Histoire culturelle de la France

L'Histoire culturelle de la France est la discipline qui étudie l'ensemble des champs culturels depuis les origines jusqu'à nos jours et faisant partie du domaine de la culture française.

Façade de la Cathédrale Notre-Dame du Puy-en-Velay, exemple de l'art roman français.

Royauté franque (Ve – Xe siècles)

Reconnaître les mouvements intellectuels des peuples francs entre les années 500 et 1000 et les rattacher à la culture française dans son ensemble soulève un certain nombre de problématiques méthodologiques. Toutefois, le consensus historique permet un certain nombre de conclusions.

Durant les premiers siècles du Moyen Âge, la culture écrite est toujours latine, et très fortement liée à la religion chrétienne. Les laïcs n'écrivent plus et les maîtres francs n'ont pas utilisé l'écriture pour fixer et transmettre leur propre culture germanique. Par ailleurs, si on peut détecter l'apparition sur cette période d'une première langue française, celle-ci n'est pas le vecteur d'une culture écrite.

Les savants religieux étudient, recopient et transmettent un certain nombre d'ouvrages antiques dès le Ve siècle dans une optique ecclésiale, que ce soit au sein d'écoles ecclésiastiques urbaines ou de monastères. Ce qu'il est convenu d'appeler la Renaissance carolingienne prend sa source dans les initiatives culturelles des maires du palais, et consiste essentiellement dans un renouveau de la langue et des arts libéraux antiques, en grande partie grâce à l'apport de savants étrangers à l'aire culturelle franque : irlandais, italiens ou espagnols.

Problématiques méthodologiques

Le concept de culture est une construction contemporaine, qu'il est délicat de transposer sans précaution à une époque où cette notion n'existait pas. Le risque d'anachronisme est très fort[1].

Les sources disponibles sont rares et ne montrent qu'une facette étroite de la culture de l'époque, essentiellement orale. Par ailleurs, la distance temporelle et intellectuelle qui sépare les chercheurs des hommes et femmes de cette époque est énorme, et doit être prise en compte[2].

Le découpage géographique pour cette époque n'a pas de sens, et une histoire de la culture doit se concentrer sur la culture du peuple franc, qui est à l'origine lointaine de ce qui deviendra des siècles plus tard l'espace culturel français[3].

La synthèse la plus récente élaborée par Michel Sot, Jean-Patrice Boudet et Anita Guerreau-Jalabert n'est, en 2005, qu'un essai et non d'une histoire en tant que telle, en raison des lacunes documentaires immenses et d'absence de consensus de la part des historiens de l'art et des archéologues spécialistes de cette période sur des éléments fondamentaux de la culture à cette époque[4].

Les origines de la culture franque médiévale

Les connaissances de la culture franque des premiers siècles après leur installation en Gaule, se limitent à quelques textes dont le plus important est l'Histoire des Francs de Grégoire de Tours, et ses réinterprétations postérieures par les érudits francs.

L'intégration des Francs dans le monde romain

Histoire des Francs, Grégoire de Tours, page à l'initiale P en forme de poisson ouvrant le livre consacré à Clovis. Luxeuil ou Corbie, fin du VIIe siècle. BnF, Manuscrits, Latin 17655 fol.13v-14.

Au VIe siècle, les élites franques se définissent avant tout comme romaines, en s'opposant aux autres peuples non intégrés, rejetés comme barbares. Intégrés depuis le IVe siècle comme peuple fédéré, les Francs ont vécu plusieurs générations dans l'Empire romain et en ont intégré la culture lorsque celui-ci s'effondre à la fin du Ve siècle. Ils apprennent et écrivent le latin, ne cherchant pas à écrire leur langue germanique, et se lient conjugalement aux élites gallo-romaines en place. Lorsque des textes sur les mythes de la nation franques sont rédigés au VIe siècle, ils ne reprennent ni les mythes germains, ni a fortiori les gaulois, mais bel et bien les mythes romains. Ils créent ainsi une généalogie faisant remonter les lignées royales à la ville de Troie, en imitation des idéaux de l'élite romaine[5].

Par ailleurs, l'évènement majeur qui fait encore davantage entrer les Francs dans la romanité est le baptême de Clovis. Abandonnant son ancienne religion et poussant son peuple à faire de même, il intègre un christianisme qui a repris les cadres culturels romains. Cette conversion facilite le ralliement des élites gallo-romaines à son pouvoir tout en lui conférant un prestige particulier. Il est ainsi comparé à l'empereur de Constantinople comme protecteur du peuple élu de Dieu[6]. Cette acculturation est facilitée à la fois par le faible nombre de Francs par rapport à la population au sein de laquelle ils s'insèrent, au plus 10 % de cette dernière, et par le fait que tous les autres peuples chassés de leurs terres et s'installant en Gaule font de même, Wisigoths et Burgondes pour l'essentiel[7].

La lente apparition de la langue française

Un élément fondamental dans l'apparition de la culture française est l'apparition de la langue française. La période de cette apparition fait débat entre les spécialistes car la langue gallo-romaine, une forme de latin vulgaire locale également nommée le gallo-roman, se nourrit autant d'une déformation du latin naturelle que d'une certaine influence des langues germaniques qui restent parlées, tel le vieux-francique. Il existe durant des siècles une cohabitation linguistique.

Or, seule la culture latine de cette époque nous est parvenue, et donc une fraction importante de la culture de la population franque ou sous domination franque nous est inaccessible. Toutefois, le peuple gallo-romain illettré comprend le latin, au moins sous sa forme vulgaire. On en a la preuve car les prédicateurs n'ont pas besoin de traduire leurs sermons aux Ve et VIe siècles[8].

En revanche, à partir de la renaissance carolingienne, cette difficulté se pose. Les élites religieuses entreprennent une restauration d'un latin plus conforme à celui dans lequel les écrits sacrés ont été rédigés, mais ils s'aperçoivent vite que le peuple ne comprend plus ce latin. Ainsi, le Concile de Tours mentionne pour la première fois l'obligation pour les prédicateurs de ne pas porter le message divin en langue sacrée, mais dans la langue du peuple auquel il s'adresse. Cette décision de traduction marque le passage d'une culture où élite lettrée et masse analphabète pouvaient se comprendre à une situation culturelle où l'accès à une forme fondamentale de la culture n'est plus accessible à la grande majorité de la population[9].

Culture tardo-antique et culture chrétienne (Ve – VIIe siècles)

Les différentes formes de la culture littéraire et intellectuelle romaine tardive connaissent une remarquable continuité au cours des trois siècles qui suivent la chute de l'Empire romain d'Occident. Les différentes invasions et déplacements de populations n'affectent pas fortement les formes culturelles écrites que les archéologues et historiens sont à même de percevoir[10].

En revanche, les arts manuels sont fortement impactés par les évolutions politiques, la disparition ou le rétrécissement des villes ; les foyers de tradition artisanale et les lieux d'échanges se réduisent fortement ou s'éteignent. Les créations artistiques se sont progressivement concentrées dans les villes épiscopales majeures et les capitales des différents peuples ou hauts dignitaires[11].

Culture littéraire et intellectuelle

Première page du texte de la Règle pastorale dans un manuscrit produit vers 600 (Troyes, Bibliothèque municipale MS 504).

La culture latine classique ne disparaît pas avec l'effondrement politique de l'empire romain d'occident. Les populations gallo-romaines, parlent le latin et entretiennent une culture classique malgré les changements politiques. Si les écoles urbaines disparaissent lentement, elles sont remplacées par un enseignement familial, et surtout, à partir du VIe siècle, par l'apparition d'écoles épiscopales et monastiques qui entretiennent les bases de l'enseignement de la grammaire latine, en recopiant des textes antiques qui servent de base à l'apprentissage.

Au VIIe siècle, la culture écrite n'est plus portée que par les religieux, l'immense majorité des élites laïques ne sachant plus lire et écrire[S 1].

Les dernières formes de la culture antique tardive (400-500)

Sur l'ensemble des Gaules, malgré la prise de pouvoir de différents peuples (Francs, Wisigoths, Burgondes), l'usage de l'écrit, en latin exclusivement, se maintient durant tout le Ve siècle. De nombreux témoignages prouvent que des grammairiens et des rhéteurs officient toujours sous de nouveaux maîtres. Les auteurs antiques restent la référence et étudiés, les formes classiques du discours ne sont pas perdues et encore employées. En 467, Sidoine Apollinaire compose et prononce un carmen en l'honneur de l'empereur Majorien dans la tradition des panégyriques d'empereurs ; Avit de Vienne, quelques années plus tard, prononce un discours d'apparat en l'honneur du baptême de Clovis construit strictement selon les règles de grammaire et de rhétorique classiques[12].

Écoles ecclésiastiques et monachisme (500-650)
Psautier pourpré dit de saint Germain, vers 500-550. BNF. Inv. Latin 11947, folio 101 verso.

Les écoles antiques classiques[S 2], urbaines et laïques, disparaissent au cours du VIe siècle. On le détecte à la disparition d'un certain vocabulaire juridique qui ne s'acquiert que dans ces structures. Si dans certaines grandes cités[N 1], elles ont pu subsister quelque temps, le consensus estime qu'elles sont toutes arrêtées au VIIe siècle[13].

Simultanément, pour des raisons religieuses, des écoles ecclésiastiques naissent et reprennent l'apprentissage du latin, de sa grammaire. Si des traces d'enseignement de la langue latine se retrouvent au cours du Ve siècle auprès de clercs, le premier marqueur de ce développement est le concile de Vaison de 529 qui postule dans le royaume burgonde que « chaque prêtre de paroisse rurale doit prendre chez lui des lecteurs et leur enseigner le psautier, les textes saints et la loi divine ». Édicté par Césaire d'Arles, ce canon pousse à l'enseignement de la lecture au plus près des populations, et les historiens constatent le développement de nombreuses écoles paroissiales sur l'ensemble de l'ancienne Gaule. Césaire d'Arles a également participé à la constitution d'école ecclésiastiques urbaines, rassemblant autour de lui une communauté de clercs et organisant en leur sein un enseignement de la langue latine. Les premières écoles de ce type connues concernent dès la fin du VIe siècle autant la Gaule du sud (Bourges, Poitiers, Clermont, Lyon) que celle du nord (Vermand, Reims, Metz, Tongres, Paris)[14].

Au cours des VIe et VIIe siècles, les anciennes Gaules se couvrent de monastères, jusqu'à plus de deux cents. Beaucoup d'entre eux vivent avec des règles qui organisent des études visant à comprendre et lire les textes sacrés. D'autres, tels ceux suivant la règle établie par l'irlandais Colomban accordent moins d'importance aux études, sans jamais l'exclure. Il s'agit surtout pour ce dernier de ne pas laisser les moines être distrait par de la littérature profane[15].

Durant le VIIe siècle, la spiritualité colombanienne se répand largement au sein de toute la Gaule. Touchant un certain nombre de laïcs et de nombreux monastères, les immigrants irlandais influencent fortement l'esprit de l'église franque et au-delà. Provoquant un renouveau de la conscience religieuse, ils demandent aux croyants de revenir aux textes sacrés, et donc de savoir les lire et de disposer des textes. Sans avoir de volonté de restauration culturelle, ce mouvement a poussé au développement de lieux d'étude et de copie au sein des monastères[16].

Contraction puis maintien de la culture écrite (650-750)
Première page du Psautier de Corbie (vers 800-810), bibliothèque municipale d'Amiens.

Durant la période 650-750, l’illettrisme chez les laïcs atteint un niveau important, la plupart ne sachant même plus signer les actes officiels. La culture savante n'est donc portée plus que par les évêques et les monastères, qui conservent et copient des ouvrages de l'antiquité, religieux pour l'immense majorité. Ces centres monastiques restent actifs et produisent des textes, développent l'art de l'enluminure et font produire quelques réalisations architecturales notables[17].

Les monastères les plus actifs à cette période sur le plan de la copie et de l'enluminure sont Laon, Chelles, Saint-Denis, Meaux, Fleury, Tours et Corbie. C'est au sein des deux derniers que l'on distingue l'apparition des prémisses de ce qui devient plus tard la minuscule caroline. Il est délicat d'analyser une production intellectuelle au sein de ce qui est avant tout un immense travail de copie. Il ne faut toutefois pas perdre de vue que recopier signifie à cette époque modifier pour améliorer si les copistes[N 2] le jugent utile. Il existe également une production originale, essentiellement des hagiographies de saints locaux. Citons ainsi la Vie de sainte Salaberge rédigée à Laon au début du VIIIe siècle ou la Vie de saint Wandrille écrite avant 688 à Fontenelle. Parmi les textes qui sortent de ce schéma, il y a la Vision de Barontus, récit d'un voyage de l'âme dans l'au-delà composé vers 678 par un moine de Saint-Cyran[18].

