Église-halle

Une église-halle est une église dont le vaisseau central et les collatéraux (vaisseaux latéraux) sont de hauteur égale (et pouvant éventuellement être de largeur égale ou non), et communiquent entre elles sur toute cette hauteur. Elle se caractérise aussi par des colonnes très élancées qui supportent directement les voûtes juxtaposées, et dont on a pu dire que, loin de diviser l'espace, elles l'élargissent ; il en résulte une certaine minceur des profils, une rigidité contrastant avec la complication des nervures des voûtes. Quant au vaisseau central, en l'absence des fenêtres hautes, il est éclairé indirectement par la lumière provenant des vaisseaux latéraux. L'église-halle se rapproche de la conception d'une vaste salle hypostyle voûtée.

Église Saint-Gorgon de Varangéville.
L'église Saint-Maurice de Lille, à cinq nefs de même hauteur.
Église Saint-Pierre et Saint-Paul de Creuë, église-halle échelonnée.

Variations et définitions

Structure halle et structure basilicale
  • Église-halle. Elle peut avoir plusieurs toits traverses au lieu du grand toit longitudinal.
  • Église-halle avec un plafond horizontal au niveau de la nef centrale et des plafonds obliques au niveau des collatéraux
  • Église-halle échelonnée : la nef centrale est un peu plus haute que les collatéraux, mais elle n'a pas d'étage supplémentaire.
  • Pseudo-baslilique : la nef centrale a un étage de plus que les collatéraux, mais pas de fenêtres supplémentaires.
  • Coupe transversale basilicale : la nef centrale est à claire-voie.

Variabilité des plans du sol des églises halles

Historiographie

L'historiographie des églises-halles[1] s'est développée en Allemagne qui a fait de ce type d'église un manifeste de la spécificité allemande face à l'architecture médiévale française au moment où se sont développées des querelles nationalistes en architecture. Le concept et le terme d'église-halle, Hallenkirche, a été inventé par Wilhelm Lübke. L'historiographie allemande a créé des sous-catégories extensives de la notion d'église-halle avec :

  • emporenhalle : église avec tribunes, comme l'église abbatiale Sainte-Foy de Conques,
  • stufenhalle ou staffelkirche, pseudo-basilique, lorsque la nef centrale est légèrement plus haute que les collatéraux et n'a pas d'ouvertures pour son éclairage.

L'historiographie française utilise le terme d'église-halle quand il y a égalité de hauteur de tous les vaisseaux d'une église.

Développement et répartition

La construction d'églises-halles a commencé et s'est répandue dès l'architecture romane, par exemple dans le Poitou[2]. La première église-halle au nord des Alpes, la chapelle Saint-Barthélemy de Paderborn fut construite en 1017 par des artisans byzantins. Le style de l'église-halle a atteint son apogée avec le gothique tardif, un bel exemple est Saint-Martin de Landshut.

On trouve des églises-halles dans toute l'Europe. Mais le plus grand nombre se trouve dans les contrées de culture germanique (zone des dialectes allemands) ou anciennement influencées par elle, et donc en Allemagne, aux Pays-Bas, Flandre, Autriche, Est de la France, Suisse, Tchéquie, Pologne, et les régions autour de la mer Baltique qui ont été influencées par la Ligue hanséatique. Cet agencement a l'avantage d'être statiquement stable et permet de se passer des arcs boutants et des étagements complexes des nefs et des fenêtres, il est ainsi possible de s'attacher à rendre l'église beaucoup plus claire et unitaire, à l'intérieur comme à l'extérieur. Cette recherche poussive de rigueur des lignes, d'unité et de clarté des volumes architecturaux, constitue une préoccupation esthétique très importante et distinctive de l'architecture gothique des pays germaniques (ces principes esthétiques pré-datent le gothique et remontent à l'architecture ottonienne au moins), l'église-halle représente l'une des solutions parmi d'autres souvent déployées pour y répondre[3]. Les fenêtres peuvent s'étendre de façon saisissante sur toute la hauteur des nefs latérales en apportant une lumière maximale, qui n'est pas gênée dans son chemin vers la nef centrale grâce à la finesse des piliers. Vue de l'extérieur, l'église-halle dispose souvent d'un toit monumental qui couvre les nefs latérales et la nef centrale, avec une pente assez prononcée pour empêcher l'accumulation de neige. Dans d'autre cas, surtout dans la région des Pays-Bas au sens large (région moins neigeuse), la couverture est constituée de multiples toitures juxtaposées de hauteurs semblables.

