Église fortifiée

Une église fortifiée est un « édifice cultuel pourvu d'organes de défense active caractéristiques, généralement parfaitement identifiables par référence à la typologie des appareils militaires »[1]. Ces églises doivent avoir des fortifications indépendantes de celles d'une ville ou d'un château fort.

Pendant la période du Moyen Âge, les églises ont vu leur architecture adaptée aux désordres sociaux et politiques de l'époque. Certaines églises (notamment celles des territoires limitrophes) ont été fortifiées de sorte que la population locale puisse s'y protéger. Cette fortification se traduit principalement par l'adjonction de parapet crénelé mais le crénelage sur les édifices religieux a plus une fonction symbolique (manifestation de puissance ostentatoire du seigneur à travers une architecture religieuse qui procède du modèle de son château fort[2]) que militaire[3], la population bénéficiant en fait de la protection par le droit d'asile dans les églises même non fortifiées[4]. Cette fortification a en effet un rôle mineur en cas d'invasion et de guerre (l'armée qui ne respecte pas ce droit d'asile étant suffisamment équipée pour s'emparer rapidement de l'édifice)[4], elle n'a une fonction dissuasive que contre les problèmes courants d'insécurité (bandes pillant et vivant de rapines, peu équipées pour un siège)[5].

Historique

Les premières églises fortifiées datent du IXe siècle quand en 869 Charles le Chauve ordonne la construction d'un castellum à Saint-Denis et qu'en 883 l'abbaye Saint-Vaast d'Arras débute ses travaux de fortification[6].

Du Xe siècle il nous est parvenu la mention en 919 de la construction de l'enceinte de Châteauneuf-les-Tours, en 920 du castellum de Saint-Martial-de-Limoges avec ses deux tours, en 923 des fortifications de Saint-Gery à Cambrai, Saint-Arnould à Reims, et en 933 de la fortification de l'église Saint-Hilaire le Grand de Poitiers. En 988 l'évêque Fortier fait enclore le monastère de Saint-Front, il en est de même pour l'abbaye de Saint-Victor dans le midi et pour l'abbaye Saint-Père de Chartres. Elle est munie d'un clocher porche défensif comme Saint-Germain-des-Prés et beaucoup d'autres églises[6].

Des églises fortifiées ont été bâties (certaines non fortifiées furent alors aménagées) en France, et dans les pays germanophones. On trouve généralement deux types de fortifications : complète ou uniquement sur une partie transformée en donjon, le chœur ou le portail (surmonté d'une « salle refuge »).

Caractéristiques et points communs

À chaque passage de troupes, la population se réfugiait dans un fort, une ville fortifiée, une église. En fait, les paroisses éloignées des quelques routes carrossables se trouvaient pratiquement hors d'atteinte des armées en campagne car les chemins de campagne étaient impraticables pour l'artillerie lourde. Par contre, elles étaient continuellement en butte aux entreprises de pillages .

Si de nombreux exemples existent dans le sud-ouest (régions Midi-Pyrénées et Poitou-Charentes), c'est sans doute en Picardie, et plus précisément en Thiérache, que le terme « église fortifiée » prend toute sa spécificité. On notera qu'à la même époque, dans la même région-frontière, mais plus à l'ouest, dans l'Amiénois, les villageois se réfugiaient non en hauteur comme en Thiérache, mais sous terre, dans des souterrains-refuges (appelés localement « muches »), creusés à partir de l'église - comme à Domqueur - ou du moulin - comme à Naours.

Églises fortifiées de Thiérache

Monceau-sur-Oise

En Thiérache, on dénombre environ 65 églises fortifiées[7] dans une zone presque circulaire, pratiquement délimitée au nord par l'Oise et au sud par la Serre, ayant en schématisant Vervins pour centre. Ces édifices sont principalement implantés dans l'Aisne, mais aussi dans les Ardennes.

