions Galilee, coll. « Débats », , 233 p. (ISBN 978-2-7186-0210-3)
- Platon, La République, Paris, Flammarion, coll. « Philosophie », , 801 p. (ISBN 978-2-08-070653-9)
- Pascal Robert, « De la communication à l' incommunication », Communication et langages, Paris, vol. 146, no 146, , p. 3-18 (lire en ligne).
Ouvrages sur la musique de film
- (en) Mathew J. Bartkowiak, Sounds of the Future : Essays on Music in Science Fiction Film, Jefferson, North Carolina, Mathew J. Bartkowiak, , 239 p. (ISBN 978-0-7864-4480-9 et 0-7864-4480-0).
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Divers
- (en) Audrey Doyle, « World of Emotion », sur cgw.com, (consulté le ).
- Cédric Chauvin, « Statut de la littérature et science-fiction », sur resf.revues.org, (consulté le ).
Autres supports de documentation
- [DVD Commentaires audio du film], Steven Soderbergh (réalisateur) et James Cameron (producteur) () 20th century fox. Durée : 1 h 34 min.
Article connexe
Liens externes
- Site officiel
- Ressources relatives à l'audiovisuel :
- Ressource relative à plusieurs disciplines :
- (en) Metacritic
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