tolérance
Français
Étymologie
- Emprunté au latin tolerantia (« constance à supporter, endurance, patience »), de tolerare (« supporter »). [1]
- 1561; Ac. 1694, 1718: tolerance; dep. 1740: tolé- [2]
Nom commun
Singulier | Pluriel |
---|---|
tolérance | tolérances |
\tɔ.le.ʁɑ̃s\ |
tolérance \tɔ.le.ʁɑ̃s\ féminin
- Capacité à supporter un inconvénient.
- Ne pouvant régler les événements, je me règle moi-même, et m’applique à eux, s’ils ne s’appliquent à moi. Je n’ai guère d’art pour savoir gauchir la fortune et lui échapper ou la forcer, et pour dresser et conduire par prudence les choses à mon point. J’ai encore moins de tolérance pour supporter le soin âpre et pénible qu’il faut à cela. Et la plus pénible assiette pour moi, c’est être suspens ès choses qui pressent, et agité entre la crainte et l’espérance. — (Montaigne, Essais , II, 17, De la présomption, 1595)
- Condescendance, indulgence, action de supporter ce que l’on ne peut empêcher ou que l’on croit ne pas pouvoir empêcher.
- Ce n’est pas un droit, c’est une tolérance. Il ne jouit de cela que par tolérance. Il n’en jouit que par la tolérance de ceux qui le pourraient empêcher.
- (En particulier) (Religion) (Politique) Fait de ne pas s’opposer à des idées, à des positions différentes des nôtres.
- Qu’est-ce que la tolérance ? C’est l’apanage de l’humanité. Nous sommes tous pétris de faiblesses et d’erreurs ; pardonnons-nous réciproquement nos sottises, c’est la première loi de la nature — (Voltaire, Dictionnaire philosophique, 1764)
- Nos Prosélytes seront-ils intolérants pour cela ? Au contraire, ils seront tolérants par principe ; ils le seront plus qu’on ne peut l’être dans aucune autre doctrine, puisqu’ils admettront toutes les bonnes Religions qui ne s’admettent pas entre elles, c’est-à-dire, toutes celles qui, ayant l’essentiel qu’elles négligent, font l’essentiel de ce qui ne l’est point. (…) Quant aux Religions qui sont essentiellement mauvaises, qui portent l’homme à faire le mal, ils ne les toléreront point, parce que cela même est contraire à la véritable tolérance, qui n’a pour but que la paix du Genre-humain. Le vrai tolérant ne tolère point le crime, il ne tolère aucun dogme qui rende les hommes méchants. — (Rousseau, Lettres écrites de la montagne, Première Lettre, 1764)
- Un prince qui ne croit pas indigne de lui, de dire qu’il regarde comme un devoir de ne rien prescrire aux hommes dans les choses de religion, mais de leur laisser à cet égard une pleine liberté, et qui par conséquent ne repousse pas le noble mot de tolérance *, est lui-même éclairé et mérite d’être loué par le monde et la postérité reconnaissante, comme celui qui le premier, du moins du côté du gouvernement, a affranchi l’espèce humaine de son état de minorité, et a laissé chacun libre de se servir de sa propre raison dans tout ce qui est affaire de conscience. — (Kant, Qu’est-ce que les Lumières ?,1784 (in Éléments métaphysiques de la doctrine du droit) trad. Durand, 1853) → (voir infra une lecture plus proche du texte de Kant.) [3]
- [Homais] – Je veux seulement dire, répliqua-t-il alors d’un ton moins brutal, que la tolérance est le plus sûr moyen d’attirer les âmes à la religion. — (Flaubert, Madame Bovary, 1857)
- Ces bouffonneries ne sont pas bien prouvées. Ce qui l’est mieux et ce qui fut peut-être plus funeste à Boniface, c’est sa tolérance. Un inquisiteur de Calabre avait dit : « Je crois que le pape favorise les hérétiques, car il ne nous permet plus de remplir notre office. » — (Jules Michelet, Histoire de France : Moyen Âge, tome troisième, Ernest Flammarion, Paris, 1893, p. 132)
- (…) La véritable élégance est moins loin de la simplicité que la fausse ; (…) Un filet de vert sombre s’harmonisait dans le tissu du pantalon à la rayure des chaussettes avec un raffinement qui décelait la vivacité d’un goût maté partout ailleurs et à qui cette seule concession avait été faite par tolérance, tandis qu’une tache rouge sur la cravate était imperceptible comme une liberté qu’on n’ose prendre. — (Proust, À l’ombre des jeunes filles en fleurs, 1919)
- Le pape Innocent III (1193-1216) devait rompre avec cette tradition de tolérance et se faire l’inspirateur d’une politique hostile, qu’il mena avec une vigueur exceptionnelle. — (Léon Berman, Histoire des Juifs de France des origines à nos jours, 1937)
- Malheureusement, il n’existait aucun attachement philosophique au laïcisme et à ses valeurs de scepticisme, d’expérimentation et de tolérance, si essentielles au pluralisme politique. — (Panayiotis Jerasimof Vatikiotis, L’Islam et l’État, 1987, traduction d’Odette Guitard, 1992)
- La tolérance religieuse s’exprime volontiers aujourd’hui au travers de l’expression « Toutes les religions se valent « ou, en se limitant au champ chrétien, « Toutes les confessions se valent ». — (Olivier Fatio, Pour sortir l’œcuménisme du purgatoire, page 39, Labor et Fides, 1993)
- Affichant non sans panache un athéisme militant, il appelle à en finir avec une certaine tolérance envers les religions monothéistes, intrinsèquement intolérantes et pétries de haine. — (Basile de Koch, Histoire universelle de la Pensée: de cro-Magnon à Steevy, 2005)
- (Administration) (Arts) (Métrologie) Écart toléré dans la dimension, la quantité, etc., des marchandises fournies.