Églises fortifiées de l’est de la France

Liste alphabétique non exhaustive d’églises fortifiées des Ardennes hors de la Thiérache ardennaise

Saint-Juvin
Vivier-au-Court

Églises fortifiées de Lorraine

Église fortifiée de Dugny-sur-Meuse (désaffectée)
Église fortifiée de Tronville-en-Barrois

Terres partagées entre comté de Luxembourg, duché de Lorraine (et duché de Bar) ainsi que les Trois-Évêchés, le territoire de la région Lorraine conserve de nombreuses églises fortifiées ou ayant été fortifiées.

Églises fortifiées de Meurthe-et-Moselle

La plupart des églises fortifiées de ce département se situent dans les environs de Toul, siège d'un ancien évêché indépendant et puissant, la vallée du Rupt de Mad avec les aîtres fortifiés aux frontières du duché de Lorraine et de l'évêché de Metz, et quelques-unes dans le Saintois (environs de Vézelise), ou encore dans le Pays-Haut, aux confins du duché de Lorraine et du comté de Luxembourg.

Secteur du Toulois :

  • L'église Saint-Pierre et Saint-Paul d'Allamps
  • L'église Saint-Jean-Baptiste de Barisey-la-Côte
  • L'église Saint-Médard de Blénod-lès-Toul, est tout à fait unique dans son édification puisqu'il s'agit d'une église de styles gothique flamboyant et Renaissance construite au sein d'une ancienne forteresse médiévale.
  • Église de Boucq, dont le clocher fortifié (XIIIe siècle) pouvait communiquer avec la maison-forte à Boucq.
  • Ancienne église romane de Bruley.
  • Église Saint-Maurice de Domgermain dont le clocher fortifié date du XIIIe siècle.

Secteur du Saintois :

Aîtres fortifiés de la vallée du Mad : La tour-clocher de l'église sert de guet et de protection et les édifices attenants participent de la formation d'un petit centre fortifié pour protéger les villages :

Pays-Haut :

  • église Saint-Martin de Bazailles clocher fortifié du (XIIe siècle)
  • église Saint-Rémy de Mercy-le-Bas, chœur avec salle fortifiée.

Églises fortifiées de la Meuse

Église de Sepvigny
Église de Woël

Le morcellement complexe des terres ancestrales entre duché de Bar, duché de Lorraine, évêché de Verdun..., fait que l'actuel territoire de la Meuse comporte de nombreuses églises fortifiées, c'est certainement le département lorraine le plus riche (65 églises fortifiées sont recensées par le service départemental de l'architecture et du patrimoine de la Meuse[8]) :

Églises fortifiées de la Moselle

Église fortifiée Saint-Pierre de Norroy-le-Veneur
Église fortifiée Saint-Brice de Saulny
Église fortifiée Saint-Quentin de Scy-Chazelles

La Moselle comporte de nombreuses églises fortifiées ou ayant été autrefois fortifiées. Elles servaient de refuge aux habitants mais aussi aux seigneurs temporels et religieux de la région comme fortifications le long de leurs frontières. Le Pays messin à lui seul comporte 31 églises de ce type[9] :

Églises fortifiées des Vosges

église d'Autreville (Vosges)

La plupart des églises fortifiées du département se situent entre la vallée de la Meuse (Pays de Neufchâteau), et Châtenois. Elles se distinguent par une salle fortifiée au-dessus du chœur.

Dans le Xaintois :

Églises fortifiées de l’ouest de la France

Églises fortifiées des Côtes-d'Armor

En région Centre

Églises fortifiées d'Indre-et-Loire

Églises fortifiées de la Manche

Églises fortifiées de la Vendée

Église Saint-Pierre du Boupère

Perche sarthois

Églises fortifiées du sud de la France

Églises fortifiées de l'Allier

Églises fortifiées de l'Ardèche

Églises fortifiées de la Charente

Abbaye de Bassac.

Églises fortifiées de la Charente-Maritime

En Saintonge, c’est durant la guerre de Cent Ans qu’ont été construites ou fortifiées de nombreuses églises romanes, à l'époque où le fleuve Charente servait de frontière[10].

Façade de l'église d'Écoyeux
L’église d'Authon

Églises fortifiées de la Corrèze

Églises fortifiées de la Creuse

Le chevet de l'église de Noth.

Églises fortifiées des Deux-Sèvres

  • Église Saint-Martin de Glénay.
  • Prieuré Saint-Pierre d’Usseau.

