pétrel-tempête
Français
Étymologie
- (XVIIIe siècle) De pétrel et tempête. Le terme s'écrit également sans trait-d'union (pétrel tempête).
Ce nom, qui a pris forme à partir d'une vieille locution encore utilisée de nos jours par certains pêcheurs hauturiers, i.e. oiseau de tempête ou encore oiseau des tempêtes, s'explique en partie par le fait que ces procellariiformes — qui sont tous pélagiques et dont certaines espèces suivent les bateaux, telles l'océanite tempête (Hydrobates pelagicus), alors que d'autres suivent plutôt les cétacés et évitent les humains, comme l'océanite cul-blanc (Oceanodroma leucorhoa) — tentent subitement de se poser sur les bateaux en plein cœur de tempêtes en haute mer, ce qui n'a eu cesse de frapper l'imagination de marins pris dans la tourmente et soudainement témoins de l'apparition inattendue de ces frêles esquifs noirâtres surgissant de nulle part. Ces procellariiformes nichent dans les endroits les plus inaccessibles et éloignés de l'homme, de sorte que, même de nos jours, on ne connaît souvent que très peu leur aire de nidification et on ne les rencontre que rarement, même en temps normal, en raison de leur vaste aire de dispersion, laquelle comprend l'immensité des zones pélagiques de tous les océans.
C'est pourquoi marins et pêcheurs ont entouré ces oiseaux d'une aura de mystère et leur ont attaché bien des croyances légendaires. Non seulement les pétrels-tempête se manifestent-ils en grand nombre au cœur de tempêtes en haute mer, mais lorsque le temps est en apparence calme et que rien ne semble poindre à l'horizon, quelques types - cette habitude varie selon les espèces - dont le pétrel-tempête pélagique (ou océanite tempête), un hydrobatidé, et l'océanite de Wilson (Oceanites oceanicus)(un océanitidé), ont la singulière habitude de suivre les chalutiers en haute mer, sans pourtant que l'équipage ne déverse de débris comestibles par-dessus bord, et donc, sans raison apparente. Ceci a donné naissance à une croyance - ou a nourri une croyance existante - à l'effet que ces oiseaux auguraient en fait immanquablement une tempête à venir. Des siècles d'observation ont renforci cette croyance, de la perspective de ses tenants, que rien n'appuie ou n'infirme pourtant, de sorte que pour beaucoup de vieux loups de mer, il ne fallait pas en démordre: ces oiseaux noirs mystérieux surgissaient de nulle part, à des centaines, voire des milliers de kilomètres de la plus proche terre ferme, et suivaient sans raison identifiable les bateaux, même par une mer d'huile, et à coup sûr, cet étrange manège se concluait inévitablement par un sérieux coup de tabac, voire un ouragan. On sait aujourd'hui que certains pétrels-tempête et océanites suivent les chalutiers tout simplement pour profiter du tourbillon que ces derniers créent dans leur sillage, puisque ces oiseaux prisent énormément le zooplancton soudain exposé à la surface grâce à la turbulence causée par l'embarcation.
C'est donc ce comportement par lequel les pétrels-tempête semblaient —- bien involontairement, il faut l'admettre — pouvoir présager les tempêtes les plus désastreuses, qui leur a valu le sobriquet d'oiseau de tempête, ainsi que le riche folklore et la batterie de superstitions qui accompagnait cette appellation. Ainsi, il ne fallait pas molester ces oiseaux s'ils venaient se reposer à bord au plus fort d’un coup de tabac, car ils incarnaient l’âme de matelots et marins ayant péri en mer. En plus d’épouvanter les pêcheurs qui voyaient arriver des dizaines de ces oiseaux noirs à bord en plein cœur de la tourmente, les pétrels-tempête accompagnaient les bateaux dans leur sillage pour une autre raison : ils profitaient du fait d’être généralement sous le vent et ainsi de l’opportunité d’un abri en plein océan leur permettant de se reposer un peu. Mais les gens de la mer voyaient une intention toute autre dans ce comportement : ils croyaient que ces pétrels, véritables revenants de victimes des tempêtes de jadis, venaient réclamer d’autres vies, soit celles de ces marins crédules…
On peut donc mieux saisir derrière les divers noms vernaculaires associés aux pétrels, sur les thèmes de la tempête et des forces occultes maléfiques, la persistance et la puissance de ces croyances et le symbolisme que les pêcheurs hauturiers d’autrefois attachaient à ces oiseaux, qu’ils craignaient tantôt comme des messagers de l’au-delà, tantôt comme des augures maléfiques. ou simplement comme des porteurs de présages d'un changement brutal du temps et des conditions au large, très, très loin de leurs frères humains…
Nom commun
Singulier | Pluriel |
---|---|
pétrel-tempête | pétrels-tempête |
\pe.tʁɛl.tɑ̃.pɛt\ |
pétrel-tempête \pe.tʁɛl.tɑ̃.pɛt\ masculin
- (Ornithologie) Genre de petit oiseau pélagique de la famille des hydrobatidés et dont il existe 14 espèces différentes, qui écument typiquement de leur vol papillonnant la surface de la mer à la recherche de zooplancton et de petits poissons marins, nichant en terriers dans des colonies parfois gigantesques, et dont la croyance chez les marins était qu'ils présageaient les tempêtes.
- Vents, orages, mouvements des flots, ils bravent tout; rien ne peut les arrêter ni les fatiguer; ils ont même la faculté de se soutenir sur les ondes soulevées, d’y marcher et d’y courir en frappant de leurs pieds avec une extrême vitesse la surface de l’eau. Ce dernier fait a été observé par trop de navigateurs pour qu’on puisse le mettre en doute, malgré son étrangeté. Les matelots nomment le pétrel-tempête satanicle". — (MM. Zurcher et Margollé, Les Tempêtes, J. Hetzel, Paris, page 277-278, 1864)
- (Ornithologie) (Spécifiquement) Espèce d'océanite de la famille des hydrobatidés, l'océanite tempête (Hydrobates pelagicus), petit oiseau marin de la taille d'une hirondelle, dont les populations nidificatrices sont toutes situées en Europe dans l'Atlantique du nord-est.
Variantes
Synonymes
- caillette (Picardie)
- chie-vent (Normandie)
- chîvent (Normandie)
- écaillette (Picardie)
- épouvantail
- malamoque
- martinet (Nice)
- océanite tempête
- oiseau du diable (Finisterre)
- oiseau de tempête
- oiseau des tempêtes
- petit-pierre
- petit-Pierre
- petit puant (Finisterre)
- pétrel-tempête pélagique
- satani (Terre-Neuve)
- satanicle
- satanique
- sataniste (Terre-Neuve)
- satanite (Picardie)
Traductions
- Conventions internationales : Hydrobates pelagicus (wikispecies) (2)
- Anglais : European storm petrel (en) (2)