Ce style est aussi l'expression des salles de prêche favorisées par les ordres mendiants qui ont joué un rôle exceptionnel dans la vie religieuse allemande.

On trouve un autre foyer important d'églises-halles et d'agencements qui s'en rapprochent dans la péninsule Ibérique (Espagne et Portugal), l'objectif esthétique recherché y est différent, malgré les échanges artistiques certains et intenses avec les pays germaniques durant le Moyen Âge. Il s'agit plutôt ici d'une solution commode utilisée pour développer au maximum la monumentalité et le gigantisme des volumes intérieurs et d'en faciliter la perception de toutes parts en offrant le moins d'obstacle possible au regard. Volontairement moins éclairées que leurs consœurs germaniques afin de bien clore et protéger l'espace sacré, ces églises ibériques ne sont pas sans évoquer des grandes salles mystérieuses de grottes souterraines, les fines colonnes faisant plus penser à des stalactites suspendues aux voûtes qu'à des supports. On peut aussi noter de nombreux cas, comme la cathédrale de Séville, où des églises basilicales tendent à se rapprocher de la conception des églises-halles par l'ampleur des nefs latérales et la hauteur des piliers, mais qui ne sont pas formellement des églises-halles.

Liste

Allemagne
Sainte-Anne d'Annaberg-Buchholz.
Église Saint-Georges de Dinkelsbühl

.

Église Sainte-Marie de Halle-sur-Saale

.

Saint-Martin de Landshut.
Église (temple) Saint Laurent de Nuremberg.
Saint-Lambert de Münster.
Église Sainte-Marie de Pirne.
Collégiale de Schwäbisch Gmünd.

– La liste en allemand est plus longue. –

Angleterre
Chapelle Notre-Dame, extrémité Est de la cathédrale de Salisbury.

Autriche
Chœur de l'église franciscaine de Salzbourg.
Église à quatre nefs de Schwaz.
Église Saint-Nicolas de Feldkirch, à deux nefs seulement.

Biélorussie

Croatie

Danemark
Cathédrale de Maribo.

Andalousie
Cathédrale de Guadix, l'église-halle la plus méridionale en Europe.

Aragon
Cathédrale de Barbastro.

Cantabrie
Saint-Piere-et-Saint-Felix de Liérganes.
Province de Burgos
Sainte-Marie-de-l'Assomption de Olmillos de Sasamón.
Saint-Sébastien de Villacastín.
Province de León
Province de Palencia
Province de Salamanque
Province de Ségovie
Province de Valladolid
Santa Maria de Mediavilla en Medina de Rioseco.
Province de Zamora
  • église San Julian de los Caballeros (es) de Toro, 1545-1577
Province de Valladolid

Castille-La Manche
Paroissiale de Sacedón.
Province de Guadalajara
Province de Cuenca

– jusqu'à vingt –

Catalogne
Santa Maria del Mar de Barcelone, une basilique en proportions d'une halle échelonnée
Province de Badajoz

Murcie

La Rioja
  • Chœur de l'abbatiale de Notre-Dame-de-la Piété (article espagnol) (es) de Casalarreina

Pays basque
Saint-Vincent de Vitoria-Gasteiz.

Estonie

Finlande

(Toutes protestantes)

Alsace
Saint-Thomas de Strasbourg, 5 nefs.
Aydat.

Aquitaine

Auvergne
Église Sainte-Marie-Madeleine de Montargis.

Bourgogne

Centre

Champagne-Ardenne

Franche-Comté

Lorraine et Barrois

Midi-Pyrénées

Nord et Pas-de-Calais

Normandie

Picardie

Poitou et Limousin
Cathédrale Saint-Pierre de Poitiers.
Saint-Savin-sur-Gartempe.

