Deuxième croisade
La deuxième croisade commença en 1146 après avoir été lancée en décembre 1145 par le pape Eugène III à la suite de la chute d'Édesse en 1144. Elle s'acheva en 1149 par un échec pour les croisés, qui rentrèrent en Europe sans avoir remporté de victoire militaire en Orient.
Date | 1146-1149 |
---|---|
Lieu | Terre sainte |
Casus belli |
Reprise de la Terre sainte par les musulmans Prise d'Édesse par les Seldjoukides |
Issue |
Statu quo ante bellum Prise de Lisbonne et de Tortosa |
Croisés
Germains : 20 000 hommes[1] Français : 15 000 hommes[1] | Sarrasins Inconnues |
Croisades
Batailles
Chute du comté d'Édesse
Les chrétiens avaient repris la ville de Jérusalem aux musulmans en 1099. Après la bataille d'Ascalon, où ils repoussèrent l'armée de secours égyptienne, ils fondèrent quatre États latins, rapidement isolés en Orient. Confrontés aux Turcs d'un côté et aux Byzantins de l'autre, les croisés se trouvaient en état de guerre quasi permanent. De surcroît, de nombreux pèlerins étaient retournés en Europe après la croisade, satisfaits d'avoir rempli leurs serments et pressés de retrouver leurs terres et leurs familles.
La prospérité du royaume de Jérusalem ayant affaibli son esprit guerrier et les querelles internes réduisant ses ressources, lorsque la forteresse frontalière d'Édesse tomba aux mains de Zengi de Mossoul le , la situation du royaume chrétien devint critique.
En apprenant la nouvelle, le pape Eugène III émit, le , la bulle pontificale Quantum prædecessores (en), appelant à une nouvelle croisade. Cet appel resta d'abord sans réponse, bien que le roi des Francs Louis VII eût envisagé de se rendre lui-même en Terre sainte.
Bernard de Clairvaux prêche la croisade
Il n'y eut pas d'enthousiasme populaire pour la croisade comme on avait pu l'observer en 1095 et 1096. Cependant, Bernard de Clairvaux, un des hommes les plus célèbres et les plus estimés de la chrétienté de l'époque, eut l'idée de promettre l'absolution de tous les péchés commis à ceux qui prendraient la croix. Le pape Eugène III dépêcha Bernard de Clairvaux, connu comme prédicateur hors pair, pour prêcher la deuxième croisade et accorda les mêmes indulgences que le pape Urbain II avait accordées pour la première croisade[2]. Le , jour de Pâques, en présence du roi Louis VII et de la reine Aliénor d'Aquitaine, il prêcha la croisade à une foule immense, à Vézelay en Bourgogne au lieu-dit « la croix Saint-Bernard », à quelques centaines de mètres de la basilique, en contrebas, à mi-flanc de coteau sur le penchant face à Asquins et non au sommet de la colline en raison de l'exiguïté de l'abbatiale qui s'avéra bien trop petite pour contenir la foule, évaluée selon la tradition orale à 100 000 personnes.
Pour commémorer l’événement, l'abbé du monastère, Ponce de Montbroissier, fait élever une chapelle commémorative « la chapelle Sainte-Croix », consacrée en 1152, et une croix en pierre qui fut détruite à la Révolution. À la suite de son prêche, Louis VII, sa femme Aliénor d’Aquitaine, les princes et seigneurs, et toute l'assistance se prosternèrent aux pieds de Bernard et se mirent à réclamer des croix de pèlerin, à tel point que l'on raconte que le tissu vint à manquer et que Bernard de Clairvaux lui-même donna son habit pour que l'on y taille des croix.
Bernard se rendit alors en Germanie et la rumeur des miracles qui se multiplièrent à chacun de ses pas a certainement contribué à la réussite de sa mission. À Spire, l'empereur du Saint-Empire romain germanique, Conrad III de Hohenstaufen, et son neveu Frédéric Barberousse reçurent la croix des mains de Bernard[3]. Le pape Eugène vint en personne en France pour encourager l'entreprise[4].