Au début du VIIIe siècle, des signes indiquent que les maires du palais pippinides redonnent une certaine importance au savoir religieux. Pépin II a ainsi aidé l'évangélisation des Frisons en établissant un monastère à Echternach pour le missionnaire Willibrord. Son fils Charles Martel agit de même avec Boniface pour qui il fonde le monastère de Fulda. Mais il entretient également à sa cour un petit cercle de lettrés, qui poursuivent la rédaction de l'histoire des francs ou recopient la loi salique en l'agrémentant d'un prologue à la gloire des Francs. Les maires du palais se rapprochent beaucoup au début du VIIIe siècle du monastère de Saint-Denis, notamment pour en faire le lieu de l'onction royale de Pépin III par le pape Étienne II[19].

L'art en Gaule du Ve au VIIe siècle

Paire de fibules ansées digitées mérovingiennes, Archéa, Louvre.

Si les formes artistiques antiques restent présentes durant cette période, elles sont influencées par les apports des Francs[16]. Les historiens de l'art ont des difficultés pour appréhender les évolutions et les particularités culturelles de cette période, les traces subsistant étant peu nombreuses et fragmentées. Que ce soit pour les arts somptuaires, l'architecture, les traditions funéraires, la sculpture au sein de monuments religieux ou la peinture, ce qui est parvenu à nous n'est qu'une petite partie de la production des artistes et artisans de l'époque.

Arts somptuaires

Les traces de l'art somptuaire de cette époque sont souvent maigres et il a fallu les travaux de nombreux archéologues à la fin du XXe siècle pour parvenir à dresser des séries de fibules ou de plaques-boucles[20]. Les séries établies ne permettent pas d'établir de ligne de partage claire entre ce qui relève spécifiquement de la culture gallo-romaine et de la culture germanique, l'une comme l'autre étant déjà tout à la fois hétéroclites et ouvertes aux apports extérieurs[21].

Durant la période du Ve au VIIe siècle, l'aire culturelle germanique, tout en conservant la tradition typiquement nordique pour l'abstraction, a intégré tout à la fois des influences du sud des Gaules et de la Lombardie (taille biseautée, traitement animalier) et de l'Irlande (formes linéaire et géométrique, avec également des motifs d'animaux)[21].

Architecture

L'architecture mérovingienne prolonge dans ses formes les monuments antiques, la dynastie franque et les autres commanditaires maintenant une forte continuité entre le Ve et le VIIe siècle[22]. La connaissance fine des apports spécifiques et des particularités artistiques propres aux Francs des Ve, VIe et VIIe siècle est complexe car l'essentiel des ouvrages d'art ont disparu, ne subsistant que des soubassements lacunaires et des mentions textuelles imprécises. Il n'est ainsi possible de repérer que des généralités sur cette période[23],[24].

Les basiliques funéraires ont été financées par les rois, reines et grands dignitaires de la dynastie mérovingienne, pour abriter les tombes et reliques des saints majeurs de la chrétienté et accueillir les nombreux pèlerins qui viennent adorer ces derniers. Les basiliques sont encore édifiées majoritairement à l'extérieur des cités, près d'une nécropole. Leurs formes sont influencées par l'Orient, avec une nef se terminant par une abside et dépourvue de transept[25].

Si certaines cathédrales ont été érigées de la volonté de rois, la plupart sont issues de l'initiative des évêques. Nombreuses sont celles qui suivent un plan type constituant un groupe épiscopal avec une ecclesia major, une église plus petite située juste à côté, un baptistère et une demeure épiscopale[25].

Si l'architecture mérovingienne adopte un grand nombre de traits issus de l'Antiquité et de l'Orient, elle adopte quelques caractéristiques qui attestent d'une certaine variabilité et d'une forme d'autonomie locale des formes architecturales : les placages d'arcade sur colonne contre les parements internes et externes de l'édifice, ou le fait que le matériau majoritairement utilisé est la pierre et non la brique[25].

Sur la période allant du Ve au VIIe siècle, les chercheurs ne détectent pas d'architecture spécifique aux nombreux monastères qui apparaissent dans l'aire culturelle franque. Les établissements sont le plus souvent modestes, en bois, ou récupérant d'anciennes villas romaines. Les églises construites, quelquefois plusieurs par monastère, n'ont pas l'ampleur et le prestige des basiliques et cathédrales urbaines. Il ne semble pas que l'architecture monastique de cette époque ait connu de crypte[26].

Traditions funéraires

Les habitudes funéraires en Gaule n'évoluent qu'assez peu entre le Ve et le VIIe siècle. Les archéologues notent bien l'apparition et le développement parmi l'élite militaire franque de l'inhumation en armes, mais cette évolution est une rupture avec leurs traditions antérieures où ils se faisaient plutôt incinérer. C'est une innovation apparue aux alentours des IVe et Ve siècles avec le développement d'une caste militaire avec les migrations, et qui s'est imposée au sein de l'aire culturelle mérovingienne[20].

La grande masse des monuments funéraires sont des sarcophages en calcaire ornés de motifs géométriques simples et de croix, taillés en relief de faible épaisseur, ou uniquement ciselés à la broche ; le mode de représentations dominant étant le méplat. Les exemples de représentations figuratives sont exceptionnelles, comme celles du panneau de tête du cénotaphe d'Agilbert à l'abbaye de Jouarre ou le sarcophage de Chrodoara de la collégiale Saint-Georges-et-Sainte-Ode d'Amay[24].

Au sein de l'aire culturelle des anciennes Gaules, il est possible de déterminer des particularismes locaux dans le domaine des monuments funéraires. Dans le sud-ouest et la Provence, les sculpteurs ont adopté des motifs essentiellement géométriques et des séries de motifs simplifiés, dans le Poitou, seuls les couvercles sont décorés et dans la région de Paris les décors, qui occupent également les côtés de la cuve se distinguent par un très faible relief et une simplification extrême des motifs[27].

Sculptures ornementales

L'art de la sculpture s'étiole avec l'extension du christianisme, la nouvelle religion étant iconoclaste par principe. À l'art antique de la représentation fidèle des corps succèdent les styles plus abstraits des peuples germains ou irlandais, portés par l'excellence de l'orfèvrerie, spécialité des nouveaux maîtres de la Gaule[28]. Des techniques semblables s'observent entre les tailleurs de pierre et les orfèvres, telle la taille en biseau, entrainant une raideur caractéristique au décor réalisé, ainsi qu'un effet graphique. De même, il arrive régulièrement que des pierres semi-précieuses et des pâtes de verre soient insérées dans des dalles de pierres, à la manière de l'incrustation de plaques de métal[29].

La sculpture mérovingienne s'inscrit dans un mouvement plus large de continuité des formes antiques, tout en s'individualisant partiellement avec le temps, notamment des arts lombards. Les deux centres de la sculpture de la Gaule antique, la Provence et le Sud-ouest, poursuivent leur activité sous les Francs. La transmission du savoir et des styles est principalement repérée au sein des ateliers d'Aquitaine[30].

Le champ d'expression de la sculpture s'est fortement réduit, les maîtres laïcs et ecclésiastiques qui financent les constructions de monuments chrétiens limitant les zones d'expression au sein des églises aux chapiteaux, et au-delà aux sculptures funéraires. Le répertoire de formes évolue rapidement et dès le Ve siècle, il se concentre sur les symboles chrétiens : croix, rosace, lierre, serpent et figures humaines de saints. Pour les réaliser, les sculpteurs utilisent comme en Lombardie le méplat et les formes linéaires, mais de manière plus austère et plus accentuée. Entre le IVe et le VIIIe siècle, l'objet de culte, et donc de représentations principal est la Sainte Croix. Ce symbole fait l'objet d'un grand nombre d'érections, que ce soit dans ou à l'extérieur des églises[31].

Enluminures

L'art pictural du VIe au VIIIe siècle ne nous est connu que par les manuscrits enluminés. Il a existé des peintures murales religieuses mais aucune ou presque ne nous est parvenue, même si quelques indices laissent penser que c'est art n'a pas été marginal[32].

Sauf exception rarissime, l'art de l'enluminure est un art monastique. Les principaux centres artistiques sont alors les monastères de Corbie, de Laon, de Chelles, de Soissons, de Fleury, de Tours et de Luxeuil. À plusieurs reprises, les répertoires de formes sont copiés et recopiés d'un centre à l'autre, au travers d'une grande circulation des manuscrits[33]. La principale influence de l'art de l'enluminure en pays franc est irlandaise, au point que les spécialistes ont le plus grand mal à établir si un ouvrage de cette époque a été réalisé en Irlande, par un Irlandais en terre mérovingienne ou par un moine franc fortement inspiré par ces derniers. Les artistes du sud de l'Europe ont également influencé les enlumineurs francs[34].

« La miniature continentale pré-carolingienne [...] touche à deux mondes, insulaire et méditerranéen. Par ses moyens d'expression, elle semble être plus proche du premier. Le dessin à la plume, parfois au pinceau, est la technique de base de la miniature, qu'elle soit une représentation figurée, un symbole ou un ornement. Souvent, l'espace entre les lignes est couvert de couleurs, formule qui donne aux objets ainsi représentés et aux lettrines un certain volume ; cependant, sauf dans quelques cas isolés, la couleur n'est pas employée pour créer le modelé »[35].

Culture carolingienne (VIIIe – Xe siècles)

La culture carolingienne est issue en premier lieu des initiatives des maires du palais pippinides lors du VIIe siècle. Ce mouvement est amplifié par leurs successeurs et Charlemagne entreprend en plus de concentrer dans le cœur de l'empire franc des influences de plusieurs cultures issues de nombreux endroits du continent européen : Italie, Espagne et Îles britanniques[36],[S 3].

Initiatives culturelles carolingiennes

Sacramentaire gélasien, copie de 750, Bibliothèque apostolique du Vatican, Reg. Lat. 316. Folios 131v/132.

L'essentiel des initiatives culturelles des rois carolingiens s'inscrit dans le cadre de la défense et de l'expansion de la chrétienté. Les liens entre les élites franques et le pouvoir de Rome est resserré, en témoigne les nombreux échanges épistolaires conservés entre les papes et les rois carolingiens, dès Charles Martel et ses fils. Ceux-ci accueillent des dignitaires romains et leur octroient des places épiscopales, tout en faisant imiter par les églises de leurs terres la liturgie romaine. Le chant romain est ainsi enseigné dans de nombreux centres religieux et le premier missel, le Sacramentaire gélasien est issu de Rome[37].

L'action des rois carolingiens

Charlemagne maintient cette proximité, se rend à plusieurs reprises à Rome, notamment pour recevoir la couronne impériale en 800. Il fait venir dans ses capitales plusieurs lettrés importants, dont Alcuin, Paulin d'Aquilée ou Paul Diacre, ainsi que des artistes qui influencent fortement les centres de production francs. Le pape Hadrien Ier envoie à Charlemagne la collection canonique Dionysio-Hadriana, qui servira de base au droit canonique des pays francs[37].

Plan de l'abbaye de Centula, première fondation de Charlemagne à présenter un massif occidental (westwerk).

À l'époque de Charlemagne, une innovation architecturale apparaît, répondant à une évolution de la pratique cultuelle. Les églises nouvelles sont pensées avec un massif occidental élaboré, permettant le déploiement d'une liturgie pascale complexe, et un chœur dédié aux saints et apôtres, avec des espaces de circulation autorisant de multiples processions. Ce schéma devient la norme et se répand au sein de l'espace carolingien[S 4]. Le massif occidental est à la base des façades harmoniques flanquées de deux tours qui seront présentes dans la majorité des édifices romans et gothiques[38].

Enfin, Charlemagne promeut un rétablissement de la discipline et de l'instruction du clergé, de manière plus accentuée que son père, à la fois dans un souci pastoral qu'administratif, pour disposer d'un personnel compétent pour rédiger lois et instructions[39].

Il rassemble autour de lui une cour de lettrés dont une grande partie n'est pas issu du monde franc mais d'aires culturelles étrangères. La bibliothèque d'Aix-la-Chapelle s'enrichit de nombreux classiques latins, qui reprennent une place éminente dans l'étude au sein du centre politique carolingien. Il s'y réunit des ouvrages de Salluste, Cicéron, Claudien, Lucain, Stace, Térence, Juvénal, Martial et Tibulle, à côté de nombreux traités de patristiques ou d'ouvrages liturgiques[40].