Rhône-Alpes

Savoie

Hongrie
Église Matthias de Budapest.

En hongrois "templom" est le terme pour chaqune église)

Dôme de Pienza.

Italie

Lettonie

Lituanie

Norvège
Cathédrale de Bergen.

Pays-Bas
St-Michel de Synkawitchy.
Broederenkerk (église des Frères) de Deventer.
Grand'église de La Haye: voûtes en berceau croisées.

Pologne
Sainte-Marie de Gdańsk.
Cath. de l'Ermeland en Frombork.
Cath. de Sandomierz.

Portugal
Monastère des Hiéronymites de Belém.

République tchèque
Saint-Jacques-le-Vieux, Kutná Hora.

Roumanie
Saint-Michel en Cluj

Russie

Serbie

Slovaquie

Slovénie

Suède
Temple de Stora Tuna.

Toutes sont des églises évangéliques.

Suisse
Saint-Jean de Müstair.

Ukraine
Basilique-cathédrale de Lviv.

Notes et références
  1. Voir la bibliographie de Pierre Sesmat.
  2. Des églises-halles romanes au gothique angevin
  3. Pablo de la Riestra, section « L'architecture gothique dans les "pays germaniques" », pages 190 à 235 dans le livre L'art gothique, Architecture, sculpture, peinture, sous la direction de Rolf Toman, éditions h.f.ullmann. 2004 (2007 pour l'édition en français). (ISBN 978-3-8331-3513-2).
  4. Ville de Dessau-Rosslau: Marienkirche(en allemand)
  5. Esslingen-Bilderbuch: Frauenkirche
  6. www.sixti-northeim.de – description allemande
  7. site officiel de l'église St. Nicolas (Nikolaikirche) en Rostock avec photos de l'intérieur
  8. http://nyk-f-sogn.dk/page/8295/kirkens-skib-og-kor paroisse de Nykøbing Falster sur nef et chœur de l'abbatiale (en danois)
  9. kirke_rummet_indgang.php Paroisse Sainte-Marie de Sønderborg sur l'entérieur de l'église (en danois)
  10. TERESA THOMSON LLISTERRI: El arte barroco en la comarca del Bajo Aragón
  11. JOSÉ LUIS PANO GRACIA: LA FÁBRICA DE LA IGLESIA PARROQUIAL DE ARIZA (ZARAGOZA)
  12. Catálogo Artístico y Monumental: LA IGLESIA PARROQUIAL DE SAN PEDRO MÁRTIR, BERGE (Bajo Aragón)
  14. Catálogo Artístico y Monumental: LA IGLESIA PARROQUIAL DE LA NATIVIDAD, CASTELSERÁS (Bajo Aragón)
  15. « La Cerollera », sur Visit Bajo Aragón (consulté le ).
  17. Catálogo Artístico y Monumental: LA IGLESIA PARROQUIAL DE SANTA ELENA, SENO (Bajo Aragón)
  18. Parroquia Santa Cruz, Medina de Pomar (Burgos)
  19. IGLESIA DE LOS SANTOS JUSTO Y PASTOR (CUENCA DE CAMPOS)
  21. Parroquia Santísimo Salvador (Simancas)
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  71. « Église Saint-Germain de Savièse (Valais, Suisse) », sur tourisme.ch (consulté en ).

Annexes

Bibliographie
  • Pierre Sesmat, « Les “églises-halles” histoire d'un espace sacré (XIIe – XVIIIe siècle) », Bulletin monumental, t. 163, no 1,‎ , p. 3–78 (DOI 10.3406/bulmo.2005.1249, lire en ligne [sur persee']).
  • Pierre Sesmat, « Église-halle », dans Pascale Charron (dir.) et Jean-Marie Guillouët (dir.), Dictionnaire d'histoire de l'art du Moyen Âge occidental, Paris, Robet Laffont, coll. « Bouquins », , 1128 p. (ISBN 978-2-221-10325-8), p. 325–326.

Articles connexes
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