Présidence de Jimmy Carter
La présidence de Jimmy Carter débuta le , date de l'investiture de Jimmy Carter en tant que 39e président des États-Unis, et prit fin le . Membre du Parti démocrate, Carter entra en fonction après avoir battu le président Gerald Ford, candidat du Parti républicain, lors de l'élection présidentielle de 1976. Il fut lui-même battu quatre ans plus tard à l'élection de 1980 par le candidat républicain Ronald Reagan, qui lui succéda à la Maison-Blanche.
39e président des États-Unis
Type | Président des États-Unis |
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Résidence officielle | Maison-Blanche, Washington |
Système électoral | Grands-électeurs |
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Mode de scrutin | Suffrage universel indirect |
Élection | 1976 |
Début du mandat | |
Fin du mandat | |
Durée | 4 ans |
Nom | Jimmy Carter |
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Date de naissance | |
Appartenance politique | Parti démocrate |
Carter accéda à la présidence au moment où l'économie américaine traversait une période de stagflation, c'est-à-dire une combinaison entre une croissance économique au ralenti et un taux d'inflation très élevé. Son administration mit en place une politique budgétaire qui visait à maîtriser l'inflation en procédant à une réduction des déficits et des dépenses publiques. En réponse à la crise énergétique qui perdura pendant une grande partie des années 1970, Carter voulut établir une politique énergétique à l'échelle nationale afin de promouvoir la préservation de l'énergie et la mise au point de ressources alternatives. En dépit de ce choix, les États-Unis subirent les effets du choc pétrolier de 1979 qui fut suivi d'une récession en 1980. Carter chercha également à réformer le système de protection sociale, le système de santé et la politique fiscale, mais il échoua en grande partie, notamment en raison de ses mauvaises relations avec le Congrès. Il fonda par ailleurs deux nouveaux départements fédéraux — Éducation et Énergie.
Sur le plan des relations internationales, dans un contexte de guerre froide, le président américain mit les droits de l'homme au cœur de sa politique étrangère, à une période où les relations avec la Chine et l'URSS étaient relativement apaisées. Poursuivant les efforts de conciliation initiés par ses prédécesseurs, Carter normalisa ainsi les relations avec la Chine et poursuivit les négociations sur la limitation des armements stratégiques avec l'Union soviétique. Dans le cadre du conflit israélo-arabe, il aida à la ratification des accords de Camp David qui mirent fin au conflit entre Israël et l'Égypte. Il signa également les traités Torrijos-Carter qui garantirent la rétrocession de la zone américaine du canal de Panama aux autorités panaméennes dans un délai de vingt ans. Après l'invasion de l'Afghanistan par les Soviétiques, Carter abandonna les tentatives de rapprochement avec l'URSS et entama un réarmement militaire.
Sa dernière année au pouvoir fut marquée par plusieurs crises majeures, en particulier le déroulement de la prise d'otages de l'ambassade américaine en Iran et l'échec de la tentative de libération des otages lors de l'opération Eagle Claw, d'importantes pénuries de carburant aux États-Unis et l'invasion de l'Afghanistan par les Soviétiques. Sa faible popularité lui valut d'être concurrencé en vue des prochaines élections par Ted Kennedy, représentant de l'aile progressiste du Parti démocrate, qui critiquait l'opposition de Carter à un système d'assurance santé universelle. Bénéficiant du soutien de l'opinion publique à la fin de l'année 1979 et au début de l'année 1980, Carter parvint toutefois à s'imposer face à Kennedy lors des primaires démocrates de 1980. La même année, il affronta au scrutin général l'ancien gouverneur de la Californie Ronald Reagan. Alors que les sondages réalisés à la veille de l'élection prédisaient un résultat serré, Reagan l'emporta largement sur son adversaire. Carter est généralement considéré par les historiens et les politologues comme un président inférieur à la moyenne.
Élection présidentielle de 1976
Carter avait été élu gouverneur de la Géorgie pour un mandat de quatre ans en 1970 et s'était forgé une réputation de gouverneur progressiste et modéré, notamment sur la question raciale. À la suite de la victoire de George McGovern aux primaires démocrates de 1972, Carter pensa qu'il avait des chances de remporter la nomination de son parti pour l'élection présidentielle de 1976 en se présentant comme un outsider déconnecté des institutions politiques de Washington[1]. À l'instar de McGovern en 1972, Carter souhaitait remporter un maximum de délégués aux élections primaires afin de compenser le manque de soutien parmi les ténors du Parti démocrate. Il annonça officiellement sa candidature à la prochaine élection présidentielle en [2]. Un certain nombre de dirigeants démocrates comme l'ancien candidat à l'élection de 1968 Hubert Humphrey, le sénateur Walter Mondale du Minnesota ou le sénateur Ted Kennedy du Massachusetts n'ayant pas souhaité se présenter, aucun favori n'émergea clairement en vue des primaires du parti. Les différents candidats — Mo Udall, Sargent Shriver, Birch Bayh, Fred R. Harris, Terry Sanford, Henry M. Jackson, Lloyd Bentsen et George Wallace — bénéficiaient toutefois pour la plupart d'une notoriété bien supérieure à celle de Carter[3].
Conscient de cette faiblesse, Carter chercha à travers ses discours à unifier le parti derrière sa candidature : son plaidoyer en faveur d'une réduction des dépenses militaires et d'un contrôle plus strict des activités de la CIA plut aux progressistes alors que sa promesse d'éliminer le gaspillage gouvernemental lui attira une grande partie de l'électorat conservateur. Pour la première élection primaire qui se tint en Iowa, Carter mena une campagne intensive car il estimait qu'une victoire dans cet État le placerait en bonne position pour remporter la nomination du parti. Lors du scrutin, il arriva en tête devant tous les autres candidats ce qui lui permit de dominer la scène médiatique avant la primaire du New Hampshire, qu'il remporta également[4]. Wallace se retira de la course après ses défaites aux primaires de Floride et de Caroline du Nord, débarrassant Carter de son principal rival dans le Sud[5]. La mobilisation des électeurs noirs en faveur de Carter joua un rôle important dans la victoire de ce dernier, notamment durant les primaires organisées dans les États du Sud. Après sa victoire contre Jackson lors de la primaire de Pennsylvanie, Carter devint le grand favori de la course pour l'investiture démocrate[6]. En dépit des déclarations de candidatures tardives du sénateur Frank Church et du gouverneur Jerry Brown, Carter décrocha la nomination le dernier jour des primaires[7]. Après s'être entretenu avec plusieurs candidats potentiels, il sélectionna Walter Mondale comme colistier, un choix qui rassura l'aile progressiste du parti plutôt sceptique à l'égard de Carter[8].
De leur côté, en dépit d'une convention particulièrement houleuse, les républicains finirent par désigner comme candidat le président Gerald Ford, entré à la Maison-Blanche en 1974 à la suite de la démission de Richard Nixon, impliqué dans le scandale du Watergate[8]. La division des républicains et les critiques selon lesquelles Ford n'était pas fait pour occuper le poste favorisèrent la candidature de Carter, qui devançait son adversaire de 15 points dans les sondages en [9]. Pendant la campagne, Carter continua de promouvoir un programme centriste et chercha à redéfinir la place du Parti démocrate dans la vie politique après les événements tumultueux des années 1960. Il concentra essentiellement ses attaques sur les institutions politiques, se définissant lui-même comme un outsider dont le but était de réformer Washington après le traumatisme du Watergate[10]. En réaction, Ford reprocha à Carter son « manque de clarté » sur divers sujets[9]. Une série de trois débats télévisés fut organisée entre les deux candidats au cours de la campagne. Ford fut généralement considéré comme le vainqueur du premier débat, mais il commit une gaffe lors du deuxième débat en affirmant que l'Europe de l'Est n'était pas sous la domination de l'Union soviétique. Cette maladresse ainsi que la bonne performance de Carter lors du troisième débat stoppèrent la remontée du président sortant, mais les sondages réalisés la veille du scrutin n'en prédisaient pas moins un résultat très serré[11].
Le , Carter remporta l'élection avec 50,1 % des voix et 297 votes de grands électeurs, contre 48 % des voix et 240 grands électeurs pour Ford. L'élection de 1976 fut la seule élection présidentielle remportée par le Parti démocrate entre 1964 et 1992. Carter réalisa de très bons scores dans les États du Sud et du Nord-Est alors que Ford remporta la quasi-totalité des États de l'Ouest et une grande partie du Midwest. Lors des élections législatives qui se déroulèrent à la même période, les démocrates accrurent leur majorité au Sénat et à la Chambre des représentants[12].
Investiture
Dans son discours d'investiture, Jimmy Carter déclara : « nous avons appris que plus n'est pas forcément synonyme de mieux, que notre grande nation a su reconnaître ses limites et que nous ne pouvons apporter de solution satisfaisante à toutes nos questions ni à tous nos problèmes »[13]. Carter avait fait campagne sur la promesse d'éliminer les travers de la « présidence impériale », promesse qu'il mit en pratique le jour de son investiture en remontant à pied Pennsylvania Avenue, du Capitole jusqu'à la Maison-Blanche, au mépris de tous les protocoles de sécurité. Ses premières actions en tant que président allèrent également dans ce sens puisqu'il réduisit d'un tiers l'effectif de son cabinet et mit en vente le yacht présidentiel, l'USS Sequoia[14]. Conformément à une promesse de campagne, Carter accorda en outre l'amnistie générale aux citoyens s'étant soustraits à l'autorité militaire lors de la guerre du Viêt Nam[15].
Composition du gouvernement
Bien que Carter avait fait campagne contre la sphère politique de Washington, la plupart des individus nommés initialement à un poste de son cabinet avaient servi sous les administrations précédentes ou avaient connu Carter en Géorgie, à l'exception notable du secrétaire au Travail Ray Marshall. Le secrétaire d'État Cyrus Vance, le secrétaire à la Défense Harold Brown et le secrétaire du Trésor W. Michael Blumenthal étaient tous d'anciens hauts fonctionnaires des administrations Kennedy et Johnson[16]. Les autres nominations importantes furent celles de Charles Schultze comme président du Conseil des conseillers économiques, de l'ancien secrétaire à la Défense James R. Schlesinger en tant que conseiller du président sur les questions énergétiques, du juge fédéral Griffin Bell comme procureur général et de Patricia Roberts Harris, la première femme afro-américaine à siéger dans un cabinet présidentiel, en tant que secrétaire au Logement et au Développement urbain[17].
Après sa victoire à l'élection de 1976, Carter offrit le poste de chef de cabinet de la Maison-Blanche à deux de ses conseillers, Hamilton Jordan et Charles Kirbo, qui le refusèrent tous les deux. Plutôt que d'offrir le poste à quelqu'un d'autre, Carter décida de se passer d'un chef de cabinet et mit en place un système dans lequel les membres du cabinet auraient plus facilement accès au président. Carter nomma plusieurs de ses anciens collaborateurs en Géorgie au sein du bureau exécutif : Bert Lance fut désigné à la tête du Bureau de la gestion et du budget tandis que Jordan devint un conseiller influent du président. Parmi les anciens de Géorgie figuraient Jody Powell comme porte-parole de la Maison-Blanche, Jack Watson en tant que secrétaire du cabinet et Stuart E. Eizenstat comme chef du personnel chargé de la politique intérieure[18]. Pour conduire la politique étrangère de l'administration, Carter s'appuya sur divers membres de la Commission trilatérale, dont Vance et le conseiller à la sécurité nationale Zbigniew Brzeziński. Brzeziński émergea comme l'un des principaux conseillers du président et Carter travailla à la fois avec le Conseil de sécurité nationale et le département d'État dirigé par Vance pour concevoir et mettre en œuvre sa politique extérieure[19]. Le vice-président Walter Mondale fut un conseiller important sur les questions de politiques étrangère et nationale[20] et la Première dame Rosalynn Carter joua également un rôle influent au sein de l'administration[21].