Églises fortifiées de la Dordogne

Dominant le bourg,
l'église de Beaumont-du-Périgord
L'église Saint-Pierre-ès-Liens
de Chantérac
Le prieuré de Merlande
à La Chapelle-Gonaguet
Le chemin de ronde
de l'église de Saint-Astier
Le prieuré de Saint-Avit-Sénieur

En Dordogne, on dénombre 53 églises fortifiées dont plus de la moitié dans le quart nord-ouest du département[11].

Églises fortifiées de la Gironde

Saint-Jean-de-Blaignac, échauguettes et assomoir.

Églises fortifiées de la Haute-Vienne

Églises fortifiées des Landes

Églises fortifiées des Pyrénées Atlantiques

  • Église Notre-Dame-de-la-Mer de Bordagain, à Ciboure.

Églises fortifiées de l'Aude

Églises fortifiées de l'Aveyron

Sainte-Radegonde.

Églises fortifiées du Gard

Églises fortifiées du Gers

Églises fortifiées de la Haute-Garonne

Églises fortifiées des Hautes-Pyrénées

Églises fortifiées de l'Hérault

Églises fortifiées du Lot

Églises fortifiées de la Lozère

Églises fortifiées des Pyrénées-Orientales

Églises fortifiées des Alpes-de-Haute-Provence

  • Église paroissiale d’Annot

Églises fortifiées des Alpes-Maritimes

Églises fortifiées des Bouches-du-Rhône

Églises fortifiées du Vaucluse

Églises fortifiées d'autres pays de l'Europe

Allemagne

Belgique

Espagne

Italie

Luxembourg

Au Luxembourg, il reste seulement une tour du monastère fortifié d'Altmünster, qui se trouvait à côté du château des comtes de Luxembourg, sur le rocher du Bock, à Luxembourg-ville[17].

Suisse

Roumanie (Églises fortifiées de Transylvanie)

Notes, sources et références

  1. page 38 : Philippe Pagnotta, Les Églises fortifiées de la Meuse, éd. Citedis, 2000, 142 p. - (ISBN 2-911920-36-8)
  2. Philippe Pagnotta, Les églises fortifiées de la Meuse: au cœur de la mémoire des terroirs, Citédis, , p. 38.
  3. Alain Salamagne, « Archères, mâchicoulis et tours dans l'architecture militaire du Moyen Âge (XIIIe-XVe siècle) : éléments fonctionnels ou symboliques ? », Actes des congrès de la Société d’Archéologie Médiévale, no 7, , p. 81 (lire en ligne).
  4. Philippe Pagnotta, Les églises fortifiées de la Meuse: au cœur de la mémoire des terroirs, Citédis, , p. 18.
  5. Alain Salamagne, « Archères, mâchicoulis et tours dans l'architecture militaire du Moyen Âge (XIIIe-XVe siècle) : éléments fonctionnels ou symboliques ? », Actes des congrès de la Société d’Archéologie Médiévale, no 7, , p. 84.
  6. Histoire de la France urbaine, la ville médiévale, Duby, Seuil, (ISBN 2-02-005666-6)
  7. p. 8 : « Les Églises fortifiées de la Thiérache » - Guide de découvertes / Sites de Mémoire, balades et circuits - Coll. Guide « Pays côté Histoire », éd. Chamina, 2006, format 14 x 21 cm, 48 pages, (prix de vente 2007 : 6 euros) - (ISBN 2-84466-110-6)
  8. SDAP de la Meuse - les églises fortifiées du Barrois
  9. Liste d'après Françoise Fauré-Audouy, Voyage en Pays messin. Villages et églises fortifiées, Édition serpenoise, Metz, 2001
  10. L’Architecture gothique en Saintonge et en Aunis, Yves Blomme, éditions Bordessoules, (ISBN 2-903504-33-4)
  11. Thierry Hourlier, Les églises fortifiées de Dordogne, éd. patrimoines & médias, 1997, p. 4-5.
  12. « AJAT, ÉGLISE SAINT-MARTIN », sur Sauvegarde de l'Art français, (consulté le ).
  13. Inventaire général du patrimoine culturel, « Eglise paroissiale Notre-Dame », notice no IA24000615, base Mérimée, ministère français de la Culture, consultée le 23 mars 2021.
  14. Jean-Luc Aubarbier, Michel Binet, Guy Mandon, Nouveau guide du Périgord-Quercy, Ouest-France, 1987, (ISBN 2-85882-842-3), p. 200.
  15. Jean-Luc Aubarbier, Michel Binet, Guy Mandon, Nouveau guide du Périgord-Quercy, Ouest-France, 1987, (ISBN 2-85882-842-3), p. 243.
  16. Jean-Luc Aubarbier, Michel Binet, Guy Mandon, Nouveau guide du Périgord-Quercy, Ouest-France, 1987, (ISBN 2-85882-842-3), p. 87.
  17. Albert Jacquemin, Burgbefestigungen der Stadt Luxemburg, Imprimerie Saint-Paul, Luxembourg 1991,163-164