- (Désuet) (Par ellipse) Maison de tolérance.
- Lorsqu’on ouvre une tolérance dans un quartier, « il est d’observation que le désordre cesse à l’instant ou devient moindre ; les prostituées s’y contiennent et ne se disséminent plus. » — (Alain Corbin, Les filles de noce, 1978)
- (Boutade) La tolérance ? Il y a des maisons pour ça !— (Citation attribuée à Paul Claudel)
- (Biologie) Seuil maximal de la capacité d’un organisme à absorber des substances chimiques ou des conditions physiques particulières sans en être visiblement affecté.
- Notre fils de 5 ans est TDAH (moi aussi) et nous voulons tester sa tolérance au gluten. — (blog.sansgluten.fr)
Dérivés
- intolérance
- tolérantisme
- maison de tolérance (Administration).
- Tolérance théologique ou religieuse, Condescendance que l’on a les uns pour les autres, touchant certains points qui ne sont pas regardés comme essentiels à la religion.
- Tolérance civile, (Politique) Permission qu’un gouvernement accorde de pratiquer, dans l’état, d’autres religions que celles qui y sont établies, reconnues par les lois, pratiquées par le plus grand nombre des citoyens.
- La tolérance civile est quelquefois restreinte à certains cultes, à certaines croyances.
Synonymes
Capacité à supporter un inconvénient :
Fait de ne pas s’opposer à des idées, à des positions différentes des nôtres :
Apparentés étymologiques
Traductions
- Allemand : Toleranz (de)
- Anglais : tolerance (en) ( 3)
- Arabe marocain : تسامح (*)
- Catalan : tolerància (ca)
- Espagnol : tolerancia (es)
- Grec : ανοχή (el) anokhí féminin
- Ido : tolero (io)
- Russe : толерантность (ru)
- Same du Nord : gierdavašvuohta (*), gierdilvuohta (*)
(4)
- Anglais : tolerance (en)
- Italien : tolleranza (it) féminin
(Biologie) Seuil maximal de la capacité d’un organisme à absorber des substances chimiques ou des conditions physiques particulières sans en être visiblement affecté. (6)
- Italien : tolleranza (it) féminin
Forme de verbe
Voir la conjugaison du verbe tolérancer | ||
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Indicatif | Présent | je tolérance |
il/elle/on tolérance | ||
Subjonctif | Présent | que je tolérance |
qu’il/elle/on tolérance | ||
Impératif | Présent | (2e personne du singulier) tolérance |
tolérance \tɔ.le.ʁɑ̃s\
- Première personne du singulier du présent de l’indicatif de tolérancer.
- Troisième personne du singulier du présent de l’indicatif de tolérancer.
- Première personne du singulier du présent du subjonctif de tolérancer.
- Troisième personne du singulier du présent du subjonctif de tolérancer.
- Deuxième personne du singulier de l’impératif de tolérancer.
Références
- Tout ou partie de cet article a été extrait du Dictionnaire de l’Académie française, huitième édition, 1932-1935 (tolérance), mais l’article a pu être modifié depuis.
- Félix Gaffiot, Dictionnaire latin français, Hachette, 1934 → consulter cet ouvrage
- « tolérance », dans TLFi, Le Trésor de la langue française informatisé, 1971-1994 → consulter cet ouvrage
- * Le sens paraît être: (un prince), "qui n’emploie même pas le mot tolérance – trop condescendant…(hochmütig)"
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