Au milieu de l'année 1978, Carter remania partiellement son cabinet en nommant le directeur de la publicité, Gerald Rafshoon, au poste de directeur des communications de la Maison-Blanche et Ann Wexler pour diriger le bureau des relations publiques[22]. Carter remplaça une grande partie de son personnel et de son cabinet au milieu de l'année 1979. Cinq membres du cabinet durent quitter leurs fonctions, parmi lesquels Blumenthal, Bell et Joseph A. Califano, Jr., le secrétaire à la Santé, à l'Éducation et aux Services sociaux. Jordan fut finalement choisi pour exercer les fonctions de chef de cabinet et Alonzo L. McDonald, un ancien cadre de la société McKinsey & Company, fut nommé directeur du personnel. Le président de la Réserve fédérale G. William Miller succéda à Blumenthal en tant que secrétaire du Trésor, Benjamin Civiletti devint procureur général et Charles Duncan, Jr. nouveau secrétaire à l'Énergie[23]. Après la démission de Vance en 1980, Carter désigna Edmund Muskie, un sénateur très respecté avec qui Carter entretenait des relations amicales, pour servir à la tête du département d'État[24].
Nominations judiciaires
Parmi les présidents ayant effectué un seul mandat complet de quatre ans, Carter fut le seul qui n'eut pas à proposer de candidats à la Cour Suprême[25]. Il nomma toutefois 56 juges aux cours d'appel fédérales et 203 juges aux cours fédérales de district. Deux des juges affectés aux cours d'appel sous son administration — Stephen Breyer et Ruth Bader Ginsburg — entrèrent par la suite à la Cour suprême sous la présidence de Bill Clinton. Carter fut le premier président à faire de la diversité démographique un critère important dans le choix des candidats à des postes de la magistrature. Sous son mandat, le nombre de juges féminins dans les cours d'appel passa de un à douze, celui des juges masculins non-blancs de six à treize et celui des juges féminins dans les cours de district de quatre à 32. Dans le même temps, le nombre de juges masculins non-blancs dans ces mêmes cours de district passa de 23 à 55. Carter nomma également la première juge de cour d'appel afro-américaine, Amalya Lyle Kearse, le premier juge de cour d'appel hispanique, Reynaldo Guerra Garza, et la première juge de district hispanique, Carmen Consuelo Cerezo[26].
Politique intérieure
Relations avec le Congrès
Après avoir mené une campagne efficace sur son image d'« étranger » de Washington et sur ses critiques à l'encontre du pouvoir en place, Carter conserva cette ligne de conduite en tant que président des États-Unis. Le positionnement qu'il adopta contre les institutions et son refus de jouer selon les règles de Washington contribuèrent néanmoins aux mauvaises relations entretenues par son administration avec les démocrates du Congrès. Après son élection, Carter étudia la possibilité de réorganiser la branche exécutive, ce qui lui aliéna plusieurs démocrates influents comme Jack Brooks ou le président de la Chambre des représentants Tip O'Neill. Sous la présidence de Nixon, le Congrès avait adopté une série de législations qui réduisait les pouvoirs du président et la plupart des membres du Congrès n'étaient pas disposés à restituer ce pouvoir, même avec un démocrate en fonction comme Carter[27]. La réticence de celui-ci à faire usage de ses pouvoirs de patronage acheva d'agacer le Congrès et ce dernier vint affecter les ambitions législatives du président Carter durant toute la durée de son mandat[28]. Les rapports entre le Congrès et la Maison-Blanche étaient tendus même si, bien souvent, les difficultés de communication ne résultaient pas d'une négligence intentionnelle mais bien plutôt d'une mauvaise organisation des relations avec le Congrès au sein de l'administration[29]. O'Neill, Robert Byrd, le chef de la majorité au Sénat, et d'autres membres du Congrès furent conviés par le président à des entretiens seul-à-seul dans lesquels Carter tentait de rallier ses interlocuteurs à ses vues, mais il échoua la plupart du temps[30]. Carter commit également l'erreur de vouloir se concentrer sur trop de priorités à la fois, en particulier durant les premiers mois de sa présidence[31].
Pendant les 100 premiers jours de sa présidence, Carter adressa une lettre au Congrès dans laquelle il proposait l'abandon de différents projets hydrauliques. Parmi les opposants à cette suggestion de Carter se trouvait le sénateur Russell Long, un démocrate influent du Comité des finances du Sénat. Le projet de Carter fut rejeté, laissant au président un grand sentiment d'amertume[32]. Un profond désaccord s'installa alors entre le Congrès et la Maison-Blanche. Carter nota que les opposants les plus acharnés à sa politique provenaient de l'aile libérale du parti démocrate, opposition qu'il attribuait à l'ambition de Ted Kennedy de le remplacer au poste de président[33].
Quelques mois après le début de son mandat, pensant pouvoir compter sur le soutien de 74 membres du Congrès, Carter publia une « liste noire » de 19 projets qu'il considérait comme relatifs à la politique d'« assiette au beurre ». Il précisa qu'il mettrait son veto à n'importe quelle législation contenant un projet de cette liste[34]. Cette dernière fut très mal accueillie par la direction du Parti démocrate. Le président estimait qu'un projet de loi sur les fleuves et les ports relevait de la dépense inutile, mais Tip O'Neill pensa qu'il était imprudent pour Carter d'interférer sur des questions relevant traditionnellement de la compétence du Congrès. Contraint par la suite d'accepter une loi incluant la plupart des projets portés précédemment sur la « liste noire », la position du président sortit affaiblie de cette confrontation[35].
Le Congrès refusa ultérieurement d'adopter les dispositions majeures de son projet de loi sur la protection des consommateurs et des mesures portant sur la réforme du travail. En retour, Carter apposa son veto à un ensemble de textes législatifs concernant le secteur des travaux publics, le qualifiant d'« inflationnaire » dans ce qu'il jugeait n'être qu'une dépense futile. Devinant néanmoins le faible soutien de l'opinion publique à l'action législative du président, les leaders du Congrès profitèrent de la situation pour réduire son plan fiscal à une succession de dépenses en faveur d'intérêts particuliers[36].
Politique budgétaire
Bien qu'il eût appelé à une réforme du système fiscal lors de sa campagne présidentielle, Carter n'y apporta que des changements mineurs une fois entré en fonctions[37]. Ses propositions consistaient en une réduction d'impôt de 50 dollars par contribuable, une diminution des impôts sur les sociétés de 900 millions de dollars et une augmentation des dépenses dans le secteur des travaux publics. La faiblesse des dépenses comprises dans ce plan de relance reflétait le conservatisme de Carter en matière de fiscalité car celui-ci était plus soucieux d'éviter l'inflation et d'équilibrer le budget que de s'attaquer au problème du chômage. L'opposition de Carter à une augmentation des dépenses fédérales lui valut d'être très critiqué jusqu'au sein de son propre parti, de nombreux démocrates souhaitant réduire le taux de chômage via une politique fédérale de travaux publics[38].
En 1977, Carter approuva plusieurs mesures destinées à lutter contre le chômage, dont une extension du Comprehensive Employment and Training Act, mais il continua de se concentrer principalement sur la réduction des déficits et de l'inflation[39]. En , il ratifia le Revenue Act of 1978 qui instaurait une baisse d'impôt à hauteur de 18,7 milliards de dollars[40]. Il procéda également à une importante réduction du taux d'imposition sur les plus-values, qui passa de 98 % à 28 %[41]. Les États-Unis accumulèrent une dette d'environ 280 milliards de dollars sous la présidence de Carter, passant d'environ 630 milliards début 1977 à près de 910 milliards à la fin de l'année 1980. Toutefois, en raison d'une croissance économique supérieure à l'augmentation de la dette nominale, le ratio dette/PIB du gouvernement américain, établi à 36,2 % au début du mandat de Jimmy Carter, diminua progressivement jusqu'à atteindre 33,3 % à la fin de l'année 1980[42].
National Energy Act
En 1973, sous la présidence de Richard Nixon, l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) avait réduit les quantités de pétrole disponibles sur le marché mondial, d'une part en raison de la déflation du dollar consécutive à la décision de Nixon de mettre fin à l'étalon-or, et d'autre part en réponse au trafic d'armes orchestré par les États-Unis avec Israël pendant la guerre du Kippour. Cet événement fut à l'origine du premier choc pétrolier de 1973 et de la hausse brutale du prix du pétrole, qui stimulèrent l'inflation et mirent un frein à la croissance économique. Sitôt la décision de l'OPEP connue, le gouvernement américain mit en place un contrôle des prix sur l'essence et le pétrole, ce qui eut pour effet d'entraîner des pénuries de carburant et de longues files d'attente devant les stations-services[43],[44]. La situation fut finalement apaisée avec la levée des contrôles sur l'essence, mais il fallut attendre l'administration de Ronald Reagan pour que les contrôles sur les prix du pétrole soient définitivement supprimés[44]. Carter déclara au peuple américain que le choc pétrolier était « une menace actuelle et réelle pour notre nation » et « l'équivalent moral d'une guerre », ajoutant dans son discours que les réserves mondiales de pétrole ne permettraient probablement plus de répondre à la demande des États-Unis dans les six à huit prochaines années[45].
En 1977, Carter obtint des démocrates du Congrès la création du département de l'Énergie des États-Unis, avec une priorité donnée à la réduction de la consommation, au développement de nouvelles ressources et à la recherche[46]. Le président instaura un contrôle des prix sur le pétrole et le gaz naturel, installa des panneaux solaires sur le toit de la Maison-Blanche et un poêle à bois dans ses appartements[47] ; il demanda par ailleurs, en 1979, que les illuminations de Noël au sein de la Maison-Blanche soient éteintes, en hommage aux otages de l'ambassade américaine en Iran mais aussi par souci d'économie[48]. Sur l'ensemble du pays, les thermostats équipant les bâtiments gouvernementaux et commerciaux furent contrôlés pour ne pas être réglés au-dessus de 18 °C en hiver et en dessous de 26 °C en été, et ce durant toute l'année 1980[49].
En réaction à la crise, Carter ratifia le National Energy Act (NEA) et le Public Utility Regulatory Policies Act (PURPA), dans le but d'encourager les économies d'énergie et le développement des ressources nationales — notamment dans le secteur des énergies renouvelables[50]. Le président s'opposa toutefois à un programme de commercialisation des photovoltaïques envisagé par le département de la Défense[51]. Entre 1979 et 1980, il entama un processus de dérégulation de l'industrie pétrolière en éliminant les allocations gouvernementales. Dans son discours du « malaise », il demanda au Congrès d'instaurer une « taxe sur les bénéfices exceptionnels », sortie justifiée par l'attitude de son administration qui voyait dans cette dérégulation un moyen pour les compagnies pétrolières d'augmenter leurs recettes de façon « indigne »[52]. Adoptée en , la taxe ne produisit que des résultats médiocres et fut finalement supprimée en 1988[53].
Deuxième choc pétrolier
Un deuxième choc pétrolier frappa les États-Unis en 1979 et les automobilistes américains durent parfois faire la queue pendant plus d'une heure pour faire le plein d'essence. En réaction, Carter demanda au Congrès de déréglementer le prix du pétrole domestique. À l'époque, le cours intérieur du pétrole n'était pas fixé par le marché mondial mais par les contrôles des prix mis en place par la loi de 1975 sur la politique et la conservation de l'énergie (EPCA). Les compagnies pétrolières étaient très favorables à cette déréglementation qui leur permettrait d'augmenter leurs profits, mais certains membres du Congrès craignaient que cela n'engendre une hausse de l'inflation. Simultanément à son projet de déréglementation, Carter proposa de créer une taxe sur les bénéfices exceptionnels qui devait rapporter au gouvernement fédéral environ la moitié des nouveaux bénéfices des compagnies pétrolières. Le président se servit d'une disposition de la loi pour instaurer progressivement des contrôles sur le prix du pétrole, mais le Congrès rechigna à mettre en œuvre la taxe proposée[54].