Voir aussi

Bibliographie

  • Gérard Artaud, La Thiérache et ses églises fortifiées, 2003. - 47 p. dont 14 de planches couleurs - 30 cm.
  • Denis Cailleaux, Les églises fortifiées, in « L'archéologue », no 42, 1999, p. 18-21
  • Xavier de Cardaillac, Les églises fortifiées landaises, Dax, 1926
  • Fabrice Cayot, La fortification des églises rurales en Bourgogne, in Chastels et Maisons fortes, III, ouvrage collectif sous la direction d’Hervé Mouillebouche, CeCab, Dijon, 2010, p. 147-180.
  • Alain Connangle, Églises fortifiées du Périgord, in « Le Festin », no 44
  • René Crozet, Les églises fortifiées du Poitou, de l'Angoumois, de l'Aunis et de la Saintonge, Bulletin de la Société des Antiquaires de l'Ouest, 1951
  • Jules de Lahondès, Les églises fortifiées des pays de Foix et du Couserans, 23 p., in « Bulletin monumental » no 288, 1883
  • Jean Garel - « Églises fortifiées de la Thiérache » (coll. Itinéraires et découvertes, éd. Elta Paris, 1976), 32 p.
  • Thierry Hourlier - « Les églises fortifiées de Dordogne », éd. patrimoines & médias, 1997, 56 p. - (ISBN 2-910137-20-1)
  • Caroline Maupas, Thierry Hourlier - « Les églises fortifiées du littoral breton », éd. de la Plomée, 1998, 142 p. - (ISBN 2-912113-09-1)
  • R. Métivier, Les Bastides et églises fortifiées du Gers, Caen, 1903
  • Jean-Paul Meuret - « Les églises fortifiées de la Thiérache »
  • Jean-Paul Meuret - « Redécouverte et sauvegarde du patrimoine communautaire des pays picards : Les églises fortifiées de la Thiérache » in Picardie Information no 32, , p. 55 à 66 (éd. Chambre régionale de commerce et d’industrie de Picardie)
  • Philippe Pagnotta - « Les églises fortifiées de la Meuse », éd. Citedis, 2000, 142 p. - (ISBN 2-911920-36-8)
  • Philippe Pécout - « Les églises fortifiées du Midi de la France », coll. "Mémoire en Images", éd. Alan Sutton, 2006, 96 p. - (ISBN 2-84910-451-5)
  • Robert Poujol - « Les églises fortifiées de la Thiérache » « Monographies des villes et villages de France », édit. 1993, 20 X 30, br., 140 pp. (ISBN 2-7428-0054-9)
  • Robert Poujol - « Les églises fortifiées de la Thiérache » (coll. Inédits du Patrimoine, éd. La Découvrance Eds, , (ISBN 284265269X). Édition fautive.
  • R. Roger, « Quelques églises fortifiées de l’Ariège », BSA T. 8

Liens externes

  • Portail de l’architecture chrétienne
  • Portail de l’histoire militaire
Cet article est issu de Wikipedia. Le texte est sous licence Creative Commons - Attribution - Partage dans les Mêmes. Des conditions supplémentaires peuvent s'appliquer aux fichiers multimédias.