L'apport des cultures étrangères

L'essor intellectuel du début de la période carolingienne ne provient pas d'une volonté politique, les rois ayant essentiellement insisté sur la constitution d'un clergé formé pour porter le peuple vers Dieu. Mais ce premier but a abouti à une renaissance plus large de la culture, visible au travers d'une production littéraire inédite du milieu du VIIIe siècle à la fin du IXe[S 5]. « Ce renouveau n'est pas né brusquement dès l'avènement de Charlemagne. Il a été préparé et devancé par des renaissances intellectuelles, en Espagne, dans les îles britanniques et en Italie. Il a été aidé alors par l'arrivée des étrangers en Francia »[41].

Les lettrés venus d'Italie revivifient l'étude du latin et des lettres classiques dès les années 770. Les savants italiens les plus notables à résider auprès des élites carolingiennes sont Pierre de Pise, Paul Diacre, Paulin et Fardulf[41].

Durant le règne de Charlemagne, de nombreux érudits espagnols viennent à la cour ou plus largement dans le monde franc. L'influence de la pensée des élites espagnole se voit dans les remous provoqués dans le royaume carolingien par l'hérésie adoptianiste venue d'Espagne et portée par Élipand de Tolède et Félix d'Urgel. Condamnée par le concile de Francfort en 794, elle est un signe de l'influence des milieux religieux espagnols au sein du monde franc. Cette influence est également portée par de grands personnages dont Théodulf, Claude de Turin[N 3], Agobard, Benoit d'Aniane ou Prudence de Troyes, qui témoigne de la présence des traditions wisigothiques dans le monde franc[41],[42].

Peinture de Godescale dans l'évangéliaire de Charlemagne. 781-783, BNF.

Plusieurs savants anglo-saxons ont contribué à restaurer l'église franque au VIIIe siècle. Les premiers d'entre eux sont Willibrord et Boniface, et celui qui a l'aura la plus importante sous Charlemagne est Alcuin. Les monastères et évêchés des îles britanniques ont également fortement alimentés en ouvrages d'auteurs antiques les bibliothèques carolingiennes, tout comme de nombreux scribes anglais ou irlandais sont venus des îles pour renforcer ou former les personnels des scriptoria franques. La venue de moines irlandais et anglais dans l'aire culturelle franque est continue et se renforce encore après le partage de 843, leur rôle dans la copie d'ouvrage ou la production littéraire religieuse étant majeur. La personnalité emblématique de cette influence du IXe siècle est Jean Scot, qui maîtrisant le grec entreprend des traductions et rectifications de textes auprès de Charles le Chauve entre 850 et 870. Cette influence se fait également sentir dans le domaine de la peinture, avec tout à la fois la transmission de modèles antiques et des formes caractéristiques de l'art d'outre-Manche[43].

Géographie des centres culturels
Centres d'études carolingiens, VIIIe et IXe siècles.

À cette époque, la lente évolution de la migration des centres culturels dans l'ancienne Gaule du sud vers le nord est achevé. Sous les Carolingiens, les principaux centres de recherches théologiques, littéraires, philosophiques ou artistiques sont situés dans le cœur de l'empire franc. Il s'agit des régions du nord, du centre et de l'est de la France actuelle, ainsi que des espaces germaniques du monde franc. Les limites de cette aire culturelle sont Tours à l'ouest, Lyon au sud, Fulda ou Reicheneau à l'est. Le sud actuel de la France ne présente pas de lieu de culture notable, à l'exception de quelques abbayes de Septimanie telles Maguelonne, Aniane, Gellone et Psalmody[44].

Les principaux centres de culture au nord de la Gaule sont les abbayes de Saint-Amand avec le poète et musicien Hucbald, Saint-Riquier avec le poète gendre de Charlemagne Angilbert et Corbie qui connaît des lettrés importants tels Maudramme ou Adalhard et des théologiens notables tels Paschase Radbert et Ratramne[44].

Évangiles d'Ebbon : Saint Luc et grande initiale Q marquant le début de son Évangile. Hautvillers, deuxième quart du IXe siècle. Épernay, Bibliothèque municipale, ms. 1 fol. 90v-91.

Au nord-est, les centres d'études les plus importants sont les sièges des évêchés de Reims et Laon. Le scriptorium de Reims, notamment sous la direction de l'abbé Ebbon ou de l'archevêque Hincmar de Reims produit un certain nombre de plus beaux exemples d'enluminures carolingiennes avec un style qui lui est propre[N 4], qui influencent fortement la production occidentale. À Laon, le centre d'étude, qui produit également de nombreux manuscrits enluminés, officient de nombreux maîtres tels Hincmar de Laon, Bernard, Adelhelm et des écossais[44].

En Lotharingie, Metz, sous la direction de Chrodegang (mort en 766) est à l'origine de la réforme liturgique de l'empire et met en place une école de chant réputée. Ce centre d'étude produit également des ouvrages prestigieux dont le sacramentaire de Drogon. L'abbaye Saint-Michel de Saint-Mihiel est célèbre pour la rédaction d'un manuel de gouvernement, le Miroir du prince de l'irlandais Smaragde[44].

Autour de Paris deux abbayes concentrent les savants et scriptoria les plus importantes : Saint-Denis et Saint-Germain-des-Prés. Proche du pouvoir politique, Saint-Denis produit plusieurs manuscrits de luxe et possède une vaste bibliothèque. Saint-Germain-des-Prés connaît des lettrés tels Usuard ou le poète Abbon[45].

Dans le centre-est de l'actuelle France, l'abbaye de Ferrières a une tradition d'étude sérieuse avec l'abbé Loup, grammairien, exégète et théologien, élève de Raban Maur et, parmi ses élèves, Hérix d'Auxerre. Auxerre justement développe deux écoles, celle de l'épiscopat et l'école monastique de Saint-Germain. Muretach, Haymon, Héric puis Rémi s'y succèdent et travaillent sur les textes sacrés mais aussi des auteurs de l'antiquité tardive[45]. Lyon est également un centre d'étude important, avec une école de lecteur et de chantres. Les grands noms de ce centre culturel sont Leidrade, Agobard, Amolon et Rémi, mais surtout le diacre Florus, « un des plus grands savants de son époque : on conserve quarante-deux manuscrits annotés de sa main dans les domaines du droit, de la liturgie, de l'exégèse et de la patristique »[46].

L'espace culturel de cette époque ne correspond pas à la France actuelle et s'étend alors commun aux actuels Benelux, Allemagne et Suisse avec comme lieu culturel important l'évêché de Liège ou d'Utrecht, et les abbayes majeures de Fulda, Saint-Gall et Reichenau[45].

Structures de la culture carolingienne

Plan de l'abbaye de Saint-Gall, haut lieu culturel carolingien, IXe siècle, Stiftsbibliothek Sankt Gallen.

Les connaissances que l'on a de la culture des Francs à cette époque est, comme pour les époques précédentes, limitées à une petite élite. Et celle-ci n'est pas un milieu homogène et stable. Les îlots de culture que l'on peut entrevoir sont essentiellement liés à un maître prestigieux qui réunit à un endroit une bibliothèque, des élèves et des compagnons. Mais ces lieux ne perdurent pas au départ ou au décès de leur initiateur. Ainsi, l'école de Fulda rayonne sous la direction de Raban Maur, et décline après lui, ou celle de Laon qui s'efface à la fin du IXe siècle. Le seul centre d'étude qui présente une réelle continuité à travers l'ensemble de la période carolingienne est le monastère de Saint-Gall[47].

Une des caractéristiques de la culture carolingienne est l'interdépendance des différents centres d'études. Les lettrés et érudits se déplacent, discutent et font voyager les textes et idées. Il y a véritablement une grande unité culturelle du monde franc, même si des nuances existent sur le plan intellectuel ou artistique[48].

La culture écrite

L'apport central des savants carolingiens sont l'étude et la transmission de l'écriture et de la grammaire latine. La volonté de lire et comprendre les textes hérités de l'antiquité, surtout les écrits religieux, ont poussé les lettrés et les princes à développer l'enseignement d'une écriture plus aisée à tracer, la minuscule caroline et de la grammaire latine, qui permet la pleine compréhension des textes sacrés et profanes[49].

Les textes et l'écrit, qui ont une importance énorme en tant qu'accès au savoir des anciens, se retrouvent dans le soin et la somptuosité mise dans les livres, enluminés, ornés de plaques de métal précieux ou d'ivoire, et quelquefois de gemmes. La culture carolingienne est également celle qui met en place de nombreux lieux de copies[50] au sein de centres épiscopaux, royaux, d'abbayes ou de monastères[51] ; et des bibliothèques qui pour beaucoup traverseront les époques[52]. L'étude de la grammaire se développe, à la fois au travers de la création de textes d'aide à l'apprentissage de cet art, mais également avec un souci de retrouver un latin le plus correct possible[53].

Les lettrés de l'époque connaissent les arts libéraux antiques, notamment au travers de la lecture des textes de Martianus Capella ou de Boèce, mais ils ne les étudient et les pratiquent qu'assez peu. Grammaire et rhétorique, pas toujours bien distinguées l'une de l'autre, sont enseignées pour leur utilité ecclésiale mais la dialectique, même si sont statut de couronnement du trivium est célébré, est très peu utilisée. Seul Jean Scot, notamment pour répondre aux théories de Gottschalk l'emploie[54]. Quant aux disciplines du quadrivium, elles sont à peine travaillées à cette époque[55].

Les savants de l'époque franque ont de faibles connaissances en médecine, et ne l'envisagent pas comme une science expérimentale. Les médecins sont des lecteurs de textes antiques, essentiellement issus des écrits de Cassiodore[56].

L'ambition des savants et érudits de cette époque n'est jamais de construire une œuvre originale, de parcourir de nouveaux horizons intellectuels mais de comprendre au mieux les textes des anciens, et surtout la bible, pour être fidèle à leurs messages et à leur savoir. Il n'existe pas à cette époque de travail intellectuel novateur, posant les bases de nouvelles réflexions sur la religion ou le monde. La grammaire, la rhétorique, toutes les études savantes servent pour connaître Dieu. C'est pour cette raison qu'il y a si peu à cette époque de textes proprement théologiques, mais seulement des gloses de textes anciens[57].

Les arts sous les Carolingiens

Sous les Carolingiens, l'art franc sous toutes ses formes se place dans la continuité directe de l'héritage mérovingien, et donc antique ; mais également sous l'influence de courants artistiques issus d'autres aires culturelles, anglo-saxonne, italienne ou byzantine. La culture franque ne connaît pas de style unifié, chaque atelier établissant son corpus de formes et de techniques[58]. Au sein de cette diversité, une tendance de fond menant à la mise au premier plan des figures humaines se relève dans l'ensemble des aires culturelles franques[59]. Là où à l'origine, seuls les portraits des évangélistes illustraient un texte, une multitude d'images nouvelles apparaissent, chargées d'un message doctrinal de plus en plus net. « L'époque carolingienne prépare ainsi l'essor des compositions iconographiques savantes futures »[60].

L'enluminure

L'enluminure, après une période de faible production sous les mérovingiens, devient un art majeur sous les carolingiens. Les décors sont marqués par les motifs zoomorphes et l'imitation des formes d'orfèvrerie. Les thèmes exploités sont fortement chargés en symboliques, que ce soit la croix, le cerf ou la colombe représentant le fidèle, l'aigle pour l'esprit saint ou le poisson associé au Christ. Sous la nouvelle dynastie, l'importance de la figure humaine et du naturalisme à l'antique s'accroît[61]. Apparaît également l'usage de l'initiale historiée avec le sacramentaire commandité par Drogon au milieu du IXe siècle, et qui connaît un essor considérable par la suite[62]. L'influence irlandaise transparaît dans plusieurs travaux d'enluminures avec un rejet quasi total des figures humaines pour déployer des spirales, des entrelacs, des formes zoomorphes ou végétales, avec des couleurs disposées uniquement en à-plat ; un exemple typique de cette tendance étant la seconde bible de Charles le Chauve réalisée entre 871 et 877[63].