En , devant la gravité de la crise, Carter rencontra toute une série de chefs d'entreprise, de responsables politiques, de dirigeants syndicaux, d'universitaires et de personnalités religieuses afin de réformer la politique de son administration[55]. Son observateur des sondages, Patrick Caddell, lui confia que le peuple américain traversait une crise de confiance, liée à la défiance du public vis-à-vis du gouvernement[56]. Alors que la plupart de ses conseillers l'encouragaient à poursuivre la lutte contre l'inflation et la crise énergétique, Carter retint l'idée de Caddell selon laquelle le principal problème du pays était une crise de confiance du peuple américain. Le , Carter s'adressa à la nation entière dans un discours télévisé au cours duquel il plaida en faveur d'un contrôle sur le long terme des importations de pétrole et du développement de carburants synthétiques. Il déclara également que « toute la législation du monde ne peut réparer ce qui ne va pas avec l'Amérique, c'est-à-dire la confiance et le sens de la communauté »[57]. Ces propos restent connus sous le nom de discours du « malaise », bien que Carter n'eut jamais utilisé le mot « malaise » dans son texte[58] :
« Je souhaite maintenant vous parler d'une menace fondamentale qui pèse sur la démocratie de notre pays… Je ne fais pas référence à l’influence exercée par l’Amérique, une nation actuellement en paix avec le reste du monde, et dont la puissance économique et militaire est inégalée…Cette menace est à peine perceptible par des moyens ordinaires. Il s'agit d'une crise de confiance. Il s'agit d'une crise qui frappe la volonté de notre nation en son sein même, en son âme et en son esprit. Nous percevons cette crise à cause du doute croissant que l'on porte sur la signification de nos propres vies et de la perte d'un objectif unique pour notre nation[58]. »
Bien qu'il eut été par la suite fortement critiqué par de nombreux historiens, le discours fut très bien accueilli par la population américaine et la cote de popularité du président augmenta de 11 points dans les sondages[59]. Trois jours après son discours, Carter exigea la démission de tous les responsables de son gouvernement, mais en fin de compte n'en accepta que cinq — notamment celle du secrétaire d'État à l'Énergie James Schlesinger et celle du secrétaire à la Santé, à l'éducation et aux services sociaux Joseph Califano[60]. Le Congrès adopta néanmoins un impôt taxant les bénéfices exceptionnels des entreprises à hauteur de 227 milliards de dollars et adopta l’Energy Security Act ou loi sur la sécurité énergétique. Ce texte donnait naissance à la Synthetic Fuels Corporation qui fut chargée de développer des sources d'énergie alternatives[61]. En dépit de ces succès, le Congrès annula en 1980 la surtaxe instaurée par Carter sur le pétrole importé et rejeta la création d'un « conseil de mobilisation énergétique » (Energy Mobilization Board), une agence gouvernementale destinée à faciliter la construction de centrales électriques[62]. Kaufman et Kaufman considèrent malgré tout les décisions de Carter comme « la législation énergétique la plus radicale de l'histoire de la nation »[61]. Les importations de pétrole aux États-Unis, après avoir atteint un record de 2,4 milliards de barils en 1977 (soit 50 % des réserves du pays), diminuèrent de moitié entre 1979 et 1983[63] tandis que la consommation d'énergie par habitant chuta de 10 % sur la même période[64].
Situation économique
Année | Revenu | Dépenses | Surplus/ Déficit |
PIB | Dette en % du PIB[note 2] |
---|---|---|---|---|---|
1977 | 355,6 | 409,2 | -53,7 | 2028,4 | 21,1 |
1978 | 399,6 | 458,7 | -59,2 | 2278,2 | 26,6 |
1979 | 463,3 | 504,0 | -40,7 | 2570,0 | 24,9 |
1980 | 517,1 | 590,9 | -73,8 | 2796,8 | 25,5 |
1981 | 599,3 | 678,2 | 79,0 | 3138,4 | 25,2 |
Sources | [65] | [66] | [67] |
L'histoire économique de la présidence de Jimmy Carter peut se diviser grossièrement en deux parties égales. Les deux premières années de son mandat furent une période de continuel redressement de la sévère récession économique subie par les États-Unis de 1973 à 1975, qui laissa l'investissement fixe à son niveau le plus bas depuis la récession de 1970 et un taux de chômage à 9 %[63]. Les deux dernières années furent quant à elles marquées par une inflation à deux chiffres, couplée à des taux d'intérêt extrêmement élevés[68], des pénuries de carburant et une croissance économique au ralenti[69]. L'économie du pays progressait à une moyenne de 3,4 % (en accord avec la moyenne historique)[70] et sous Carter, plus d'emplois furent créés par mois dans le secteur privé que sous n'importe quelle autre administration depuis 1950, l'administration Clinton exceptée[71].
L'économie des États-Unis, qui avait bénéficié d'une hausse de 5 % en 1976, continua de croître dans des proportions similaires au cours des deux années suivantes[70]. Le chômage chuta de 7,5 % en à 5,6 % en [72], avec environ 9 millions d'emplois créés dans cet intervalle[73] et un revenu médian des ménages en progression de 5 % entre 1976 et 1978[74]. L'investissement fixe dans le secteur privé (machineries et construction) augmenta de 30 % de 1976 à 1979, croissance identique à celle connue dans la vente et la construction de logements en 1978, tandis que la production industrielle ainsi que la fabrication et la vente de moteurs de voiture frisaient les 15 %. À l'exception des nouvelles mises en chantier, toujours établies un peu en dessous de leur pic de 1972, chacun de ces secteurs de référence atteignit des records de croissance en 1978 ou en 1979[63].
Le deuxième choc pétrolier de 1979 mit cependant un terme à cette période de prospérité : l'inflation et les taux d'intérêt bondirent tandis que la croissance économique, la création d'emploi et la confiance des consommateurs diminuèrent rapidement[68]. La politique monétaire laxiste adoptée par le président de la Réserve fédérale américaine, G. William Miller, avait déjà contribué à une situation de forte inflation[75], passant de 5,8 % en 1976 à 7,6 % en 1978[76], mais la décision de l'OPEP de multiplier soudainement le prix du pétrole par deux[77] conduisit à une inflation à deux chiffres qui atteignit 11,3 % en 1979 et 13,5 % en 1980[76]. La pénurie de carburant durant les vacances d'été de 1979 aggrava le problème de manière considérable, à tel point qu'elle devint plus tard un symbole de la crise chez les Américains[68]. L'augmentation des prix pratiquée par la firme pétrolière Amerada Hess, largement au-dessus du seuil fixé par la Maison-Blanche, incita le gouvernement fédéral à entamer des poursuites judiciaires contre la compagnie[78].
À l'instar de Nixon, Carter demanda au Congrès d'imposer un contrôle des prix sur l'énergie, la médecine et les frais de consommation, mais l'opposition du Capitole l'empêcha d'en obtenir l'application[79]. Le , Carter eut recours au Energy Policy and Conservation Act — voté par le Congrès en 1975 sous la présidence de Gerald Ford — afin de déréguler les prix sur le pétrole domestique et ainsi encourager à la fois la production de pétrole et les économies de carburant[80].
En eut lieu un important remaniement du cabinet au cours duquel Carter demanda la démission d'un certain nombre de ses collaborateurs. Le président en profita pour nommer Paul Volcker au poste de président de la Réserve fédérale en remplacement de Miller devenu secrétaire du Trésor[81]. Tout au long de son mandat, Volcker conduisit une politique monétaire rigoureuse destinée à réduire l'inflation[82], objectif que lui et Carter parvinrent finalement à atteindre après avoir traversé une phase économique difficile marquée par un ralentissement de l'économie et une hausse du chômage. Il fallut attendre l'année 1982 pour retrouver une inflation à un chiffre à l'occasion d'une deuxième récession encore plus sévère que la première, et en 1983, Volcker fut réintégré dans ses fonctions par le président Ronald Reagan[83].
Sous la direction de Volcker, la Réserve fédérale augmenta le taux d'escompte de 10 % en à 12 % deux mois après[84]. Le taux directeur dépassa même le taux des fonds fédéraux américains en atteignant 20 % au mois de . Estimant que l'inflation était arrivée à un « stade critique », Jimmy Carter lança par ordre exécutif l'application d'un plan d'austérité ; le taux d'inflation et le taux d'intérêt à court terme atteignirent les 18 % en février et [85]. Les investissements dans le revenu fixe (obligations détenues par la bourse de Wall Street et pensions de retraite) acquirent bientôt une valeur moindre en termes de valeur réelle, et le , le président Carter annonça l'instauration d'un contrôle sur le crédit, une première depuis la Seconde Guerre mondiale[86].
Cette politique, combinée avec des taux d'intérêt records, aboutit à une forte récession économique au printemps 1980[87]. La baisse soudaine du PIB au cours du deuxième trimestre provoqua une augmentation du taux de chômage, qui passa de 6 % à 7,5 % au mois de mai, tandis que la production dans les secteurs de l'automobile et du logement s'effondra de presque 20 % pour atteindre son niveau le plus bas depuis la récession de 1975[63]. Les contrôles sur le crédit furent supprimés par Carter en [88] et le taux directeur chuta à 11 % fin juillet[89] alors que la courbe de l'inflation s'inversa et repassa sous les 13 % pour le restant de l'année[90]. La sévère récession économique qui eut lieu alors que Carter menait campagne en faveur de sa réélection contribua néanmoins à sa défaite face au candidat républicain Ronald Reagan lors de l'élection présidentielle de 1980[79].
Durant la deuxième partie de l'année 1980, les faibles taux d'intérêt et l'assouplissement des contrôles sur le crédit marquèrent une période de redressement économique. Même si certains domaines particulièrement touchés par la récession eurent de grandes difficultés à se rétablir, à l'exemple de la construction automobile et du logement[63], le PIB et l'emploi retrouvèrent leur niveau d'avant la crise dès le premier trimestre de 1981[70],[73] et l'indice S&P 500 (qui était resté aux alentours de 100 depuis 1976) grimpa jusqu'à 140 au cours des derniers mois de 1980[91]. Afin de contrebalancer la reprise de la croissance, la Fed décida de fixer des taux d'intérêt très élevés[92] et, en , le taux directeur s'établit à 21,5 %, le plus haut taux jamais atteint durant l'histoire des États-Unis tous présidents confondus[93]. L'administration Carter demeura fiscalement conservatrice durant les deux périodes de croissance et de récession économiques, mettant son veto à de nombreux projets liés à une hausse des dépenses tout en appliquant la dérégulation dans le secteur énergétique et le domaine des transports. Elle réduisit également le taux maximal d'impôt sur les plus-values[94]. Sous le mandat de Carter, la dette publique américaine en resta approximativement au déficit de 70 milliards de dollars atteint en 1976 mais avec un ratio dette/PIB moins important (4 % à 2,5 % pendant l'année fiscale 1980-1981)[63].