Malgré tout son zèle, Bernard n’était par nature ni bigot, ni persécuteur. Comme lors de la première croisade, le prêche provoqua par inadvertance des attaques contre les juifs ; un moine français nommé Radulphe inspira des massacres de juifs en Rhénanie, à Cologne, Mayence, Worms et Spire, en déclarant que les juifs ne contribuaient pas financièrement au secours de la Terre sainte. Bernard, l’archevêque de Cologne et l’archevêque de Mayence étaient farouchement opposés à ces accusations, et Bernard se rendit en Germanie pour résoudre le problème et apaiser la foule. Bernard trouva Radulphe à Mayence, parvint à le réduire au silence et le fit retourner dans son monastère[5].
La nouvelle entreprise attira des souverains de toute l'Europe, à l'instar d'Aliénor d'Aquitaine, qui était alors reine de France, mais aussi Thierry d'Alsace, comte de Flandres ; Henri, futur comte de Champagne ; Robert Ier de Dreux, frère de Louis VII ; Alphonse Ier de Toulouse ; Guillaume II de Nevers ; Guillaume III de Warenne, 3e comte de Surrey ; Hugues VII de Lusignan, Amédée III de Savoie, et de nombreux autres nobles et évêques.
Croisade contre les Wendes
À l'appel de la deuxième croisade, de nombreux Germains du Sud se portèrent volontaires pour la croisade en Terre sainte. Cependant, les Saxons du Nord étaient réticents. Ils firent part à saint Bernard de leur souhait de faire campagne contre les peuples slaves (ou wendes) païens, au nord-est de l'Empire, lors d'une réunion du Reichstag à Francfort le . Le pape Eugène III approuva le plan des Saxons et émit le la bulle Divina dispensatione stipulant qu'il n'y aurait aucune différence au niveau des récompenses spirituelles, quelle que soit la croisade. Ceux qui se portèrent volontaires pour la croisade contre les Slaves étaient principalement les Danois, les Saxons, et les Polonais[6], bien qu'il y eut également des Bohêmiens[7]. Le légat du pape, Anselme de Havelberg, fut placé à la tête des opérations. La campagne elle-même fut menée par des familles saxonnes tels que les Ascaniens, Wettin et Schauenburgers[8].
Outrés par la participation des Allemands à cette croisade, les Abodrites envahirent par anticipation la Wagrie (en) en , entraînant le mouvement des croisés à la fin de l'. Après avoir expulsé les Abodrites des territoires chrétiens, les croisés prirent en ligne de mire les forteresses de Dobin et de Demmin. Parmi les forces qui attaquèrent Dobin se trouvaient les troupes de Knut V et Sven III de Danemark, celles d'Adalbert II (de), l'archevêque de Brême, et le duc de Saxe Henri le Lion. Lorsque certains croisés suggérèrent de ravager la campagne, d'autres objectèrent en demandant « Le pays qu'on dévaste n'est-il pas notre pays, et le peuple qu'on combat n'est-il pas notre peuple ? ». L'armée saxonne d'Henri le Lion se retira après que le chef païen Niklot eut accepté que la garnison de Dobin fît son baptême. Après le siège infructueux de Demmin, un contingent de croisés fut persuadé par les margraves de plutôt attaquer la Poméranie. Ils atteignirent la ville de Stettin, déjà convertie au christianisme, d'où les croisés se dispersèrent après avoir rencontré l'évêque Albert de Poméranie et le duc Racibor Ier. Selon Bernard de Clairvaux, l'objectif de la croisade était de combattre les Slaves païens « jusqu'au jour où, avec l'aide de Dieu, ils seront soit convertis soit éradiqués. » Cependant, la croisade échoua en grande partie dans son entreprise de conversion des Wendes. Les conversions obtenues par les Saxons à Dobin étaient surtout des conversions symboliques, vu que les Slaves revinrent à leurs croyances païennes à la suite de la dispersion des armées chrétiennes. Albert de Poméranie dit à ce sujet : « S'ils étaient venus pour renforcer la foi chrétienne… ils auraient dû le faire par la prédication, non par les armes. »
À la fin de la croisade, les campagnes du Mecklembourg et de la Poméranie furent pillées et dépeuplées dans un bain de sang, particulièrement par les troupes d'Henri le Lion. Cela aura eu pour conséquence de faciliter d'autres victoires chrétiennes dans les décennies suivantes. Les autochtones slaves perdirent également une grande partie de leur matériel de production, ne leur permettant d'offrir par la suite qu'une résistance limitée aux envahisseurs.