L'orfèvrerie et la sculpture sur ivoire

L'orfèvrerie connaît à partir de Charlemagne un essor important dans la quantité et la qualité de sa production. Tournée essentiellement vers l'art sacré, il produit à cette époque des pièces d'une très haute technicité. De nombreux travailleurs du métal précieux n'hésitent pas ainsi à unir dans une seule création des procédés éloignés les uns des autres tels le sertissage, le cloisonné ou le repoussé. De même, les commanditaires n'hésitent pas à accumuler sur les objets liturgiques des richesses exceptionnelles, qu'ils concentrent pour orner l'ensemble des objets entourant l'autel des fondations religieuses les plus importantes[58]. Parallèlement à l'enluminure, la sculpture sur ivoire renaît sous Charlemagne. Très liée au domaine du livre, sa production est presque exclusivement destinée à la reliure, ce qui explique que l'iconographie gravée dessus soit intimement liée à l'enluminure. La tradition de la sculpture sur ivoire antique ayant été perdue sous les Mérovingiens, un retour aux sources s'est opéré, qui explique que les formes employées soient fondamentalement issues des auteurs anciens[64].

L'architecture et la sculpture

L'architecture de l'aire culturelle franque se caractérise par trois éléments : l'esprit de grandeur, le retour à une structure basilicale et l'agencement recherché d'un nombre croissant d'éléments architecturaux. Mais cette vision est partielle ; la plupart des édifices bâtis à cette période n'existent plus et leur compréhension repose donc sur les éléments archéologiques et les sources écrites contemporaines[65].

La volonté de grandeur pour les édifices religieux se retrouve essentiellement dans les constructions voulues par les rois et leurs proches, en Austrasie et Neustrie. La volonté d'une imitation de l'Antiquité trouve également son origine au cœur du pouvoir franc, avec comme modèle les basiliques de la Rome antique tardive. Les nouveautés par rapport à ce modèle initial sont l'invention d'une façade monumentale et la recherche d'un équilibre entre « le mouvement horizontal engendré par la structure basilicale et la stabilité de la forme propre aux masses étagées du chevet et de la façade »[66]. Par ailleurs, une autre nouveauté apparaît à cette époque, répondant au besoin de faire circuler les pèlerins et visiteurs venus se recueillir devant la tombe du saint fondateur de l'édifice sans perturber la vie de la communauté locale, ecclésiale ou monastique. Des déambulatoires apparaissent donc, en premier lieu modestes et destinés à circuler au sein des cryptes où reposent les saints vénérés (tel à Auxerre ou Flavigny-sur-Ozerain), puis de véritables espaces organisés arrondis autour du chœur, le saint fondateur reposant souvent sous le maître-autel (comme à Clermont-Ferrand ou Saint-Maurice-d'Agaune)[67].

Le décor sculpté, quant à lui, répond fortement à cette époque aux normes classiques de l'architecture, et est influencé par le monde méditerranéen et reprend pour l'essentiel les modèles antiques, sans figuration. À cette tendance de fond s'ajoute, pour les réalisations dans l'espace alpin, l'emploi de stuc peint[68]. Les premières sculptures d'églises figuratives, encore modestes, ne datent que du Xe siècle, mais la sculpture romane ne se déploie réellement qu'après l'an mil[69].

La société féodale (XIe – XIIIe siècle)

Pour un article plus général, voir Moyen Âge central.

Sources et problématiques

L'étude des structures culturelles de la période comprise entre l'an mil et la fin des Capétiens est toujours fortement contrainte à une fraction très minoritaire de la société, les élites ; les sources permettant des analyses et synthèses solides pour l'immense majorité pauvres et rurales de la société restant trop parcellaires. L'histoire culturelle de cette période reste donc, comme pour les périodes précédentes, celles des clercs et d'une fraction de l'aristocratie. Par ailleurs, la langue qui porte cette culture est encore très majoritairement le latin, les quelques textes en langue vulgaire de cette période ne permettant pas d'avoir une vision de ce que pouvait être la culture en langue commune.

Documentation disponible

L'histoire culturelle de la période féodale (XIe – XIIIe siècle) souffre des sources documentaires disponibles, textes religieux, documents juridiques et administratifs, qui excluent quasiment totalement ce qui constitue le mode normal de transmission de la culture pour la population de cette époque : l'oralité. Les traces permettant de saisir la culture orale de tous les jours, mais également la réceptions par la population des constructions culturelles construites par les élites manquent cruellement à l'historien, qui doit se contenter d'éléments épars et indirects, et être très prudents sur les conclusions à apporter. Les retranscriptions des cultures orales n'existent qu'à la fin du Moyen âge[70].

Approche théorique

Dans l'étude de la culture du Moyen âge féodal, un certain nombre de contraintes s'imposent à l'historien, qui doit admettre que des aspects de son champ d'étude lui resteront plus ou moins fermés.

Même si cette période connaît un développement des structures d'enseignement, le savoir écrit reste l'apanage d'une infime minorité, et la culture littéraire à laquelle nous avons accès ne peut donc représenter correctement la culture globale de la société. La déformation inévitable entre ce qui a été rédigé par quelques-uns et le vécu de l'ensemble de la population impose une grande prudence dans l'analyse de la culture française de cette période[71].

L'étude de la culture des femmes sur cette période est d'autant plus délicate. Les textes issus d'une femme sont rarissimes et les discours dont disposent les chercheurs est non seulement masculin, mais également façonné quasi exclusivement par des clercs. Il les exclue de toute instruction, même pour les femmes de l'élite aristocratique, et savoir ce qu'elle pensent ou ce qu'elles ont comme pratique culturelle est très difficile[71].

Les lieux de culture

Les lieux de culture évoluent fortement durant les trois siècles du milieu du Moyen âge. Les lieux d'enseignement quittent progressivement les monastères pour s'insérer pleinement dans les villes, et les maîtres évoluent[S 2]. S'ils sont encore théoriquement des clercs, leur insertion dans la vie profane se développe et prend le dessus sur leurs origines cléricales[72]. Les lieux de culture française dont on a des traces se situent dans les cours des élites aristocratiques, qui exportent la culture française notamment via la langue, en dehors du territoire du royaume de France.

Les écoles

Au XIe siècle, les écoles issues des fondations carolingiennes produisent très peu de textes, et sont donc très mal connues. Les traces d'influence perçues ont systématiquement pour origine les écrits d'un maître prestigieux, tel l'abbaye du Bec avec Lanfranc de Pavie et Anselme du Bec[73].

Durant cette époque, les écoles monastiques se ferment en restreignant le nombre d'oblats autorisés à y suivre un enseignement. Certains monastères exigent un âge minimum, et une instruction minimale pour être autorisé à y entrer en tant qu'écolier. Dans le même temps, les travaux intellectuels des maîtres de ces monastères se restreignent, se limitant à des recherches individuelles[74]. La production écrite des monastères se replie lentement vers les textes rédigés pour leurs propres besoins, sermons, histoire de leur monastère, lettres spirituelles et de moins en moins en direction du monde extérieur[75].

Au XIIe siècle, si les écoles monastiques poursuivent leur repli et la limitation du nombre de leur élèves, les différentes écoles urbaines, au contraire, se développent[74]. Durant les XIIe et XIIIe siècles, les écoles cathédrales se maintiennent. Les écoles canoniales, issues d'anciennes collégiales urbaines ou de nouveaux ordres enseignants, croissent en nombre et en importance. Enfin, de rares mais souvent notables écoles « privées » autorisées apparaissent, dont celle d'Abélard à Paris[72].

Les écoles canoniales connaissent un développement important grâce à l'action de réforme portées par les ordres prémontrés et victorins. Ce dernier est le plus influent, né autour de Guillaume de Champeaux et de l'abbaye Saint-Victor, il produit une méthode et des textes majeurs. Il renouvelle une forte exigence de la maîtrise des sciences du langage (grammaire et dialiectique) et de l'histoire pour comprendre les sciences religieuses, exégèse et théologie. Le mouvement victorin essaime au sein de nombreux groupe canoniaux dans l'aire culturelle française[76].

Le nombre d'élèves s'accroissant rapidement, les écolâtres des écoles cathédrales et canoniales ne peuvent progressivement plus assurer l'ensemble de l'enseignement et ils multiplient le nombre de « maîtres agrégés », recevant la licentia docendi, l'autorisation d'enseignement. Les conditions d'obtention de ce grade sont floue au XIIe siècle. La papauté encourage leur développement, établit la gratuité de leurs cours et fixe pour eux une prébende}. Le réseau scolaire est disparate, de nombreux maîtres n'enseignant que quelques savoirs, conduisant nombre d'élèves a devoir voyager d'une ville à l'autre pour compléter leur éducation. Cela génère à cette époque un milieu de clercs mobiles, vagants, dénommés des « goliards », qui écrivent des poésies mêlant critique de l'ordre social, exaltation de l'amour et de la bonne vie[77].

Les universités

Miniature représentant un cours à la faculté de médecine de Paris dans l'ouvrage Livre des propriétés des choses de Barthélemy l'Anglais, BNF, Paris, département des Manuscrits, Français 216, fol. 43.

L'accroissement du nombre de maîtres se réalise sans qu'une organisation ne soit prévue pour eux, et ils finissent par s'organiser par eux-mêmes. La première association de maîtres est officialisée en 1200 par l'octroi d'une charte par Philippe Auguste, et sa structuration est globalement achevée au milieu du XIIIe siècle. Dominant intellectuellement le nord de la France, l'université de Paris affaiblit les écoles provinciale de cette aire culturelle, comme le démontre la rareté des sources issues de ces lieux de savoir à cette époque, en forte diminution par rapport à l'époque antérieure. Le sud de la France possède également deux universités, à Montpellier et Toulouse, cette dernière fondée à la suite de la croisade des albigeois. Ces universités fonctionnent surtout dans le domaine du droit, et de la médecine pour Montpellier[78].

L'université de Paris est fondamentalement structurée par les maîtres, qui défendent leur autonomie, choisissent les doyens et les recteurs, organisent la hiérarchie de l'enseignement et font respecter les règlements. Les étudiants, très nombreux, n'ont pas de pouvoirs. La faculté des arts prépare aux différents examens et est chapeauté par la faculté de théologie, la plus prestigieuse, même si elle ne contient qu'un dixième des effectifs de l'université. La faculté de théologie de Paris est la seule en occident avec celle d'Oxford, et c'est en son sein que sont réalisées les plus grandes œuvres théologiques de l'époque, et que les débats les plus importants sur la définition même de la théologie se déroulent. Parmi les grands penseurs formés en son sein on compte Thomas d'Aquin, Albert le Grand ou Bonaventure[79].

La cour

Alors que durant le XIIe siècle, une culture de cour se crée en Angleterre et Italie, Les principales places lettrés en France sont les cours d'Aquitaine, aux temps d'Aliénor, et de Champagne, avec sa fille Marie de Champagne. De nombreux lettrés sont réunis pour instruire les nobles et les distraire. Ces cours françaises voient se réunir des poètes tels Chrétien de Troyes, Benoît de Sainte-Maure, Wace ou Philippe de Thaon. C'est surtout au XIIIe siècle qu'une cour dotée d'une production culturelle propre entoure le roi de France[80].

La culture française hors du royaume

« Le rayonnement des princes, de la langue et de l'art de vivre français outrepasse les frontières du royaume capétien, car ses limites politiques, longtemps demeurées assez théoriques qui plus est, n'ont rien d'infranchissables, considérées dans le large espace de la Chrétienté occidentale, unifiée par l'interprétation catholique du christianisme latin »[81]. L'espace ibérique tout comme l'italien voient un certain nombre d'hommes et d'éléments culturels français s'insérer en leur sein. En Espagne, de nombreux hommes sont partis comme volontaires ou mercenaires pour combattre les musulmans d'Al-Andalus, les Bourguignons ont été parmi les plus nombreux à émigrer, l'un des exemples les plus influents étant Alphonse-Henri, fils du comte de Bourgogne Henri, qui devient le premier roi du Portugal[82].

En Italie, la langue française est utilisée et célébrée comme une langue de culture ainsi que de commerce. Dante Alighieri tenait cette langue en haute estime, Marco Polo a fait rédiger par Rusticiano de Pise la première version de son Livre des Merveilles en français, tout comme la première histoire de Venise par Martino de Canal. Rusticiano de Pise rédige également des récits arthuriens en français pour un lectorat italien. Trois éléments expliquent cette implantation du français en Italie et dans le monde méditerranéen. Elle est utilisée comme langue commune par beaucoup de marchands du versant oriental de la Méditerranée, de nombreux marchands au long cours ont comme client final des princes du nord de la France, via les foires de Champagne et le prestige de l'université de Paris attire de nombreux lettrés qui sont obligés d'apprendre le français pour vivre à Paris[83].