Santé
En , Carter proposa une réforme des soins de santé incluant certains éléments-clés du projet de loi pour la couverture maladie universelle, soutenu par le sénateur démocrate Ted Kennedy[95]. En 1977, la plupart des Américains disposaient d'une couverture santé via Medicare, Medicaid ou des assurances privées, mais environ 10 % de la population en était encore dépourvue. La mise en place d'une assurance maladie universelle fut la principale priorité des syndicats et de nombreux démocrates libéraux, mais Carter était préoccupé par les coûts et par l'impact sur l'inflation que risquait d'engendrer un tel système. Il retarda l'examen de la loi tout au long de l'année 1977 et décida en dernier ressort de ne pas soutenir les efforts de Kennedy en faveur d'une couverture maladie pour l'ensemble des Américains. Kennedy eut de nombreux entretiens avec des membres de l'administration pour tenter d'établir un compromis sur la question des soins de santé mais les négociations échouèrent en . Les relations entre Kennedy et Carter, plutôt bonnes jusque-là, se dégradèrent fortement à la suite de cet épisode[96].
Trois ans plus tard, en , Carter proposa une réforme plus limitée de l'assurance maladie — un mandat d'employeur pour fournir une assurance privée pour maladies graves, une couverture sans partage des coûts pour les femmes enceintes et les nourrissons, une extension du Medicaid au niveau fédéral avec élargissement aux familles les plus pauvres sans enfants mineurs à leur charge, ainsi que l'adjonction au Medicare d'une couverture « catastrophe ». En , le sénateur Russell Long, à la tête de la majorité conservatrice et bipartisane du Comité des finances du Sénat, défendit le recours au mandat d'employeur pour la mise en place d'une couverture « catastrophe » seulement et pour l'adjonction de cette dernière au Medicare[97] ; il abandonna toutefois ses efforts en 1980 en raison des contraintes budgétaires[98].
Carter initia en un projet de contrôle obligatoire des coûts hospitaliers, qui resta longtemps en suspens avant d'être rejeté par la Chambre en 1979[99]. Des progrès furent réalisés dans le domaine de la santé au travail avec la nomination du docteur Eula Bingham au poste de directrice de l'OSHA. Forte de son expérience de physiologiste spécialiste des cancérogènes, Bingham procéda à une augmentation et une simplification des normes médicales et redirigea les fonds alloués à son administration aux groupes industriels en difficulté ; elle imposa par ailleurs une réglementation très stricte sur les taux d'exposition aux particules, plomb et benzène des employés au travail, permettant ainsi aux travailleurs de mieux connaître les risques liés à l'exercice de leur profession. Ces mesures furent appliquées dans un contexte de forte opposition, non seulement celle des républicains, mais également d'une partie de l'administration Carter — notamment le membre du Council of Economic Advisers Charles Schultze et son supérieur direct, le secrétaire au Travail Ray Marshall. Les réformes entamées par Bingham, pour leur plus grande part, ne furent finalement jamais mises en œuvre ou furent purement et simplement annulées[100].
Les programmes de l'OSHA (Occupational Safety and Health Administration) et les programmes en faveur des femmes furent renforcés, alors qu'un « sens commun des priorités » amèna le gouvernement à se concentrer sur des problèmes sanitaires majeurs[101]. Adoptée en 1978, le Pregnant Discrimination Act (loi contre la discrimination de la grossesse) interdisait aux entreprises et aux organisations de discriminer les employées enceintes et offrait à ces dernières une protection dans les établissements de santé et des soins médicaux adaptés[102].
Réforme de la sécurité sociale et de la fiscalité
En 1978, le National Consumer Cooperative Bank Act autorisa à procéder à des levées de fonds qui devaient ensuite être redistribués à des taux d'intérêt très faibles aux jeunes coopératives[103]. La couverture du salaire minimum fut étendu aux travailleurs agricoles, et, à la suite des Age Discrimination in Employment Act Amendments de 1978, la limite d'âge fixée pour l'obtention de la protection contre la discrimination liée à l'âge dans les emplois non-fédéraux et le secteur privé passa de 65 à 70 ans[104]. À cet ensemble de décisions s'ajoutèrent en outre la suppression de l'achat obligatoire des tickets d'alimentation, la proposition du Low Income Home Energy Assistance Program destiné à aider les familles dans le règlement de leur facture de chauffage[105] et l'adoption de la toute première loi fédérale relative à l'emploi pour la jeunesse[106].
Le Fair Debt Collection Practices Act (FCDPA ou loi pour un recouvrement équitable des créances) fut adopté pour mettre fin aux « pratiques injustes et abusives dans le recouvrement de dette »[107].
Éducation
Le programme Head Start fut élargi, avec 43 000 familles et enfants supplémentaires[108], tandis que la part des dépenses consacrées à l'éducation fut multipliée par deux[109]. En 1978, les Child Nutrition Amendments introduisirent une mesure classique du revenu national pour l'admissibilité aux programmes, basée elle-même sur la mesure des revenus prescrits pour une réduction du prix sur les repas scolaires. Cette loi renforça en outre le précédent texte sur l'éducation nutritionnelle contenu dans le programme WIC en demandant une hausse des moyens alloués à cette dernière à l'ensemble des adhérents au programme[110].
Politique environnementale
Qualifié de président « écologiste »[111], Carter introduisit durant son mandat de nombreuses réformes en faveur de la protection de l'environnement[112]. Le , il ratifia le Comprehensive Environmental Response, Compensation, and Liability Act of 1980 (CERCLA), communément désigné sous le nom de Superfund, une loi fédérale relative à la décontamination des sites pollués par des substances chimiques[113]. Le président fit également installer 32 panneaux solaires sur le toit de la Maison-Blanche, le [111], afin de promouvoir l'utilisation de l'énergie solaire[114].
Le , il intégra dans la législation le Alaska National Interest Lands Conservation Act prévoyant la création ou la remise en état de plusieurs parcs nationaux et l'élargissement du champ d'action du United States Forest Service et de l'United States Fish and Wildlife Service à un certain nombre de territoires ; ce furent finalement 421 000 km2 de terres d'Alaska qui furent transformés en réserves naturelles, parmi lesquels près de la moitié se virent décerner le statut de contrées sauvages[115].
Autres actions et réformes
Sous la présidence de Carter, le département de la Santé, de l'Éducation et des Services sociaux des États-Unis fut scindé en un département de l'Éducation et un département de la Santé et des Services sociaux[116]. Le président fit également passer par la voie législative une importante réforme de la fonction publique, la première depuis près d'un siècle[117].
Carter fit voter en 1978 le Surface Mining Control and Reclamation Act, avec l'intention de permettre à l'industrie houillère d'exploiter les réserves de charbon sans endommager les autres ressources naturelles[118], tandis que le Federal Mine Safety and Health Act tendait à assurer une meilleure protection des mineurs à leur lieu de travail[119].
Il fut le premier président à aborder le sujet des droits accordés aux personnes lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres[120]. Il s'opposa ainsi à l'initiative Briggs, une proposition de loi californienne visant à empêcher les personnes gays et les partisans des droits pour les homosexuels d'enseigner dans les écoles publiques[121], et c'est sous son mandat que fut organisée la première rencontre entre la Maison-Blanche et les chefs de file du mouvement pro-gay[122]. Carter était favorable à la politique de discrimination positive et son administration présenta un mémoire (amicus curiae) à la Cour suprême dans le cadre de l'affaire Regents of the Univ. of Cal. v. Bakke. En 1978, la Cour suprême déclara que le concept de discrimination positive était conforme à la Constitution mais interdit en revanche l'utilisation de quotas raciaux pour les admissions dans l'enseignement supérieur[123]. La Première dame Rosalynn Carter soutint publiquement la ratification de l'Equal Rights Amendment et son mari appuya la prolongation de la période nécessaire à l'adoption du texte[124].
Toujours sous Carter, l'administration américaine promulgua le Airline Deregulation Act, qui abolit l'Office de l'aviation civile (Civil Aeronautics Board) et instaura une déréglementation dans les transports par camion, les transports ferroviaires, les communications et le secteur financier[94].
Fut aussi voté en 1977 le Housing and Community Development Act, qui prévoyait notamment le lancement du programme Urban Development Action Grant afin de venir en aide financièrement aux villes les plus démunies[125], ainsi que des prestations plus étendues pour les handicapés et les personnes âgées et les bases du Community Reinvestment Act de 1978[126], qui visait à empêcher les banques de refuser des prêts ou des crédits aux communautés les plus pauvres[127].
Politique étrangère
Guerre froide
Carter entra en fonction pendant la guerre froide, dans une période de tensions géopolitiques entre les États-Unis et l'Union soviétique. La fin des années 1960 et le début des années 1970 initièrent une phase de détente qui vit un apaisement des relations entre les deux superpuissances. La guerre froide perdit de son importance sur le plan international et certains contemporains de Carter le désignèrent même comme le premier président de l'après-guerre froide. Les relations avec l'URSS continuèrent toutefois d'être un facteur important de la politique étrangère américaine, surtout à la fin des années 1970 et au début des années 1980. Une grande partie des membres de l'administration Carter, y compris Carter lui-même, faisaient partie de la Commission trilatérale qui traitaient en priorité les questions relatives à la guerre froide. Cette organisation défendait une approche de la politique étrangère centrée sur l'aide aux pays du tiers-monde et sur l'amélioration des relations avec l'Europe occidentale et le Japon. Le cabinet Carter était divisé à ce sujet entre le secrétaire d'État Cyrus Vance, qui souhaitait améliorer les rapports avec l'Union soviétique et le tiers-monde, et le conseiller à la sécurité nationale Zbigniew Brzeziński, qui prônait régulièrement la confrontation avec l'URSS[128].
Droits de l'homme
Carter prit initialement ses distances avec la politique d'endiguement longtemps menée à l'encontre de l'Union soviétique et décida de faire des droits de l'homme un axe primordial de sa politique étrangère. Ce choix marqua une rupture dans la ligne de conduite tenue par plusieurs de ses prédécesseurs, dans laquelle les crimes humanitaires étaient souvent négligés lorsqu'ils étaient commis par un gouvernement allié — ou supposé tel — aux États-Unis[129].
Le président nomma l'activiste des droits civiques Patricia M. Derian au poste de coordinateur pour les Droits de l'homme et les Affaires humanitaires ; en , la fonction fut élevée à celle de secrétaire d'État assistant des États-Unis. Derian mit en place le Country Reports on Human Rights Practices, publié chaque année depuis 1977, dont les conclusions se révélèrent un facteur important dans la politique américaine d'assistance militaire, mettant notamment fin à l'appui apporté par les États-Unis à cinq pays d'Amérique du Sud pour le reste de la présidence de Carter[130]. L'administration Carter rompit également avec le soutien historique fourni par les États-Unis au régime somoziste installé au Nicaragua et aida le nouveau gouvernement formé par le Front sandiniste de libération nationale, qui avait pris le pouvoir après la chute de Somoza. Carter continua cependant à soutenir le gouvernement du Salvador malgré les supplications de l'archevêque Óscar Romero, qui fut assassiné quelque temps plus tard pour avoir critiqué les violations des droits de l'homme commises au Salvador[131]. D'une manière générale, le respect des droits de l'homme dans les États latino-américains, qui s'était brusquement détérioré au cours de la décennie précédente, s'améliora significativement après ces initiatives ; le journaliste Jacobo Timerman, torturé durant la « guerre sale » en Argentine, considérait que les prises de position du président Carter relevaient d'une tendance positive et déclara qu'elles avaient non seulement sauvé des vies, mais avaient également « accru la conscience démocratique aux États-Unis »[132].
Une grande partie de l'administration s'opposa toutefois aux initiatives de Carter, et la politique des droits de l'homme menée de manière plus affirmative par ce dernier lors de sa présidence fut entachée par la discorde qui s'installa rapidement parmi ses collaborateurs. Derian et le directeur de la planification politique du département d'État Anthony Lake estimaient que la prise en considération du volet sur les droits de l'homme amélioraient grandement l'efficacité de la diplomatie américaine à l'étranger, alors que le conseiller à la sécurité nationale Zbigniew Brzeziński tenait à traiter en priorité les questions relatives à la Guerre froide. Ces divergences de point de vue atteignirent leur paroxysme en 1979, lors de la chute du régime du Kampuchéa démocratique dirigé par le dictateur Pol Pot, coupable de génocide, à la suite de l'invasion du Cambodge par le Viêt Nam. Brzeziński obtint que l'administration refusât de reconnaître le nouveau gouvernement cambodgien en raison de ses attaches avec l'URSS[133]. Carter fut par ailleurs critiqué par l'écrivain et militante féministe Andrea Dworkin pour avoir ignoré le problème du droit des femmes en Arabie saoudite[134].