La croisade passe au Portugal et en Espagne
À la mi-, une flotte de près de deux cents navires quitta le port de Dartmouth en Angleterre et se dirigea vers la Terre sainte. Elle emmenait une armée de croisés composée de Flamands, de Frisons, de Normands, d'Anglais, d'Écossais, ainsi que de quelques Germains et Français. Ni prince ni roi ne prit part à la croisade à ce stade ; de fait, l'Angleterre connaissait à ce moment une période d'anarchie.
La flotte longeait les côtes, mais le mauvais temps les fit s'arrêter le à Porto où l'évêque du lieu les convainquit de poursuivre jusqu'à Lisbonne afin de prêter main-forte au roi Alphonse Ier de Portugal qui voulait délivrer la ville alors occupée par les Maures. Puisqu'il s'agissait aussi de combattre les musulmans, les croisés, sous la conduite du flamand Arnoul d'Arschot[9], acceptèrent de se joindre à Alphonse. Le siège de Lisbonne commença le ; la ville tomba le , et les croisés se livrèrent au pillage avant de remettre la ville au roi du Portugal. Certains s'installèrent à Lisbonne, parmi lesquels Gilberto de Hastings, qui fut élu évêque ; mais la plus grande partie de la flotte reprit sa route en .
Presque au même moment, dans une autre partie de la péninsule Ibérique, Alphonse VII de Castille, aidé de Garcia Ramirez, roi de Navarre, de Raimond-Bérenger IV, comte de Barcelone, et aussi de croisés venus d'Italie et de France, réussit à reprendre Almería le ; en 1148 et en 1149, ce furent aux villes de Tortosa, Fraga et Lérida de revenir dans le giron de la chrétienté.
Croisade à l’est
Josselin II d'Édesse tenta de reprendre Édesse après le meurtre de Zengi, mais Nur ad-Din réussit à le vaincre en . Le , les croisés français se réunirent à Étampes pour discuter de l’itinéraire à suivre. Les Germains avaient déjà décidé de voyager à travers la Hongrie du fait de l’impraticabilité de la route maritime, Roger II, roi de Sicile, étant un ennemi de Conrad. Beaucoup de nobles français se méfièrent de la route terrestre traversant l’Empire byzantin dont la réputation souffrait encore des pertes occasionnées aux premiers croisés. Néanmoins, ils décidèrent de suivre Conrad à dater du . Roger II en fut offensé et refusa d’y participer plus longtemps. En France, l’abbé Suger et le comte Guillaume II de Nevers furent élus à la régence du royaume pour toute la durée de la croisade. En Germanie, un nouveau prêche fut prononcé par Adam d'Ebrach (en) et Otton de Freising qui prirent également la croix. Le à Francfort, Frédéric, le fils de Conrad, fut élu roi, sous la régence de l’archevêque de Mayence Heinrich Ier Felix von Harburg. Cinq ans plus tard, Conrad III désigna son neveu, Frédéric Barberousse, comme son successeur. Les Germains avaient prévu leur départ pour Pâques mais ils ne purent partir avant mai[10].
Rupture avec Byzance
Les croisés français, sous la conduite du roi Louis VII, partent de Metz en . Ils rejoignent l'armée germanique conduite par Conrad III de Hohenstaufen, dans la vallée du Danube. L’indiscipline de l’élément populaire, surtout dans la croisade germanique, provoque des incidents au passage de l’armée dans les Balkans.
L’armée française, est ralentie par plusieurs facteurs : passant après l’armée germanique, et sur une seule route, elle a du mal à se ravitailler en Hongrie. Elle est aussi un peu ralentie par la suite des épouses, Aliénor d'Aquitaine en tête (mais aussi Sybille d'Anjou (en), Faydide de Toulouse), et par leurs bagages[réf. nécessaire]. La présence de très nombreuses suivantes, que les chevaliers ont du mal à ne pas convoiter[réf. nécessaire], détourne pour les chroniqueurs l’esprit de pèlerinage (castra non casta, campements qui n’ont rien de chaste). Ainsi ralenti, parti le 12 juin, le convoi met environ quatre mois pour atteindre Constantinople, le .
Le basileus, Manuel Ier Comnène, craint que les troupes des croisés ne renforcent la principauté d’Antioche où il veut rétablir sa souveraineté, et qu’elles affaiblissent l’alliance germano-byzantine contre Roger II de Sicile. En effet, pendant que Conrad III et Louis VII refusent de prêter hommage au basileus à l’automne, et retiennent ainsi les troupes byzantines, Roger II s’empare de Corfou et de Céphalonie, pille Corinthe et Thèbes. Manuel Ier Comnène doit conclure un traité avec le sultan Mas`ûd Ier de Rum.