La culture ecclésiastique

La culture cléricale est durant les trois siècles centraux du Moyen Âge largement issue des principes augustiniens établis dans le De doctrina Christiana (en) et mis en application aux temps carolingiens. Cette culture s'enrichit de nombreux apports de nouvelles sources antiques, mais qui sont systématiquement réinterprétées dans une optique chrétienne. Une littérature cléricale apparaît durant ces trois siècles, issue du milieu des écoles en plein essor, mais s'engageant progressivement vers des thèmes et un public laïcs, en commençant à écrire en langue vernaculaire au XIIIe siècle. La théologie, conçue comme discipline dominant les champs du savoir, est une culture réservée à une petite élite, mais disposant d'un prestige intellectuel incontesté.

La culture classique et les arts libéraux

La culture cléricale est durant les trois siècles centraux du Moyen âge largement issue des principes augustiniens établis dans le De doctrina christiana et mis en application aux temps carolingiens. Cette culture s'enrichit de nombreux apports de nouvelles sources antiques, mais qui sont systématiquement réinterprétées dans une optique chrétienne[84]

Les enseignements au sein des écoles et des universités sont toujours calqués sur les classiques trivium et quadrivium, même si dans les faits, les maîtres sont libres d'enseigner ce qu'ils jugent bon et que c'est le trivium qui occupe une place prépondérante. La discipline reine reste la grammaire, permettant de maîtriser le latin, langue de culture par excellence et ouvrant l'accès aux textes sacrés. Son apprentissage se fait à l'aide de nombreux textes issus de l'antiquité, mais plus par fragments que dans le cadre d'une étude réelle du texte lui-même. La grammaire ouvre la voie à la dialectique, ou logique. Peu étudiée auparavant, elle devient un élément d'enseignement majeur à partir du XIIe siècle à la fois avec de nouvelles traductions de textes de logiques antiques venus des zones de contact avec les arabes en Espagne, Italie ou Sicile, ou de textes grecs retraduits. Le développement de la logique fait évoluer d'autres champs culturels, tel que la théologie[85].

L'usage des penseurs antiques au sein de la culture médiévale
Premiers Analytiques d'Aristote, rédigé en grec, env. 1290, Bibliothèque Laurentienne, Florence.

Parmi les nombreux auteurs antiques redécouverts, Aristote est considérablement traduit, recopié et étudié au cours du XIIe siècle. Mais si ses textes permettent d'enrichir la culture de la langue latine, du discours et de la logique, ils amènent également des éléments de représentations de l'univers difficilement compatible avec la structure de la société chrétienne qui heurte de nombreuses autorités jusqu'à la fin du XIIIe siècle[86]. La synthèse entre les visions du monde portées par les textes anciens et la culture cléricale médiévale se fait en conservant et étudiant particulièrement les éléments utiles et en adaptant ou éludant le reste. Tout ce qui fournit des outils utiles au déchiffrement et à la bonne compréhension de la Révélation est employé, et quasi-uniquement dans ce but. « Au XIIIe siècle, les œuvres métaphysiques, éthiques, politiques d'Aristote sont lues de la même façon ; elles fournissent un stock limité et récurrent de notions, d'idées et d'arguments qui sont abstraits de leur contexte intellectuel et social pour venir à l'appui d'une réflexion chrétienne sur l'ordre du monde et de la société. Ainsi, les notions aristotéliciennes de bien commun et d'homme comme animal politique […] sont utilisés en des sens du reste contradictoires par différents auteurs des XIIe et XIIIe siècles pour justifier la prépondérance du pouvoir pontifical dans la chrétienté, ou au contraire pour assurer celui des rois et princes. Aristote ne fournit ici qu'un vocabulaire et des notions qui sont pliés à une réalité sociale tout autre que celle de la cité antique, laquelle est du reste très largement, sinon totalement ignorée au Moyen Âge »[87].

L'usage du savoir antique
Mappemonde dessinée dans le Beatus de Saint-Sever au sein de l'abbaye de Saint-Sever, milieu du XIe siècle. BNF. Lat.8878.

La transformation des savoirs issus de l'antiquité dans une optique chrétienne se voit par exemple dans la culture géographique des lettrés. Les clercs qui recopient ou élaborent des cartes du monde ou des textes évoquant l'agencement de l'espace géographique n'ont jamais un souci de vraisemblance, de précisions ou de représentations concrètes du réel. Dans l'iconographie ou les textes, les présupposés religieux ou les légendes s'imposent à toute construction géographique rationnelle[88]. « On ne soulignera jamais assez le poids des représentations religieuses pour expliquer le fixisme et aussi le caractère hétéroclite des conceptions médiévales du monde. Certaines mappemondes étaient fondées sur l'idée d'un univers rond et sphérique, mais elles continuaient de l'inscrire dans un carré, pour s'accorder à la parole biblique selon laquelle les anges devaient annoncer l'heure du Jugement aux quatre extrémités du cosmos. On estimait aussi que l'hémisphère sud, séparée de l'hémisphère Nord par une zone torride infranchissable, n'était pas peuplée. Sinon, ses habitants n'auraient jamais pu entendre la parole évangélique, injustice difficilement concevable »[89].

La littérature ecclésiastique

Une littérature cléricale apparaît durant ces trois siècles, issue du milieu des écoles en plein essor, mais s'engageant progressivement vers des thèmes et un public laïcs, en commençant à écrire en langue vernaculaire au XIIIe siècle[90].

Lors du XIe siècle, la production littéraire ecclésiastique est restée quantitativement limitée, restreinte à quelques centres monastiques importants tels Fleury, Cluny ou Saint-Martial de Limoges et centrée sur quelques genres : hagiographie, récit de miracles, biographie, histoire et chronique. Cette production littéraire est profondément marquée par la culture de l'époque, imprégnée de l'évidence de la toute-puissance de Dieu et une vision eschatologique de l'histoire de l'humanité ; les auteurs ne recherchent ni réalisme, ni exposition objective des faits, mais « des faits et des phénomènes qui constituent des signes et font sens dans une conception du monde dominée par les représentations et le valeurs chrétiennes »[91].

Aux XIIe et XIIIe siècles, les textes se multiplient et se diversifient fortement autour de quatre grands catégories : récits d'histoire, littérature d'édification, écrits encyclopédiques et poésie latine.

Lettrine historiée représentant Bernard de Clairvaux dans la Légende dorée, mi-XIIIe siècle, Keble College, Oxford, MS 49, fol 162r.

Les centres monastiques produisent toujours plus de récits d'histoire, chroniques, annales et gesta. Inscrits systématiquement dans un cadre local, ils peuvent s'étendre dans une optique universelle et rattacher ainsi une histoire à l'histoire du monde, tel l'Historia ecclesiastica d'Orderic Vital, composée à partir de 1100 à Saint-Évroult, qui commence par le récit d'une histoire universelle pour décrire ensuite, en la rattachant à cette dernière, l'histoire du monde normand et de sa propre abbaye. Dans ce genre, les récits de croisade se multiplient après la première d'entre elle, que ce soit par des témoins ou par des auteurs n'ayant pas participé à l'évènement. Cette croisade fournie une des premières autobiographie de la culture française avec De vita sua, sive monodiarum de Guibert de Nogent. Ces récits de croisade sont parmi les premiers à être rédigés en langue vernaculaire[92].

Un second pan de la littérature ecclésiastique est la littérature d'édification[S 6]. Touchant à la théologie, leurs auteurs rédigent ces textes destinés à leurs pairs mais également aux laïcs, et montrent un souci de clarté et de simplification pour toucher réellement leurs auditoires. Les figures importantes de ce genre sont Abélard ou Bernard de Clairvaux pour le XIIe siècle et Guillaume d'Auvergne, Bonaventure ou Albert le Grand au XIIIe siècle. Ces petits traités théologiques, de plus en plus écrits en langue vernaculaire, emploient de nombreuses anecdotes puisées à des sources variées, mêlant culture purement cléricale et laïque pour toucher au mieux le public[93].

La théologie

La théologie, conçue comme discipline dominant les champs du savoir, est une culture réservée à une petite élite, mais disposant d'un prestige intellectuel incontesté. La théologie est une discipline essentiellement universitaire, liée à l'enseignement et aux débats entre maîtres. Entre les années 1100 et 1300, les centres théologiques importants du monde franc sont Laon, Chartres et surtout Paris. Elle s'appuie à cette époque sur l'essor de deux disciplines, l'exégèse et la théologie systématique. Fondement de l'ordre social, cette discipline emploie les outils de la grammaire et de la logique, mais en employant les éléments de la foi chrétienne comme postulats, jamais pour les remettre en cause[94].

La culture laïque

Les trois siècles centraux du moyen âge, du XIe au XIIIe siècles, sont la première période de l'histoire de France pour laquelle il subsiste de nombreuses traces et témoignages de la culture laïque. Le temps a toutefois joué un puissant rôle de filtre et les historiens ne disposent encore qu'essentiellement des livres, les objets et lieux de cette époque n'ayant que très rarement été conservés[95].

L'écrit administratif et politique

Le nombre d'actes écrits dans les administrations laïques ou ecclésiastiques augmente considérablement entre l'an mil et la fin du XIIIe siècle. Les pouvoirs centraux développent considérablement la culture de l'écrit dans l'administration et la mémoire des décisions officielles. En France, ce développement accuse un retard important comparativement à l'Angleterre et à la papauté. Là où ces deux pouvoirs produisent plus d'une centaine d'actes par an au milieu du XIIe siècle, la chancellerie française n'en rédige qu'une quinzaine par an à la même date. La petitesse du territoire royal explique probablement cela. Au XIIIe siècle, la chancellerie française rattrape son retard. L'usage de l'écrit aux échelons inférieurs du pouvoir se répand d'abord dans les monastère et évêchés, les élites nobiliaires ne prenant l'habitude de l'écrit qu'à la fin du XIIe siècle[96].

La littérature du Moyen Âge central

La littérature dans le sens utilisé à l'époque contemporaine avec des objets nettement définis et des institutions l'encadrant et la régulant n'existe pas au Moyen Âge. La notion d'écrivain ou d'auteur est quasiment inexistante. Celle d'œuvre même pose problème, tant la copie d'un récit implique systématiquement sa réécriture, voir sa réinvention. Les pièces majeures de cette époque telle la Chanson de Roland ou la geste arthurienne apparaissent dans des formes variées, modifiées quelquefois fortement à chaque copie, ces dernières étant le plus souvent anonymes[97]. Pour le chercheur, la littérature médiévale est un objet complexe à appréhender[98].

La littérature du XIe au XIIIe siècles dans l'espace capétien est rédigée dans de nombreux dialectes des langues d'oc et d'oïl, mais l'ensemble forme un continuum où tout le monde comprend les autres : « les contemporains semblent avoir eu longtemps le sentiment qu'il n'y avait qu'une seule langue romane et que toutes les variations étaient dialectales »[99].

Les écrits en langue vernaculaire relèvent tous d'une production savante avec une grande recherche formelle. Celle-ci procède de la même construction que celle en latin. Tous les écrits ont une volonté morale, édificatrice, même ceux qui semblent procéder du pur divertissement ou du récit historique. Ces derniers ne sont pas rédigés avec un souci d'exactitude, mais avec un but autre, comme ancrer une lignée dans un passé prestigieux et reconstruit. Enfin, à aucun moment les rédacteurs n'opèrent de distinction entre le sacré et le profane. Tout comme la société médiévale ne connaît pas d'autonomie de la sphère laïque vis-à-vis de la religion, les poèmes, romans ou fabliaux sont insérés dans une société qui ne voit pas de différence entre les deux mondes[100].

Durant cette période, les écrits se regroupent en quelques genres : la lyrique d'oc, la chanson de geste, le grand chant courtois (en), pour les formes destinées à être chantées ; et le roman et les fabliaux, apparaissant à partir de la seconde partie du XIIe siècle pour les formes destinées à être récitées ou lues. Les thèmes abordés sont d'un côté l'amour courtois, appelé à l'époque le fin amor, et de l'autre les trois grandes matières à des récits historico-mythiques composant la Matière de Rome, la Matière de France et la Matière de Bretagne[101].

De l'art roman à l'art gothique

Alors que durant les temps carolingiens, la production des images a connu les soubresauts d'une polémique sur leur légitimité, elle connaît une forte croissance entre les XIe et XIIIe siècles. Outre le développement de formes classiques que sont la peinture sur manuscrit et murale et la sculpture en bas-reliefs et ornementale, deux nouvelles formes apparaissent et marquent cette époque : la statuaire et les vitraux[102]. En architecture, aux XIe et XIIe siècles romans succède, à partir du centre de l'aire culturelle franque, l'opus francigenum, l'architecture gothique[103].