Carter convainquit le Congrès d'abroger l'amendement Byrd, réinstaurant des sanctions à l'égard de la Rhodésie (devenue plus tard Zimbabwe-Rhodésie, actuel Zimbabwe), puis, après l'élection de l'évêque Abel Muzorewa en tant que Premier ministre, protesta contre le traitement infligé à Robert Mugabe et à Joshua Nkomo qui se voyaient interdits de participer aux élections. Sous la pression des États-Unis et du Royaume-Uni, de nouvelles élections furent organisées à l'issue desquelles Robert Mugabe devint Premier ministre du Zimbabwe ; les sanctions mises en place par Carter furent levées peu après et les relations diplomatiques rétablies. L'attention particulière prêtée par le président américain sur le processus de transition entre Rhodésie et Zimbabwe reflétait son intention d'empêcher des gains soviétiques dans cette région et de réaliser des progrès dans le domaine de l'égalité raciale[135]. Sa politique au Zimbabwe bénéficia directement à la coopération étroite qu'il menait avec les dirigeants africains, à l'exemple de Kenneth Kaunda, le président de la Zambie[136]. Indépendamment des considérations relatives aux droits de l'homme, Carter renouvela le soutien des États-Unis au dirigeant du Zaïre Mobutu Sese Seko, notamment lors du conflit qui opposa ce dernier à des insurgés soutenus par l'Angola durant la première et la deuxième guerre du Shaba[137]. Son administration s'abstint également de condamner les violations des droits de l'homme commises aux Philippines, en Indonésie, en Corée du Sud, en Iran, en Israël, en Égypte, en Arabie saoudite et au Nord-Yémen[138],[139] ; ou encore en Chine dont le pouvoir communiste participait à la lutte contre l'URSS et ses alliés.
SALT II
Ford et Nixon avaient souhaité amorcer une deuxième phase des négociations sur la limitation des armements stratégiques (SALT), qui avaient permis de fixer une limite au nombre d'armes nucléaires détenues par les États-Unis et par l'Union soviétique. Carter souhaitait également parvenir à un accord pour réduire, et non pas simplement limiter, les arsenaux nucléaires des deux superpuissances[140]. Ses relations avec l'URSS furent plus malaisées que ses deux prédecesseurs républicains. Il critiqua régulièrement le bilan de l'URSS en matière de droits de l'homme car il pensait que ses négociations ne seraient pas bien accueillies par le public s'il se montrait trop empressé de conclure un accord avec les Soviétiques. En 1978 il tegiversa dans l'affaire de la bombe à neutron, annonçant sa fabrication en mars, puis y renonçant début avril, avant six mois plus tard d'en réenvisager partiellement la fabrication. Carter et le dirigeant soviétique Léonid Brejnev signèrent l'accord SALT II en , mais la chute de la popularité de Carter ainsi que l'opposition des républicains et des démocrates néoconservateurs compliquèrent le processus de ratification[141]. Les relations américano-soviétiques se dégradèrent à la suite de l'invasion de l'Afghanistan par l'URSS et le traité SALT II ne fut jamais définitivement ratifié[142].
Afghanistan
L'Afghanistan avait fait partie des pays non-alignés au début de la guerre froide, mais un coup d'État mené en 1973 avait conduit à la mise en place d'un gouvernement pro-occidental[143]. Le , les communistes dirigés par Nour Mohammad Taraki prirent le pouvoir en Afghanistan. Le nouveau régime — divisé entre le groupe extrémiste Khalq de Taraki et le Parcham, plus modéré — signa un traité d'entente avec l'Union soviétique en décembre de la même année. Les efforts de Taraki pour améliorer l'éducation séculaire et la politique de redistribution des terres s'accompagnèrent d'une vague d'exécutions massives et d'oppression politique sans précédent dans l'histoire du pays, ce qui conduisit à la révolte des rebelles moudjahidines. Ayant dû faire face à un soulèvement général en , Taraki fut finalement destitué de ses fonctions par son rival Hafizullah Amin au mois de septembre[144],[145],[146]. Les dirigeants soviétiques craignaient que la présence d'un gouvernement islamiste en Afghanistan ne menaçât la position de l'URSS en Asie centrale et, devant la persistance des troubles, ils déployèrent 30 000 soldats à la frontière soviéto-afghane[147]. Carter et Brzeziński voyaient tous les deux l'Afghanistan comme un « guêpier » potentiel où les forces soviétiques s'useraient dans un conflit inutile et les États-Unis programmèrent de l'aide aux rebelles moudjahidines au début de l'année 1979 qu'ils mirent à exécution le par l'Opération Cyclone[148]. Dans le courant du mois de décembre, le gouvernement d'Amin perdit le contrôle de la plus grande partie du pays, décidant l'URSS à envahir l'Afghanistan, exécuter Amin et à le remplacer à la présidence par le leader du Parcham Babrak Karmal[144],[146].
Carter fut surpris de l'invasion de l'Afghanistan par les Soviétiques car les services de renseignement américains étaient persuadés que Moscou n'oserait pas intervenir militairement[149]. La CIA avait observé attentivement le déploiement des soldats soviétiques le long de la frontière afghane mais elle ne s'attendait pas à une invasion en bonne et due forme[150]. Carter estima que la conquête de l'Afghanistan par l'armée soviétique constituait une menace sérieuse pour les intérêts américains dans la région du golfe Persique et il eut une réaction très ferme face à ce qu'il considérait comme une provocation[151]. Dans une allocution télévisée, le président annonça l'instauration de sanctions contre l'Union soviétique, renouvela son soutien au Pakistan et formula la doctrine Carter, qui stipulait que toute tentative de prise de contrôle du golfe Persique serait perçue comme une atteinte aux intérêts vitaux des États-Unis et entraînerait une riposte militaire[152],[153]. Le dirigeant du Pakistan Muhammad Zia-ul-Haq s'était jadis disputé avec Carter au sujet du programme nucléaire pakistanais et de l'assassinat de Zulfikar Ali Bhutto, mais l'invasion de l'Afghanistan par les troupes soviétiques et l'instabilité politique de l'Iran donnèrent une nouvelle impulsion à l'alliance américano-pakistanaise[149]. En collaboration avec l'Arabie saoudite et les services de renseignement pakistanais, Carter accrut l'aide américaine aux moudjahidines via le « programme afghan » élaboré par la CIA[153]. Il annonça un peu plus tard que les États-Unis boycotteraient les Jeux olympiques d'été de 1980 à Moscou, ce qui déclencha une vive polémique[154].
L'intervention soviétique en Afghanistan modifia significativement la politique étrangère de Carter et mit fin à la période de détente entamée au milieu des années 1960. Revenant au concept classique de l'endiguement, les États-Unis se réconcilièrent avec leurs anciens alliés de la guerre froide et augmentèrent le budget de la défense, initiant une reprise de la course aux armements avec l'Union soviétique[155]. Le soutien des États-Unis aux moudjahidines fut encore renforcé sous la présidence de Ronald Reagan, le successeur de Carter, et coûta environ 3 milliards de dollars aux contribuables américains. Les Soviétiques échouèrent à réprimer l'insurrection et se retirèrent d'Afghanistan en 1989, ce qui précipita la chute définitive de l'Union soviétique[149]. La nouvelle rhétorique guerre froide du président Carter ne frappa pas uniquement l'URSS. Il se déclara ainsi garant en de l'indépendance de la Yougoslavie en cas d'attaque soviétique (s'entendant répliquer par Belgrade que les Yougoslaves pouvaient se défendre tout seuls), puis refusa de s'y rendre en mai pour les obsèques du maréchal Tito, afin de ne pas y rencontrer Léonid Brejnev.
Conflit israélo-arabe : les accords de Camp David
Vance et Brzeziński prêtèrent une grande attention au déroulement du conflit israélo-arabe. Les relations diplomatiques entre Israël et l'Égypte s'améliorèrent significativement après la guerre du Kippour et l'administration Carter sentit que le moment était venu d'apporter une solution au conflit. Au milieu de l'année 1978, alors que le traité de désengagement israélo-égyptien arrivait bientôt à son terme, Carter prit la situation très au sérieux et envoya sur place un ambassadeur. Ce dernier fit à plusieurs reprises l'aller-retour entre Le Caire et Tel Aviv à la recherche d'une solution qui permettrait de réduire le différend entre les deux pays. Une rencontre fut finalement organisée avec les ministres égyptien et israélien des Affaires étrangères au château de Leeds, en Angleterre, afin de discuter des possibilités de paix, mais elle échoua à aboutir sur un accord[156].
Cette situation déboucha la même année sur les accords de Camp David, l'une des plus grandes réussites de la présidence de Carter. Ces accords faisaient suite à de précédentes négociations menées au Moyen-Orient avec le concours du roi Hassan II du Maroc, en qualité d'intermédiaire entre les intérêts arabes et Israël, et du président roumain Nicolae Ceaușescu qui joua le rôle d'entremetteur entre Israël et l'organisation de libération de la Palestine (OLP). Une fois ces préliminaires achevés, le président égyptien Anouar el-Sadate sollicita l'assistance de Carter, qui décida d'inviter Sadate et le Premier ministre israélien Menahem Begin à Camp David afin de poursuivre les négociations. Les deux dirigeants arrivèrent aux États-Unis le . Très vite, Carter se posa en médiateur dans la querelle opposant Sadate à Begin et s'entretint séparément avec chacun d'entre eux jusqu'à ce qu'un terrain d'entente fût trouvé. Un mois s'était presque écoulé depuis le début des négociations mais aucun accord concret n'avait pu être obtenu. Pour sortir de cette impasse, Carter décida d'emmener ses hôtes à Gettysburg, en Pennsylvanie, où s'était déroulé l'un des plus sanglants affrontements de la guerre de Sécession. Le président leur fit visiter le champ de bataille et, tout en leur expliquant le déroulement des faits, souligna combien la paix était un élément nécessaire à la prospérité des peuples. La démarche fut un succès : de retour à Camp David, Sadate et Begin convinrent ensemble qu'un accord devait être signé[157].
Le , le président Carter suggéra de diviser les clauses du traité de paix en deux accords-cadres. Le premier traitait des territoires palestiniens occupés, à savoir la Cisjordanie et la bande de Gaza, en proposant tout d'abord l'élection d'une autorité indépendante afin de garantir une autonomie totale aux habitants de ces régions. Ce gouvernement serait élu par les Palestiniens et s'occuperait uniquement des affaires municipales avec, dans une deuxième étape, l'autonomie administrative de la population palestinienne. Le statut de la Palestine pourrait alors être renégocié cinq ans après la mise en place de ces deux mesures. L'accord-cadre no 1 déclencha cependant la fureur des Palestiniens et des Jordaniens qui n'acceptaient pas que Sadate et Begin eussent décidé ainsi de leur avenir commun sans avoir pris la peine de consulter la population ou les autres dirigeants. Voué à l'échec dès le principe, les propositions contenues dans cette première étape du traité ne furent jamais appliquées[158].