Défaites contre les Seldjoukides
L'armée de Conrad III arrive la première à Constantinople mais les relations entre l'empereur germanique et l'empereur byzantin, Manuel Ier Comnène, sont tendues. Les Germains, désirant traverser l'Asie Mineure le plus vite possible, n'attendent donc pas les Français et partent vers Édesse.
Conrad III divise son armée en deux unités. L'une d'elles est annihilée par les Seldjoukides lors de la bataille de Dorylée, le . L'autre division est également massacrée au début de l'année 1148, et s’en retourne à la rencontre de l’armée française.
Les relations de l'empereur byzantin avec l’armée française sont meilleures qu’avec l’armée germanique, mais il refuse néanmoins de lui fournir des renforts et fait même promettre de rendre à l'Empire byzantin tout territoire pris à l'ennemi. L’armée française rencontre à Nicée les survivants de l'armée germanique (composée également de forces tchèques et polonaises, comme l'atteste le chroniqueur byzantin Jean Cinnamus). Pour éviter d’avoir à traverser les déserts d’Anatolie comme l’armée germanique, le roi de France choisit un itinéraire plus long. Mais, à l’Épiphanie 1148, dans les défilés du mont Cadmos, l’avant-garde est séparée du convoi, et les Turcs infligent une défaite à l’armée française.
Les survivants des deux armées arrivent finalement en Syrie par la mer. Le roi Louis VII suit le littoral, mais harcelé dans la vallée du Méandre, doit abandonner les non-combattants à Antalya (Attaleia) et s’embarque pour Antioche avec ses chevaliers. Conrad III, réconcilié avec Manuel Comnène, gagne Saint-Jean-d'Acre sur des vaisseaux byzantins. Les mauvais rapports entre les croisés et Byzance, aussi bien qu'entre eux-mêmes, ont réduit de trois quarts les forces de la croisade.
Voyage à Jérusalem
Louis arriva finalement à Antioche le , plus tard que prévu à cause d’une mer tempétueuse. Amédée III de Savoie étant mort le en cours de route à Chypre, Louis fut accueilli par Raymond de Poitiers, oncle d’Aliénor d’Aquitaine, qui attendit de lui de l’aide face aux Turcs et pour qu’il l’accompagne dans une expédition à Alep, cité musulmane et porte d’entrée vers Édesse. Mais Louis refusa, préférant finir son pèlerinage à Jérusalem plutôt que de se focaliser sur l’aspect militaire de la croisade[11]. Aliénor voulut continuer, mais son oncle l'implora de rester pour accroître le domaine familial et de divorcer de Louis, si le roi refusait d’aider la cause militaire de la croisade. Aliénor fut mise aux arrêts et Louis passa rapidement d’Antioche au comté de Tripoli. Début avril, Otton de Freising et ce qui restait de ses troupes arrivèrent à Jérusalem, et Conrad peu de temps après[12]. Foucher d'Angoulême, patriarche latin de Jérusalem, fut envoyé pour inviter Louis à se joindre à eux. La flotte qui s’était arrêtée à Lisbonne arriva à ce moment, tout comme les Provençaux qui avaient quitté l'Europe sous le commandement d'Alphonse Jourdain, comte de Toulouse. Alphonse mourut à Césarée et ne put donc pas se rendre à Jérusalem. Une supposition voudrait qu’il ait été empoisonné soit par Aliénor d’Aquitaine, soit par Raymond II de Tripoli, le neveu qui craignait ses aspirations politiques dans le comté. Le but original de la croisade était Édesse, mais le roi Baudouin III de Jérusalem et les chevaliers du Temple préférèrent Damas[11].
Le concile d’Acre
La noblesse de Jérusalem s'est félicitée de l'arrivée des troupes venues d'Europe, et une annonce informe qu’un concile devrait se réunir pour décider de la meilleure cible pour les croisés. Ce concile se réunit le , lorsque la haute cour de Jérusalem rencontre les croisés récemment arrivés d'Europe à Palmarea, près de Saint-Jean-d'Acre, une ville importante du royaume croisé de Jérusalem. C'est la plus spectaculaire assemblée de la cour dans toute son existence[13],[14].