Comme pour les traces antérieures, les restes de l'art roman, plus encore que le gothique sont parcellaires et délicates d'interprétation, les écrits sur leurs significations étant rarissimes. Si durant le XIXe et encore le XXe siècle, l'historiographie a tenter de mettre en avant des « écoles régionales », avec une recherche d'antériorité et de réseaux d'influence, cette approche est considérée au XXIe siècle comme obsolète et l'art roman est étudié comme un tout, avec uniquement des particularités locales limitées[104].

Architecture

L'architecture romane s'exprime pour l'essentiel au sein des édifices religieux, monastères et églises, principalement les cathédrales urbaines qui sont reconstruites, dont l'espace franc se couvre durant les XIe et XIIe siècles. Porté par le mouvement clunisien, l'architecture romane est centrée sur l'office et le culte des reliques[105]. Contrairement à l'architecture romane germanique, mandatée par les empereurs et leurs soutiens pour exalter la grandeur du trône impérial à l'image de la cathédrale de Spire, l'architecture romane dans l'espace culturel franc reste centrée sur des problématiques religieuses[106].

À partir de l'an mil, après quelques expérimentations et sur le modèle de la seconde église de Cluny, deux éléments architecturaux majeurs s'imposent au sein du royaume franc : le chœur à déambulatoire pour permettre la circulation des fidèles autour des reliques et la voûte en berceau percée de baies, qui succède au toit à pans plats sur le modèle latin. Ces deux éléments majeurs connaissent une évolution continue durant les XIe et XIIe siècles, à la fois dans le sens d'un perfectionnement mais aussi d'une adaptation à des sensibilités locales[107].

Le modèle roman trouve tout à la fois son apogée et son terme avec la construction au XIIe siècle de la troisième église de Cluny. Immense édifice qui porte le style et les techniques à leur meilleur, elle est achevée à une époque où le style gothique s'impose progressivement ; s'il frappe les contemporains par son ampleur, il ne crée pas d'engouement pour en reprendre les principes[107].

À partir de la fin du XIIe siècle, l'architecture gothique apparaît et se développe au cœur de l'espace culturel franc, dans le domaine royal de l'époque et à sa périphérie, avec les cathédrales de Paris, Sens, Laon, Soissons, Chartres, par exemple, ou les abbayes de Saint-Rémi de Reims ou de Saint-Germain-des-prés. Cette forme architecturale se déploie de manière concomitante avec l'affirmation de la puissance royale capétienne, sous le règne de Philippe auguste. Si les donneurs d'ordre des ornementations sont bien les puissances religieuses, ils font apparaître massivement une imagerie royale, mettant en avant les figures des rois de la Bible et ceux des lignées françaises, donnant à penser qu'il y a continuité entre les uns et les autres[108]. Ce lien entre art gothique naissant et pouvoir royal capétien se lie également dans les reconstruction qui ont lieu en Occitanie après la prise de pouvoir du comté de Toulouse par Philippe III (les cathédrales de Narbonne, Toulouse ou Rodez), et à contrario dans le décor voulu à contre-courant par l'évêque d'Albi hostile au roi de France pour sa cathédrale[109].

L'art gothique français est caractérisé par l'arc brisé, des techniques permettant de répartir les forces autrement et d'ouvrir largement des murs pour laisser passer la lumière. Cet art est également celui de la couleur, avec les vitraux, l'apparition des rosaces, les peintures murales intérieure comme extérieure, et une statuaire bien plus présente, et peinte également. Cette forme s'impose dans toute la France, puis s'étend dans toute l'Europe à partir de la seconde moitié du XIIIe siècle[110]. Les techniques du bâti connaissent également une révolution avec l'apparition d'une standardisation et de la production en série, qui impose l'existence d'un architecte maîtrisant la géométrie et capable d'élaborer des plans précis suivis par les artisans. L'architecture quitte le seul milieu de l'artisanat pour devenir un art intellectuel[111].

Sculpture

La sculpture religieuse poursuit son déploiement entamé durant les derniers temps carolingiens, étalant sur les façade et les intérieurs un riche programme d'éducation du peuple chrétien par l'image, centré sur les thèmes de la mort, du jugement divin et des Jérusalem céleste et terrestre. Ces thèmes répondent d'un côté à la structuration de la croyance dans le Purgatoire, et d'un autre à l'idéal des Croisades[112]. Au XIe siècle, l'essor de la sculpture est principalement le fait des abbayes et monastères, destiné à un usage interne, peut être dans la crainte de l’idolâtrie et pour fournir aux moines des modèles de vie vertueuse. Durant ce siècle, les modèles proviennent partiellement des sculptures romaines, mais surtout des enluminures, pièces d'orfèvrerie ou plaques d'ivoire[113].

C'est au XIIe siècle que les sculptures sont massivement portées à la vue des fidèles, principalement par le biais des frontons et intérieurs des basiliques. Les moteurs de cette évolution sont les abbayes les plus puissantes et surtout Cluny[114]. Signes de richesse et de puissance, ces décors monumentaux ont également une fonction sociale et politique en fixant dans la pierre les signes de l'orthodoxie et de la légitimité des intermédiaires monastiques et cléricaux entre le peuple et Dieu sur le chemin du Salut[115].

Peinture

La période romane de l'art pictural français s'épanouit entre 1000 et 1200 et présente aux spécialistes des entités culturelles assez tranchées. « Les relations entre elles ne sont certes pas absentes, et nous constaterons même le parallélisme de certaines progressions. Mais sans pour autant revenir à la notion d'« écoles » — nous la récusons dès l'introduction — ces milieux ont connu chacun leur évolution propre »[116].

Les espaces de production pictural principaux sont le Nord, le Centre-Ouest, les régions proches de l'Espagne, la Bourgogne et l'Île-de-France. Plusieurs centres artistiques[N 5] dans le Nord de l'espace culturel franc présentent des caractéristiques communes, des initiales historiées développées, l'apparition de la glose figurative et des compositions vivantes, rompant avec le style graphique figé antérieur. Sont notamment issus de cet élan artistique la Bible de Saint-Vaast, la Vie de Saint-Armand et Baudemond ou les Vies et miracles de Saint-Omer. Dans le Centre-Ouest du centre de l'espace franc, la région du Poitou, du Berry ou de la Marche, le XIIe siècle est le moment d'une formidable éclosion de peinture monumentale, ainsi que le lieu où naissent les vitraux historiés. Parmi les exemples conservés de cette production existe Le Christ et les apôtres du lac de Tibériade de la salle capitulaire de église de la Trinité de Vendôme, l'œuvre sur la nef de l'Abbaye de Saint-Savin-sur-Gartempe ou le vitrail de la Crucifixion et de l'Ascension du Christ de la cathédrale de Poitiers. Les régions proche de l'Espagne recèlent des compositions avec des à-plats de couleurs tranchés et des figures très stylisées. Issus des arts mozarabes, ces réalisations atténuent leurs caractéristiques avec le temps. La Bourgogne connaît à cette époque la double influence clunisienne et cistercienne. La première se retrouve par exemple dans les peintures de la chapelle de Berzé-la-Ville. Cîteaux, quant à elle, promeut des réalisations d'une plus grande sobriété, renonçant aux riches polychromies, à l'or et aux pourpres pour s'en tenir à un dessins au trait fin seulement rehaussé de quelques tons légers. Certains manuscrits reprennent des éléments byzantins. Les réalisations en Île-de-France sont fortement liées au pouvoir royal. Les vitraux de Saint-Denis réalisés au milieu du XIIe siècle, pour la première fois, intègrent une véritable dimension d'exaltation des liens entre la dynastie régnante et les personnages bibliques. Voulus par Suger et les rois Louis VI et Louis VII, de très nombreux maîtres de multiples origines sont sollicités amenant avec eux plusieurs styles. « La conjonction de ces courants majeurs allait précisément permettre, en phase totale avec la dynamique capétienne bientôt prévalente, de poser les fondements d'un art nouveau »[117].

Tout en ayant à l'esprit que poser des limites reste artificiel, il est possible d'estimer que l'apparition de nouvelles pratiques et styles picturaux apparaissent entre la fin du XIIe et le début du XIIIe siècle. La production du livre enluminé est dorénavant confié essentiellement à des laïcs, le rôle du vitrail au sein des édifices religieux devient prépondérant, et le langage formel répond à une aspiration au naturalisme[118].

L'apparition du nouvelle forme artistique, la peinture gothique, répond en partie à de nouveaux modes de production. Le développement des universités entraîne la constitution de groupe laïcs de copistes qui travaillent pour les docteurs, comme dans le quartier Saint-Séverin à Paris. Ces groupes deviennent très importants et prennent le relais des atelier monastiques, sans les faire disparaître complètement. La demande émanant non plus exclusivement d'ecclésiastiques, mais également de nobles et de bourgeois, les peintres n'illustrent plus uniquement des ouvrages de piété mais également de la littérature profane, historique, romanesque ou didactique.

Le style gothique est celui d'un retour au style antique mieux imité, avec le drapé mouillé, une recherche sur la figure humaine et son épaisseur charnelle ou le souci de rendre compréhensible la gestuelle. Ce style, qui a bénéficié des nouveaux contacts avec le monde byzantin liés aux croisades, se retrouve autant dans les peintures d'enluminures que sur les vitraux. Même si les techniques des deux types d'artistes sont éloignées, il existe une profonde unité formelle entre les peintres sur parchemin et les maître verriers[119].

Ces derniers font évoluer leurs composition d'ensemble car l’agrandissement progressif de la dimension des vitraux les oblige à clarifier et organiser un véritable discours théologique, comme le montre les verrières du déambulatoire et des chapelles rayonnantes de la cathédrale de Bourges qui offrent à la vue un ensemble d'images strictement ordonné délivrant un message savant de comparaison entre l'Ancien Testament et le Nouveau. Toutefois, même si les artistes doivent obéir à une ambition collective unique, leur style individuel reste visible dans leurs création[120].

L'art pictural monumental évolue au cours du XIIIe siècle pour devenir plus naturaliste. Les peintres cherchent à mieux décrire les costumes, accessoires et abandonnent les formes inadaptées pour ce faire. « La matière même des vêtements change, se fait plus épaisse, ne se prête plus aux effets de draperies moulant étroitement le corps mais souligne sobrement les attitudes en ponctuant efficacement les gestes ». Malheureusement, le maigre corpus de peinture murale qui subsiste ne permet pas de construire une vision d'ensemble de cet art[121].

La fin du Moyen Âge (XIVe – XVe siècle)

Pour un article plus général, voir Moyen Âge tardif.

Culture écrite et enseignement

Durant les XIVe et XVe siècles, l'enseignement croît qualitativement et quantitativement, tout en restant profondément inégalitaire[S 2]. Devenant une demande de la part d'une tranche importante de la société pour eux-mêmes et leurs enfants, la connaissance de la lecture se répand car à l'apparition et la croissance dans toutes les régions françaises de nombreuses petites écoles, et également par la création d'un grand nombre d'universités, permettant à un nombre important de fils de toutes les élites, nobiliaires et bourgeoise, d'accéder pas trop loin de chez eux à une culture universitaire minimale.

Progrès de la lecture et de l'écriture

Lors des deux derniers siècles du Moyen Âge, la société française connaît une croissance forte du nombre de personnes qui savent lire et écrire. Les élites continuent d'employer le latin comme langue savante et de l'administration mais les langues vernaculaires se couchent progressivement à l'écrit pour tous les usages courants, et même pour des productions artistiques.

Extension de la culture écrite

« La civilisation de la fin du Moyen Âge profite à plein de l'élan donné au XIIe siècle à la culture écrite. Celle-ci se diffuse de plus en plus largement sous l'effet de l'urbanisation et de la poursuite de l'enrichissement de la population ». De nombreux facteurs poussent un nombre toujours plus grand de personnes à faire l'effort de l'apprentissage et à payer pour leurs enfants, les fils la plupart du temps, une éducation minimale avec la lecture et le calcul[N 6]. Les plus importants d'entre eux sont l'intensification des échanges à moyenne ou grande distance, la multiplication des transactions foncières, la dévaluation des formes ordaliques ou orales des preuves judiciaires au profit des traces écrites, ou la mise à l'écrit des coutumes[122].

Les estimations les plus récentes postulent que la population française passe d'une proportion de lecteurs allant de 2 à 3 % au milieu du Moyen Âge à 10 à 20 % pour le XVe siècle. Durant ce dernier siècle, l'usage de l'écrit est devenu complètement banal pour l'élite nobiliaire et bourgeoise[123].