Le second accord-cadre abordait quant à lui la question du Sinaï. Il se décomposait en deux points : en premier lieu la négociation d'un traité de paix entre les deux belligérants pour une période de six mois, avec la reconnaissance de la souveraineté égyptienne sur le Sinaï et le retrait d'Israël de cette région ; en second lieu, conséquemment à la signature du traité, la mise en place de relations diplomatiques, politiques, économiques et culturelles entre l'Égypte et Israël[158]. Carter admit cependant qu'« il reste toujours de grandes difficultés et de nombreuses questions difficiles à régler »[159]. À l'origine des accords de paix se trouvait l'intention du président américain de voir des relations normales s'établir enfin entre les deux États[160]. Les accords de Camp David furent signés par les trois dirigeants à Washington lors d'une cérémonie officielle, le ; un mois plus tard, le , Sadate et Begin reçurent le prix Nobel de la Paix[161].
Cette première avancée dans la réconciliation israélo-égyptienne fut toutefois accueillie avec beaucoup d'hostilité dans le monde arabe. Au mois de novembre, un sommet de la Ligue arabe réuni en urgence à Damas condamna les clauses du projet de traité, tandis que la presse fit une charge violente contre Sadate en l'accusant d'avoir pris ses distances avec la Ligue et trahi ses compatriotes. Des discussions concernant le futur traité eurent lieu dans les deux pays. Israël insistait pour que l'accord se substituât à tous les autres traités signés par l'Égypte, y compris ceux conclus avec la Ligue et les autres pays arabes. Le gouvernement israélien demandait en outre à avoir accès au pétrole découvert dans la région du Sinaï. Carter intervint sur ce dernier point en informant ses alliés que si, pour une raison ou pour une autre les Égyptiens en venaient à stopper leurs approvisionnements, les États-Unis se tenaient prêts à fournir tout le pétrole nécessaire à Israël pour une durée de quinze ans[160].
Comme pour le premier accord-cadre, le gouvernement israélien accepta les termes du second accord qui fut également approuvé par le Parlement à une large majorité. À l'inverse, le gouvernement égyptien tergiversa, en manifestant notamment son désaccord quant à l'annulation de tous les traités précédents et en regrettant que la question du Sinaï n'eût pas été reliée à celle de la Palestine. Finalement, le , l'Égypte et Israël signèrent les accords de paix à Washington[158]. Dans ce processus, le rôle de Carter avait été essentiel. L'analyste Aaron David Miller, qui interviewa de nombreux hommes politiques pour son livre The Much Too Promised Land paru en 2008, remarqua la chose suivante : « de tous ceux à qui j'ai pu adresser la parole — Américains, Égyptiens ou Israéliens —, presque tous disaient la même chose : sans Carter, pas de traité de paix »[162]. Carter lui-même considérait cet accord comme la principale réussite de son administration[163].
Création du Rapid Deployment Force
Le , quelques semaines avant la prise d'otage de l'ambassade américaine à Téhéran par un groupe de militants islamistes révolutionnaires, Jimmy Carter annonça la création du Rapid Deployment Force ou RDF[164]. Le but de cette décision était de mettre en œuvre une force de frappe mobile composée d'éléments de l'US Army, de l'US Navy, de l'US Air Force et du corps des Marines, capable d'intervenir en toute indépendance sans avoir à recourir à des bases avancées où à l'accord de pays amicaux. Bien que devant théoriquement opérer sur tous les fronts, le RDF était particulièrement destiné à intervenir au Moyen-Orient. Cette décision fut entérinée au début de l'année 1980 par le discours de Carter sur l'état de l'Union, où le président déclara que toute tentative de prendre le contrôle de la région du Golfe Persique par une puissance étrangère serait considérée comme une atteinte aux intérêts vitaux des États-Unis et devrait être stoppée par tous les moyens nécessaires, y compris le recours à la force[165].
Révolution iranienne et crise des otages
Le shah d'Iran Mohammad Reza Pahlavi avait été un allié loyal des États-Unis depuis le coup d'État iranien de 1953. Dans les années qui suivirent l'arrivée au pouvoir du shah, le gouvernement américain fournit une aide à l'Iran qui exportait en échange une grande partie de sa production de pétrole vers les États-Unis[166]. Carter, Vance et Brzeziński voyaient l'Iran comme un allié sûr dans le contexte de la guerre froide, non seulement pour son pétrole mais aussi pour son influence au sein de l'OPEP et sa situation stratégique à cheval entre l'Union soviétique et le golfe Persique[167]. En dépit des atteintes aux droits de l'homme commises dans ce pays, dont il avait souligné l'extrême gravité (avec celles du Brésil) pendant sa campagne électorale Carter visita l'Iran à la fin de l'année 1977, congratula le Shah et autorisa la vente d'avions de chasse à l'armée iranienne. La même année, des émeutes éclatèrent dans plusieurs villes et se propagèrent rapidement à l'échelle du pays. La mauvaise conjoncture économique, l'impopularité de la « révolution blanche » menée par Pahlavi et la montée en puissance de l'islam accentuèrent le mécontentement de la population iranienne ; en outre, la plupart des Iraniens n'avaient pas une bonne opinion des États-Unis en raison de leur soutien à Pahlavi et de leur participation au coup d'État de 1953, l'opération Ajax[166]. À la fin de 1978, les déclarations radiophoniques du président des États-Unis ne furent pas très bien accueillies en Iran : « Carter s'offusque lorsqu'on arrête deux dissidents à Moscou et se tait quand on tue des milliers d'Iraniens »[168].
En 1978, une révolution éclata contre le régime de Pahlavi[169]. Le secrétaire d'État Vance voulait que le shah engage immédiatement une série de réformes afin d'apaiser la révolte populaire alors que Brzeziński était partisan de la répression. Les avis contradictoires de Vance et de Brzeziński ne firent cependant qu'accroître l'indécision du shah. Celui-ci partit en exil, déléguant la gestion de la crise à un gouvernement provisoire. Une figure religieuse charismatique et populaire, l'ayatollah Rouhollah Khomeini, fut accueillie en héros par la population à son retour d'exil en . Alors que l'Iran était toujours en proie à des troubles, Carter autorisa Pahlavi à séjourner sur le territoire américain pour y recevoir un traitement médical[170]. Carter et Vance étaient initialement réticents à autoriser la venue du shah en raison de la situation en Iran, mais les représentants iraniens lui assurèrent que cela ne posait aucun problème au gouvernement iranien[171]. En , peu après l'arrivée du shah aux États-Unis, un groupe de militants iraniens prit d'assaut l'ambassade américaine à Téhéran, retenant 66 Américains en otages[170]. Le Premier ministre iranien Mehdi Bazargan demanda à ce que les otages soient libérés mais il démissionna après que Khomeini eut apporté son soutien aux militants[171].
La crise fut rapidement au centre de l'actualité nationale et internationale. Carter promit de négocier le retour des otages mais il refusa d'expulser Pahlavi en échange de leur libération. Son attitude fut initialement approuvée par une majeure partie des Américains et il bénéficia d'un regain de popularité dans les sondages, mais la crise des otages devint de plus en plus problématique pour son administration à mesure qu'elle se prolongeait[172]. Afin de mettre un terme à la captivité des otages, Carter lança en l'opération Eagle Claw, qui se solda par un désastre et coûta la vie à huit soldats américains. L'échec de l'opération renforça la position de l'ayatollah Khomeini en Iran et entama sérieusement la réputation de Carter[173]. Le président essuya une autre déconvenue lorsque Cyrus Vance, qui s'était opposé depuis le départ à l'opération, donna sa démission[174]. L'Iran refusa toute négociation au sujet de la libération des otages avant le début de la guerre Iran-Irak en . Avec l'Algérie dans le rôle de médiateur, les négociations se poursuivirent et les deux partis aboutirent à un accord en . En échange de la libération des 52 otages américains, l'Iran se vit attribuer une compensation financière de 7 milliards de dollars, obtint le dégel des fonds iraniens détenus aux États-Unis et la promesse que les États-Unis ne s'ingèreraient plus jamais dans les affaires intérieures de l'Iran. Les otages furent relâchés quelques heures après le départ de Carter de la Maison-Blanche, le [175].
Canal de Panama
Le canal de Panama faisait depuis les années 1960 l'objet d'un litige entre les États-Unis et le Panama. Ce dernier souhaitait renégocier le traité qui avait concédé aux Américains le contrôle de la zone du canal. Carter pensait que la restitution du canal était moralement justifiée et permettrait d'améliorer les relations des États-Unis avec les pays d'Amérique latine. Il espérait aussi que cette décision aiderait à contenir l'agitation intérieure auquel faisait face le gouvernement panaméen d'Omar Torrijos[176]. Son administration négocia les traités Torrijos-Carter, un ensemble de deux accords qui prévoyait le transfert de la gestion du canal aux autorités panaméennes en 1999. L'initiative de Carter souleva de vives contestations aux États-Unis, en particulier chez les conservateurs, qui estimaient que Carter cédait là un atout essentiel de la puissance américaine[177]. Des groupes de conservateurs comme le « comité pour la sauvegarde du canal de Panama » se créèrent pour empêcher la ratification des traités au Sénat. L'adoption des accords sur le canal devint l'une des priorités absolues du président Carter. Au cours des débats sur la ratification, le Sénat proposa une série d'amendements qui accordaient aux États-Unis le droit d'intervenir militairement afin de maintenir le canal ouvert à la circulation maritime, ce que les Panaméens acceptèrent à l'issue de nouvelles négociations[178]. En , le Sénat approuva la signature des traités par 68 voix contre 32, soit plus de la majorité des deux tiers requise[179].
Cuba
Lors de son entrée en fonction, Carter souhaitait améliorer les relations avec Cuba mais il en fut empêché par les luttes en cours contre les communistes en Amérique latine et en Afrique et les réticences du sénat américain. En 1977 des mini-sections diplomatiques furent créées entre les deux pays. Le , sur initiative du sénateur démocrate Frank Church il dénonça la présence d'une brigade militaire soviétique (non nucléaire) qui s'y trouvait en fait depuis la crise des missiles. L'incident entraîna le mois suivant un raidissement de sa politique à l'égard de l'ile. Début , le dirigeant cubain Fidel Castro déclara que toute personne qui souhaiterait quitter Cuba serait libre de le faire par le port de Mariel. Carter annonça que les États-Unis étaient prêts à accueillir « à bras ouverts des dizaines de milliers de réfugiés cherchant à être libérés de la domination communiste » et des Cubano-Américains supervisèrent au printemps 1980 l'exode de Mariel. La loi sur les réfugiés qui venait d'être ratifiée avait fixé un plafond d'accueil de 19 500 immigrants cubains par an sur le sol américain, non sans examen préalable pour chacun des nouveaux arrivants. Toutefois, au mois de septembre, 125 000 Cubains étaient déjà arrivés aux États-Unis et un grand nombre d'entre eux rencontrait des difficultés pour se nourrir et se loger correctement. Carter fut largement critiqué pour sa gestion de l'exode, en particulier dans l'État de Floride qui revêtait une importance cruciale sur le plan électoral[180].
Rapprochement avec la Chine
Dans la lignée du rapprochement initié par l'administration Nixon, Carter chercha à entretenir des relations plus étroites avec la République populaire de Chine. Les deux pays unirent leurs efforts face à l'URSS et l'administration Carter donna son consentement tacite à l'invasion chinoise du Viêt Nam. En 1979, Carter décida d'accorder pour la première fois une reconnaissance officielle et diplomatique au régime chinois. Cette décision entraîna une augmentation massive des échanges commerciaux entre les États-Unis et la Chine alors que cette dernière entreprenait des réformes économiques sous la direction de Deng Xiaoping[181]. Après l'invasion de l'Afghanistan par les Soviétiques, Carter autorisa la vente de matériel militaire à la Chine et entama des négociations sur le partage des renseignements militaires[182]. En , Carter révoqua unilatéralement le traité de coopération mutuelle et de sécurité entre les États-Unis et la république de Chine, qui avait perdu le contrôle de la Chine continentale pendant la guerre civile chinoise mais conservait toutefois celui de Taïwan. L'abrogation du traité par Carter fut contestée devant les tribunaux par certains républicains conservateurs mais la Cour suprême statua qu'il s'agissait d'un acte de gouvernement non susceptible de recours dans l'arrêt Goldwater v. Carter. Les États-Unis maintinrent néanmoins des échanges diplomatiques avec la république de Chine dans le cadre de la loi sur les relations avec Taïwan adoptée en 1979[183].