En fin de compte, la décision d'attaquer la ville de Damas est prise. Damas était une ancienne alliée du royaume de Jérusalem, qui avait changé d'allégeance en faveur des Zengîdes et avait attaqué, en 1147, le royaume allié de la cité de Bosra. En juillet, les armées croisées réunies à Tibériade marchèrent contre Damas, près de la mer de Galilée par le biais de Baniyas. Il y avait peut-être 50 000 soldats au total[15].
Échec du siège de Damas
L'intention des croisés était soit de reprendre Édesse, soit d'attaquer Alep, centre de la puissance de Nur ad-Din. Mais Louis VII prend ombrage des rapports trop amicaux entre sa femme, Aliénor d'Aquitaine, et le prince d'Antioche, Raymond de Poitiers, par ailleurs oncle d'Aliénor. Il tient aussi à entrer à Jérusalem en même temps que Conrad III, arrivé par mer. Baudoin III s'est entendu avec Conrad III pour attaquer d'abord Damas, plus proche. Les rivalités entre croisés vont donc rediriger l'expédition contre Damas, malgré la trêve qui existe entre cette ville et les Francs.
Le siège de Damas commence le et est levé quatre jours plus tard[16].
Les croisés décidèrent d’attaquer Damas par l’ouest, où le verger pourrait leur fournir un approvisionnement alimentaire constant[13]. Le , ils arrivèrent à Daraiya. Le lendemain, les musulmans, qui s’étaient préparés pour l’attaque, ont constamment attaqué l’armée croisée à travers les vergers de Damas. Les défenseurs avaient demandé l’aide de Saif ad-Din Ghazi de Mossoul et Nur ad-Din d’Alep qui a personnellement mené une attaque sur le camp des croisés. Les croisés furent repoussés contre les murs des vergers où ils furent victimes d’embuscade et de guérilla[11].
D’après Guillaume de Tyr, les croisés décidèrent le de bouger sur les plaines à l’est de la cité qui possédaient moins de fortification mais également d’eau et de vivres[13]. Il a été rapporté que Mu'in ad-Din Unur promit de rompre son alliance avec Nur ad-Din si les croisés rentraient chez eux[11]. Cependant, Nur ad-Din et Saif ad-Din arrivèrent et avec Nur ad-Din, il était impossible d’obtenir de meilleures positions[11]. Les seigneurs croisés locaux, installés sur une plaine sans point d'eau en plein soleil, refusèrent de poursuivre le siège et les trois rois durent abandonner la ville sans autres choix[13]. D’abord, Conrad, puis le reste de l’armée décidèrent de se retirer sur Jérusalem le pendant que des archers turcs ne cessaient de les harceler[17]. Une fois à Jérusalem, le , les Français eurent vent de la décapitation par l’ennemi, de Raymond, roi d’Antioche, lors de la bataille d'Inab, contre Nur ad-Din, ce qui était un coup dur pour la croisade. Conrad III et Louis VII rentrent alors en Occident sans aucune victoire militaire.
Conséquences malheureuses pour les croisés
Chacune des forces chrétiennes se sent trahie par l'autre[13]. L'émirat de Damas sort épuisé de cette épreuve. Nur ad-Din en profite pour en prendre le contrôle en 1154. Un nouveau plan a été élaboré pour attaquer Ascalon et Baudouin III de Jérusalem commet l'erreur de la prendre en 1153, ce qui amène l'étendue du conflit jusqu'en Égypte. Conrad y mène ses troupes mais à défaut du manque de confiance quant à la réussite du siège, celui-ci ne se voit apporter aucun soutien. Par leur défaite, cette méfiance mutuelle persiste pendant une génération, et contribue à la ruine des royaumes chrétiens en Terre sainte. La maladresse des croisés aboutit à créer contre eux un front commun de l'islam. Après avoir quitté Ascalon, Conrad retourne à Constantinople pour maintenir son alliance avec Manuel. Louis reste à Jérusalem jusqu'à 1149.
De retour en Europe, Bernard de Clairvaux sort humilié de l'échec de la croisade et en pâtit en termes de crédibilité. Il croit de son devoir d'envoyer des excuses au pape. Il en rejette la faute sur les péchés commis par les croisés. Lorsqu'il échoue à l'appel d'une nouvelle croisade, il tente de se dissocier du fiasco de la deuxième croisade. Il meurt en 1153[18]. De cet échec, la couronne de France perd également beaucoup aux points de vue financiers, politiques, militaires et stratégiques.