Apparition du soucis éducatif

Les sources permettent à partir du XIVe siècle, d'avoir une vision plus nette qu'aux époques antérieures sur la manière dont les parents considèrent l'enseignement de leurs enfants[S 7]. La manière dont doivent se dérouler les premiers âges de la vie est assez largement partagée à la fois par les nobles, les bourgeois et les clercs[124].

Jusqu'à l'âge de raison, fixé très largement à sept ans, les enfants des deux sexes sont confiés à des femmes, mères, servantes, nourrices. La mise en nourrice est fréquente dans la plupart des milieux, et tout particulièrement dans les couches aisées de la société. L'allaitement maternel est selon les auteurs vu comme un marque de pauvreté, avilissement ou comme un témoignage d'amour. Apparaissent ainsi à cette époque des écrits exprimant la tendresse des parents pour leurs enfants[N 7].,[125]

À partir de sept ans, les enfants sont considérés comme en mesure de prendre les décisions engageant leur avenir, mais également capables d'être tentés par les vices, et qu'ils doivent donc être corrigés en conséquence. C'est à partir de sept ans qu'on confie les premiers travaux aux enfants dans les populations pauvres, et que les premiers enseignements intellectuels ou martiaux commencent. Mais c'est à partir de douze à quatorze ans que les enfants s'engagent réellement dans l'apprentissage d'un métier, pour les classes populaires, du métier des armes pour les nobles destinés à la guerre, et également à l'apprentissage de la lecture et de l'écriture pour ceux qui ont accès au savoir[126].

Apparition des petites écoles

Au début des années 2000, il n'existe aucune étude d'ensemble sur l'enseignement non universitaire en France à la fin du Moyen Âge, uniquement des recherches ponctuelles. La synthèse établie en 2005 par Jean-Patrice Boudet est donc sujette à évolution. Les trois traits principaux de ce niveau d'enseignement sont l'absence de distinction entre les niveaux des écoles non universitaire, une multiplicité de formes d'établissement très majoritairement sous le contrôle de l'Église et un accès très inégalitaire favorisant les classes sociales élevées, les citadins et les garçons[127].

Très mal connues pour les campagnes, elles existent néanmoins et permettent aux garçons à partir de six à huit ans de bénéficier de l'apprentissage de la religion et d'élément de lecture sous l'autorité d'un clerc. Visibles dans les sources surtout au XVe siècle, elles semblent plus nombreuses en Normandie et Champagne[127].

Les écoles des villes, bien mieux documentées, apparaissent plus nombreuses dès le XIVe siècle. Leur mode d'organisation et l'enseignement proposé est très divers, avec des éléments de lecture, d'écriture, de grammaire, de morale chrétienne, de logique, etc., selon les capacités de l'enseignant. Dès le XIVe siècle, certaines proposent des cours pour les jeunes filles, dispensés par des bourgeoises. Les maîtres peuvent être des clercs ou des laïcs, rarement gradués de l'université. Le contrôle de l'école, s'il est souvent sous la direction des autorités religieuses locales, résulte également de compromis avec les notables locaux qui y envoient leurs enfants. Certaines structures deviennent suffisamment grandes pour organiser des niveaux de manière souvent informelle. Des écoles proposent ainsi aux enfants ayant déjà un certain niveau des éléments de trivium et de quadrivium[128].

Il est malheureusement très difficile de mesurer l'impact de la montée en puissance de cet enseignement « primaire ». Le but premier de ce dernier est l'accès à la lecture, plus qu'à l'écriture, ainsi qu'à des notions d'arithmétique. Il est toutefois délicat d'estimer numériquement le résultat de cet alphabétisation. Jean-Patrice Boudet indique ainsi qu'il est possible d'estimer à 15 à 20 % la population capable de lire à Reims au début du XVe siècle, mais sans pouvoir généraliser, Reims étant un cité archiépiscopale avec une proportion de clercs supérieure à d'autres villes de l'époque. L'auteur en reste donc à une impression d'ensemble de développement des moyens de l'enseignement et de l'extension du nombre de lecteurs entre le XIVe et le XVe siècle ; et donc d'une croissance de la part de la population ouverte à la culture écrite[129].

Expansion et déclin des universités

Au cours des deux derniers siècles du Moyen Âge, l'enseignement des universités croît quantitativement et si elles jouent un rôle social de plus en plus net, leur influence intellectuelle semble se réduire. Toutefois, l'idée historiographiquement traditionnelle d'un déclin des universités françaises aux XIVe et XVe siècles est nuancée par les travaux de plusieurs chercheurs[S 8].

Développement des universités et collèges

Le nombre d'universités croît fortement à la fin du Moyen Âge[N 8], conçues essentiellement sous l'autorité d'un monarque ou d'un prince territorial. Dans la mesure où elles sont destinées à assurer l'éducation des élites nobiliaires et bourgeoises, leur recrutement est toujours élitiste. Leurs statuts fixant leur fonctionnement sont toujours des imitations des statuts des universités de Paris et Toulouse, sans nouveautés organisationnelles ou éducatives. La plus grande part des nouvelles universités sont destinées au droit, civil ou canon. Consécutivement à la multiplication du nombre d'établissements, l'aire de recrutement de chacun se réduit ; mais cet affaiblissement de l'influence des universités françaises vis-à-vis des étudiants étrangers provient également du Grand schisme, qui réduit notablement l'attraction des établissements français, et surtout de Paris[130]

Durant cette même période, le nombre de collèges qui assurent l'accueil des étudiants se multiplie, plus de cinquante sont fondés à Paris entre 1300 et 1500, onze à Toulouse, cinq à Montpellier et environ vingt-cinq dans les autres villes universitaires. Le plus grand reste sur cette période celui de la Sorbonne. Très lié au bienfaiteur qui le finance et à sa famille, le collège est destiné avant tout à accueillir les membres de son clan, de ses amis et affiliés, même si certains développent des activités pédagogiques élémentaires. De fait, et malgré l'inscription dans les statuts qu'ils sont destinés à accueillir les pauvres, ces derniers sont numériquement peu nombreux[131].

Durant cette période, les universités ne génèrent quasiment pas d'ascension sociale ; la très grande majorité des étudiants sont issus de l'élite française. Par ailleurs, leur influence sur la marche du royaume n'est pas très forte, peut être moins qu'aux époques antérieures ; les gradués s'insèrent largement dans les administrations laïques ou ecclésiastiques, mais leurs études ne leur assurent jamais l'accession à des organes de décision, qui restent réservés aux personnes dont la naissance les destine à diriger[132]. Par ailleurs, une part importante des étudiants n'acquiert pas de grades, dont l'obtention impose un sacrifice financier important. Beaucoup retournent dans leur famille après l'acquisition des formations de base[133].

Influence sur la société française

Longtemps, l'histoire a glosé sur le déclin intellectuel des universités durant les deux derniers siècles du Moyen Âge, mais cette position est de plus en plus nuancée. Si beaucoup de philosophes se sont perdus dans des théories sans avenir, l'institution parisienne acquiert au XIVe siècle une influence politique et morale, qu'elle perd par la suite, réduite par le renouveau de la monarchie.

Faiblesse du renouveau intellectuel

Une des raisons du jugement longtemps sévère sur la production intellectuelle des universitaires français est la faiblesse de la vivacité de la théologie française des XIVe et XVe siècles comparativement aux époques antérieures, temps des grandes synthèses et aux courants étrangers, notamment le scotisme et l'ockhamisme d'Oxford. Réelle, cette moindre créativité ne touche d'autres disciplines au sein desquelles les penseurs universitaires français réalisent des œuvres notables[134]. La majeure partie des penseurs universitaires français s'engagent à la suite de Jean Duns Scot et Guillaume d'Ockham dans le rejet l'union de la science et de la foi. Ce courant de pensée modifie les méthodes d'enseignement, qui négligent tout un pan de la philosophie médiévale et réduisent les questions entre élèves[135]. Les quelques savants français qui tentent de réfléchir aux sciences expérimentales (tels Jean Buridan ou Nicole Oresme) ne parviennent pas à dépasser les intuitions théoriques pour aboutir à de véritables constructions intellectuelles[136]. Les dérives théoriques des maîtres de l'université nominalistes ou terministes sont abondamment raillés par François Villon[N 9] ou François Rabelais[N 10],[137].

Place dans la politique nationale

L'influence sociale de l'université provient tout à la fois du prestige de ses maîtres, mais également de ses nombreux anciens élèves qui peuplent les places laïques et ecclésiastiques prestigieuses de France et d'Europe. Au XIVe siècle, elle joue un rôle important dans les grands évènements du royaume. « Charles V l'appelle « la fille aînée du Roi ». Elle est officiellement représentée dans les conciles nationaux de l'Église de France et dans les assemblées des États généraux. Sa médiation est demandée au moment de la lutte entre Étienne Marcel, les Parisiens et la Cour, lors de l'insurrection des Maillotins ; elle est signataire du traité de Troyes ». Lors du schisme, si elle commence par soutenir la papauté d'Avignon, elle évolue et finit par soutenir le roi de France. Ce revirement l'affaiblit mais c'est la prise de Paris par les Anglais et la soumission d'une partie du corps universitaire aux Bourguignons qui fait diminuer définitivement l'opinion de la monarchie à son encontre. Le XVe siècle est une succession d'affaiblissements politiques, de la suppression de ses privilèges fiscaux en 1437 à celui du droit de grève en 1499[138].

Culture sociale commune

À partir du XIVe siècle, les sources permettent de disposer de nombreux avis sur la manière dont la culture commune existe au sein de la société française. Des valeurs partagées sont distinguables, en dehors des traités théoriques religieux, reflétant ainsi davantage le sentiment commun des Français.

Ces valeurs faisant consensus sont l'ordre public dans un univers chrétien, protégé par le Roi, qui l'est de droit divin. Pour tous, atteindre à la paix, à l'ordre public régenté par le Roi est rompre un ordre sacré, une action sacrilège. Cet ordre public est également intimement lié à la hiérarchie sociale, indispensable à l'harmonie entre les hommes. Cette hiérarchie s'inscrit partout et en premier lieu dans les vêtements et postures publiques, qui doivent montrer à chacun ce que chacun est dans la société chrétienne[139].

Une autre valeur fondamentale de cette époque est l'honneur, ressenti et vécu par l'ensemble de la population, riche ou pauvre, et qui correspond à la renommée au sein de sa communauté, portée par le regard des autres. Cet honneur doit être défendu jusqu'à la violence s'il le faut[N 11], car à cette époque, la justice se fonde beaucoup sur la réputation des personnes pour statuer, dans la plupart des cas « rendre la justice, c'est mesurer un consensus social »[140].

Dans les histoires d'honneur, comme pour toutes les épreuves de la vie, l'homme n'est jamais seul, mais s'inscrit dans un groupe social, qui le défend et qu'il défend. La société de cette époque fait vivre de nombreux liens au sein d'un groupe, et des structures apparaissent pour porter ces liens : ordre de chevalerie, confrérie de jeunes d'une même communauté, mais les plus essentiels restent les groupes de vie : famille, villages et quartiers[141].

Enfin, la dernière valeur unanimement portée par les témoignages est l'amour. Autant au sens général de sentiment propre à l'espèce humaine que l'amour entre conjoints, ou l'amitié entre membres d'une même famille, dénommé souvent amour charnel. Le premier amour promu par les moralistes[N 12] est celui dévolu à Dieu, avant tout sentiment envers sa famille et amis. Les mêmes moralistes mettent en garde contre l'amour excessif, qui rend fou et surtout qui peut entrer en contradiction avec les indispensables hiérarchies et places sociales auquelles chacun est lié[142].

Amorce de la prééminence culturelle de Paris

Le nombre de lettrés à Paris augmente fortement, avec l'extension de l'administration royale[143].

La culture de cour se développe et influence l'ensemble de la société[144].

L'importance de la vie culturelle parisienne devient un topos auprès de nombreux érudits[145].

Prélude à la Renaissance

L'humanisme diffuse depuis l'Italie en France avec un certain nombre de lettrés qui ne sont souvent pas des maîtres universitaires, mais dans la seconde moitié du XVe siècle, plusieurs maîtres s'emparent et diffusent la nouvelle philosophie tels Guillaume Fichet ou Robert Gaguin[146].

XIXe siècle

Le XIXe siècle français est notamment marqué par le romantisme dans une version française (romantisme français)[147].

XXe siècle

L'entre-deux-guerres est marqué par une efflorescence artistique dans les milieux parisiens, et par un essor des loisirs de masse et de la culture populaire[148].