Corée du Sud
Tout juste entré en fonctions, l'une des premières décisions de Carter fut de planifier le retrait de toutes les armes nucléaires présentes sur le sol de la Corée du Sud et la réduction du nombre de soldats américains déployés dans ce pays[184]. Carter pensait que ces soldats seraient plus utiles en Europe occidentale mais les opposants au retrait craignaient que la Corée du Nord n'en profitât pour envahir la Corée du Sud. Cette dernière protesta contre cette décision, de même que le Japon, une grande partie des membres du Congrès, des militaires et des fonctionnaires du département d'État[185]. Le major-général John K. Singlaub, chef d'état-major des forces américaines en Corée, qui avait publiquement critiqué la position du président au sujet de la baisse des effectifs, fut relevé de son commandement par Carter le [186]. Le président jugeait possible de rapatrier l'ensemble des troupes américaines de Corée d'ici à 1982 — à l'exception de 14 000 membres de l'U.S. Air Force et logisticiens —, mais après avoir procédé à une réduction de seulement 3 600 hommes, la pression du Capitole et l'hostilité du haut commandement le contraignirent à renoncer à son projet en 1978[187]. Les efforts de Carter en faveur d'un retrait des troupes américaines de Corée du Sud fragilisèrent le gouvernement du président sud-coréen Park Chung-hee qui fut assassiné en 1979[185].
Un incident a cependant amené à s'interroger sur cette distanciation géopolitique de l'administration Carter avec la Corée du Sud. Le , un avion de ligne sud-coréen, le KAL 902 Paris-Séoul, s'éloigne de sa route vers les bases de défense de la péninsule de Kola et subit un atterrissage forcé près de Mourmansk, faute d'avoir obéi aux sommations soviétiques. Moscou affirme que cet avion agissait en coordination avec un satellite américain dans le but de tester les radars et les communications soviétiques. L'URSS formule une accusation similaire à l'encontre de l'administration Reagan, après l'annonce de la destruction par la chasse soviétique d'un autre Boeing sud-coréen, le KAL 007, qui survole dans la nuit du au les bases de Kamtchatka et Sakhaline[188].
Timor oriental
L'administration Carter poursuivit et augmenta dans des proportions considérables la vente d'armes au gouvernement indonésien du président Suharto lors de l'occupation du Timor oriental. Le régime de Suharto avait envahi ce pays en 1975 en guise de protestation contre les Nations unies. À ce moment, les ventes annuelles d'armes américaines à l'Indonésie, entamées peu avant le déclenchement du conflit, engendraient un bénéfice de 11 millions de dollars durant les deux dernières années de la présidence de Gerald Ford. D'après George H. Aldrich, conseiller juridique adjoint du département d'État, les armes équipant les forces indonésiennes au temps de l'invasion du Timor étaient d'origine américaine à « près de 90 % »[189].
En 1977, l'occupation du Timor par les troupes indonésiennes acheva d'épuiser les stocks fournis par Ford, si bien que dès l'année suivante, l'administration américaine revendit pour 112 millions de dollars de matériel militaire au régime de Suharto. Sous le mandat de Carter, les ventes d'armes au gouvernement indonésien culminèrent aux alentours de 60 millions de dollars chaque année, soit plus du double des ventes annuelles réalisées par son prédécesseur[189]. Les ventes d'armes aux Indonésiens par les États-Unis se poursuivirent sous les présidences de Ronald Reagan, George Bush et Bill Clinton avant de s'arrêter définitivement à la suite du référendum de 1999 qui déclara officiellement l'indépendance du Timor oriental[190]. D'après les estimations faites par les Nations unies, entre 84 000 et 183 000 Est-Timorais trouvèrent la mort lors de l'occupation, estimations qui créditent également l'armée indonésienne de 70 % des 18 600 assassinats commis durant la guerre[191]. En 2007, dans une interview accordée à la journaliste Amy Goodman, Jimmy Carter reconnut à propos de l'attitude de son administration vis-à-vis du Timor oriental : « vous savez, je n'étais pas aussi bien informé que j'aurais dû l'être à propos de ce qui se passait au Timor oriental. J'étais davantage préoccupé par d'autres parties du monde à cette époque »[192].
Liste des déplacements internationaux
Carter fit douze voyages internationaux dans vingt-cinq pays au cours de sa présidence[193] :
Liste des déplacements internationaux du président Jimmy Carter | |||||
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Ville | Pays | Date | Raisons du déplacement | ||
Londres Newcastle |
Royaume-Uni | 5 au | Sommet du G7. Rencontre avec les Premiers ministres de Grèce, de Belgique, de Turquie, de Norvège, des Pays-Bas et du Luxembourg ainsi qu'avec le président du Portugal. Discours à la réunion des ministres des pays membres de l'OTAN. | ||
Genève | Suisse | Visite officielle. Rencontre avec le président suisse Kurt Furgler et le président syrien Hafez el-Assad. | |||
Varsovie | Pologne | 29 au | Visite officielle. Rencontre avec le Premier secrétaire Edward Gierek. | ||
Téhéran | Iran | et | Visite officielle. Rencontre avec le shah Mohammad Reza Pahlavi et le roi Hussein de Jordanie. | ||
New Delhi Daulatpur Nasirabad |
Inde | 1er au | Rencontre avec le président Neelam Sanjiva Reddy et le Premier ministre Morarji Desai. Discours au Parlement de l'Inde. | ||
Riyad | Arabie saoudite | 3 et | Rencontre avec le roi Khaled et le prince héritier Fahd. | ||
Assouan | Égypte | Rencontre avec le président Anouar el-Sadate et le chancelier allemand Helmut Schmidt. | |||
Paris Normandie Bayeux Versailles |
France | 4 au | Rencontre avec le président Valéry Giscard d'Estaing et le Premier ministre Raymond Barre. | ||
Bruxelles | Belgique | Rencontre avec le roi Baudouin et le Premier ministre Leo Tindemans. Présence à des réunions du Conseil des communautés européennes et du Conseil de l'Atlantique nord. | |||
Caracas | Venezuela | 28 et | Rencontre avec le président Carlos Andrés Pérez. Discours à l'Assemblée nationale et signature d'un accord de frontière maritime. | ||
Brasilia Rio de Janeiro |
Brésil | 29 au | Visite officielle. Rencontre avec le président Ernesto Geisel et discours au Congrès national. | ||
Lagos | Nigeria | au | Rencontre avec le président Olusegun Obasanjo. | ||
Monrovia | Liberia | Rencontre avec le président William Richard Tolbert. | |||
Panama City | Panama | 16 et | Signature d'un protocole relatif à l'échange de documents concernant la ratification des traités du canal de Panama, à l'invitation du président Demetrio Lakas Bahas et du général Omar Torrijos. Rencontre informelle avec le président vénézuélien Carlos Andrés Pérez, le président colombien Alfonso López Michelsen, le président mexicain José López Portillo, le président costa-ricain Rodrigo Alberto Carazo Odio et le Premier ministre jamaïcain Michael Manley. | ||
Bonn Wiesbaden Francfort |
Allemagne de l'Ouest | 14 et | Visite officielle. Rencontre avec le président Walter Scheel et le chancelier Helmut Schmidt. Discours aux troupes américaines et allemandes. | ||
Berlin-Ouest | Allemagne de l'Ouest | Discours au mémorial du pont aérien de Berlin. | |||
Bonn | Allemagne de l'Ouest | 16 et | Sommet du G7. | ||
Basse-Terre, Guadeloupe | France | 4 au | Rencontre informelle avec le président Valéry Giscard d'Estaing, le chancelier allemand Helmut Schmidt et le Premier ministre britannique James Callaghan. | ||
Mexico | Mexique | 14 au | Visite officielle. Rencontre avec le président José López Portillo. Discours au Congrès de l'Union. | ||
Le Caire Alexandrie Gizeh |
Égypte | 7 au | Rencontre avec le président Anouar el-Sadate. Discours à l'Assemblée populaire d'Égypte. | ||
Tel-Aviv Jérusalem |
Israël | 10 au | Visite officielle. Rencontre avec le président Yitzhak Navon et le Premier ministre Menahem Begin. Discours à la Knesset. | ||
Le Caire | Égypte | Rencontre avec le président Anouar el-Sadate. | |||
Vienne | Autriche | 14 au | Visite officielle. Rencontre avec le président Rudolf Kirchschläger et le chancelier Bruno Kreisky. | ||
Vienne | Autriche | 15 au | Rencontre avec le secrétaire général soviétique Léonid Brejnev pour la conclusion du traité SALT II. | ||
Tokyo Shimoda |
Japon | 25 au | Sommet du G7. Visite officielle. Rencontre avec l'empereur Hirohito et le Premier ministre Masayoshi Ōhira. | ||
Séoul | Corée du Sud | au | Visite officielle. Rencontre avec le président Park Chung-hee et le Premier ministre Choi Kyu-ha. | ||
Rome Venise |
Italie | 19 au | Sommet du G7. Rencontre avec le président Sandro Pertini. | ||
Palais du Vatican | Vatican | Audience avec le pape Jean-Paul II. | |||
Belgrade | Yougoslavie | 24 et | Visite officielle. Rencontre avec le président Cvijetin Mijatović. | ||
Madrid | Espagne | 25 et | Visite officielle. Rencontre avec le roi Juan Carlos Ier et le Premier ministre Adolfo Suárez. | ||
Lisbonne | Portugal | 26 au | Visite officielle. Rencontre avec le président António Ramalho Eanes et le Premier ministre Francisco Sá Carneiro. | ||
Tokyo | Japon | 9 au | Visite officielle. Cérémonies en l'hommage de l'ancien Premier ministre Masayoshi Ōhira. Rencontre avec l'empereur Hirohito, le président bangladeshi Ziaur Rahman, le Premier ministre australien Malcolm Fraser, le Premier ministre thaïlandais Prem Tinsulanonda et le Premier ministre chinois Hua Guofeng. | ||
Controverses
Le , le directeur du Bureau de la gestion et du budget, Bert Lance, démissionna de son poste à la suite d'accusations d'activités bancaires illicites qui avaient été portées contre lui avant qu'il n'intègre l'administration[194]. La controverse autour de Lance et sa démission entachèrent la réputation de Carter auprès du Congrès et du grand public et le privèrent d'un de ses conseillers les plus efficaces[195]. En , le procureur général Griffin Bell chargea l'avocat Paul J. Curran d'enquêter sur les prêts contractés par l'entreprise de production d'arachides de Carter auprès d'une banque dirigée par Bert Lance. Contrairement à Archibald Cox et Leon Jaworski, les deux procureurs spéciaux chargés de l'enquête sur le scandale du Watergate, le statut de Curran ne lui permettait pas de formuler directement des accusations car il devait d'abord en référer au procureur général adjoint Philipp Heymann, qui donnerait ou non son approbation[196]. Carter devint le premier président en exercice à témoigner sous serment dans le cadre d'une enquête le concernant[197]. L'affaire fut toutefois classée en après que Curran eut annoncé qu'aucune preuve ne permettait de soutenir les allégations selon lesquelles une partie des fonds accordés par la Banque nationale de Géorgie aurait servi au financement de la campagne de Carter[198].