La croisade obtient des résultats mitigés. Bien que les Saxons aient affirmé leur possession de Wagria et Polabia (en), les païens conservent le contrôle de la terre d'Abodrite et de Lübeck. Les Saxons reçoivent également un tribut du chef Niklot, en autorisant la colonisation de l'évêché de Havelberg (en), et libérant quelques prisonniers danois. Toutefois, les différents dirigeants chrétiens se soupçonnent et s'accusent mutuellement de saboter leur campagne. Dans la péninsule Ibérique, les campagnes en Espagne, ainsi que le siège de Lisbonne, ont été parmi les quelques victoires chrétiennes de la deuxième croisade. Elles sont considérées comme des batailles décisives de la Reconquista, qui sera achevée en 1492[19].
En Orient, la situation est beaucoup plus sombre pour les chrétiens. En Terre sainte, la deuxième croisade a des conséquences désastreuses à long terme pour Jérusalem. Le 29 juin 1149, Raymond de Poitiers, prince d'Antioche, est battu par Nur ad-Din lors la bataille d'Inab et meurt au cours du combat. Damas de son côté n'a plus confiance dans le royaume croisé. La ville est remise à Nur ad-Din en 1154.
Néanmoins, Baudoin III réussit enfin à saisir Ascalon en 1153, faisant ainsi rentrer l'Égypte dans la sphère du conflit. Le royaume de Jérusalem a été en mesure de faire de nouveaux progrès en Égypte, en occupant brièvement Le Caire dans les années 1160[20]. Cependant, les relations avec l'Empire byzantin ont été mitigées, et les renforts en provenance d'Europe restent rares après la catastrophe de la deuxième croisade. Le roi Amaury Ier de Jérusalem s'allie avec les Byzantins et participe à une invasion combinée de l'Égypte en 1169, mais finalement l'expédition échoue. En 1171, Saladin, neveu d'un des généraux de Nur ad-Din, est proclamé sultan d'Égypte, réunissant l'Égypte et la Syrie et entourant complètement le royaume des croisés. Pendant ce temps, l'alliance byzantine s'est terminée par la mort de l'empereur Manuel Ier en 1180, et en 1187, Jérusalem capitule devant Saladin. Ses forces s'étendent vers le nord pour capturer toutes les grandes cités des États croisés, précipitant la troisième croisade[21].
Anecdote
On raconte, et ce n'est pas une boutade[22], que les croisés revenant défaits de Damas en Syrie, en rapportèrent une variété de prunier à pruneaux, nommée de ce fait prunier de Damas. On les critiqua alors, en disant qu'ils étaient allés là-bas « pour des prunes », expression actuelle signifiant : pour « pas grand-chose », voire « pour rien ».
Musique
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Second Crusade » (voir la liste des auteurs).
- Norwich 1995, p. 94-95.
- Bunson 1998, p. 130.
- Riley-Smith 1991, p. 48.
- Tyerman 2006, p. 275-281.
- Tyerman 2006, p. 281-288.
- Davies 1996, p. 362.
- Herrmann 1970, p. 326.
- Herrmann 1970, p. 328.
- Biographie nationale (1866), publiée par l'Académie royale des sciences, des lettres et des beaux-arts de Belgique, p. 473.
- Runciman 1952, p. 257, 259.
- Brundage 1962, p. 115-121.
- Riley-Smith 1991, p. 49-50.
- Riley-Smith 1991, p. 50.
- Guillaume de Tyr, Babcock et Krey 1943, vol. 2, bk. 17, ch. 1, pp. 184-185 : « it seems well worth while and quite in harmony with the present history that the names of the nobles who were present at the council…should be recorded here for the benefit of posterity. » He lists these and numerous others ; « to name each one individually would take far too long. »
- Runciman 1952, p. 228-229.
- Georges Bordonove, Les croisades et le Royaume de Jérusalem, Pygmalion - G. Watelet, 1992, p. 201.
- Baldwin 1969, p. 510.
- Runciman 1952, p. 232-234, 277.
- Riley-Smith 1991, p. 126.
- Riley-Smith 1991, p. 56.
- Riley-Smith 1991, p. 60.
- Azza Heikal, Il était une fois une sultane, Chagarat al-Durr, 2004, p. 115.
Voir aussi
Bibliographie
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- René Grousset, Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem, Paris, Perrin, (réimpr. 1999).
Articles connexes
Liens externes
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