La Quatrième République cherche à mettre en place une forme de démocratisation culturelle en continuant un processus d'ouverture de la culture aux populations. L'époque est toutefois également marquée par une uniformisation et une américanisation de la culture[148]. La culture de masse s'épanouit dans les années 1960 et 1970. L'époque est marquée par le rôle d'André Malraux en tant que ministre de la Culture du président Charles de Gaulle[148].

Bibliographie

Le champ d'étude de l'histoire culturelle de la France est immense et le volume d'articles et ouvrages scientifiques est à l'avenant. Cette section bibliographie ne recense donc que les ouvrages effectivement utilisés pour construire et appuyer l'article.

Ouvrages généraux

Ouvrages thématiques

  • Georges Duby et Jean-Luc Daval, La Sculpture : De l'antiquité au XXe siècle, Taschen, (ISBN 978-3-8365-4483-2)
  • Pierre Rosenberg, La peinture française, Place des Victoires, (ISBN 978-2-8099-1057-5)

Moyen Âge

  • Pierre Riché, L'empire carolingien : VIIIe et IXe siècles, Hachette, coll. « Civilisation et sociétés », (1re éd. 1973) (ISBN 2-01-235100-X, BNF 35708363)
  • Jacques Le Goff, Les intellectuels au Moyen Âge, Seuil,
  • Hervé Martin, Mentalités médiévales : XIe – XVe siècle, Presse universitaires de France, (ISBN 2-13-047678-3)
  • Rolf Toman (de), L'art roman : Architecture — Sculpture — Peinture, Könemann, (ISBN 3-89508-448-4)
  • Piotr Skubiszewski, L'art du haut Moyen Âge : L'art européen du VIe au IXe siècle, Librairie générale française, coll. « Pochothèque / Encyclopédie d'aujourd'hui » (no 3056), , 480 p., Nicolas Reveyron, conseiller pour l'édition française (ISBN 2253130567, BNF 36705271)
  • Colette Beaune, Éducation et cultures : Du début du XIIe siècle au milieu du XVe siècle, SEDES, coll. « Regards sur l'histoire » (no 131), (ISBN 2-7181-9208-9)
  • Boris Bove et Jean-Louis Biget (dir.), Le temps de la guerre de cent ans, Paris, Belin, coll. « Histoire de France, sous la direction de Joël Cornette », , 670 p. (ISBN 978-2-7011-3361-4)
  • Jean-Christophe Cassard et Jean-Louis Biget (dir.), L'âge d'or capétien, Paris, Belin, coll. « Histoire de France, sous la direction de Joël Cornette », , 777 p. (ISBN 978-2-7011-3360-7)

Époque contemporaine

Notes et références

Notes

  1. Tours, Lyon, Clermont, Orléans, Paris ou Metz.
  2. Il ne faut pas oublier que le travail de copie à cette époque est un travail éminemment collectif.
  3. Il est né et a grandi en Espagne.
  4. « notice BNF de l'enluminure de Luc. »
  5. Saint-Bertin, porté par l'abbé Odbert, Saint-Vaast d'Arras, la collégiale Saint-Omer, par exemple
  6. L'apprentissage de l'écriture, plus difficile, se répand bien moins, les lecteurs demandant à des notaires ou des clercs de rédiger pour eux les documents dont ils ont besoin.
  7. Voir les textes de Nicole Oresme, Jean Gerson ou Christine de Pizan, dans son Livre des trois vertus.
  8. Avignon (1303), Orléans (1306), Cahors (1332), Angers (1337), Grenoble (1339), Orange (1365), Aix-en-Provence (1409), Dole (1422), Poitiers (1431), Caen (1432-1436), Bordeaux (1441), Valence (1452-1459), Nantes (1460) et Bourges (1464).
  9. Notamment les lais 35 à 37 ; François Villon, Le Petit Testament, Paris, A. Lemerre éd., (lire sur Wikisource), « Le Petit Testament », p. 7-19.
  10. Voir le catalogue burlesque des maîtres parcouru par Pantagruel dans la bibliothèque Saint-Victor ; François Rabelais, Les Horribles et Espoventables Faictz et Prouesses du très renommé Pantagruel, roy des Dipsodes, filz du grand géant Gargantua, composez nouvellement par Maistre Alcofrybas Nasier, Lyon, C. Nourry, ca 1532 (lire sur Wikisource), p. 36
  11. Plus de la moitié des lettres de rémission délivrée sous le règne de Charles VI concernent des meurtres dans le cadre d'une affaire d'honneur bafoué.
  12. Comme on peut le lire dans le Livre de Sidrac, où la hiérarchie des sentiments amoureux s'établit comme suit : Dieu en premier, puis lui-même, puis son épouse, puis ses enfants, puis sa fratrie, puis le reste de sa famille, ses amis et enfin l'ensemble des hommes.

Bibliographie complémentaire

Cette section présente des ouvrages de références sur les sujets traités dans l'article mais qui n'ont pas été exploités pour sa rédaction.

  1. Pierre Riché, ''Éducation et Culture dans l'occident barbare'', Paris, Seuil, 1962, rééd. 1995.
  2. Michel Rouche, ''Histoire de l'enseignement et de l'éducation. Tome 1, Des origines à la Renaissance, Ve siècle av. J.-C.XVe siècle, Perrin, 2003, coll. Tempus, 736 p. (ISBN 978-2-262-02099-6).
  3. Pierre Riché, ''De Charlemagne à saint Bernard, culture et religion'', Orléans, Paradigme, 1995.
  4. Sur le rapport entre architecture et pratique cultuelle, voir les travaux fondamentaux de Carol Heitz : Recherches sur les rapports entre architecture et liturgie à l'époque carolingienne, 1963 et L'architecture religieuse carolingienne, les formes et leurs fonctions, 1980.
  5. Voir Ph. Wolff, L'Éveil intellectuel de l'Europe, Paris, 1971.
  6. Paul Bretel, Littérature et édification au Moyen âge, Paris, Honoré Champion, , 512 p. (ISBN 9782745324092)
  7. La synthèse la plus récente est : Danièle Alexandre-Bidon, Didier Lett, Les enfants au Moyen Âge, Fayard, coll. Pluriel, 2013, isbn : 9782818503676.
  8. Voir Simone Roux, La rive gauche des escholiers (XVe siècle), Paris, 1992 ; Jacques Verger, « Les universités françaises au XVe siècle, crises et tentatives de réforme », Cahiers d'histoire, 22, 1976, p. 43-66.

Références

Cette section présente les appels de note renvoyant aux ouvrages ayant été utilisés pour la construction de l'article.

  1. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 8.
  2. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 9.
  3. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 10.
  4. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 12.
  5. Sot, Boudet et Guerreau-Jalabert 2005, p. 24-26.
  6. Sot, Boudet et Guerreau-Jalabert 2005, p. 27.
  7. Sot, Boudet et Guerreau-Jalabert 2005, p. 54.
  8. Sot, Boudet et Guerreau-Jalabert 2005, p. 42-43.
  9. Sot, Boudet et Guerreau-Jalabert 2005, p. 44-45.
  10. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 53.
  11. Skubiszewski 1998, p. 24.
  12. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 55-56.
  13. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 67.
  14. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 69.
  15. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 72.
  16. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 74.
  17. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 77.
  18. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 81.
  19. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 83.
  20. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 75.
  21. Skubiszewski 1998, p. 120.
  22. Skubiszewski 1998, p. 89.
  23. Skubiszewski 1998, p. 95.
  24. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 76.
  25. Skubiszewski 1998, p. 91.
  26. Skubiszewski 1998, p. 97.
  27. Skubiszewski 1998, p. 109.
  28. Duby et Daval 2015, p. 249.
  29. Skubiszewski 1998, p. 106.
  30. Skubiszewski 1998, p. 102.
  31. Skubiszewski 1998, p. 104.
  32. Skubiszewski 1998, p. 111.
  33. Skubiszewski 1998, p. 112.
  34. Skubiszewski 1998, p. 113.
  35. Skubiszewski 1998, p. 114.
  36. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 85.
  37. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 86.
  38. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 87.
  39. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 88.
  40. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 89.
  41. Riché 1994, p. 243.
  42. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 93.
  43. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 95-97.
  44. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 99.
  45. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 100.
  46. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 101.
  47. Riché 1994, p. 245.
  48. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 102.
  49. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 103.
  50. Riché 1994, p. 247.
  51. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 104.
  52. Riché 1994, p. 250.
  53. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 107.
  54. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 109.
  55. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 110.
  56. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 112.
  57. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 114.
  58. Skubiszewski 1998, p. 324.
  59. Skubiszewski 1998, p. 326.
  60. Skubiszewski 1998, p. 327.
  61. Rosemberg 2013, p. 31. § « La peinture préromane et romane », par Jean-Pierre Caillet
  62. Rosemberg 2013, p. 32. § « La peinture préromane et romane », par Jean-Pierre Caillet
  63. Rosemberg 2013, p. 34. § « La peinture préromane et romane », par Jean-Pierre Caillet
  64. Skubiszewski 1998, p. 339.
  65. Skubiszewski 1998, p. 287.
  66. Skubiszewski 1998, p. 289.
  67. Toman 1997, p. 120-121.
  68. Skubiszewski 1998, p. 310.
  69. Toman 1997, p. 256.
  70. Martin 1996, p. 19-20.
  71. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 117.
  72. Beaune 1999, p. 77.
  73. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 118.
  74. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 120.
  75. Beaune 1999, p. 76.
  76. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 121.
  77. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 124.
  78. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 124-126.
  79. Beaune 1999, p. 98-100.
  80. Beaune 1999, p. 266.
  81. Cassard et Biget 2011, p. 100.
  82. Cassard et Biget 2011, p. 101.
  83. Cassard et Biget 2011, p. 102.
  84. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 160.
  85. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 161.
  86. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 162.
  87. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 167.
  88. Martin 1996, p. 128.
  89. Martin 1996, p. 134.
  90. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 169.
  91. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 171.
  92. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 172.
  93. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 173.
  94. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 175-201.
  95. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 207.
  96. Beaune 1999, p. 36-37.
  97. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 218.
  98. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 211-212.
  99. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 209.
  100. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 214.
  101. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 218-258.
  102. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 202.
  103. Cassard et Biget 2011, p. 329.
  104. Duby et Daval 2015, p. 302.
  105. Toman 1997, p. 9 & 11.
  106. Toman 1997, p. 13.
  107. Toman 1997, p. 121.
  108. Cassard et Biget 2011, p. 329-331.
  109. Cassard et Biget 2011, p. 332.
  110. Cassard et Biget 2011, p. 341-343.
  111. Cassard et Biget 2011, p. 345-347.
  112. Toman 1997, p. 10.
  113. Duby et Daval 2015, p. 266.
  114. Duby et Daval 2015, p. 267.
  115. Duby et Daval 2015, p. 284.
  116. Rosemberg 2013, p. 36. § « La peinture préromane et romane », par Jean-Pierre Caillet
  117. Rosemberg 2013, p. 36-58. § « La peinture préromane et romane », par Jean-Pierre Caillet
  118. Rosemberg 2013, p. 61. § « La peinture gothique », par Fabienne Joubert
  119. Rosemberg 2013, p. 63. § « La peinture gothique », par Fabienne Joubert
  120. Rosemberg 2013, p. 64. § « La peinture gothique », par Fabienne Joubert
  121. Rosemberg 2013, p. 66. § « La peinture gothique », par Fabienne Joubert
  122. Bove et Biget 2009, p. 489.
  123. Bove et Biget 2009, p. 491.
  124. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 263.
  125. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 264.
  126. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 265.
  127. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 268.
  128. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 270-272.
  129. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 272-274.
  130. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 275-276.
  131. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 277.
  132. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 282.
  133. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 281.
  134. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 283.
  135. Le Goff 1985, p. 149-150.
  136. Le Goff 1985, p. 151-153.
  137. Le Goff 1985, p. 170-172.
  138. Le Goff 1985, p. 167-169.
  139. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 343-345.
  140. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 346-347.
  141. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 348.
  142. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 349.
  143. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 293296.
  144. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 309-326.
  145. Hist. cult. de la Fr. 1, p. 297-299.
  146. Le Goff 1985, p. 174-176.
  147. Jean-Claude Yon, Histoire culturelle de la France au XIXe siècle, Armand Colin, (ISBN 978-2-200-35327-8, lire en ligne).
  148. Pascale Goetschel et Emmanuelle Loyer, Histoire culturelle de la France - 5e éd.: De la Belle Epoque à nos jours, Armand Colin, (ISBN 978-2-200-62385-2, lire en ligne)
  • Portail de la France
  • Portail de la culture
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.