Le frère de Jimmy, Billy Carter, connut une grande notoriété sous la présidence de son frère en raison de sa personnalité extravagante[199]. Le Sénat ouvrit une enquête sur les activités de Billy Carter après qu'il eut été révélé que la Libye avait versé à ce dernier plus de 200 000 dollars pour des raisons peu claires[200]. La controverse autour des relations de Billy Carter avec la Libye devint connue sous le nom de Billygate et, bien que le président n'était pas personnellement impliqué, elle porta néanmoins préjudice à son administration[201].
Élection présidentielle de 1980
En , les sondages révélèrent une chute spectaculaire de la popularité de Carter et une enquête Gallup montra Carter devancé par Ted Kennedy pour la course à l'investiture démocrate de 1980[202]. Au milieu de l'année 1979, Carter était confronté à la crise énergétique, à la hausse de l'inflation, à une croissance économique au ralenti et au sentiment généralisé que son administration était incompétente pour faire face à ces problèmes[203]. En , Kennedy annonça publiquement sa candidature aux primaires démocrates de 1980[204]. Toutefois, la cote de popularité de Carter remonta dans les sondages à la suite de la crise des otages en Iran[205], et sa réponse à l'invasion soviétique de l'Afghanistan augmenta encore ses chances en vue des primaires[151]. Il remporta les premières primaires, s'assurant ainsi une avance confortable en termes de délégués, mais sa cote de popularité subit une nouvelle inflexion au mois de mars et il fut battu par Kennedy aux primaires de New York et du Connecticut[206]. Alors que le président sortant conservait toujours une avance significative en nombre de délégués, Kennedy remporta deux victoires écrasantes en Pennsylvanie et dans le Michigan, l'incitant à maintenir sa candidature[207]. Dans les derniers jours des primaires, le taux d'approbation de Carter était tombé à un niveau historiquement bas et Kennedy était parvenu à rassembler suffisamment de délégués pour empêcher Carter de remporter la nomination[208].
Une fois les résultats des dernières primaires connus, Carter invita Kennedy à la Maison-Blanche. Ce dernier refusa de concéder la défaite, notamment parce que Carter était hostile à l'instauration d'un système d'assurance santé universelle et ne souhaitait pas l'intégrer dans son programme. Il proposa à la place une convention ouverte dans laquelle les délégués seraient libres de voter pour le candidat de leur choix indépendamment du résultat des primaires[209]. Les partisans de Carter manœuvrèrent habilement à la convention démocrate de 1980, permettant en définitive au président sortant et au vice-président Walter Mondale de décrocher la nomination[210]. Malgré sa défaite, Kennedy était parvenu à mobiliser l'aile progressiste du Parti démocrate, laquelle ne soutint que faiblement Carter lors du scrutin général[211].
Les primaires présidentielles républicaines de 1980 se transformèrent rapidement en un duel opposant l'ancien gouverneur de la Californie Ronald Reagan à l'ancien représentant du Texas George H. W. Bush. Bush, qui avait qualifié le programme de réduction d'impôt de son adversaire d'« économie vaudou », remporta le caucus de l'Iowa mais son avance s'effondra rapidement au fil des primaires. Reagan fut investi comme candidat du parti dès le premier tour de scrutin à la convention nationale républicaine de 1980 et nomma Bush en tant que colistier[212]. Dans le même temps, le représentant républicain John B. Anderson, qui avait sollicité la nomination de son parti en vue de l'élection présidentielle, se lança dans la course en indépendant[213]. Les sondages effectués au mois de septembre, après la clôture des conventions des deux grands partis, donnèrent Reagan et Carter au coude-à-coude dans les intentions de vote[214]. L'équipe de campagne de Carter était persuadée que les électeurs rejetteraient les idées conservatrices de Reagan alors que des signes encourageants laissaient entrevoir une amélioration de la situation économique et de la crise des otages en Iran[215]. Cherchant à unifier le Parti démocrate derrière sa candidature, Carter décida de se concentrer sur la critique de l'extrémisme idéologique de Reagan plutôt que sur l'explication de son propre programme politique[216].
Dans le camp républicain, les propos de Reagan rencontrèrent une forte résonance au sein du mouvement conservateur alors en plein essor et qui était incarné par des activistes comme Paul Weyrich, Richard Viguerie et Phyllis Schlafly. Traditionnellement partisans d'une réduction des impôts et du déficit budgétaire, de nombreux conservateurs commençaient également à s'intéresser aux questions sociales comme l'avortement ou l'homosexualité[217]. Un certain nombre d'événements survenus au cours des années 1970, notamment l'arrêt Roe v. Wade rendu par la Cour suprême ou le retrait de l'exemption fiscale de l'université Bob Jones, convainquirent de nombreux protestants évangéliques de s'engager pour la première fois en politique ; ils formèrent par la suite un corps électoral de plus en plus important et la plupart soutinrent la candidature de Reagan durant la campagne de 1980[218]. Reagan profita également du ralliement des Reagan Democrats, généralement des électeurs du Nord, blancs, issus du milieu ouvrier, favorables aux politiques économiques libérales mais opposés à certaines actions telles que la discrimination positive[219]. Reagan était favorable à des mesures conservatrices sur les questions sociales mais il concentra surtout ses attaques sur la politique étrangère de Carter, en particulier le traité SALT II, les traités Torrijos-Carter et la révocation du traité de coopération mutuelle et de sécurité entre les États-Unis et Taïwan. Reagan plaida également pour une augmentation des dépenses dans le secteur de la défense, une baisse massive des impôts et une réduction des dépenses intérieures ainsi que pour la suppression des départements de l'Éducation et de l'Énergie[220].
Les deux candidats restèrent très proches dans les intentions de vote tout au long des mois de septembre et octobre, mais la solide performance de Reagan lors du débat du et l'échec de Carter à obtenir la libération des otages en Iran donnèrent un élan décisif à la campagne de Reagan[221]. Le jour de l'élection, Reagan arriva en tête avec 50,7 % des voix et 489 votes de grands électeurs, contre 41 % des voix et 49 votes de grands électeurs pour Carter et 6,6 % des voix pour Anderson[222]. Le candidat républicain remporta la plupart des États et réalisa des scores particulièrement élevés dans l'électorat blanc du Sud[223]. L'ampleur de la victoire de Reagan surprit de nombreux observateurs, qui s'attendaient au contraire à un résultat extrêmement serré. La participation électorale atteignit en revanche son plus bas niveau depuis l'élection de 1948, traduisant un rejet de la personnalité des trois principaux candidats par un grand nombre d'électeurs[224]. Lors des élections législatives qui eurent lieu à la même période, les républicains remportèrent une majorité absolue des sièges au Sénat, pour la première fois depuis les années 1950[223]. Carter devint pour sa part le premier président à ne pas être réélu pour un second mandat depuis Herbert Hoover en 1932[225].
Héritage
Dans les enquêtes d'opinions effectuées auprès des historiens et des politologues, Carter est généralement évalué comme un président inférieur à la moyenne. Un sondage réalisé en 2018 auprès de la section de l’American Political Science Association consacrée aux présidents et aux politiques exécutives le liste à la 25e place parmi les présidents américains[226]. Lors d'un sondage C-Span mené en 2017 auprès d'historiens, Carter termine également en 26e position[227]. Certains opposants l'ont parfois comparé à Herbert Hoover pour son profil de « technocrate consciencieux mais sans relief »[228].
Robert A. Strong écrit :
« Jimmy Carter est beaucoup plus apprécié aujourd'hui que lorsqu'il échoua à se faire réélire en 1980. Sa période post-présidentielle a été exemplaire et on comprend mieux aujourd'hui, sinon les mesures qu'il prit pour faire face aux crises auxquelles il fut confronté, du moins l'énormité de la tâche qu'il dut assumer en 1977. Carter entra en fonction trente mois après qu'un de ses prédécesseurs avait laissé le gouvernement fédéral en ruines. Il fut confronté à des défis immenses : la crise énergétique, l'agression soviétique, l'Iran et surtout la profonde méfiance des citoyens vis-à-vis de leurs responsables politiques. Il était un travailleur acharné et consciencieux. Toutefois, il donnait souvent l'impression d'être dépassé par ses responsabilités et son image était plus celle d'un homme fait pour être secrétaire à l'Énergie que président. Carter avait été élu en battant de justesse un chef de l'exécutif dépourvu de charisme, qui n'avait pas été élu et dont l'accession au pouvoir était liée au pire scandale présidentiel de l'histoire. S'il remporta la nomination de son parti, ce fut essentiellement parce que, dans la décennie précédant l'année 1976, l'état-major démocrate avait été décimé par des scandales, par le Viêt Nam et par un assassinat[229]. »
L'historien Howard Zinn émet lui aussi un jugement peu flatteur sur le bilan du 39e président américain :
« La présidence de Jimmy Carter […] a pu apparaître comme une tentative de la part d'une partie des pouvoirs en place — en l'occurrence le parti démocrate — de remobiliser une opinion publique désabusée. Pourtant, malgré quelques gestes en direction de la communauté noire et des pauvres, malgré quelques beaux discours sur les droits de l'homme à l'étranger, Carter demeura dans les limites historiques du système américain et continua de veiller sur les intérêts et les prérogatives du monde des affaires, en maintenant un appareil militaire phénoménal — qui accaparait une grande partie du revenu national — et en confirmant les alliances avec les régimes dictatoriaux à l'étranger[230]. »
Bibliographie
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
- (en) Ian J. Bickerton et Carla L. Klausner, A history of the Arab-Israeli conflict, Upper Saddle River, New Jersey, Pearson Prentice Hall, .
- (en) W. Carl Biven, Jimmy Carter's Economy : Policy in an Age of Limits, Chapell Hill, University of North Carolina Press, , 368 p. (ISBN 0-8078-2738-X, lire en ligne).
- (en) David Frum, How We Got Here : The '70s, New York, Basic Books, , 418 p. (ISBN 0-465-04195-7).
- (en) Betty Glad, An outsider in the White House : Jimmy Carter, his advisors, and the making of American foreign policy, Ithaca, Cornell University Press, , 398 p. (ISBN 978-0-8014-4815-7, lire en ligne), p. 71.
- (en) George C. Herring, From Colony to Superpower : U.S. Foreign Relations Since 1776, New York (N. Y.), Oxford University Press, , 1035 p. (ISBN 978-0-19-507822-0).
- (en) Burton I. Kaufman et Scott Kaufman, The Presidency of James Earl Carter, Lawrence (Kan.), University Press of Kansas, , 302 p. (ISBN 978-0-7006-1471-4).
- (en) James Patterson, Restless giant : the United States from Watergate to Bush v. Gore, New York, Oxford University Press, , 448 p. (ISBN 978-0-19-512216-9, lire en ligne).
- (en) Tim Weiner, Legacy of Ashes : The History of the CIA, Anchor Books, , 812 p. (ISBN 978-0-307-38900-8).
- (en) Julian Zelizer, Jimmy Carter, New York, Times Books, , 183 p. (ISBN 978-0-8050-8957-8).
Notes et références
Notes
- Toutes les données, à l'exception du pourcentage de la dette, sont exprimées en milliards de dollars. Le PIB est calculé selon l'année civile. Le montant des revenus, des dépenses, du déficit et de la dette est calculé selon l'année fiscale, qui se termine le . Par exemple, l'année fiscale 2017 aux États-Unis s'est achevée le .
- Représente la dette nationale détenue par le public en pourcentage du PIB.
Références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Presidency of Jimmy Carter » (voir la liste des auteurs).
- Kaufman et Kaufman 2006, p. 9-12.
- Zelizer 2010, p. 27-29.
- Zelizer 2010, p. 31-32.
- Zelizer 2010, p. 34-38.
- Zelizer 2010, p. 39-40.
- Kaufman et Kaufman 2006, p. 15.
- Zelizer 2010, p. 41-44.
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